we saw the fire before we heard our names (devon)

La clinique était réouverte depuis deux semaines après une relâche bien méritée pour les fêtes. Woody en avait profité pour faire du classement dans ses dossiers, dans ses suivis, réaménager ses horaires, et il avait pu prendre quelques patients en plus. Parmi ceux-ci, un dossier que son associée Eva lui avait transféré parce qu’elle avait eu quelques contretemps l’empêchant de le rencontrer pour son rendez-vous d’évaluation. Puisqu’Eva avait à plusieurs reprises prêté main forte à Woody l’année dernière, alors que celui-ci était en dépression sévère, le physiothérapeute se voyait mal lui refuser ce petit service. Il avait donc récolté ce dossier qui s’ajoutait à ses filières, et puisqu’Eva lui avait donné les grandes lignes du cas, Woody ne s’était pas à proprement parler plongé dans le dossier. Il avait préparé à côté un plan de réhabilitation et l’avait glissé dans le porte-documents, sans s’attarder aux détails de la personne. Ce n’est que quelques minutes avant le rendez-vous, en préparant ce dernier, que Woody ouvrit la fiche d’informations de l’homme et que son attention fut captée par le nom. Devon Keynes. Et Eva lui avait bien dit que c’était un homme atteint de la mucoviscidose. Ça ne faisait aucun doute, absolument aucun doute, c’était le frère jumeau de Charlie. Il alla d’ailleurs voir la date d’anniversaire et confirma qu’ils avaient le même âge. Woody ne connaissait pas la date de naissance de la pâtissière mais quand même, c’était assez de preuves. Un petit stress s’empara donc de Woody, dont les mains devinrent rapidement moites. Et alors que sa tête commençait à tourner rapidement à la recherche d’excuses pour se défiler de ce rendez-vous, l’intercom de son téléphone s’alluma et sa réceptionniste l’avisa de l’arrivée de Devon Keynes. « Merde … » Lâcha-t-il une fois que sa réceptionniste eut raccroché. Il inspira profondément, expira d’un coup, et se leva. Il marcha jusqu’à l’accueil, équipé de sa canne, ce qui clashait quand même avec son rôle de physiothérapeute, mais ça n’enlevait rien à ses compétences. C’était dans sa tête à lui que la honte grandissait. « Devon Keynes ? Tu peux me suivre. » Il lui sourit, faisant un signe de tête vers le couloir. Généralement, quand ses patients avaient le même âge que lu ou plus jeunes, il ne passait pas par le vouvoiement. Il aimait bien avoir des relations plus friendly avec les gens qu’il traitait.

Enfin j'ai eu ma greffe, c'est un très beau cadeau de la vie, j'ai enfin la vie dont je rêver. J'avais commencé mes séances de kiné après ma greffe, mais mon médecin m'a annoncé qu'elle partait, c'est avec un grand regret que j'ai effectué ma dernière séance de kiné avant que je sorte de l'hôpital, quelques jours avant Noël. J'ai passé des fêtes de folie, j'ai eu un accueil digne de ce nom quand je suis arrivé chez ma soeur. Je savais qu'elle avait invité quelques personnes, moi ma surprise fut cette voiture que je lui avais achetée, elle ne s'y attendait pas et pourtant je l'ai fait. J'ai également fait le père noël, j'ai vu les yeux émerveillés du petit-garçon qui faisait semblant de dormir. Mais aujourd'hui je devais reprendre mes séances, j'en avais besoin, je faisais le nécessaire bien sûr à la maison, mais ce n'était pas pareil. J'ai un nouveau médecin, je ne sais pas s’il est bien, je ne le connais pas, mais je suis sûr que si ma kiné me la conseille c'est qu'il est bien, je vais lui laisser une chance dans ce cas. Quand le médecin m'appelle, je le suis jusqu'à sa salle, je le regarde et quand j'arrive, je m'installe sur la chaise avant d'enlever mes affaires. "Merci d'avoir repris mon dossier" Je ne pouvais pas lui dire grande chose en fait, je ne savais pas ce qu'il voulait que l'on fasse.

Une fois dans son bureau, Woody referma la porte après avoir laissé entrer Devon. Il le détailla rapidement du regard, essayant de trouver les ressemblances avec Charlie. Il pouvait voir qu’ils étaient de la même famille, oui, cela ne faisait aucun doute. De là à les dire jumeaux, il n’aurait sans doute jamais deviné s’il n’avait pas été au courant. Il n’aurait sans doute même pas fait le rapprochement avec Charlie rien qu’à voir son visage, même. C’était le nom qui lui avait mis la puce à l’oreille, autrement, il aurait été un patient comme un autre, aujourd’hui. Sauf que ce n’était pas le cas. Il n’était pas un patient comme un autre. Il était le frère de la femme qu’il fréquentait, et il n’avait aucune idée de ce qu’il pouvait savoir de lui. « Tu peux t’asseoir, on va prendre le temps de parler un peu quand même avant d’rentrer dans le gros du rendez-vous. » Il pointa la chaise face à son bureau, bureau qu’il contourna pour aller retrouver sa chaise à lui. « Tu le sais sûrement déjà par la réceptionniste ou la prise de rendez-vous mais moi, c’est Woody. Woody Rutkowski. » Il ne prendrait généralement pas trop le temps de se présenter, jugeant justement que les gens qui prenaient rendez-vous avec lui faisaient au moins l’effort de connaître le nom de leur professionnel de la santé. S’il avait ouvert de cette manière-là, c’était pour voir si Devon le connaissait déjà, ce nom, avant même qu’il soit attitré à son physiothérapeute. En gros, Woody, il tâtait le terrain pour savoir si Charlie avait déjà parlé de lui à sa famille. Ça lui permettrait du même coup de savoir quoi faire pour la séance d'aujourd'hui. Tout de suite dire qui il était, ou bien ne pas en tenir compte pour le moment ?

Mon médecin traitant et mon kiné, se sont deux vieux amis, mais quand ma kiné ma dit qu'elle partait a la retraite j'étais vraiment triste, j'aimais bien faire les séances avec elle. On discuter de tout et de rien avec elle, comme le travail, les filles, maintenant il faut que j'aille voir un autre kiné, il s'agissait d'un certain Woody Rutkorowski, je ne le connaissais pas enfin c'est vite dit, car ma soeur m'avait parlé d'un mec qu'elle voyait, elle se confie beaucoup à moi ma jumelle. Curieux comme je suis, je lui ai demander commencer s'appeler ce garçon et ce qu'il faisait dans la vie. Quand elle a prononcé ce prénom, je suis resté assez surpris, oui ma soeur connaissait ce Woody qui allait devenir mon kiné, je ne sais pas comment accepter cette nouvelle, mais comment dire que si je la vois heureuse, je serais le plus heureux. Woody mon nouveau kiné vient me chercher, je le regarde, il est charmant, je peux comprendre que ma soeur craque pour ce charmant jeune homme. Je m'installe quand celui-ci m'invite a le faire, je le regarde et je le laisse ce présenter, je hoche la tête. "Je sais qui vous êtes. J'ai pris rendez-vous avec la réceptionniste et on m'a parlé de vous. Je vous rassure en bien évidemment. Sinon je ne serais pas l’assise en face de vous." Je dirai a ma soeur que j'ai vu son charmant Woody, elle va me tuer, car elle ne sait pas que ma kiné habituelle est parti a la retraite.

Devon s’installa devant Woody, qui à son tour pris place dans sa chaise à roulettes. Il se tira vers son bureau et posa ses coudes sur le bois verni. Habituellement, le physiothérapeute ne faisait pas les présentations aussi officiellement. Dire son nom complet comme ça, ça faisait limite le mec qui se prend un peu trop au sérieux. Ce n’était pas tout à fait ça. Woody avait juste besoin de scruter le visage de son patient pour guetter une quelconque réaction, une quelconque lueur dans son regard qui lui permettrait de comprendre que le frère jumeau de Charlie était déjà au courant de qui il était. Le trentenaire n’eut pas besoin d’aller beaucoup plus loin dans son enquête, puisque Devon lui donna directement la réponse qu’il cherchait à obtenir. « Tu peux me tutoyer … on a pratiquement le même âge de toute façon. » Proposa-t-il. Et puis, si cela devenait encore plus sérieux avec Charlie, Devon allait devenir son beau-frère. Ils n’allaient pas en rester dans cette formelle politesse bien longtemps. Rien qu’à penser à cet engagement plus sérieux avec Charlie, il se sentit perdre un peu le pied. Woody avait un cœur encore bien confus, et plus il se rapprochait de Charlie, plus cette confusion prenait de la place. « Quand tu dis on t’a parlé de moi, tu parles de ma réceptionniste ? … Ou de ta sœur ? » Il esquissa un faible sourire. « Non parce que j’sais pas à quel point ma réceptionniste est du genre à m’lancer des fleurs. » Ils n’avaient qu’une relation professionnelle, et même si Woody était un patron plutôt cool, il n’était pas non plus le mec le plus amical du monde. Charlie avait déjà dû le dire à son frère, ça, de toute façon. Qu’il était un peu bougon, fermé et solitaire. Et dire que dix années auparavant, il était absolument tout le contraire …

M'installant dans un des deux fauteuils situés en face du bureau du médecin, je le regarde, je ne sais pas du tout ce que l'on va se dire. Je sais que ma soeur m’a parlé d'un certain Woody, qu'elle avait rencontré cet homme et qu'elle le voyait. Je suis simplement heureuse pour lui, elle qui en bave avec ses relations amoureuses, je dois dire que j'aimerais qu'elle trouve enfin quelqu'un et qu'elle fonde pourquoi pas sa petite famille. Je sais très bien qu'elle veut la même chose pour moi, mais c'est compliqué de vouloir des choses comme ça quand on a une maladie comme la mienne. Je souris quand Woody m'invite à le tutoyer, en même temps nous ne sommes pas trop éloignés en âge, je hoche la tête simplement pour approuver son idée. Je souris à nouveau, il a l'air de vouloir savoir qui a parlé de lui. "La réceptionniste, mon juste demandé pourquoi je voulais un rendez-vous avec vous ne t'inquiète pas....Ma soeur m'a dit que vous vous voyez. Mais sache que ce n'est pas pour ça que je suis venue ici aujourd'hui, mais bien pour un rendez-vous médical." Je regarde Woody, même si Woody et ma soeur sont de potentiel futur amoureux, je suis venue, car j'ai eu une greffe des poumons et qu'avec ma maladie je n'ai pas le choix de voir des kinés.

L’art de la subtilité n’était visiblement pas maîtrisé par Woody, dont les tentatives de savoir ce que Charlie avait bien pu dire sur lui s’avérèrent vaines. Au lieu de mettre l’accent sur les propos de sa sœur, Devon avait plutôt répondu par rapport à la réceptionniste. En ce qui concernait Charlie, tout ce que Woody arriva à obtenir, c’est qu’elle lui avait dit qu’ils se voyaient. Ça ne disait pas grand-chose. Ni sur lui, ni sur leur relation, ni sur ce qu’elle pensait de lui. À sa plus grande surprise, Devon le rappela à l’ordre en lui disant que s’il était venu ici aujourd’hui, ce n’était pas pour ça mais bien pour son rendez-vous médical. Ouch. Shit. Le trentenaire avait carrément été pris en flagrant délit de manque de professionnalisme, oui. Gêné, il baissa les yeux vers le dossier de Devon. « Ouais … désolé. J’essayais de faire un peu de small talk vu que je fréquente effectivement ta sœur mais … ok. Commençons. » Lâcha-t-il un peu plus sèchement qu’il l’aurait voulu. C’est que Woody, au lieu d’admettre qu’il était en tort, préférait tenter que ce soit Devon qui se sente fautif. Il avait toujours été comme ça, Woody, à préférer faire porter le blâme aux autres. « Comme on en est au début de la phase postopératoire secondaire, le plan de match c’est que les prochaines séances seront beaucoup plus des exercices respiratoires. Mieux ça ira, plus on intégrera des exercices de réentraînement à l’effort. On te l’a sans doute déjà dit mais … ça demandera beaucoup de travail. Dépendamment du stade, parfois une à quatre séances par jour, 20 à 30 min chaque fois. On risque de se voir souvent, du coup. » Alors espérons qu’ils ne s’entendraient pas trop mal. Ce n’était pas gagné d’avance, avec Woody.

Face à ce médecin, je ne m'attends pas forcement à un interrogatoire, non c'est un médecin, c'est bien la première fois que je subis un genre d'interrogatoire, même mon ancienne kiné ne m'a jamais posé autant de questions. Bon à force j'ai pris le temps de parler avec elle et de parler de ma vie, sur mon boulot de directeur de banque, puis dernièrement quand j'ai changé de travail, elle était contente pour moi. Passer de Directeur d'une banque à Éditeur dans une maison d'édition c'est peu commun, mais je l'ai fait, ma maladie me faisait m'absenter beaucoup trop dans ce métier à responsabilité. Mais aujourd'hui je peux enfin travailler de chez moi, je vais au travail 3 fois par semaine, car la plupart du temps j'ai des rendez-vous médicaux. MA soeur m'avait avoué qu'elle voyait un mec, un certain Woody, je suis contente qu'elle tourne la page avec Liam et avec Owen, car j'avais l'impression qu'elle souffrait beaucoup après ses relations. Je ne lui ai jamais vraiment demandé pourquoi elle avait quitté Owen, d'ailleurs, je crois savoir qu'il est venu s'installer à Bowen et qu'il a ouvert sa pâtisserie, je ne sais pas comment ma soeur a pris la nouvelle, j'espère juste qu'elle ne va pas craquer et qu'elle ne retournera pas dans ses bras. J4avoue que ce que je viens de lui dire j'aurais peut être du le garder pour moi, en même temps il essayer d'être gentil avec moi et d'installer une confiance entre nous. Donc c'était bien lui le Woody, je ne me suis pas trompé, car il peut y en avoir des millions de Woody ont Bowen. "Non ce n'est pas grave....Mais....Je n’aurais pas dû te parler comme ça....Alors comme ça vous vous voyez ? " Je vais essayer de veillez sur ma soeur, car je n'ai pas envie qu'elle souffre et qu'elle ai le coeur brisé. "4 séances par jour ?" Waouh je ne m'attendais pas a autant de séances en fait, cela est pour mon bien après tout, il faut que je réapprenne a vivre avec des poumons sains. "Très bien, je pense que je n'ai pas le choix si je veux vivre avec de super poumon tout neuf." Je ne sais pas comment va se passer ses séances avec lui, mais je suis sur que je vais bien m'entendre avec lui et puis peu être qu'un jour il sera mon beau-frère alors il faut que nos relations soit cools.

Ce n’était pourtant pas le genre de Woody, de se perdre dans des conversations personnelles avec ses patients. Surtout, ce n’était pas son genre de manquer à son devoir de cette façon, pour une femme. C’était bien là la preuve que Charlie avait su, au fil des mois, se frayer un chemin dans sa vie et peut-être même, jusqu’à son cœur. Il était encore trop tôt pour Woody pour parler de ce genre de sentiments et pourtant, s’il cherchait autant à tirer les vers du nez de Devon, c’était parce qu’ils étaient bel et bien là, ces sentiments. L’opinion qu’avait Charlie de Woody lui importait bien plus qu’il ne le laissait paraître. Après des années à être amoureux de la même femme, dans les meilleurs comme dans les pires moments, c’était effrayant d’ouvrir la porte à quelqu’une d’autre. Bref, ramené à l’ordre par le jumeau de sa fréquentation, le physiothérapeute se replongea dans le dossier de Devon. Voyant sans doute le malaise qu’il venait de créer, le patient essaya de se rattraper un peu. Pour un bougon comme Woody, il était légèrement trop tard. « Ouais, mais euhm, c’est pas important. T’as bien fait de dire ça, t’es effectivement pas ici pour ça. » Il balaya donc la question de Devon de cette simple réponse, ne voulant plus de ce small talk qu’il avait initié alors qu’il n’aurait pas dû. De se rendre compte qu’il avait été trop loin l’avait un peu secoué, et Woody se remettait constamment en doute quand ça arrivait. Il se concentra donc sur les traitements de Devon. « Je sais que ça a l’air gros, mais ce n’est que de courte durée. Quelques semaines. Et puis, à voir comment ça va, y’a certaines de ces séances que tu pourras éventuellement faire par toi-même. Mon rôle est de te guider dans la marche à suivre, mais une fois que tu vas assez bien les maîtriser, on se verra beaucoup moins souvent … » Il esquissa un faible sourire. « Ne perdons pas plus de temps, du coup … tu peux aller t’installer là. » Dit-il en pointant le lit d’auscultation. Il attrapa sa canne pour l’aider à se relever, avant rejoindre Devon de son pas lent et lourd. Deux estropiés de la vie, ces deux-là.