marché noir (edd)

Mauvaise soirée pour Leo. Peu de sommeil, et beaucoup de travail pour tuer le temps. Elle avait beaucoup bu cette semaine, et aujourd'hui son corps commençait à lui faire défaut. J'ai besoin de légumes. Et d'une cure de jus de céleri, se dit-elle, comme si elle allait véritablement le faire. A d'autres. Elle n'avait pas appelé Edd depuis un petit bout de temps, et elle en était plutôt fière. Vu tout ce qu'elle buvait déjà, il valait mieux qu'elle se calme sur les benzodiazépines. Mais bon, les nuits commençaient à être bien longues, alors Léo avait craqué.
Elle était de très, très mauvaise humeur. Elle n'avait pas eu son créneau du vendredi, où généralement les pourboires sont généreux, et devait se coltiner le bar le dimanche, là où il y a le moins de clients. Ca commençait déjà mal. Elle avait la gerbe. La fin du mois approchait. Rien à bouffer chez elle. Elle avait reçu un SMS de sa mère. En gros, c'était une mauvaise soirée dans tous les sens du terme. Et ses tremblements étaient de pire en pire. Ils devenaient de plus en plus dur à cacher au manager, et si il y avait une seul chose à laquelle Leo tenait par-dessus tout, c'était son travail au Elm Street.

De plus, Edd lui avait donné rendez-vous dans une église. Une putain d'Eglise. Léo avait déjà une relation assez compliquée avec la religion, et honnêtement, récupérer des pilules près d'une église ne la réjouissait pas. Mais Edd n'avait pas eu l'air d'avoir envie de négocier, et Leo voulait pouvoir dormir ce soir. Et en parlant d'Edd, il n'était toujours pas là. Leo lui envoya un sms rapidement, allant droit au but:

t ou ?????

L'ambiance ne lui plaisait pas du tout. On était à Bowen, à deux pages de la plage et il faisait tout juste nuit. Donc le cliché de l'église perdue dans une forêt noire et brumeuse ne tenait pas la route. Mais Leo était tout de même mal à l'aise, ses paumes moites, et elle ne pouvait pas se séparer de cette sensation. Cette sensation qu'il y avait quelque de fondamentalement malsain dans l'air ce soir, et qu'elle ne devrait définitivement pas être là. Leo se retourna d'un coup. Elle avait entendu un bruit. Putain tu deviens dingue ma pauvre vieille. Pense à ton sommeil, Leo, pense à ton sommeil.

Il avait intérêt à se grouiller.

Aujourd’hui, n’était pas le bon jour pour Edd. Il s’était fait réveiller en plein milieux de la nuit, par un de ces clients, presser et soit disant son dernier espoir pour le fournir en cette heure de la nuit. Tu m’étonnes ! Cette remarque lui avait trotté dans la tête. Pourtant, il n’avait pas su refuser. Il ne pouvait pas refuser. C’est ce qui le faisait vivre. Le peu de sommeil qu’il avait au compteur, ne le rendait pas des plus agréable. Il avait dormi en tout et pour tout, une heure. Et après cette course improvisée, le sommeil l’avait quitté. La nuit semblait longue, il avait tenté de trouver une activité pour s’occuper. Regarder son répertoire, pour communiquer. Sans avoir de réponse. Il aurait pu faire comme à chaque fois, se consoler dans des bras d’inconnues, même ça, il n’en avait pas envie. À la place, il s’était installé, sur le banc en bas de chez lui, à fumer de l’heure. Il n’avait jamais étant consommé qu’en ce moment. Lui qui ne faisait qu’en vendre…
Les gens avaient décidé de lui casser les couilles. Il n’avait pas arrêté de courir de la journée. En plus, il essayait le mécontentement des gens. Il allait exploser. L’église ne faisait pas parti de son chemin. Il avait trouvé que c’était plus simple de se voir là-bas, plus discret. Qui allait soupçonner une transaction. À part des gentils petits prieurs en train de discuter de la prochaine messe. Il ne croyait pas plus à la religion, qu’à ces adeptes. Et il l’avait prouvé par le passé. Son téléphone sonnait pour la énième fois, un message…. Pas la peine de regarder qui s’était… Il savait, d’ailleurs, il avait hâte d’arriver et de mettre quelques petites choses au clair. Il éteignait son portable, d’un coup de rage. Le silence allait parler pour lui.
Et pourtant, c’était l’histoire quelques minutes, sa silhouette trahissait un certain manque, comme les traits sur son visage, l’impatience qu’il pouvait constater à mesure, qu’il ne s’approche. « Je ne suis pas un chien qu’on siffle et qui arrive tout de suite ! » Il avait posé les fondations, cette entrevue risquait d’être tendu. « Tu sais que je ne m’occupe pas que de toi ! » Dit-il en grimaçant et pourtant, il arrivait à dévoiler un sourire, amusé. Ce qui ne signifiait rien de bon… « Tu as une tête à faire peur ! Tu as songé au maquillage ? Il prait que ça fait des miracles » Edd dans sa splendeur et sans le moindre tact

Léo était rassurée. Edd avait l'air d'aussi bonne humeur qu'elle. Cela aurait pu être une mauvaise nouvelle, mais cela voulait dire que tout était à sa place. Cet imbécile n'avait pas pris la peine de répondre à son message, comme si c'était la tâche la plus dure du siècle.
Léo n'était pas fan du jeune garçon. En fait, elle ne le connaissait que très peu, car ils n'avaient jamais vraiment passé de temps ensemble en dehors de leurs transactions. Mais ils finissaient toujours par s'embrouiller: Edd toujours aussi acide et fauteur de troubles, et Léo toujours aussi sensible, réagissant au quart de tour.
Je ne suis pas un chien qu’on siffle et qui arrive tout de suite !   "Oh arrête de te plaindre bordel, c'est ça l'industrie du service hein." dit Léo en levant les yeux au ciel. Constat certes un peu sévère, mais c'était la vérité. Barman comme dealer, il s'agissait de fournir le client, et donc de se faire appeler à longueur de journée, et souvent traiter comme un moins que rien. Elle aurait en général plus de compassion pour quelqu'un qui au final, avait un métier presque proche du chien, mais Edd lui avait déjà trop tapé sur les nerfs.
Tu sais que je ne m’occupe pas que de toi ! Toujours enrobé de ses 10 couches de prétention. Et Léo n'aimait pas la prétention. Elle comprenait la colère, la haine, le silence, mais les gens prétentieux la rendaient hors d'elle. Elle ne supportait pas de voir que les gens arrivaient à avoir autant de confiance en eux, alors qu'elle n'y arrivait pas. Même si elle se doutait que dans le cas d'Edd, cela cachait surement bien plus. Non pas qu'elle allait chercher à apprendre à le connaitre, vu comment il était aimable.
"Ouais, et pourtant t'es là, alors arrête de pleurer et parlons business écoute?" Léo s'alluma une clope. Il allait lui falloir du courage pour supporter cette conversation. Tu as une tête à faire peur ! Tu as songé au maquillage ? Il parait que ça fait des miracles. Elle l'aurait insulté si il n'avait pas eu raison. Elle avait le teint hagard, des cernes monumentales et le visage creusé. Résultat de longues journées et de courtes nuits. "Et toi t'as déjà pensé à trouver un vrai taff au lieu de me casser les couilles?" dit-elle après une bouffée de fumée. C'était gratuit, mais il commençait déjà à lui taper sur les nerfs. Cependant, elle lui tendit son paquet de cigarette, comme pour enterrer la hache de guerre "Clope ?" ce n'était pas par pure bonté de cœur, mais plus par besoin stratégique. Peut-être qu'un peu de nicotine allait le calmer, et rendre cet échange un chouïa moins désagréable.

Il y avait des transactions plus dur que d’autres… Edd n’était pas le plus aimable, il l’accorde. En même temps, le but n’était pas d’être tendre dans ce boulot. Dès la première rencontre et son manque évident, la méthode agressive, marchait peu avec lui. Certes, il était au service, à sa manière, autant qu’ils étaient dépendant de lui. Prétentieux, mais dans le vrai. Elle avait l’air d’avoir un sacré caractère, et Edd lui rendait bien. Elle N’allait pas rejoindre son cercle d’amis, ça en resterait leur échange était toujours sous le classe dans le domaine du bras de fer, voulant dominer l’autre, ou à celui qui sortirait la phrase la plus mal placé et cinglante. Un bon apprentissage, si il débutait dans le domaine. La différence, c’était qu’il était loin de l’être. Des caractériels en manque, il en côtoyait pour ainsi dire tous les jours, avec beaucoup plus d’impact, et d’enjeux.  "Oh, arrête de te plaindre bordel, c'est ça l'industrie du service hein." C’était plus un sourire amusé, retenant une remarque sarcastique, entre ces lèvres. Et c’était elle qui lui parlait de service et de me plaindre. Honnêtement, c’était de foutre de sa gueule-là. Et pourtant, il laissait courir autant qu’il avait envie d’être un vrai connard. C’est toutefois, son attitude, son manque évident, qui ne reflétait pas que sur son attitude, mais sur son physique, qui lui en dissuada. Âme charitable, moment de bonté, ça le perdra. D’accord, c’était ironique et intéresser… "Ouais, et pourtant t'es là, alors arrête de pleurer et parlons business écoute ?" C’était la parole en trop, il aurait certainement eu de la compassion, un instant, si elle avait su se la fermer. Être au service ok, être compatissant à la rigueur, bien qu’il avait du mal avec Léo. Il avait été curieux un temps, à se demander, si elle était comme ça avec ces clients. Il avait su qu’elle était barman, par en posant des questions. C’est en seulement en rentrant dans un bar, un soir, qu’il l’avait reconnu. Il ne lui avait fallu que quelques secondes pour rebrousser chemin. Il était dans le but de passer une bonne soirée et pas de se la saper. Elle avait l’air différente. À ces yeux, Léo était une espèce inexplicable, donc il ne prenait même pas la peine de vouloir connaître. « Je pleure ? Ah oui, ce n’est pas mal qui inondait mon portable de messages pour savoir ou j’étais passé ! Quand tu parles de pleurer, réfléchi à deux fois, à tes paroles… Je veux bien parler affaires, j’apporte un service ok, tu as besoin tout autant que moi de cette transaction, autant il serait préfère, qu’on se modère on a autant à y gagner... » Ou pas, parce que franchement, en cet instant, il aurait envie de la laisser dans sa merde. "Et toi t'as déjà pensé à trouver un vrai taff au lieu de me casser les couilles ?" Pour une fois, elle avait réussi à lui provoquer un sourire franc. « Non, je n’ai pas encore, on ne m’a pas proposé, il paraît que ça n’existe pas un boulot ou on peut casser les couilles des gens quotidiennement. Celui-là sans rapproche le plus. » Son regard se posa sur le paquet et elle, surpris. Elle qui l’avait limité provoqué. « Il y a quoi du cyanure, de la mort-aux-rats ? » Méfiance, le maître-mot. Mais en même temps, si il y avait vraiment quelque chose… Elle ne fumerait pas. Donc il en prit une. « Merci... tu aurais du feu ? » Autant qu’elle en profite, ce n’était pas un mot qu’il employait souvent. «  Finis la petite discute, c’était sympa. Il manquait les petits gâteaux et la tasse de thé, la prochaine fois peut-être... ou pas » Dit-il avec une certaine acidité. « Comme d’habitude, c’est ça ? » Il posait la question pour la forme.

Leo sentait qu'elle avait poussé le bouchon un peu trop loin. Et elle s'en prenait plein la gueule. Pour sa défense, il était rare qu'elle réussisse à créer un lien avec Edd. Tout ce qu'elle disait lui retombait à la figure, que ce soit grâce au sarcasme ou aux piques du jeune garçon. "Ok ok je capte. t'es de mauvaise humeur" fit-elle, en essayant de détendre l'atmosphère. "Mais en même temps tu es si agréable, je ne peux pas me passer de ta présence, c'est pour ça." continua t-elle avec un léger sourire, expirant une bouffée de clope. Peut-être que l'apparente ironie allait réussir à le faire rire. Edd était quelqu'un de compliqué pour Léo. Ils se connaissaient très peu, mais elle avait régulièrement besoin de ses services. Mais elle ne savait jamais vraiment comment réagir autour de lui, ne savait pas prédire ses réactions, et leurs conversations tournaient toujours au désastre. "Boh. Tu pourrais devenir flic écoute. Casser les couilles des gens, mais au moins tu risques pas la taule." fit elle en riant. Edd flic. Quelle image.
Elle vit son manque de confiance apparent à l'approche du paquet de clopes. Elle qui se se sentait si inoffensive, elle ne comprenait pas comment Edd pouvait s'imaginer ce genre de trucs. Mais il en prit une. Petite victoire, comme un calumet de la paix. "Tiens." fit-elle en lui tendant son briquet. Un vieux zippo rouillé qu'elle se trimballait depuis le lycée parce qu'à l'époque elle était persuadée que c'était cool. Maintenant c'était plus déprimant qu'autre chose. Mais la paix ne dura pas longtemps, et Edd était de retour à être lui-même. C'est à dire une personne généralement désagréable. Ou peut-être que c'était juste parce qu'il ne l'aimait pas. Et ça l'insupportait. Non pas qu'elle en ait particulièrement quelque chose à foutre de lui, mais ça l'énervait que malgré tous ses efforts, il lui reste aussi hostile. Elle qui ne cherchait qu'a se faire apprécier de tous (malgré que ce soit un échec flagrant). "Comme d'hab ouais. Quand aux petits gâteaux et au thé, je suis barman. C'est mal me connaitre." C'est vrai que Léo était plus du genre bière-sandwich. On faisait ce qu'on peut. En attendant, elle continua à regarder autour d'elle, et finit sa clope. "C'est une soirée de merde non?" fit-elle. Qu'est ce qu'elle risquait à tenter un semblant de conversation ? Dans le pire des cas, elle se ferait rembarrer comme à son habitude, et pourrait rentrer chez elle se défoncer au Xanax. Mais en attendant, elle avait envie de parler.

Edd n’était pas de mauvaise humeur… Si, il l’était mais il ne fallait pas compter sur lui, pour l’avouer. Cette journée était à classer dans les journées les plus merdiques et Léo n’arrangeait rien, avec son humeur. Il aurait pu faire comme la plupart des gens, passer outre, faire sa petite affaire, être courtois pour la forme, le sourire collait aux lèvres, grincer des dents à chaque remarque, ravalant la fierté mal placé qu’il pouvait avoir. Sauf que ce n’était pas Edd, et qu’il se sentait toujours attaqué. Qui fallait qu’il ouvre toujours sa bouche. Son regard sur elle, haussant légèrement ces sourcils, sa tête en mouvement, dans cette expression " ouha tu es un génie perspicace ! ". Et pourtant, les mots ne sortaient pas, ce n’était pas qu’ils ne voulaient pas. C’est qu’il les retenait. Autant mener à bien la transaction, et que tout ça se termine. « Fous-toi de ma gueule… » Un murmure arrachait. « Je te rappelle que tu n’es pas des plus agréable non plus. Tu sais sourire au moins ? Ou la grimace ça m’est réservé ? Je te dirais au moins, je suis flatté, tu pourras lui donner mon nom ». Il mentait là, parce qu’elle venait de le faire, mais tout comme lui, c’était surtout dans le domaine de la provocation. Ils n’étaient pas si différents, une des raisons pour que ça ne passe pas entre eux. Néanmoins, elle réussissait à le faire rire. Lui en flic, autant dire qu’il serait certainement l’un de ces flics corrompu jusqu'à la moelle. Ou le mauvais élève de sa classe, qu’il se ferait certainement viré dès les premiers jours. «  Je suis allergique à l’autorité et à la couleur bleu sombre… Mais tu as de l’humour, j’aime assez ! » Un sourire amusé au coin des lèvres.

Méfiant, le brun l’avait toujours été, ce n’était pas particulièrement parce que c’était Léo. Comme analyser son comportement et comprendre qu’il avait fait une erreur. Il s’approcha de son zippo, absorber par la flamme qui dansait devant ces yeux. Tirant sur la cigarette, emplissant ces poumons, cette nicotine menaçant et de ces dangers. À l’image de cet instant. Elle avait un effet apaisante, réconfortante. «  merci » Chose qu’elle entendra, très peu de ces lèvres. Une pensée germait dans sa tête, elle n’était obligée à rien avec lui. Simple dealer, et pourtant elle faisait l’effort à rendre cette entrevue… Supportable. Edd qui ne gérait pas et qui déconnait. Sa main venait de sa poche, elle n’avait pas été sa seule cliente, ce soir, mais elle était la dernière, à devoir servir. Donc ce n’était pas aussi compliqué de trouver, ce qu’elle avait tant chercher. Ce sachet taille moyen, tout aussi discret, ne laissait la place qu’un bruit de frottement. Il arrêta son geste. « mais je demande que ça de te connaître. C’est quoi, qu’est-ce que propose la barman, chips et alcool, tequila et citron vert, cacahuète et bière ? ». Il n’était pas fan du thé et des gâteau non plus, soit dit en passant. L’alcool… bien sûr avec ces amis…. Ces sourcils se froncèrent, à sa question. Pourquoi, elle lui demandait ça ? Qu’est-ce qu’elle attendait de lui ? Ils n’avaient pas échangé deux mots, à part pour s’envoyer de pics et maintenant… « Je durais l’enfer même, ne prends pas ça pour toi. C’est un constat plutôt général… » Il se défend avant qu’elle ne le prenne pour une énième attaque bien sûr. Il tira une dernière taffe de sa cigarette avant de sortir le petit sachet. «  Le bar ? » Il supposait qu’elle avait compris. La soirée de merde, de son côté venait de son boulot. Maintenant, il en était moins sûr… Il n'était vraiment pas doué pour la conversation...

Edd était insupportable. Elle avait beau avoir un caractère plutôt bien accroché, elle détestait sa manière de toujours chercher la merde. C'était peut-être quelque chose qu'ils avaient en commun, mais ça, elle refusait de l'admettre. "Allez, détends toi un peu. Pourquoi t'es toujours tendu comme ça ? Maman t'as pas donné assez d'affection ?" Bon, elle risquait sûrement de s'en prendre une, mais c'était plus fort qu'elle. "Désolée." dit-elle en souriant légèrement. "Je te taquine plus qu'autre chose. Mais en voyant ta tête, j'avoue que j'ai pas trop envie de sourire." fit en elle exprimant une bouffée de clope, et paradoxalement, en souriant. Elle était contente parce qu'il allait la fournir, mais c'était à peu près tout. C'était une discussion de gens qui se méprisaient profondément, tout en ne pouvant s'empêcher de déconner. Au moins ça rajoutais un peu de piment dans sa vie merdique. "J'avoue que la vie de hors-la-loi ça doit être plus fun. Ça te fatigue jamais ?" C'était une question sérieuse. Elle ne savait pas si elle aurait pu supporter le stress permanent que devait apporter être dealer. Gérer des clients relous (comme elle), savoir qu'on peut se faire choper à la moindre minute. Pour une fois, elle était contente de son petit travail bien rangé. Elle voyait que Edd s'adoucissait un peu. Enfin, adoucir était un bien grand mot. Il ne lui crachait plus à la gueule. C'était un début.
La clope semblait avoir légèrement enterré la hache de guerre. Elle leva les yeux et regarda les étoiles, profitant de la légère brulure de fumée dans ses poumons. Une mauvaise habitude dont elle n'arrivait pas à se débarrasser. "Derien." dit-elle en souriant. Et c'était la vérité. Il lui tendit le petit sachet remplit de pilules blanches. Elle tendit la main, et il ne lui donna pas. Elle leva le sourcil, confuse. Edd, vouloir la connaître ? Jamais elle n'aurait parié dessus. Mais elle était aussi curieuse. Comment quelqu'un pouvait être devenu aussi amer, aussi merdeux, c'était un mystère. Mais il n'était pas si insupportable au bout du compte. "Tu pensais pas si bien dire. C'est un métro boulot dodo, mais avec pintes, carte bleue, et torchons. Tu comprends pourquoi j'ai besoin d'un break ?" fit-elle en jetant un regard derrière les pilules. Parfois, il fallait que le monde s'arrête de tourner pour un instant. Elle prit un air intrigué. "Je sais même pas pourquoi je te demande en vrai. J'ai juste envie de pas avoir l'impression d'être la seule miséreuse dans cette ville je crois." C'était plutôt honnête. Elle s'était peu à peu adaptée à sa petite vie, mais elle ne pouvait s'empêcher de penser que tout le monde avait l'air étrangement... heureux, ici. Comme une hallucination collective. Elle se trompait bien évidemment, mais elle était trop solitaire pour s'en rendre compte. "Il t'es arrivé quoi pour que tu sois au bout à ce point ?" demanda t-elle. "Enfin t'es rien obligé de me dire. Motus et bouche cousue. Jsuis trop morte pour vraiment m'en souvenir de toute façon."  Elle tendait de raccommoder les liens un peu. Sa soirée calme était foutue maintenant. Mais elle ne voulait pas passer une insomnie à rien foutre. "Je t'offre la pinte si tu veux." Elle savait que son boss allait la détester, mais c'était plus fort qu'elle

Il avait appris à se contrôler parfois, ce n’était pas chose facile. Edd avait très peu de patience, le sarcasme son moteur. Mais il avait une adversaire de taille. Il préférait oublier ce point, et se consacrer à pourrir la vie de gens, avec qu’il savait faire de mieux. Son sarcasme. Mais l’évocation de sa mère était loin d’être une plaisanterie à son goût. Si d’ordinaire, bien souvent, il réagit. Là, il s’étonnait lui-même de son indifférence. Pourquoi ? « Ou peut-être que Maman m’en a trop donné à m’étouffer… On est proche à un point ou tu dois savoir ma vie. » C’était la seule chose, qui se contentait de dire, face à cette provocation. Elle pouvait être tranquille même s'il était du genre macho sur les bords, Edd n’était pas du genre non plus bagarreur, ou à lever la main. Lui ne faisait que provoquer et s’en délecter après. « Tu t’excuses maintenant, je ne savais pas que cela existait dans ton vocabulaire. » La lenteur des mots avait traversé ses lèvres, comme si, il en ponctuait chacun. «  Tu as envie de me voir rire ? Léo… Sérieusement, on n’est pas assez proche pour ce genre de jeu » dit-il calmement. Comme si déjà qu’elle le pense fût un fait déjà exceptionnel. Pourquoi, voulait-elle qu’il est autant de familiarité entre eux ? Parce que c’était plus agréable ? Ce n’était pas son job et il était pour un service et être payé, on ne lui avait jamais dit qu’il fallait qu’il soit… Aimable. Edd réfléchissait tout de même à la question. Comme si ce moment était été existentiel dans sa vie. Les yeux dans la vague, à regarder la fumée qui s’échappait d’entre ses lèvres. Les choses avaient chargé depuis qu’il faisait ce boulot. Et pour sa question, l’avait fait réfléchir bien plus sérieusement que ça n’aurait dû… « On croit que c’est fun… Dans les premiers temps… On se lasse comme tout le reste, je suppose » Edd n’avait jamais été aussi sincère qu’à cet instant. Que même lui, ça lui faisait peur. D’ailleurs, sa place initiale, lui semblait inconfortable. « Je suppose qu’avoir des clients chiants et courant pour toi aussi, pressé, qui veulent toujours plus, et dont la patience... » Il terminait ces mots-là, il se rendait compte bien sûr, elle se rendait compte et qu’en plus elle pouvait le prendre pour elle. C’étaient exactement les reproches qu’il avait fait, il y a quelques… Minutes. « Mais je pense que tu voulais surtout parler du danger de se faire prendre…? » Son regard se posa sur la jeune femme, dans l’attente d’une réponse qui ne venait pas. « Je pense que c’est ça qui me plaît dans le fond. Le sursis, chaque jour, je suis dehors. Adrénaline ouai, j’aime ça. » Mais ça ne durera qu’un temps, il le sais. C’était aussi intense que ces clients drogués après leurs petits doses.
Il se rendait compte, qu’ils étaient en train de raconter leur vie, ou plutôt lui. Léo était plutôt discrète, dans le genre. Edd était pareil, d’ordinaire, alors pourquoi d’un seul coup, il se sentait âme à se pencher de son cas. Un sourire se dessina sur ses lèvres, tirant une taffe, puis une autre, ce truc détendait ces nerfs, alors que lui même n’était pas conscient qu’il était à cran. « Qu’est-ce qui te pousse à continuer, si tu ne supportes pas… La pression ou la routine ? » C’était même logique, qu’est-ce qu’elle foutait dans un bar, si elle ne pouvait pas voir la majorité des personnes présentes. Voir toujours les mêmes faces, les mêmes gestes, sortir les soûlards qui n’avaient aucun respect à part avoir la main baladeuse. Il haussa tout de même un sourcil, à vouloir savoir son passé, l’origine de son comportement. Putain… Il aurait certainement rigolé à cet instant, si le flot de sa part sombre ne faisait pas surface. « Tu joues les psys maintenant ? » Elle était aussi détraquée que lui, ironie de la situation. « Hum… Comme tu pourras avoir une influence sur moi… Et me le sortir à chaque fois, que tu voudras obtenir quelque chose... C’est compliqué, on peut dire qu’il y a un événement qui a joué beaucoup » Il avait besoin de chose qu’il cachait, des choses qui ne révélait pas grand monde, même Caspian. Mais l’idée du verre n’était pas une si mauvaise idée. « Si tu me promets de ne pas mettre de cyanure dans mon verre…. J’aurais peut-être quelque chose à te proposer... » Il n’arrivait pas à croire ce qu’il allait faire. Ce soir, ils étaient dans une autre dimension. Inviter son ennemie… « Va pour la pinte, les prochains verres c’est pour moi, en échange d’informations. C’est une bonne occas, tu veux savoir des choses, moi aussi… Après… il y a toujours autre chose que la bière comme échange » Edd se rendait compte de ce qu’il venait de dire. « Ne te méprends, tu n’as pas ce qui faut ... » Ça sonnait comme insultant non ?