you've heard of me before… (charlize)

C’était un véritable cauchemar. Je haïssais mes sœurs de m’avoir inscrite à cette soirée à mon insu. C’était une idée de Pippa, j’en étais certaine, elle la fêtarde, celle qui trouvait toujours un moyen de s’amuser même dans des situations difficiles. Elles savaient toutes les deux à quel point la solitude me pesait, mais ce qu’elles n’avaient pas compris c’est que ce n’était pas tellement d’être seule qui me faisait du mal, c’était le manque de mon mari et ça aucun autre homme ne pourrait le remplacer. Alors me faire participer à un speed-dating c’était vraiment une idée stupide. Mais finalement la plus bêtes des trois c’était certainement moi, puisque j’avais accepté, sous la pression, parce que ce serait fun, parce que de toute façon je n’allais prendre aucun risque. Non, aucun, mis à part celui de me ridiculiser. Je n’avais rien à leur dire, à ces hommes, je n’avais pas une vie palpitante ni d’envies particulières mis à part celle de quitter cette pièce au plus tôt. Par contre il s’avérait que ces messieurs en avaient pas mal, de choses à dire. C’était à peu près toujours le même discours, ils étaient là pour s’amuser, ils aimaient voyager, le sport, la cuisine, ils paraissaient parfaits sur le papier et si en plus je leur glissais mon numéro de téléphone histoire de passer une nuit sympa ensemble je ne le regretterais pas. Evidemment ! J’avais vraiment la tête d’une fille facile ? Ce ne seraient pas eux qui se lèveraient à quatre heures le matin suivant pour aller préparer une fournée de Cinnamon Rolls tous chauds pour les premiers clients de la matinée. Je ne comptais plus le nombres de gamins immatures qui avaient défilé à ma table et je n’en pouvais plus. Mes mains crispées sur mon café frappé, je regardais ma petite feuille sur laquelle j’avais griffonné tout un tas de petits dessins mais aucune ligne concernant les éventuels hommes qui m’auraient marqué. Je levais à peine la tête lorsque le prochain s’installa face à moi, avant même qu’il soit assis il commença son laïus qui semblait bien rodé et qui me fit relever le menton vers lui, j’étais un peu surprise, au moins c’était direct, il fallait le reconnaître. Un mince sourire se dessinait déjà sur mes lèvres alors qu’il m’accordait enfin un regard. Non, en effet ce n’est pas ce que je recherche. Mais je ne cherche pas non plus le Casanova de ma prochaine nuit, soyons clairs. Au moins les bases étaient posées des deux côtés. J’hésitais une seconde, mais il ne m’en fallu pas plus, physionomiste que j’étais je n’oubliais jamais un visage et en avisant la tasse qu’il avait posé devant lui je devinais déjà ce qu’il y avait dedans, je connaissais cet homme, du moins je l’avais déjà vu, même si je n’étais pas pas certaine d’avoir un jour réellement entendu le son de sa voix sur une phrase complète. Nos regards se croisaient, s’agrippaient même et je découvrais qu’il était capable de ne pas baisser les yeux alors je ne le fis pas non plus, presque impressionnée durant un instant. Finalement je pris la parole. Moi c’est Charlize, enchantée. Histoire d'être polie pour commencer. Il y a un nuage de lait dans votre thé ? Je me souvenais de l’habitude du jeune homme, parce qu’il était un client fidèle de ma boutique avant que je quitte Bowen et c’était le genre de petit détail que je n’oubliai pas.