Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.
Sujet: shuffling the cards of your game ⤅ maximilien Lun 5 Oct - 16:27
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Une mince pellicule de sueur recouvrait son épiderme, les gants frappaient le sac de boxe à un rythme saccadé, mais sa respiration était contrôlée. Saoirse avait mis un moment avant de dépasser ses réticences et d’enfin oser aller au complexe sportif pour franchir la double-porte de la salle de boxe. Elle n’était pas du genre à se laisser impressionner et ce n’était pas par timidité qu’elle n’y avait pas mis les pieds plus tôt. Mais elle devait reconnaître qu’elle avait été moins sûre d’elle et qu’il lui avait fallu une petite dose de courage pour se décider à se mettre à la boxe ici. Elle ne doutait pas de ses capacités, non. Mais elle était seule, pour cette activité, et elle n’y voyait rien. Si l’Irlandaise vivait depuis longtemps avec sa cécité et tout ce que cela impliquait, c’était en revanche les premiers mois de son existence où elle ne bénéficiait pas du cocon protecteur et rassurant de sa communauté. Elle était partie de sa propre volonté, certes, et entre autres pour échapper aussi à ce cocon, mais ça n’empêchait pas qu’il lui manquait parfois. Comme tout être humain, aussi indépendante et déterminée soit-elle, elle avait parfois besoin de se sentir à sa place, soutenue, avec un filet de sécurité. D’autant plus qu’elle n’avait jamais pratiqué la boxe dans un complexe, mais juste avec son entourage, depuis qu’elle était gamine. Rien d’officiel, elle n’avait même jamais assisté à un vrai cours de boxe. Les combats n’étaient que des querelles de gamins ou d’adolescents turbulents, et ça avait forgé ses défenses, voilà tout. Mais une fois le cap franchi ici à Bowen, heureusement, au bout de quelques séances, son appréhension s’était évidemment envolée. Venir ici lui faisait du bien, elle aimait sentir ses muscles travailler, elle avait pris ses marques dans la salle, après qu’on lui ait montré l’emplacement de chaque dispositif et qu’elle ait appris les petites habitudes des gens qui venaient s’entraîner ici, à un niveau professionnel ou amateur. Elle, c’était juste pour le plaisir, quand ça lui chantait, pour se faire du bien. Parfois, on venait lui parler, elle avait déjà eu l’occasion d’apprendre deux ou trois petites choses avec ceux qui avaient eu la gentillesse de proposer leur expertise. Quelques petits combats gentillets, où elle avait rapidement démontré que ce n’était pas parce qu’elle vivait dans le noir qu’elle n’y voyait rien. Plein d’autres choses lui permettaient de savoir où frapper et quand esquiver. Aujourd’hui, alors que l’hiver touchait à sa fin en Australie, et que la température grimpait, elle avait reconnu une voix qu’elle avait déjà entendue, mais avec qui elle n’avait jamais pris le temps de faire connaissance. C’était un homme, et des quelques paroles volées qu’elle avait pu percevoir, il s’y connaissait bien plus que les autres, ou en tout cas que la moyenne. À la fin de son échauffement intense, Saoirse se dit que ça valait bien le coup d’aller lui parler. Après tout, tout le monde était assez ouvert et jovial, par ici. « Salut ! Je m’appelle Saoirse, j’ai cru entendre que t’étais un super bon boxeur. Ça te dirait un entraînement en binôme, quand t’as le temps ? Je me défends mais j'ai peu de connaissances théoriques. » se présenta la jeune femme après être parvenue jusqu’à lui, empruntant les murs de la salle pour se guider sans sa canne, se repérant aux bruits pour ne pas envahir l’espace utilisé par quelqu’un, et marchant avec prudence pour ne pas se prendre les pieds dans quelque chose, sait-on jamais. Elle avait toujours sa canne blanche à proximité si elle voulait se déplacer avec plus de certitude, mais elle préférait ne pas l’utiliser dans la salle. Question de fierté, sans doute, même si c’était un peu idiot. Elle savait s’en sortir sans, grâce à la bienveillance des autres et avec ses autres sens, même si c’était moins confortable.