#382 collapsing breaths discover turning hope, new-boarded highs (tahlia)

Par chance, Nova avait Juliann dans sa vie. Parce qu’elle avait du mal à rentrer en contact avec ses parents, parce que la distance s’installait et qu’elle n’avait pas envie d’y remédier, la rouquine ne savait plus toujours où se tourner lorsqu’il était question de famille. Au fond, il n’y avait que Juliann vers qui aller lorsqu’elle avait besoin de cette aide qui est habituellement prodiguée par un père, par une mère. C’était souvent bien banal, une information par-ci, un objet par-là, mais ça lui faisait du bien, à Nova, de savoir que quelqu’un l’aimait inconditionnellement. Elle qui avait tellement peur qu’on l’abandonne, qu’on lui tourne le dos, si elle révélait un jour sa véritable personne au grand jour. Bref, aujourd’hui, il était question d’une autre banalité, un simple outil qu’elle aurait pu se procurer n’importe où ou emprunter à n’importe qui, mais c’était à Juliann qu’elle avait fait appel, parce que ça la réconfortait toujours de l’entendre se demander ce qu’il pourrait lui prêter pour l’aider, ou lui donner des consignes pour utiliser tel ou tel truc. Il lui avait dit de passer aujourd’hui pour emprunter cette fois sa scie sauteuse, sans pour autant lui donner d’heure. Nova avait donc décidé de passer après son propre boulot, se disant que si son cousin lui avait dit de passer au courant de la journée, c’était parce qu’il prévoyait être là. Elle gara sa voiture devant la maison du pompier et marcha jusqu’à la porte d’un pas léger. Elle sonna à la porte avec insistance, pour le déranger comme toujours, en appuyant sur le bouton trois-quatre fois, elle avait arrêté de compter tellement elle s’en fichait d’être désagréable avec lui. Puis, cinq heures le soir, ce n’était pas une heure pour faire une sieste, alors si c’était ce qu’il était en train de faire, elle le sauvait d’une nuit bien difficile à trouver. La jeune femme fut totalement prise de court lorsqu’une brunette ouvrit la porte. Tahlia, pour être plus précise. Elle ne la connaissait que très peu, juste comme étant l’amie et l’ex de Juliann, pas assez pour s’imaginer la trouver ici aujourd’hui. Elle fronça les sourcils d’un air mitigé. « Oh, Tahlia. Désolée, je suis surprise, je m’attendais à ce que ce soit Juliann qui ouvre. Euh … il est là ? » Parce que s’il ne répondait pas à la porte de sa propre maison et envoyait ses invités le faire, franchement, il était le pire.

Aujourd'hui, c'était journée crêpes. En regardant simplement une émission culinaire, Tahlia avait été prise d'une envie de crêpes et malheureusement, cela s'était amplifié avec les heures. Merci la grossesse ! A 17h pétantes, elle s'était donc lancée dans la recette, perdue entre la farine, l'huile, le sucre et le lait. Du lait d'avoine, s'il vous plaît, la brune voulant tester une recette vegan par pure curiosité. Mais ce fut en tenant la bouteille dans la main qu'elle se rendit compte d'un oubli bien plus dérangeant. Elle avait oublié d'acheter la boîte de lait pour Thaïs ! Juliann, qui se tenait à ses côtes quand elle s'en rendit compte, se porta automatiquement volontaire pour aller régler l'oubli de cette mère indigne. Quel colocataire parfait, s'était-elle amusée à lui dire, avant de le remercier avec un baiser sur la joue. Quand le pompier quitta la maison, Tahlia se relança dans la recette, bien vite interrompue, quelques minutes plus tard, par des coups de sonnette insistante. Juliann avait sûrement oublié la carte bancaire de Tahlia et les clés de la maison. Elle en mettrait sa main à couper ! La jeune femme s'empressa d'aller ouvrir la porte, prête à taquiner son colocataire. "Un jour, tu oublieras ta tête, Ju... " Mais elle s'interrompit en voyant cette grande rousse devant la porte. "Oh Nova !" s'exclama-t-elle, reconnaissant la cousine de son colocataire qu'elle avait croisé à quelques reprises. Elle était le genre de jeune femme que l'on reconnaissait au premier regard. Tahlia tenta d'épousseter son débardeur noir qui avait blanchi avec la farine qu'elle manipulait juste avant, sans grand succès. Elle adressa un sourire à la jeune femme, secouant la tête afin de répondre à sa question. "Juliann vient à peine de sortir, il est parti faire une course pour moi. Mais il devrait être là d'ici une vingtaine de minutes." Elle ouvrit davantage la porte afin de l'inviter à entrer. "Tu veux rester ? Je suis en train de faire des crêpes et je pense que j'en ai fait pour un régiment..." dit-elle en riant. Même si elles ne se connaissaient pas tant que cela, elle n'allait quand même pas la mettre à la porte. Ce n'était pas le genre de Tahlia, bien au contraire.

Tahlia reconnut Nova aussitôt, elle aussi, et un sourire se dessina sur les lèvres la rouquine. Même, elle se permit de rire un peu, en ajoutant à propos de la réplique que la brunette s’apprêtait à lancer à Juliann : « Qu’il oublie sa tête, ça va encore, c’est le jour où il oubliera son dick qu’il faudra s’inquiéter ! » Elle porta sa main à sa bouche en riant. Volubile, elle poursuivit : « Pardon, c’est louche de dire ça de son cousin. Si je continue ce sera à propos de nous, les rumeurs d’inceste sur les Writers ! » Et pas à propos de la famille de son colocataire Alex. Encore heureuse que ce n’était pas lui qui était visé par la rumeur mais bien son frère et l’une de ses sœurs. De toute façon, Nova n’inventait rien, son cousin pensait souvent avec ce qu’il avait entre les deux jambes plutôt qu’entre ses deux oreilles. Tahlia devait être bien placée pour le savoir. Cette dernière lui expliqua que Juliann était parti faire une course pour elle et qu’il devrait être de retour d’ici une vingtaine de minutes. « Oh, je vois. » Elle resta là, songeuse, en train de se demander en silence si cela valait la peine d’attendre vingt minutes pour la scie sauteuse ou si elle remettait le projet à plus tard. Elle n’eut pas le temps de prendre une décision que Tahlia l’invitait à rentrer pour partager les crêpes qu’elle était en train de préparer. « Ooouh, des crêpes ! J’pourrais difficilement refuser. » Elle rentra dans la maison, qu’elle connaissait déjà bien assez, contrairement à Tahlia avec qui elle n’avait jamais vraiment discuté seule à seule de toute sa vie. La rouquine ferma la porte derrière elle et suivit la brunette jusqu’à la cuisine. « Vous faites souvent ça, Juliann et toi, des crêpes pour le dîner ? No judgment, je suis le genre de personne qui mangerait un petit-déjeuner matin, midi ou soir ! » Et en plein milieu de la nuit après une grosse soirée arrosée, aussi, mais ça elle ne s’en vanterait peut-être pas tout de suite. Surtout quand on savait dans quel état lamentable elle les terminait, ces soirées-là.

Pour le peu qu'elle avait parlé avec elle, Tahlia se souvenait que Nova avait une répartie - et un humour ! - hors pair. La jolie rousse le prouva une nouvelle fois, quand cette dernière rebondit sur la réflexion de Tahlia qui était originellement adressée à Juliann. La brune éclata de rire, avant de rétorquer, amusée : "Pas sûre qu'il l'oublie un jour, ceci dit !" Ce n'était pas sympa de rebondir sur ce sujet, mais en même temps, c'était bien connu que Juliann était du genre charnel. Il avait disons un bon nombre de conquêtes derrière lui ! Mais quand Nova s'excusa de sa réflexion, Tahlia rebondit aussitôt : "C'est juste un constat ! Et puis, ces mots ne franchiront jamais cette porte, promis." Elle savait qu'elle faisait référence à l'article sur les Rutkowski. Un beau ramassis de conneries, oui ! Informant la jeune femme que Juliann reviendrait d'ici une vingtaine de minutes, elle vit l'hésitation passer sur son visage. Une hésitation qui disparut bien vite quand Tahlia proposa des crêpes. "On ne refuse jamais des crêpes. Sinon, c'est un sacrilège !" dit-elle en riant, laissant Nova fermer la porte derrière elle. Alors que Tahlia retourna dans la cuisine afin de terminer sa pâte, Nova l'interrogea à ce sujet, et notamment sur l'heure à laquelle elle s'était mise à faire ces encas. Oui, elle était clairement déphasée. "Non, on ne le fait pas souvent." commença-t-elle, avant que Nova ne lui avoue qu'elle ne jugeait pas. Au contraire, elle était adepte des petits-déjeuners à toute heure. "Toi, je vais bien t'aimer !" lança-t-elle en pointant sa cuillère vers elle, le regard complice. "C'est la faute de cette émission de cuisine !!" se justifia-t-elle en montrant l'émission qui passait à la télé. "Il s'est mis à faire des crêpes et voilà que mon cerveau s'est focalisé sur ça." Ajouté aux hormones de grossesse, cela la poussait à faire des crêpes à 18h passées. "Et c'est bien connu, on ne résiste jamais à des envies. JAMAIS !"

Heureuse de constater que Tahlia partageait son avis sur la réputation de Juliann, le tombeur de ces hommes et de ces femmes, Nova afficha un large sourire à la réplique de la brunette. « Pas sûre non plus ! » Acquiesça-t-elle en riant. Reste que, venant de l’ancienne policière, c’était déjà plus normal comme vanne que de la part de la cousine du principal intéressé. Cependant, la relation entre Nova et Juliann n’avaient jamais été que familiale. Au-delà des liens de sang, ils étaient amis. Il était bien l’une des seules personnes chez les Rosebury-Hawkes avec qui la rouquine pouvait se sentir confortable de parler de n’importe quoi. Être à l’aise ne signifiait pas qu’elle le faisait pour autant, cachant autant ses secrets à son cousin qu’à tout le reste du monde, mais passons. « C’est gentil. J’apprécie cette solidarité féminine. » Rétorqua la thanatopracticienne alors que Tahlia lui assurait que ce qui venait d’être dit resterait entre elles. La plus-que-jolie brunette lui proposa alors d’entrer déguster des crêpes avec elle, puisqu’elle en avait fait pour une armée, ce que Nova accepta sans hésiter. Éternelle gourmande, elle salivait rien qu’à imaginer l’odeur et le goût. « Pire qu’un chat noir ou un miroir brisé … une éternité de malchance ! » Renchérit Nova, d’une voix pas du tout trop dramatique. Elle aurait pu faire du théâtre, celle-là. Déjà qu’elle était très habituée à jouer un rôle qui ne lui correspondait pas, mais alors pas du tout. Après avoir refermé la porte derrière elle, la jeune femme demanda sans gêne si ça leur arrivait souvent, aux deux colocataires, d’avoir ce genre de craving. Elle rit, lumineuse, quand Tahlia affirma qu’elle allait l’aimer, elle qui petit-déjeunerait à toute heure. « Aaaah, toi aussi tu es du genre assez influençable par tout ce qui passe à la télé. Il ne faut pas que je regarde les info-pubs débiles qui passent aux petites heures du matin, on arriverait à me vendre les trucs qui vibrent sur le ventre pour façonner des abdos. » Dit-elle en posant ses mains sur son ventre. « Pour la bouffe, c’est pareil. » Et elle n’avait même pas besoin d’être enceinte pour ça. « Qu’est-ce que quelqu’un, quelque part, a dit déjà ? Dépêchons-nous de succomber à la tentation avant qu'elle s'éloigne. Il ne faudrait pas manquer l’appel des crêpes, et de tout autre festin ! » Nova se planta aux côtés de Tahlia dans la cuisine, devant le plan de travail. « Je peux faire quelque chose pour t’aider ? » La tête que ferait Juliann en rentrant, retrouvant sa coloc et sa cousine les mains à la pâte.

Bon, il était vrai que Tahlia aurait pu voir d'un mauvais œil la blague de Nova sur son cousin. Mais... aussi étrange qu'était l'affirmation, il s'avérait surtout qu'elle était bien vraie. Quiconque connaissant Juliann savait qu'il dégainait aussi vite que son ombre. Même son entourage familial devait s'en douter ! Toutefois, Tahlia lui souffla que ces mots ne sortiront pas d'ici, même si un instant, l'envie de taquiner Juliann se faisait assez forte. « Oui, la solidarité féminine avant tout. » dit-elle en riant. La solidarité féminine, c'était une valeur que Tahlia prônait depuis peu, depuis que son entourage féminin s'était agrandie. Avant, elle était plutôt du genre louve solitaire, avant de comprendre qu'elle pouvait, elle aussi, trouver des amitiés féminines solides, sans rivalité ou provocations. C'était un grand pas pour la femme qu'elle était, oui oui ! Ouvrant davantage la porte, elle invita Nova à entrer déguster ces crêpes qu'elle faisait en nombre, parce qu'on ne disait jamais non à des crêpes ! Tahlia éclata de rire quand Nova prit un air dramatique en évoquant une éternité de malchance, ce à quoi la jeune femme répondit, sur le même ton : « ô désespoir ! Ô tristesse infinie ! » Elle lui lança un regard malicieux avant de rejoindre la cuisine, afin de continuer sa recette. Tahlia adorait faire la cuisine, mais c'était encore mieux quand cela était partagée. Et cerise sur le gâteau : cela lui permettait de découvrir Nova, appréciant déjà ce qu'elle découvrait. Elles semblaient avoir le même amour pour les petits-déjeuners à toute heure et semblaient toute aussi faibles devant les émissions de téléshopping. « Ne me dis pas que tu as craqué sur l'appareil pour les abdos... Non. Non... désolée, c'est trop. » commença-t-elle, feintant le rejet. Mais très vite, Tahlia ajouta : « Bon... ok... moi j'ai craqué pour le laveur de vitres. Je n'ai jamais su le faire fonctionner correctement. » Elle se mit à rire quand Nova posa ses mains sur son ventre, évoquant que pour la bouffe, c'était la même tentation. Elle alla même jusqu'au bout de sa pensée en citant Epicure . « Ah, tu vois pour moi, c'est plutôt 'Le seul moyen de se délivrer d'une tentation, c'est d'y céder' mais ça se rejoint parfaitement ! » Remuant sa pâte, Tahlia posa son regard sur Nova, qui demandait ce qu'il fallait. « J'ai presque fini la pâte. Si tu veux, tu peux prendre la poêle et la mettre à chauffer. » Elle était ravie comme une gamine, Tahlia. Regardant la texture de sa pâte, elle fronça les sourcils, perplexe. « Ma pâte a une sale tête, je trouve ! » Elle se pencha pour sentir et se redressa aussitôt, fronçant le nez, retenant un haut-le-coeur. « C'est moi ou elle a une odeur particulière ? » Non, Tahlia, c'était juste toi. Toi et tes saletés de nausées.

Heureusement que Tahlia n’était pas snob ou timide, tout le contraire d’ailleurs, pour qu’elle rejoigne Nova dans ses expressions dramatiques. La rouquine éclata de rire face à la réplique shakespearienne de la colocataire de Juliann. C’était déjà tellement simple d’être auprès d’elle, elle dégageait cette énergie bienveillante qui avait tout de suite su mettre Nova à l’aise. Les deux jeunes femmes passèrent à la cuisine où le mélange de crêpe attendait bien sagement d’être brassé un peu plus encore. Levant les mains en l’air, Nova se défendit tout de suite quand Tahlia la jugea moqueusement d’avoir craqué sur l’appareil pour les abdos. « Oh, oh, je n’ai pas dit que je l’avais acheté ! Il m’a juste fait de l’œil … un peu beaucoup … » Dit-elle avec une mine coupable mais amusée. Puis, la brunette lui avoua qu’elle avait craqué sur le laveur de vitres et elle, elle était allée jusqu’à l’achat. Pour un truc qui finalement était trop complexe à utiliser. « Noooon. Je savais que la démonstration était trop belle pour être vraie. » Lâcha-t-elle en secouant la tête de gauche à droite, soupirant de déception face à ces pubs mensongères. Heureusement que la bouffe, elle, ne décevait jamais ! C’est pourquoi il fallait rapidement succomber aux tentations, comme elles le disaient si bien à travers deux citations différentes. « C’est pas ce que j’ai dit ? » Demanda-t-elle, dubitative, avant de rire. Pour elle, les deux phrases sonnaient exactement pareil et elle ne différenciait même pas les mots utilisés. Disons qu’elle n’était pas une philosophe née. Elle demanda plutôt à Tahlia si elle pouvait aider à quelque chose, parce que cuisiner, ça elle savait faire ! « D’acc ! » Dit-elle en se levant alors que la brunette proposait de prendre la poêle et de la mettre à chauffer. La poêle était déjà sortie, posée sur le comptoir, n’attendant qu’à être mise sur le feu. Nova s’exécuta, jetant un coup d’œil à la pâte de Tahlia alors que cette dernière la remettait en question. La rouquine s’approcha et mit son nez juste au-dessus, les sourcils froncés. « Non, pour moi elle sent exactement ce qu’elle devrait sentir. » Mais la colocataire de Juliann avait des haut-le-cœur et ça se lisait sur son visage. Elle était plus blême qu’au moment d’ouvrir la porte, aussi. Les sourcils encore plus froncés maintenant, Nova s’inquiéta. « C’est plutôt toi qui as une sale tête, pas ta pâte. Ça va pas ? » Demanda-t-elle.