Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.
Sujet: De l'autre côté de la rue... [Judas] Ven 19 Mar 2021 - 11:52
Foutue maladie. Mais il n'avait pas le choix, déjà qu'il ne respirait qu'à moitié, il lui fallait en plus se piquer trois fois par jour. Et pas pour voir des éléphants roses ! Parce que ça aurait au moins eu un côté sympa... Mais là non, c'était juste pour pouvoir survivre. Et qui disait insuline, disait pharmacie. Et bon sang, entre la canicule extérieure et les intérieurs frigorifiés par les climatisations, ce n'était vraiment pas bon pour son seul petit poumon qui lui restait. Foutue maladie et foutu pays ! Mais il avait besoin de cette insuline. Quitte à faire deux heures de queue -enfin peut-être que c'était plutôt vingt minutes... Mais l'idée était là !- dans ce fichu frigo qu'était cette pharmacie. Et ce n'était pas étonnant qu'il y ait tant de monde malade...
Et après vingt bonnes minutes à se les geler, il avait dû replonger dans la fournaise extérieure. Oh joie, oh bonheur... Mais au moins, il avait à la main son petit sac isotherme contenant son insuline. Pour un mois. Qu'en serait-il le mois prochain et surtout, où serait-il... Il n'en avait aucune idée. Il était parti sans donner de date de retour et sans même savoir s'il retournerait aux Etats-Unis. A... Lockesburg ? Peut-être. Sans doute même ! Il n'avait pas vendu la maison, et c'était chez lui après tout. Enfin, chez Joe Davis. Donc chez lui, oui. Ici, c'était... Bon sang, tout était si compliqué... Et ce n'était certainement pas en restant planté devant la pharmacie, son sac contenant l'insuline à la main, qu'il allait mettre tout cela au clair. Il lui fallait rentrer à l'hôtel, mettre l'insuline au frigo et envisager comment il allait pouvoir non pas reprendre contact, mais juste voir Bart. Simplement le voir serait déjà tellement bien. Voir à quoi il ressemblait maintenant. Ses cheveux blonds trop longs pour être courts et trop courts pour être véritablement longs, et partant dans tous les sens... Sa silhouette toujours aussi longiligne... Et des tatouages, beaucoup de tatouages au niveau des jambes qu'il n'avait pas avant... Euh... Qu'il n'avait pas avant ?
Il en écarquilla le regard alors qu'il réalisait qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Il faisait chaud. Beaucoup trop chaud. Et comme si ça ne suffisait pas, il y avait un vent brûlant qui venait faire voler en tous les sens les mèches de cheveux déjà indisciplinées de... son frère. Bath... Qui était là. Face à lui. Enfin, de l'autre côté de la route à sens unique... Pas si large finalement, et assez pour qu'il le voit. La chaleur était juste trop accablante pour lui qui n'était plus habitué. Il avait pris un coup de chaleur et il hallucinait. C'était forcément ça. Bart ne pouvait pas... être là. A le fixer tout comme lui-même le regardait sans ciller. C'était... Juste impossible ! C'était pas comme ça que ça aurait dû se passer. Il devait juste le voir, pas se faire voir ! Il était censé préparer les choses, se faire à l'idée, y aller en douceur et... Il faisait trop chaud pour respirer correctement. Et il devait s'occuper de son insuline, la mettre au frais ! Il fallait... Qu'il arrête de paniquer et qu'il respire ! A la place, il recula d'un pas, puis de deux et puis son dos tapa contre la vitrine de la pharmacie alors qu'il était toujours face à... Bart. Mon Dieu, Bart...
...Il devait fuir !
Avant qu'il ne soit trop tard, avant que l'hallucination ne devienne trop réelle, avant que Jonas Kirke ne reprenne le pas sur Joe Davis... Son sachet glissa de ses mains et tomba à terre mais ça n'avait plus d'importance. L'insuline ne comptait plus, seul respirer importait. Et s'éloigner, le temps de poser les choses, de réfléchir, et de réaliser l'ampleur de ce qui venait de se passer... Bart l'avait vu. Il savait maintenant... Il savait.
D'un geste tremblant, il tira ses lunettes de soleil du col V de son tee-shirt pour dans une tentative dérisoire de camouflage, se les coller sur le nez. C'était tellement idiot qu'il se faisait presque pitié mais ça lui permettait d'un peu mieux respirer. Se baissant pour récupérer son insuline, il hésita sur la conduite à tenir. Que devait-on faire dans un tel cas ? Est-ce que seulement quelqu'un avait jamais eu à vivre ça avant eux ? Partir, ça semblait être encore le mieux. Il reviendrait plus tard quand... Les choses seront mieux ? Il ne savait pas quand, ni même comment mais il se détourna et fit un pas, puis deux avant de se figer. Il pouvait pas. Dieu ! Il pouvait pas... Pas alors que son coeur tambourinait comme un fou dans sa poitrine et que son esprit hurlait après Bart...
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Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Sam 20 Mar 2021 - 9:08
De l'autre côté de la rue...
Le temps file et ne nous attend pas. S'il y a une leçon à apprendre de la vie, c'est celle-ci, car elle est véridique et universelle. Même si ça a été dur à accepter, il a fini par le faire, dénouant le fil de son destin au fur et à mesure qu'il avançait. Pendant des années, ça avait été dur, mais doux. Le deuil lui avait donné l'impression que les années étaient trop longues et il avait hâte d'être à ce plus tard où penser à un frère perdu ne ferait plus aussi mal. Au final, la douleur ne s'efface pas, et le manque se creuse de plus en plus, mais il faut vivre avec. Des années foutues en l'air en espérant que ça irait mieux. Puis des années de bonheur dans lesquelles il se sentait coupable de vivre et d'être un minimum heureux. Un fils et une meilleure amie pour qui vivre, enfin. Pas d'amour pendant tout ce temps, mais qu'est-ce qu'il n'en avait rien à foutre à cette époque. Et aujourd'hui, la douleur revenait, comme si le karma avait décidé qu'il était temps pour lui de répondre de ses actes. Un enfant à naître, bientôt, et une revenante. Il ne s'était toujours pas remis du retour de Scarlet à Bowen. Elle aussi avait fini par être un fantôme à ses yeux. Elle était la petite rouquine qui les suivait toujours dans les emmerdes, et elle revenait aujourd'hui alors que le trio n'avait plus lieu d'être, puisque l'un était mort et que les deux autres se perdaient dans leurs maux. Il s'éclipse de cet appartement dans lequel il se fait petit à petit à tout cet espace partagé, dans lequel il espère voir grandir son enfant et sa famille avec Noa. Fille ou garçon ? Il a déjà eu un fils, il aimerait avoir une fille à aimer. Il ne fera pas le difficile. Judas est plein de cet amour et serait prêt à le partager avec n'importe quel enfant. Il passe de plus en plus de temps dans des boutiques pour les enfants, pour essayer de choisir quel serait le plus beau doudou et la première belle guitare, sans savoir ce qu'il adviendra de l'avenir. Il s'oublie un peu, et il est temps de penser à lui. Ce pari à la con avec ses potes en est la première preuve. Se teindre les cheveux, n'importe quelle couleur mais le faire quand même. Il lui faut de la teinture pour ruiner ses belles mèches blondes, alors c'est vers ce genre de boutique qu'il se dirige alors que la chaleur plaque ses mèches contre son front, casquette enfoncée sur la tête, la sueur dégoulinant le long de son grand débardeur rose qui ne cache rien de ses tatouages puisqu'il est entièrement transparent. Il se gratte sans arrêt la cuisse par dessus son short parce qu'il s'est fait bouffer par des moustiques. Il lui faut de la crème avant de rentrer et il y a une pharmacie pas loin, ça tombe bien. Il s'arrête sur le trottoir et observe la devanture mais le temps s'arrête. Y'a un mec un peu louche juste devant la pharmacie qui le fixe comme s'il avait vu un fantôme. Plus petit que lui de dix centimètres, un peu moins blond, mais avec quelque chose d'étrangement familier dans la façon de le regarder. Pour faire comme si de rien était, Judas sort son téléphone pour voir s'il a des notifications et quand il le replonge dans sa poche, le blond a remis ses lunettes de soleil et a l'air de vouloir fuir. Dans quelles emmerdes s'est-il encore plongé, Judas, pour être suivi par un mafieux de service ? Les questions se bousculent dans sa tête et il se décide à traverser la rue pour aller le repérer de plus près. Juste quelques secondes supplémentaires... Mais le sang ne fait qu'un tour dans son corps tandis que son esprit est secoué de et si... Il lui faut quelques secondes pour atteindre ce mec et l'empêcher de s'enfuir à toutes jambes. Il pose doucement la main sur son épaule pour le retenir, fronçant les sourcils. « Eh, ça va ? T'es blanc comme un cul, on dirait que tu vas tomber dans les po-... » La mâchoire cesse de remuer et il ne sort plus aucun son de sa bouche. Pas ça. Pas ce sentiment, ni ce tremblement, ni ce haut-le-cœur, par pitié ! Maintenant c'est le tatoué qui a l'impression d'avoir vu un fantôme, pourtant, il a posé la main sur son épaule et elle était bien réelle, cette épaule. Il est mort. « T'es qui ? » Deux syllabes prononcées à la hâte pour être sûr. Il a le même regard qu'il y a plus de quatorze ans, en plus fatigué, en plus vieux, c'est son portrait craché. Un peu comme un reflet de lui-même qui aurait mal vieilli, et là, il a des frissons jusqu'au bout des orteils. Fais chier.
Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Dim 21 Mar 2021 - 5:41
Ca faisait mal. Tellement mal qu'il aurait pu s'écrouler là sur ce trottoir. Son corps entier se rebiffait à l'idée de s'éloigner davantage et chaque foutue cellule qui le composait hurlait d'agonie à l'idée de faire un pas supplémentaire. Il était vivant. Bartosz était vivant... Bien sûr qu'il était vivant, il s'en était assuré le jour de l'accident ! Lui allait mourir, les médecins ne pariaient pas un kopeck sur lui, un mort en sursis qui suppliait pour qu'on lui prélève son poumon pour le donner à son jumeau. Alors oui, Bart était vivant. Il ne s'était juste pas attendu à le voir de si près ! Et c'était aussi magique, étourdissant même, que cruel... Une si douce cruauté. Parce que cette voix, il l'aurait reconnu entre mille malgré les années et cette main soudainement posée sur son épaule était comme une évidence. Alors qu'il pouvait en ressentir toute la chaleur qui passait à travers la barrière de son tee-shirt... C'était comme être hors du temps et c'était la chose la plus merveilleuse et la plus atroce qu'il ait pu vivre. Est-ce que Bart le ressentait aussi ? Oui, il était sûr que oui. Parce que ça venait des tripes, du plus profond d'eux-mêmes et que ça ravageait le peu de raison qui lui restait.
Et il n'y avait bien que son frère pour se préoccuper ainsi des autres, et d'autant plus d'un simple inconnu passant dans la rue et qui menaçait effectivement de s'écrouler. T'es blanc comme un cul... Non, il était juste malade d'angoisse à se demander ce qu'il devait dire ou faire, ou plutôt ne pas dire et ne pas faire... Sanders avait raison comme souvent d'ailleurs, de quel droit venait-il réapparaitre dans sa vie comme si de rien n'était ? Alors que Bart buguait à son tour en le fixant... Exit donc les enlacements émotifs et les retrouvailles pailletées sur dos de licornes gambadant sur les arcs-en-ciel, et les bons vieux souvenirs partagés autour d'une bonne bière fraîche... C'est qu'il avait imaginé des centaines de millions de fois ce moment où ils seraient l'un en face de l'autre, qu'ils se reconnaitraient comme une évidence et se tombaient dans les bras. Ce devait être beau et tout effacer, l'accident, l'EMI, la cave, et tout le reste... Il n'y aurait plus eu qu'eux, juste eux, à nouveau réuni, ensembles... Mais la réalité était bien plus complexe. Comment effaçait-on 14 ans de mort ? Il était mort et enterré ! Il ne savait même pas où d'ailleurs... Ni même qui ils avaient mis dans la boite à sa place. Enfin si, ça il pensait savoir parce que la feuille qui était posée sur le drap qui le recouvrait lui avait glissée dans les mains, et il l'avait posé sur le corps à côté de son propre brancard, faisant voltiger sa propre feuille par terre... Mais il ne s'en était pas préoccupé à ce moment-là, il avait juste voulu sortir de là...
Et puis soudain, la planche de salut. Inattendue et inespérée, et qui lui tendait les bras. « T'es qui ? »"Joe Davis." Le nom était sorti naturellement de sa bouche sans la moindre once d'hésitation. Parce que c'était qui il était maintenant. Joe Davis. 26 ans. Né le 7 décembre 1994 à New-York. Américain. Et écrivain. Comme une litanie qu'il se répétait à l'infini. Son identité collée à sa peau... qui était autre. Et qui se tendait toute entière vers cette main posée sur lui, au point qu'il aurait pu se faire un claquage musculaire tant il se crispait. Est-ce que Bart allait y croire ?... Mais surtout, est-ce qu'il y croyait lui-même alors qu'il se trouvait là face à son frère ? Il aurait pu faire croire à un sosie, c'était le moment idéal pour cela. Parler de ses livres et même pourquoi pas -soyons fous !- d'autographe. Evoquer la canicule et ce qui était censé être ses vacances. Voire même lui préciser qu'il ne semblait être aussi blanc qu'un cul que lui ! Mais... C'était déjà trop tard. Il le fixait trop intensément, et avec bien trop d'émotions malgré les lunettes de soleil. Bart était là, enfin... 14 ans, c'était une vie entière ! Toute la vie de Joe Davis. Les mots tout juste murmurés franchirent ses lèvres avant même qu'il n'ait pu les penser consciemment. "Tu vas bien, on dirait. C'est... cool." Il avait la gorge nouée et les bras ballants, il n'osait juste pas le toucher. Et s'il disparaissait aussi soudainement qu'il était apparu face à lui ? Il ne le supporterait pas, il le savait.
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Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Lun 22 Mar 2021 - 12:51
De l'autre côté de la rue...
Trois syllabes parvenaient aux oreilles de Judas qui ne savait plus vraiment comment réagir. Joe Davis. Donc ce n'était pas lui. Alors comment son cerveau pouvait-il interpréter ce simple nom ? Joe, ça ressemblait à un diminutif de Jonas et il pouvait bien s'appeler Davis parce qu'il a changé de nom à la mairie ou qu'il s'est marié, ce serait pas si con. Et puis, cette voix... Était-il vraiment en train de chercher des signes là où il n'y en avait aucun ? Il se le demandait. Son frère était peut-être bien mort finalement, il avait été là à l'enterrement. Croisant les bras sur son torse, le tatoué avait l'impression qu'il ne pouvait plus respirer. Tous ses muscles étaient ridiculement tendus et sa mâchoire ne parvenait pas à se décrocher, le souffle lui manquait. C'étaient les mêmes émotions que quand il avait revu Scarlet pour la première fois. Pourquoi fallait-il que les fantômes du passé le croisent par hasard ? Tout aurait été plus simple s'il y avait eu un médiateur ou des sms échangés avant. Non. Tout aurait été plus simple s'ils étaient vraiment morts, ou bien jamais morts. Et en même temps, ces syllabes semblaient si naturelles. Quand on ment, on hésite, on ne parle pas d'une truc, on cille un peu des yeux. Lui, c'est une traite, comme ça. A moins que le mensonge ne se traduise par des expressions contraires ? Les souvenirs remontent lentement à la surface pour trouver des corrélations entre Joe et Jonas, et elles sont trop nombreuses. La couleur des yeux, la blondeur de ses cheveux, la voix un peu muée mais la voix tout de même, la sensation d'être aussi mal à l'aise l'un que l'autre et c'est ainsi que les larmes lui viennent aux yeux. Il a même pas eu le temps de lui parler avant qu'il soit mort. Il avait surpris les mots et son corps n'avait pas été assez fort pour protester. Il n'avait pas voulu de ce poumon sur lequel, aujourd'hui, il pose la main en espérant que ce ne soit qu'un mythe. Que ce poumon greffé l'ait vraiment été. En même temps, c'était le cas, sinon, à quoi bon être essoufflé au bout de trois pas et être constamment surveillé par les médecins ? « Non, ça va pas. » Le ton est tranchant et tout ce que Judas a fait toutes ces années pour surpasser le deuil volaient en éclat. Les pleurs, le déni, la douleur, la tristesse, l'acceptation, la peur d'être seul pour toujours et à jamais. La reconstruction de soi avait été si rude qu'il s'était sans arrêt demandé si ce qu'il vivait était réel ou non. Scar qui revenait, c'était déjà trop. Jonas en plus ? C'est voir exploser toutes ses convictions d'un coup, et ça fait putain de mal. « C'est toi. Putain, c'est toi. » Cette fois ça ne sort que dans un souffle et il regarde autour d'eux avant de passer une main incertaine dans sa propre chevelure, avec les tremblements qui commencent à naître. Et d'un coup, c'est la violence qui perce. D'une main tremblante et ferme, il empoigne Joe par le tee-shirt pour l'empêcher de s'enfuir. « Mens pas ! Dis-moi que c'est toi. Joe. Jonas. T'étais mort ! Putain de mort ! » Il lui hurle et lui crache à la figure, se foutant bien de tout ce que les passants peuvent interpréter en les voyant ainsi. Il n'a qu'une seule question en tête à laquelle il espère entendre une réponse, la plus tranchante de toute sa vie et celle qui va achever son envie d'être mort depuis des années.
Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Mar 23 Mar 2021 - 6:10
Ca ne devait pas se passer ainsi. Il n'était pas prêt. Pas prêt pour... ça ! Sanders l'avait prévenu que ça n'irait pas et il l'avait écouté pendant des années. Parce que ça semblait tellement évident que les morts étaient faits pour rester morts ! Pas pour revenir un jour à la vie. Voilà, c'était ce qu'il était, une erreur de la nature. Il allait faire du mal à tout le monde. Il en faisait déjà ! Bartosz... Qui encaissait parce que bien sûr qu'il savait que c'était lui. Ils étaient jumeaux ! C'était pas ainsi que ça aurait dû se passer, mais il s'en foutait parce que là il prenait tout ce que Bart lui offrait. Ses cris si vivants, son souffle qui balayait son visage, sa main qui tordait le tissu de son tee-shirt, son regard trop brillant qui le vissait à lui plus sûrement que tout le reste, Bart... Bart.
L'instant d'après, il se trouvait pendu à son cou à le serrer de toute ses forces entre ses bras, comme si sa vie en dépendait. 14 putains d'années... Mais qu'est-ce qu'il avait fait pendant tout ce temps ?! Rien... Absolument rien. Et ce n'était que maintenant qu'il se trouvait face à son frère qu'il réalisait tout ce qu'il avait perdu avec la mort de Jonas. Tant de choses mais surtout la seule qui comptait réellement et à laquelle il s'agrippait avec tant de force. "Personne ne me cherchait, j'étais mort..." La voix qui déraille et les poings qui se serrent alors qu'il se revoit captant quelques images à la télé d'une fille disparue déclenchant le plan alerte enlèvement. Les yeux qui clignent pour ravaler les larmes et le souvenir du désespoir sans nom qui l'avait prit ce jour-là alors qu'il se gorgeait aujourd'hui de l'odeur de son frère. "J'étais mort, tu comprends ? Foutument mort. Un putain de macchabé enterré... Et plus de vie qui allait avec." Il n'avait même plus de nom à cette époque. La plus dure. Celle où il cherchait encore à faire connaitre son existence par tous les moyens possibles. Avec les conséquences que ça avait eu.
Il en ferma les yeux alors que son poing s'ouvrait pour mieux se refermer sur le débardeur de son frère. Son insuline ? Certainement tombée à terre depuis un moment maintenant mais il s'en fichait. Il faisait chaud, le soleil tapait et c'était un vrai cagnard sur ce trottoir sans ombre, Bart était en sueur et collait -plus que lui qui sortait du frigo de la pharmacie- mais ça aussi, il s'en fichait. Il ne voulait pas le lâcher... Plus jamais. Et s'il disparaissait à nouveau, le laissant seul une nouvelle fois ? Il ne pouvait juste pas laisser ça arriver. "Ne m'abandonne plus jamais, s'il te plait Bart... S'il te plait..." Il aurait tout le temps de regretter par la suite ses paroles et leur cruauté. Et tout le temps pour se traiter de tous les noms et de se maudire pour toute la bêtise dont il pouvait faire preuve. De se laisser ronger par les remords et occuper tout le reste de sa vie à se faire pardonner cela, parce qu'une vie n'y suffirait pas à elle seule.
Et avec quelle excuse ? Celle que ce n'était pas lui qui parlait là, mais le gamin de 16 ans qui enfermé dans son caveau, tentait désespérément de se faire entendre ? De faire savoir à un monde totalement sourd et aveugle qu'il était encore vivant ? Il était encore trop perdu dans ses souvenirs pour réaliser toute l'énormité qu'il venait de lancer à Bartosz alors qu'il s'accrochait à lui avec l'énergie du désespoir.
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Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Jeu 8 Avr 2021 - 8:46
De l'autre côté de la rue...
C'est clair que les morts, une fois enterrés, on ne les cherche plus. Ils sont six pieds sous terre et y'a pas moyen de faire marche arrière. Il a eu envie mille fois de retourner dans le passé, d'effacer le cannabis dans leurs veines pour que tout redevienne normal. Scarlet, Jonas, Bartosz, et Isaac. Le quatrième avait eu le plus de chances de tous les quatre. Quatre mousquetaires indivisibles jusqu'à l'accident. Yeux dans les yeux, y'a tout qui revient, des souvenirs du passé infernaux. Des rires et des larmes, des colères et mille et unes conneries, parce qu'ils en avaient faites, des conneries. C'était drôle au début d'embrouiller tout le monde et de faire croire que l'un était l'autre et que l'autre était l'un. Il l'idolâtrait presque. Jonas, l'enfant parfait. S'il savait... Que les parents sont à des centaines de kilomètres de là, qu'ils ne s'en sont jamais remis et qu'il ont eu un autre fils pour remplacer celui qu'ils ont perdu. Et finalement, Jonas s'accrochait aussi à lui. Bart s'accrochait à son frère par colère, son frère par désespoir. Deux comportements qui les caractérisaient toujours si bien. Y'a même plus de tentative de respirer correctement, de rester dans la réalité et de contrôler ses émotions. Le tourbillon s'est déchaîné, entraînant dans son sillage une tempête qu'il n'arrêtera certainement pas. « Va te faire foutre. » C'est sorti sans qu'il n'ait eu le temps d'y réfléchir. « Lâche-moi. » grogne-t-il alors qu'il le repousse et qu'il s'écarte pour être le plus loin possible de lui et de son putain de corps vivant. Il voulait pas le voir vivant. Il préférait quand il était mort. « Je ne suis plus Bart, et j't'emmerde, toi et ta putain de vie. » Il a les larmes qui montent aux yeux et il se sort une cigarette de son paquet, les mains plus que tremblantes. Quand il la porte à ses lèvres et qu'il tente de l'allumer, il se sent faible et fort à la fois. Le feu consume tout à coup le premier bout de la clope et il en arrache une taffe qui lui fait beaucoup de bien, plus à son esprit qu'à son corps. Il lui tourne le dos quelques instants, puis décide de lui faire face à nouveau. Il lève la main, et il le claque aussi violemment qu'il en meurt d'envie. Juste comme ça, parce que c'est plus simple de se foutre sur la gueule comme des gamins. « Tu peux me supplier autant que tu veux, j'en ai rien à foutre ! T'es mort, ok ? T'aurais dû me laisser crever. T'as toujours été le plus con. J'te déteste, Jo ! » Il hurle désormais à plein poumons entre ses sanglots incontrôlables. Son bras ne s'arrête plus de trembler et il a l'impression de revivre la douleur du passé en mille fois pire. Ses poumons le font souffrir, et il plaque sa main contre sa putain de cicatrice qu'il aurait préféré oublier. Oublier tout ça. Il tombe sur les genoux, incapable de relever la tête, parce qu'il vient de comprendre la bombe qui vient d'exploser en lui. Il a toujours voulu que son frère soit vivant, et Dieu a osé l'écouter.
Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Ven 9 Avr 2021 - 11:33
Retrouver son frère -enfin !- c'était replonger dans un passé qu'il pensait définitivement perdu et toucher du bout des doigts sa vie qu'il n'était plus en droit d'avoir. Parce que Jonas Kirke était mort et enterré. Alors il s'accrochait tant qu'il pouvait à son frère et à ce morceau de soi-même qui n'était plus lui. Et pourtant, tout revenait plus fort que jamais. Son frère... Et les mots qui coulaient de ses lèvres comme un torrent qui se serait ranimé après une forte pluie d'été. "Non toi, vas te faire foutre !" Et pour une fois il n'eut même pas le réflexe de rentrer la tête dans ses épaules attendant la traditionnelle baffe reçue derrière la tête. Et qui fut rapidement suivi d'un ferme et définitif "Non." Il y était, il y restait. Il avait déjà mis bien trop de temps pour en arriver là. Dans les bras de son frère. Alors non, il ne le lâcherait pas. Plus jamais. Sauf qu'il y avait ce qu'on voulait, et ce qu'on pouvait avoir. Et bientôt le corps de Bart lui glissa des mains alors que c'était son frère lui-même qui le repoussait. Et ça faisait mal. Un putain de déchirement qui lui coupait le souffle alors qu'il restait là les bras ballants, à cuire sous ce soleil de plomb. ...j't'emmerde, toi et ta putain de vie. Qu'est-ce qu'il pouvait répondre à ça ? L'angoisse de ne rien trouver lui tenaillait la gorge alors que son cerveau tournait à plein régime dans le vide. Parce qu'il devait lui répondre quelque chose alors qu'il regardait horrifié Bart lui tourner le dos. Et avant qu'il ne parte et qu'il le perde à nouveau, et cette fois-ci à jamais... Sauf que là c'était juste le vide, le blanc alors qu'il sentait les secondes lui filer elles aussi entre les doigts. Ou plutôt, son cerveau ne s'accrochait qu'à une chose. Bart pouvait encore fumer. Et c'était la plus belle chose qu'il ait jamais vue. Son frère plein de vie qui tirait une taf sur sa clope... Il imaginait sans mal les saveurs qui se déployaient sur le palais alors que la fumée se propageait dans les bronches jusqu'à parvenir aux poumons. Et le plaisir que ça devait être alors que la nicotine atteignait le système sanguin et le cerveau... Lui ne pouvait plus. Mais ça n'avait pas d'importance puisque Bart pouvait encore en profiter...
Le coup rude et sanguin, le prit totalement par surprise et l'espace d'une fraction de seconde il crut qu'il allait à nouveau être traîné d'une poigne solide jusqu'à la cave... Sa joue cuisait comme jamais mais il était toujours là sur ses deux jambes et non pas tiré par le col à descendre les escaliers et c'était... bien. Ou pas. Parce que ce ne fut pas de voir Bart lui jeter toute sa colère à la figure qui fut violent, ni même ce qu'il lui disait parce qu'il avait raison. Sauf pour le fait de ne pas l'avoir laissé crever, ça tout son être se révulsa aussitôt contre cette idée, et d'autant plus lorsqu'il le vit s'écrouler. Parce que c'était bien ça qui était le plus terrible, assister impuissant à la douleur qu'il infligeait à son frère. Parce que c'était de sa faute si Bart était là à terre, hurlant et pleurant toutes les larmes de son corps... Parce qu'il avait raison, il était censé être mort... Et il était sans contexte le plus con des deux oui, à vouloir revenir dans une vie où il n'avait plus sa place. Et alors même qu'il en avait une autre, qu'il haïssait plus fort que jamais en cet instant. Jonas Kirke ou Joe Davis, il n'était plus qu'un usurpateur, des deux côtés...
Et ça le mit dans une rage dingue parce que ce n'était pas juste ! C'était son frère qui était là, merde ! Son autre partie de lui-même, la plus belle... Et la plus vivante et qui hurlait à mort. Alors que c'était lui le mort dans toute cette histoire ! Bien déterminé à se faire reconnaitre comme non-mort, ou mort revenu à la vie, ou quoi que ce soit d'autre du moment que c'était quelque chose !, il alla se planter devant lui, présentant à son regard ses Vans défraîchies mais si confortables. Alors que tapotant son pied du sien pour attirer son attention, il demanda sans se préoccuper de sa crise existentielle parce que question crise existentielle, il doutait que quelqu'un puisse le battre à ce niveau-là. "Hey ! C'est quoi ton nouveau nom alors si c'est plus Bartosz ? Et pourquoi t'as changé, t'es pas mort, toi !" Pour soudainement se radoucir parce que Bart n'y était pour rien. Et que ça faisait vraiment trop mal de le voir comme cela. Il s'accroupit à sa hauteur, son front touchant le sien alors qu'il lui disait. "Hey... Arrête de chialer, je suis là maintenant. Et puis, je t'aime moi. C'est pour toi que je suis revenu, tu sais." Et il pouvait bien le frapper tant qu'il voulait et lui hurler toutes les horreurs de la Terre, il resterait là. Foi de... Jonas Kirke ? Joe Davis ? Merde, il savait plus... Foi de son frère jumeau ! Voilà, ça c'était bien.
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Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Dim 2 Mai 2021 - 9:51
De l'autre côté de la rue...
Entendre son frère jurer de la sorte lui rappelait combien le temps avait réussi à les éloigner. Ils n'étaient plus les mêmes qu'avant, raison pour laquelle Judas refusait de croire que Jonas était bien vivant. Alors qu'à l'époque le tatoué aurait baissé la tête et acquiescé, aujourd'hui, ce n'était clairement plus possible. Il lui en voulait trop pour tout. D'avoir voulu mourir pour le sauver lui, d'avoir sacrifié sa vie pour lui. On lui avait arraché un poumon et pourtant il était encore là, s'accrochant à la vie d'un rien. Le blond n'y croyait pas. Il pourrait se barrer en courant, même s'il ne pouvait pas se cacher à plus de quelques rues de là, ce serait déjà ça de pris. Il aurait pu aussi ne pas s'approcher et ne jamais entamer la conversation. Il n'aurait jamais su, et il n'aurait jamais eu autant mal. Finalement, il avait réussi à faire son deuil, à sa façon, et il était bien comme ça. Si, plus jeune, il lui en avait voulu de l'avoir laissé vivre, aujourd'hui, il n'avait plus le droit pour ça. Parce qu'il avait une famille, désormais. Ainhoa, Laël, Noa, et son futur enfant. Pourtant, son ego était trop fort pour remercier son frère d'un tel cadeau. Si ça se trouve, lui aussi avait tout ça, en mieux. Au fond, ils n'étaient pas tant perdants. A terre, il était bien, c'était sa place désormais. Entre les larmes et la colère, les émotions étaient beaucoup trop fortes. Il avait toujours été un sensible, dans le fond, et il ne l'avait jamais vraiment caché. Lui, si calme d'habitude, si réfléchi, avait enfin pété les plombs. Redressant alors la tête, il regretta de ne pas avoir la force de mettre à nouveau de la distance entre eux. « Pourquoi j'ai changé ? » Sourcils froncés, il se demande si Joe est sérieux. « Judas. » souffla-t-il, résigné. Jo n'allait pas lâcher l'affaire, alors autant lui dire tout de suite. « Mais je voulais pas que tu reviennes. » Il détourne le regard, presque honteux. Autour, les passants continuent leur chemin, même si les regards curieux s'accumulent. Faut-il intervenir ? C'est ce qu'ils se demandent, mais aucun ne vient sauver Judas de la merde dans laquelle il est. « Parce que j'étais plus rien sans toi. Bart n'aurait jamais pu vivre sans Jo, mais j'ai pas eu le courage de me foutre en l'air. Parce que t'as été con, j't'ai entendu demander à maman de me sauver à ta place ! » Mâchoire serrée, il passe une main dans sa propre chevelure emmêlée. C'était dur de laisser sortir tout ça. Baissant la tête, il ferma les yeux, comme si ça allait l'apaiser. « J'ai essayé de prendre ta place, mais ça marche pas comme ça. Ce sont toujours les pires types qui vivent. Et j'me suis barré, j'suis resté à la rue le temps que je trouve qui j'étais. Judas. Le traitre de Dieu et de ses compères. Bart est mort, lui aussi. » Immobile, la clope pendue au bord des lèvres, il ne sait pas quoi ajouter de plus. Il tremble, secoué de spasmes et de sanglots. Il avait imaginé le trouver un jour au paradis et de régler leurs comptes comme ça, pas ici, sur Terre et bien vivants.
Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Lun 3 Mai 2021 - 1:56
Qu'il veuille l'admettre ou non, ce connard de Sanders avait eu raison sur toute la ligne. Une nouvelle fois. Revenir avait été une erreur. Après tout si le morts pouvaient revenir à la vie, ça se saurait ! « Mais je voulais pas que tu reviennes. » Ca avait au moins le mérite d'être clair. Ca faisait foutrement mal mais au moins les choses étaient dites. C'était un Dégage ! Je veux plus te voir ! T'es plus mon frère ! Et ce n'était d'ailleurs même plus Bartosz. Bart... Mais Judas. Un nom clairement pas choisi par hasard alors qu'il en écarquillait les yeux... Ok. Judas donc. Bart allait lui manquer.
Mais surtout, il encaissait. Comme il pouvait. Toutes ces années à croire, et à espérer pour finalement, apprendre qu'il n'était pas désiré et qu'il serait sans doute même souhaitable qu'il reparte d'où il venait... Dans sa cave ? Dans ce mausolée où il avait été enfermé vivant pendant des années... Alors que la chaleur plombante n'aidait pas et qu'il sentait des vertiges le prendre. Que ce soit par la chaleur ou les émotions bien trop violentes, voire le manque de sucre ? Mais il n'avait de toute façon pas le droit de s'écrouler alors que tout ça était de sa faute et que le « Mais je voulais pas que tu reviennes. » de son frère se gravait dans son esprit. Mais avant il devait comprendre. Judas... Et expliquer. "J'étais empalé avec un truc en fer, ça m'a perforé le pancréas et c'est passé à un cheveu que l'estomac ne soit lui aussi éclaté... J'avais pas de chance de survie, et d'ailleurs je suis mort. Alors... C'était la chose logique à faire. Et tu aurais fait pareil à ma place." Parce que la question ne se posait pas, Bart l'aurait fait de la même façon. Tout comme Judas parce que malgré le changement de nom, il restait la même belle personne que son frère avait toujours été. "Bien sûr que non, t'es pas un traitre. Viens, il faut qu'on se mette à l'ombre." Avant qu'il ne s'écroule réellement à terre, ce qui n'aiderait en rien Bart. Judas. Dieu, qu'il détestait ce prénom ! "Et de toute façon, Judas a été pardonné. Et je te pardonne aussi." Aucune idée de ce qu'il devait lui pardonner mais il n'était plus trop en état de réfléchir. Il lui fallait -et de toute urgence- trouver un peu de fraîcheur !
Combattant ses vertiges, il se redressa et tira son frère pour le lever du sol avec une poigne loin d'être aussi assurée qu'il l'aurait voulue. Tout en attrapant au passage ce qui lui assurait sa survie au quotidien, le sac contenant son insuline. "Faut qu'on trouve un endroit frais et après on pourra... J'en sais rien." Bel aveu d'impuissance. Mais son frère ne voulait pas de lui... Et qu'est-ce qu'il pouvait faire contre ça ? Si ce n'est lui demander pardon, pardon d'être encore vivant et de venir le déranger dans sa vie. "J'te demande pardon, j'aurais jamais dû revenir. C'était égoïste de ma part. J'aurais dû écouter Sanders." Et Dieu sait s'il détestait l'idée de donner raison à Sanders. Et alors qu'il n'avait fait que suivre Scarlet, à la différence que Scarlet avait toujours été vivante, elle !
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Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Jeu 13 Mai 2021 - 10:42
De l'autre côté de la rue...
Il n'était clairement pas obligé de préciser ce qu'il lui était arrivé, il se serait contenté d'un simple miracle pour explication. Parce que chaque détail lui rappelait ce foutu accident gravé dans sa mémoire. Cet instant suspendu dans l'éternité qui avait effacé tous les souvenirs qui avaient suivi. Un relent se présenta à lui mais par chance, il ne dégobilla pas comme il l'avait fait avec Scarlet. Le savait-elle ? Il avait l'impression que ce n'était pas un hasard s'il les avait revus tous les deux, aussi peu de temps l'un après l'autre. « Oui, mais je me serais débrouillé pour vraiment crever après. Ou revenir à la maison. » Personne ne saurait jamais si c'était vrai. Il n'aurait pas eu le courage de se finir tout seul, alors retourner à Bowen ? Il en aurait voulu à Jonas d'avoir été épargné du pire. Au fond, aucun des scénarios n'était le meilleur. Si, un seul aurait pu les aider, qu'ils ne fument pas autant de cannabis que ça. Qu'ils ne se cassent pas en plein désert complètement défoncés et qu'ils ne fassent pas autant de conneries. Lèvres pincées, il regrette. Il ne sait pas trop quoi, mais il regrette. « On ? » Dans son esprit, ce "on", ce "eux, ce "nous", il n'existait plus depuis longtemps. Même si le soleil cognait fort, et qu'il en avait mal au crâne, il n'avait pas envie de frais. Il avait envie de rester à terre comme un con, et c'est tout. Il ne sait même plus quoi dire. Il laisse Joe faire, accepte de se relever sous sa poigne, impuissant lui aussi. Il le suit lentement vers ce coin d'ombre au coin de la rue, mais il se sent presque ailleurs, zombifié. « Ouais, j'sais pas qui c'est mais t'aurais dû l'écouter. » Serrant la mâchoire, le tatoué regarde autour de lui, comme s'il revenait enfin à la raison après tout ce temps. Poussant un long soupir, il posa sa main tremblante sur l'épaule de son frère en l'observant. Il avait l'air si faible, bien plus qu'auparavant. « J'ai besoin de temps, ok ? » Butant sur les mots, il était incertain. « Vas pas voir papa et maman. Leur fait pas le même coup que moi. Ils... » Il ne sait même pas s'il doit le dire. « Ils ont refait leur vie, ils ont un autre enfant, on a un frère. » Il sait qu'avouer ce détail est un nouveau coup de couteau en pleine poitrine, et il ne sait pas s'il le fait par vengeance ou pour l'effrayer et l'empêcher de faire cette connerie de se montrer vivant, mais il le fait.
Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Ven 14 Mai 2021 - 7:03
Les retrouvailles ne se déroulaient en rien comme il l'avait tant de fois imaginé. Et pourtant, il en avait inventé des scénario différents ! Mais tous systématiquement avaient pour point commun la fin heureuse où ils se tombaient dans les bras, en larmes ou pas d'ailleurs. Mais... pas comme ça, non. Parce que là, c'était lui qui avait envie d'en pleurer. Ou d'hurler, au choix. Et c'est ce qu'il se retrouva à faire alors que les mots sortaient d'eux-mêmes de sa bouche. "J'AI ESSAYE ! TU CROIS QUOI ? QUE C'ETAIT UNE PARTIE DE PLAISIR, PEUT-ETRE !?" Soudainement essoufflé après ce soudain éclat qui l'avait pris par surprise, il dut reprendre son souffle alors qu'il laissait la tension retomber.
Alors oui, "On" ! Mais ce fut surtout la suite qui le crucifia sur place alors que pourtant il avait trouvé son coin d'ombre et sa toute relative fraîcheur. Vite oubliée face à ce que son frère venait de lui dire alors qu'il serrait les poings pour tenter de se contenir. Pourquoi devait-il passer par ça ? Alors qu'ils s'étaient retrouvés et qu'il n'y aurait dû y avoir que cela qui aurait dû compter ! "Ecouter Sanders ?! Plutôt crever !" le fiel contenu dans ses paroles camouflait mal une certaine vérité, parce qu'il ne le faisait que trop que de l'écouter. Mais ce n'était pas Judas qui allait comprendre ça, pas après lui avoir demandé de vraiment crever cette fois-ci.
Il était mal mais il pouvait encore comprendre qu'il ait besoin de temps. Ils en avaient besoin tous les deux. Peut-être qu'une fois les choses assimilées, ça irait mieux ? Et qu'ils pourraient, peut-être pas se tomber dans les bras mais... discuter ? Il voulait y croire. Il en avait besoin. C'était comme se raccrocher aux branches, de façon aussi désespérée que pitoyable. Mais la situation était tellement ubuesque qu'on pouvait presque considérer ça comme normal... Et il suffisait juste de s'en convaincre pour rendre ça réel. Sauf que tous ses beaux efforts pour garder pied s'envolèrent en éclats lorsque Judas l'acheva. Ils ont un autre enfant, on a un frère... Ce n'était pas possible, n'est-ce pas ? Il devait rêver. Il ne pouvait pas vivre ça ? Bizarrement, les mots tournoyaient autant dans son esprit sans y trouver d'accroche que le monde le faisait sous ses pieds. Ils ont un autre enfant, on a un frère... Qu'était-il censé dire, ou faire, après ça ? Il avait été remplacé. Juste remplacé. Remplacé et oublié, au point d'en être devenu indésirable, forcément. Il lui fallait donc retourner à son anonymat et à sa cave. Assumer pleinement le fait d'être maintenant Joe Davis, et que Joe Davis. Jonas Kirke était mort. Il recula d'un pas, sonné par la réalisation alors qu'il murmurait d'une voix sourde. "Désolé... désolé..." Que pouvait-il dire d'autre ? Rien. Et que pouvait-il faire, si ce n'est retourner à son hôtel pour s'enfermer dans sa chambre ? Loin de ce soleil qui tapait décidément trop fort, et surtout loin de ce frère qui n'avait plus de frère que le souvenir... Ils ont un autre enfant, on a un frère..."Je... J'irai pas... Je promets, j'irai pas les voir. Faut que... je rentre." Avant qu'il ne s'écroule par terre. Le pas mal assuré, il se détourna se moquant cette fois-ci de marcher à l'ombre ou même de son sac contenant l'insuline qu'il avait perdu il ne savait où. Il n'était d'ailleurs même pas sûr de la direction qu'il prenait mais là aussi, il s'en moquait. Peut-être que ça le ferait crever plus vite, histoire de remettre les choses à leur place ?
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Sujet: Re: De l'autre côté de la rue... [Judas] Ven 2 Juil 2021 - 9:01
De l'autre côté de la rue...
Ce cri était un pur déchirement, et il ne voulait pas l'entendre. Lèvres pincées, il se surprend à penser qu'il s'en veut d'avoir des mots aussi cru envers celui qui était sa seule raison d'exister quand il était plus jeune. Il n'avait pas pensé une seule seconde que Joe aurait préféré être mort. Dire qu'il l'avait voulu vivant et maintenant qu'il l'avait, il le voulait mort. Et comme pour lui faire payer tout ce qu'il venait de lui faire vivre, le tatoué finit par porter le coup fatal à leurs mots. Il balance la vérité sur leur famille et la naissance d'un frère qui n'a toujours été là que pour remplacer l'enfant perdu plus de dix ans après. Il prend soin de garder sous silence que lui aussi l'avait mal vécu, car leur mère n'était plus aussi pimpante que lors de sa jeunesse. Une nouvelle grossesse aurait pu lui être fatale. Dire qu'il lui avait fallu des années pour comprendre sa connerie... « Putain, Joe... Joe ! » Mais son frère ne l'écoutait plus et il le voyait dans son regard. Il avait enfin de s'excuser pour tout ce qu'il venait de lui faire subir, mais c'était plus fort que lui, son ego lui en empêchait. Soupir aux lèvres, il se résigna. Il leur faudrait du temps pour se remettre de tout ce qu'ils avaient vécu et pour à nouveau rire comme avant. Et il aurait pu le retenir, mais il n'avait pas réussi la première fois, et il ne réussirait pas non plus cette fois. Le voir lui tourner le dos et tituber, c'était comme revivre une seconde fois son décès. L'homme qui s'était tenu face à lui quelques minutes plus tôt n'était plus son frère mais un imposteur, tout comme Judas l'avait lui-même été il y a quelques années. Refusant de voir le monde comme il est, il fini par détourner le regard lentement, avant que son corps ne décide de le suivre également. Ses pieds se mettent à marcher dans la direction opposée alors qu'il est complètement déboussolé, son monde venant de s'écrouler.