Histoire éternelle (Thomy)

En acceptant ce dîner avec Thomas, Romy était passée par toutes les étapes. D'abord, le regret d'avoir fait une erreur. La culpabilité, aussi, à l'idée de prendre le risque de tout détruire en une soirée. Puis les jours avançant, l'excitation avait remplacé ses sentiments négatifs. Elle ne pouvait renier ces petits papillons dans le ventre, même si ce tête-à-tête l'effrayait. Et s'ils n'avaient rien à se dire ? Et s'ils se disputaient ? Et si, au contraire, elle craquait de nouveau pour lui ? Il était là, le problème. Romy avait peur de se laisser charmer, d'abdiquer, de baisser les armes pour qu'il l'atteigne de nouveau. Le jour J, l'appréhension était de mise. Elle mit toute sa garde-robe en bazar afin de trouver la tenue idéale. Il ne fallait pas que ce soit trop charmeur, mais elle voulait quand même qu'il la trouve jolie. Il fallait juste que ce soit fait avec subtilité pour ne pas montrer qu'elle avait passé des heures à se préparer pour lui. Elle avait donc opté pour une robe cache-coeur d'un rouge bordeaux, qui mettait sa taille de guêpe en valeur. Ses cheveux nouvellement roux flamboyaient, contrastaient avec sa peau d'ivoire et cassaient le côté petite fille sage qui lui collait à la peau. Malheureusement, elle opta pour des chaussures plates, à cause de cette attelle qui lui emprisonnait toujours la cheville.

19h35 précises, et alors qu'ils avaient rendez-vous à 20h, elle arriva au petit restaurant qu'ils aimaient tant, à pied, puisqu'elle habitait à deux pas d'ici et qu'avec sa cheville, elle était encore incapable de conduire. Elle était arrivée avec un peu d'avance, pour se laisser un peu de temps pour déstresser. Mais cela eut l'effet contraire. Et s'il ne venait pas ? Un bref instant, cette idée semblait l'arranger. Mais elle connaissait Thomas et elle savait qu'il ne ferait jamais cela. Pas manqué. Le jeune homme arriva peu de temps après elle. La jeune femme esquissa un sourire, attendant qu'il soit à sa hauteur pour lui dire : « Ah toi aussi, tu es en avance ? » Cela montrait peut-être qu'ils avaient un peu trop d'engouement face à ce rendez-vous. Elle le salua en lui faisant une bise puis attendit qu'il s'installe. « Tu as déposé Arthur chez Jamie ? Il ne t'a pas posé trop de questions ? » demanda-t-elle en riant.

Ce repas avec Romy était la chose des plus importantes ces derniers temps. Tu avais envie de tout faire bien, de ne pas faire les choses de travers. Il fallait que tu sois bien, propre sur toi et que tu présentes bien. En réalité, tu avais l’impression de revivre ce premier diner que vous aviez fait tous les deux, dans un restaurant de Los Angeles après votre présentation d’histoire totalement foireuse. Tu l’avais invité pour t’excuser d’avoir fait un peu n’importe quoi pendant cet exposé. T’avais enfilé une belle chemise blanche, avec ta veste de costume et un jean noir pour ne pas en faire des caisses. T’avais passé tellement de temps devant le miroir qu’Arthur t’avait demandé si t’avais un rendez-vous galant. Baragouinant une excuse qu’il n’avait bien sûr pas gobé, tu l’avais fais vite monter dans la voiture pour que tu l’emmènes chez sa tante. Jamie t’avait encore une fois fait la morale mais elle t’avait laissé assez tranquille, contente de passer la soirée avec son neveu. 

Tu avais garé ta voiture sur le parking du restaurant. Il était 19h40, c’était pas encore l’heure de retrouver ta blonde. Mais tu n’allais pas attendre seul dans la voiture. Alors tu t’étais dis qu’attendre dans le restaurant, c’était le mieux. Mais ne fut pas ta surprise de voir que l’enseignante était déjà sur les lieux. Tu ris légèrement avant de lui répondre. « J’avais peur d’être en retard » dis-tu en riant encore une fois. T’étais surtout très stressé, comme un enfant de 14 ans qui a son premier rencard. Pourtant, vous vous connaissiez par coeur tous les deux. Une fois que tu avais salué la jeune femme en lui faisant la bise, tu t’assis après elle. « J’lui ai dis que j’avais un rendez-vous avec Zak pour une soirée entre gars » avouas-tu à la jeune femme. « Mais il m’a demandé pourquoi je mettais du parfum pour Zak, c’est là qu’il m’a perdu » continuas-tu en riant légèrement. Tu posais un regard sur la jeune femme. « Mais promis, j’ai rien dis et Jamie non plus » dis-tu avec un sourire. T’avais fais promettre à ta soeur de ne rien dire, même si elle était contre l’idée de ce rendez-vous, comme la moitié de votre entourage d’ailleurs. « Tu es très belle ce soir » dis-tu avec ton sourire charmeur. Mais c’était vrai. De toute façon, tu la trouvais belle dans n’importe quelle circonstance.

Elle n'était décidément pas la seule en avance. En voyant Thomas arriver plus tôt, lui aussi, un sourire en coin s'était affiché sur les lèvres de Romy. Et elle avait laissé traîner son regard sur lui quelques secondes, quelques longues secondes, se rendant compte qu'elle n'était pas insensible à son charme. Elle avait cru qu'elle s'en était détachée, mais la photo qu'il avait mis sur Instagram lui avait montré le contraire. Il y avait encore ce trou béant dans son coeur, causé par le manque de Thomas. Pendant toutes ces années, elle s'était contentée de mettre une compresse de gaze dessus, fine et légère, lui permettant de se voiler la face et croire qu'elle l'avait oublié. Le stress qu'elle ressentait aujourd'hui, l'appréhension et les petits papillons dans le ventre montraient que ce n'était pas le cas. Alors qu'elle le taquina sur le fait qu'il était en avance, elle rit avec lui en entendant sa justification : "Ne t'en fais pas, si t'étais arrivé avec un peu de retard, je t'aurais attendu. Cinq minutes au moins. Après j'aurai fui en courant." Ou presque. Elle le laissa s'installer à ses côtés, puis posa quelques questions sur Arthur. Elle voulait savoir ce qu'il avait sorti comme bobard à leur fils. Parce qu'elle le connaissait, Arthur, ce gamin avait un radar pour détecter les mensonges ! La soirée entre gars était une bonne excuse, facile à gober. Mais en entendant la suite des mots, Romy éclata de rire : "C'est bon, tu es foutu ! Il va croire que tu as vu une femme ! Attends-toi à ce que demain, il te sorte l'excuse du j'ai oublié mon devoir d'histoire chez maman." Elle regrettait l'époque où il n'était qu'un nourrisson tout mignon, qui passait son temps à dormir. Maintenant, il butinait autour d'eux comme une abeille à l'affût du moindre détail qui laisserait croire à une nouvelle histoire d'amour entre ses parents. Son sourire s'atténua quelque peu, hochant la tête quand il lui affirma que Jamie ne dirait rien. "Je suppose qu'elle n'était toujours pas d'accord avec le fait que l'on se voit ce soir ?" Elle ne pouvait pas lui en vouloir, à Jamie. Elle était sûrement la plus sensée dans l'histoire. Mais Romy se fichait de ce qu'il y avait du sens ou non. Elle avait besoin de voir Thomas. C'était viscéral. Son sourire réapparut quand il la complimenta. "Beau parleur." se contenta-t-elle de répondre, replaçant une mèche rousse flamboyante derrière son oreille, les joues légèrement rosies. "Mais toi aussi, tu es très beau." avoua-t-elle, en posant ses yeux verts sur lui. Elle resta silencieuse un moment, ses doigts jouant nerveusement avec la serviette de table. "Rassure-moi, je ne suis pas la seule à être stressée par ce repas ? ça fait tellement bizarre de se trouver là, face à toi. Mais au fond... au fond, ça me fait du bien." continua-t-elle sur le ton de la confidence.

Finalement, tu n’étais pas le seul à être en avance à ce rendez-vous. Romy était déjà là, avec sa nouvelle chevelure rousse flamboyante, tu ne pouvais pas la rater. Un sourire se dessine sur ton visage au moment où tes yeux se portent sur la jeune femme. Tu arrivais à sa hauteur, encore plus nerveux que lorsque tu étais dans ta voiture, ta clope au bec. « J’ai bien fais d’arriver en avance alors » dis-tu en soufflant de soulagement avant de rire. Tu savais qu’elle ne se serait pas échapper, vous auriez échangé par messages avant de mettre un terme à ce rendez-vous. Heureusement, vous étiez tous les deux là et personne ne s’était défilé. Ton ex-femme te demandait ensuite comment ton fils avait prit cette soirée. Prétextant une soirée avec ton meilleur ami, tu avais finalement fait la boulette de mettre du parfum et de bafouiller. « Il va préparer ma valise pour venir chez toi plutôt » ris-tu en écho avec la rousse. Il était sûr que ton fils allait te poser des questions demain, et que tu devrais lui mentir chose que tu détestes faire. Mais c’était important, pour ne pas qu’il ne fasse pas de conclusions hâtives à ce rendez-vous avec sa mère. Il a tellement envie de vous voir ensemble qu’il serait capable de s’immiscer dans ce rencard pour vous emmener l’un vers l’autre. « Non, j’ai eu droit à la morale, comme par message. Un jour, elle va me tuer » dis-tu en riant un peu nerveusement. Tu n’en voulais pas à Jamie, vous avez chacun des idées différentes sur la vie. Mais elle était de l’avis de tout le monde, elle ne comprenait pas pourquoi tu faisais ça, pourquoi tu voulais reconquérir Romy alors que tu lui avais fait du mal, énormément de mal. « Tu devrais le savoir avec le temps » dis-tu en faisant un clin d’oeil. Tu souris lorsque les joues de l’enseignante prenaient une teinte rosée. « Merci, mais j’peux pas être mieux que toi » dis-tu avec ton plus beau sourire. Tous les deux l’un en face de l’autre, vous étiez nerveux, ça se voyait et tu cachais un léger rire de gêne, lorsque Romy te demanda si tu étais stressé aussi. « J’ai l’impression qu’on revis notre premier rendez-vous. Tu sais ce resto thai où on était allé après notre exposé d’histoire ? Bah j’suis dans le même mood, les boutons sur le visage en moins » dis-tu avec toujours ce léger rire gêné.

"Oui tu as bien fait, sinon j'aurais été impitoyable !" Romy rit joyeusement face à ses mots. Mais au fond, cela la rendait heureuse de le voir arriver en avance. Cela signifiait qu'il était tout aussi pressé qu'elle à l'idée d'avoir ce rendez-vous, aussi stressant que cela pouvait être toutefois. Cherchant à savoir ce qu'il avait sorti comme excuse à leur fils, elle comprit très vite que le parfum de Thomas l'avait grillé sur ses véritables intentions. Arthur allait se faire tout un tas d'idées. Il allait peut-être croire que Thomas voyait une autre femme et donc, il redoublerait de stratagèmes pour rassembler encore plus ses parents. "Si je vois une valise dans le salon, je comprendrais qu'Arthur est passé par là, alors." Elle esquissa un sourire, mais une chose était certaine : elle était bien contente de ne pas avoir Arthur cette semaine. C'était Thomas qui allait se récolter toutes les questions demain matin. Et sans doute allait-il aussi avoir les questionnements de Jamie. Jamie qui lui avait fait une leçon de morale. "Oh non, elle ne te tuera pas... Elle te rappellera juste que tu fais toujours n'importe quoi." Pour quiconque de sensée, ce repas entre les deux ex était peut-être du n'importe quoi. Mais Romy s'en fichait. Elle avait besoin d'aller jusqu'au bout. Elle avait besoin de voir si la flamme était encore là ou s'il valait mieux clore le chapitre une bonne fois pour toutes. Les compliments de Thomas firent néanmoins leur effet sur la rousse, qui sentit ses joues s'échauffer. "Que tu es un beau parleur ? Oh mais je le sais déjà ! Mais malgré tout, ça marche." Elle les aimait, ces petits compliments. Cela lui redonnait confiance. Evidemment, elle lui retourna le compliment, Thomas jouant le modeste. "Oh arrête, même l'une des mes amies m'a rappelé à quel point mon ex-mari était canon !" le taquina-t-elle, tout sourire. Mais malgré ces plaisanteries, le stress était là. Parce qu'elle ne savait pas comment la conversation allait dévier, parce qu'elle savait qu'ils allaient devoir parler des choses qui fâchent. Alors que Thomas lui confia que ça lui rappelait leur premier rendez-vous, les yeux de Romy se teintèrent de nostalgie. "Le resto thaï où tu as fini avec une intoxication alimentaire ?! Oui, je m'en souviens bien. Je déprimais toute seule dans ma chambre parce que je n'avais pas de nouvelles de toi et que je croyais que tu ne voulais plus me voir." Elle sourit, attendrie, avant de reprendre : "C'était le bon temps. Même avec les boutons en plus sur la figure." Elle regarda un instant un groupe de personnes qui entrait dans le restaurant, avant de reposer son regard sur Thomas : "Tu crois qu'un jour, on retrouvera cette sérénité ? Cette... alchimie ?"

Tu ris de bon coeur avec la blonde. Ca faisait du bien, t’avais l’impression de revenir à cette époque où vous filiez tous les deux le grand amour à Los Angeles, entouré de votre merveilleux fils. Malheureusement, ce n’était pas le cas, et tu aurai préféré que ça le soit. Mais c’était ta faute si vous en étiez là aujourd’hui. D’ailleurs, votre fils voulait que vous reviviez ces moments là, d’être heureux tous les trois mais à Bowen cette fois. « Ou si tu le vois emballer tes affaires » dis-tu en riant légèrement. Il était prêt à tout ce gamin, et il avait surement cramé ce rendez-vous ce soir. Et demain, tu devras lui expliquer ta soirée et lui mentir. T’aimes pas ça, t’as pas envie de lui mentir, mais t’es obligé, pour le bien de cette relation avec sa mère. Préserver cette relation, serait plus approprié. Il n’y a rien pour l’instant, mais tu ne veux pas que ça mette la puce à l’oreille de votre fils. « Elle me dit ça depuis qu’elle sait parler » ajoutas-tu avec un rire. Jamie avait surement raison, c’était pas une bonne idée de vous retrouver tous les deux avec Romy, en face à face. Mais t’en avais envie. Après tout, tu étais toujours aussi amoureux de ton ex-femme, et t’avais envie de lui montrer, de lui prouver. Tu lui faisais des compliments, qui étaient vrais. Mais elle te rappela le fait que tu étais un beau parleur, elle le savait depuis qu’elle t’avait rencontré, t’avais toujours été comme ça. Surtout lorsque tu l’avais dragué. Un sourire de vainqueur s’affichait sur ton visage lorsqu’elle t’avoua que tu étais beau parleur mais que tes paroles marchaient toujours, tu le voyais sur ses joues qui étaient légèrement roses. Mais tu ne relevais pas. « C’est moi qui vais rougir maintenant ! » dis-tu avec un léger rire gêné. « Moi je veux pas que mes amis te voient, sinon j’suis foutu » dis-tu en reprenant un semblant de sérieux. Tu ne voulais pas qu’on te dise : mais pourquoi t’as trompé cette femme ? Qu’es-ce qu’il t’es passé par la tête ? Elle est magnifique, du coup elle est libre ? NON. Rien de tout ça. Tu ne voulais pas que Romy plaisent aux hommes de ton entourage, c’était très égoïste mais tu la voulais encore pour toi tout seul. Vous vous rappeliez votre premier resto ensemble, après votre exposé foireux en histoire. Tu avais fais une intoxication alimentaire, et ça t’avait foutu dans le mal pendant quelques jours. « Pendant ce temps là, j’avais la tête dans les toilettes et je me disais que plus jamais t’aurais eu envie de me voir » ajoutas-tu sur un ton nostalgique. Elle avait raison, c’était le bon vieux temps. « C’est vrai que c’était le bon temps » dis-tu attendrit à ton tour. Lorsqu’elle te demandait si tu pensais que vous alliez retrouver cette alchimie entre vous, tu esquissais un mince sourire. « J’espère, j’ai envie qu’on retrouve ça… j’espère que toi aussi » dis-tu en te pinçant la lèvre inférieure.

"Je te rappelle que ma maison est à deux pas de l'Arcade Game, donc non, Arthur fera tes  bagages." rétorqua-t-elle en riant, mais l'un et l'autre savaient à quel point l'arcade game était le repaire de leur fils, là où il se retrouvait avec ses amis. Elle adressa un large sourire à Thomas, amusée par leurs plans sur la comète. Ils étaient clairement dans le turfu. Il y avait pourtant tout un tas de raisons qui les ramenaient à la réalité, dont Jamie. Jamie qui n'approuvait pas ce dîner. Peut-être avait-elle raison, peut-être avait-elle tort, mais dans les deux cas, ce dîner était complètement assumé par Thomas et Romy. Ils en avaient besoin. Elle esquissa un léger sourire, hochant doucement la tête : "C'est parce qu'elle protège son grand frère." Romy agissait de la même manière avec ses frères. Et si son frère lui annonçait qu'il allait dîner avec son ex, sans doute Romy aurait aussi dit qu'il faisait n'importe quoi. Mais aujourd'hui, elle était celle qui poussait Thomas à faire n'importe quoi. C'était étrange, ces sourires qu'ils se lançaient, ces compliments qu'ils se disaient. C'était léger, c'était pur, c'était beau. Et c'était peut-être dangereux... Face au compliment de Romy, Thomas parla de rougir. "Avant de te faire rougir, toi, il faut y aller..." Thomas avait toujours eu cette assurance qui l'avait charmé dès les premiers instants. Il fallait mettre beaucoup d'énergie pour l'atteindre. Mais elle, elle avait réussi. Elle arqua  légèrement les sourcils à la suite de ses mots, demandant innocemment : "Pourquoi tu ne veux pas que tes amis me voient ? Tu ne me fais quand même pas passer pour une terreur ?!" Elle rit légèrement, mais au fond, il y aurait de quoi. Romy avait beau être douce et bienveillante, il s'avérait qu'elle était aussi têtue et rancunière. Elle faisait ramer Thomas depuis cinq ans, tout de même ! Mais à cet instant, elle abdiquait, appréciant ces souvenirs qu'ils partageaient, le regard brillant. "Je n'attendais qu'un appel de toi. J'avais tellement galéré pour que tu daignes t'intéresser à moi, jeter un regard sur la petite australienne que j'étais." souffla-t-elle avec un sourire. Oui c'était le bon temps. Un bon temps qu'elle aimerait retrouver. Elle voudrait retrouver cette simplicité, cette sérénité, cette alchimie. En entendant que c'était aussi le cas pour Thomas, elle esquissa un sourire. Un sourire qui se figea quand elle entendit ses derniers mots. "Ce serait mentir de dire que non, je n'ai pas envie de retrouver cette alchimie." commença-t-elle à dire. "Mais à côté, il y a aussi la peur, la peur de ne plus être à la hauteur... la peur de souffrir à nouveau." Elle joua nerveusement avec le bout de sa serviette, avant de reporter son regard sur Thomas. "Je peux te poser une question plutôt... intime ?" Elle s'arrêta un instant, avant de reprendre : "Tu... tu as rencontré beaucoup de femmes depuis moi ? Tu n'es pas obligé d'y répondre si tu trouves que c'est déplacé."

Tu ris à la remarque de Romy. « J’avais oublié ce détail là » dis-tu toujours en riant de bon coeur avec la blonde. Arthur te le rappelait souvent pourtant, parce que de chez toi, il devait y aller en vélo ou simplement tu devais l’emmener en voiture parce qu’il avait la flemme. Mais c’était son repaire. Tu le comprenais, c’était un peu le tien, secrètement, vu que tu étais un grand enfant. Rapidement, la conversation tourna sur ta petite soeur qui n’acceptait pas trop ce repas, ces retrouvailles pourtant si importantes pour toi. « Peut-être, mais c’est moi qui devrait la protéger, c’est moi le grand frère. Mais elle me dit rien » dis-tu en haussant les épaules, cherchant à éviter le sujet. Mais c’était réel, Jamie était beaucoup plus secrète que toi, sur sa vie sentimentale. Peut-être parce que tu étais le genre de grand frère à rentrer dans le lard et à vouloir faire peur au petit ami de ta soeur. C’était le cas, tu étais beaucoup trop bagarreur et protecteur quand il s’agissait de Jamie. Les compliments entre la blonde et toi fusaient, c’était rare. Mais elle avait ce pouvoir te faire rougir à n’importe quelle phrase et elle était bien la seule à détenir ce super pouvoir. « Y’a que toi qui sait faire ça » dis-tu en riant, un peu gêné. C’était vrai. Tu avais appris à prendre les compliments pendant ta carrière d’acteur, sans que ça ne te fasse beaucoup trop d’effet. Mais quand c’est la femme que tu aimes depuis que tu as 17 ans qui t’en fais, ça change tout. Ce n’est pas une inconnue, c’est une femme qui te connait par coeur. Tes défauts, comme tes qualités. « Parce qu’ils voudraient tous venir te draguer ! Et moi j’veux pas » expliquas-tu à Romy. Non, tu ne voulais pas que tes amis se disent qu’ils peuvent approcher la blonde de façon romantique. Il en était hors de question. Même si c’était peut-être la chose à faire, qu’elle voit quelqu’un d’autre. Mais tu n’en avais pas envie. Les souvenirs de ce premier rendez-vous te rendait nostalgique. Tu te revoyais, la tête au dessus des toilettes entrain de vomir toutes tes tripes et Jamie qui se moquait de toi. « Je voulais pas te parler alors que je vomissais toutes les 10 minutes, j’me suis dis que t’aurai été dégouté de moi. Et ça, j’aurai pas supporter » dis-tu en hochant la tête de gauche à droite. Pourtant ce jour là, tu t’en souviendra toute ta vie. Tu voulais la voir, tu voulais lui parler mais t’étais un déchet humain. Tu voyais que le regard de l’enseignante s’était diriger vers l’entrée du restaurant, où des groupes et des couples arrivait. « Je… je comprends… mais j’veux pas te faire souffrir. J’m’en mords les doigts de l’avoir déjà fais une fois » avouas-tu en soupirant. Tu t’en voulais encore de cet écart, c’était impardonnable et tu le savais. « Je t’écoute » affirmas-tu avant d’entendre la question. Et lorsqu’elle te posait son interrogation intime, tu tiquais. Mais tu allais être honnête avec elle, tu voulais pas lui mentir il en était hors de question. « J’en ai seulement vu une, oui. Mais c’était l’instant d’une fois, c’est tout » dis-tu en étant le plus honnête possible. Puis tu relevais les yeux vers elle. « Et toi ? » demandas-tu, le coeur serré de connaître la réponse.

« Comment oublier ce détail alors qu'il faut sans cesse rappeler notre cher fiston pour qu'il rentre à la maison ?! » dit-elle en riant. C'était la joie d'avoir un adolescent. Il fallait se faire à l'idée qu'il débordait toujours un peu sur l'heure à laquelle il devait rentrer. Mais Romy avait toute confiance en lui, raison pour laquelle elle lâchait du lest avec Arthur. En revanche, il y en avait une qui ne lâchait pas forcément du lest avec Thomas. Jamie. Jamie qui ne voyait pas ce repas d'un très bon œil. Romy esquissa un sourire quand Thomas rappela qu'il était le grand frère, qui subissait les mystères de la cadette. « Le cœur d'une femme est un océan de secrets, Thomas. » dit-elle en citant Titanic. « Pour avoir vécu avec mes frères, je peux te dire que je gardais aussi mes secrets. Il valait mieux. » Sinon, elle aurait fini étouffée et ses crushs martyrisés. Heureusement qu'elle était à des milliers de kilomètres quand elle avait rencontré Thomas. Sinon, il aurait eu le droit aux pseudos-menaces des aînés Lloyd. L'atmosphère était légère. Romy esquissa un sourire amusé quand Thomas affirma qu'elle était la seule à le faire rougir. « Je vais éviter de donner mes astuces, alors. » En vrai, elle n'en avait pas. C'était juste leur alchimie qui agissait. Ils s'étaient connus jeunes, oui, avaient fait un enfant jeunes, et même si les années étaient passées, rien n'altérait cette alchimie. Encore aujourd'hui, elle existait et les empêchait de se séparer réellement. Les empêchait de voir ailleurs. Romy arqua un sourcil quand il lui donna la vraie raison pour laquelle il ne voulait pas que ses amis la voient. Surprise, un rire vint rapidement la submerger : « Tu as cru que j'étais Scarlett Johansson ?! » commença-t-elle à dire. Elle n'était pas le genre de femmes que l'on draguait. Peut-être parce qu'elle mettait des stops dès le début. « Mais ça fait plaisir de voir que je ne suis pas la seule jalouse par ici. » Elle faisait évidemment référence à sa pseudo crise de jalousie par rapport à Freja, par texto. Et sûrement pas la dernière. Mais pour l'instant, l'heure était aux souvenirs, à ce premier rendez-vous qui ne s'était pas terminé de la meilleure façon mais qui restait gravé en elle. « Je n'aurais jamais pu être dégoûtée de toi. Jamais. » Et pourtant, quelques années plus tard, elle l'avait été. Elle avait été dégoûtée de lui, de son attitude, de sa tromperie qu'elle ne soupçonnait pas et qui l'avait blessé au plus haut point. La cicatrice était toujours là, tout comme la peur de souffrir de nouveau. Elle écouta les paroles de Thomas avec attention. « Je sais que tu t'en veux. Et je m'en veux de te le faire encore payer. » C'était une sensation horrible. Les sentiments étaient là, mais la crainte l'empêchait de se jeter sans filet. Et surtout elle se demandait pourquoi il insistait tant. Romy n'avait pas perdu que son mari, elle avait perdu sa confiance en elle. Elle s'était vue comme une femme banale, incapable de satisfaire son mari. Elle s'était comparée à toutes ces femmes parfaites jusqu'au bout des ongles, belles, intelligentes et intéressantes. Et elle avait laissé ses complexes grandir encore et encore. Mais aujourd'hui elle mettait le doigt dessus, en posant cette question intime. Cette question à laquelle il répondit sans hésiter. Face à cette réponse, Romy haussa les sourcils : « Une seule ? En cinq ans ? Ce n'est pas vrai... » Beau comme il était, il ne pouvait pas avoir vu qu'une seule femme. Par contre, le revers, elle ne s'y attendait pas. Quand il lui retourna la question, elle lâcha un léger soupir. Mais elle lui devait la vérité, elle aussi. « Un seul. Et c'était récemment. Mais ça n'a duré qu'une nuit. J'ai eu tellement honte que je me suis enfuie comme une lâche au petit matin. » Elle releva son regard vers lui. « Tu n'as jamais eu envie de retenter quelque chose avec une autre personne ? »

« Suis-je bête » dis-tu en riant avec la blonde. Un adolescent c’était dur à gérer, heureusement pour Romy et toi, Arthur était un garçon adorable. Il était certes turbulent, mais il ne vous en faisait pas en voir de toutes les couleurs. Il savait quand il fallait rire ou pas, en tout cas avec ses parents. Et avec sa tante aussi, mais il était toujours adorable et gentil avec elle. Ta soeur qui ne te racontait jamais rien. Et ça te minait, parce que tu voulais savoir comment elle allait, si c’était un mec bien avec qui elle était. Mais ton ex-femme avait raison, c’était un secret et elle le gardait bien. Les femmes en général cachent bien leur relation. « Tu m’as caché à tes frère, j’veux dire au début de notre relation ? » demandas-tu à l’enseignante. Elle habitait à plusieurs milliers de kilomètres de sa famille mais tu savais qu’elle la contactait tous les jours quasiment. De ton côté, Jamie connaissait Romy par l’école et forcément elle t’embêtait là dessus devant votre grand-mère, donc elle était aussi au courant. La jeune femme avait réussi à te faire rougir et c’était rare de réussir à te faire cet effet là. Aucune femme n’arrivait à te flatter autant que Romy. Surement parce que tu étais toujours amoureux d’elle, que tes sentiments pour elle ne s’étaient jamais dissipés. La relation faisait que c’était toujours délicat, tendu mais il y avait toujours cette alchimie, cette électricité dans l’air quand vous étiez ensemble. Elle te dit qu’elle ne révèlera pas ses astuces et ça te faisait rire. Puis tu expliquais à Romy pourquoi tu ne voulais pas la présenter à tes amis d’ici, enfin leur dire qu’elle était libre, célibataire. « Ne te rabaisses pas, Romy. Tu es une très belle femme » dis-tu avec un sourire en coin. C’était vrai. Même Marcus t’avait fait la réflexion l’autre soir, quand tu avais passé la soirée au Elm. « Moi ? Jaloux ? Je vois pas de quoi tu parles » dis-tu avant de rire un peu gêné. Mais c’était la vérité. Tu étais jaloux comme un pou. Savoir qu’un homme pouvait entrer dans la vie de l’enseignante ça te faisait flipper mais ça te mettait aussi en colère. T’avais laissé cette femme de côté, et tu t’en mordais les doigts. Vous parliez de votre premier rendez-vous qui avait été un échec comme votre premier exposé ensemble. Mais c’était le début de votre histoire. « Même la tête dans les toilettes ? » demandas-tu avec un léger rire. Tu avais passé une sale nuit, après ce rendez-vous. La tête dans les toilettes à vomir toutes tes tripes. C’était pas très glamour. Tu avais réussi à la dégouter pourtant, une fois. Cette tromperie te hantera toute ta vie. Et tu savais même pas pourquoi tu avais fais ça. « Pourquoi tu t’en veux ? T’as rien à t’en vouloir. J’ai mérité tout ça » ajoutas-tu en haussant les épaules. Tu savais que ça n’allait pas être facile après le divorce, que tu n’allais pas passé de bons moments avec elle. Et elle avait tous les droits de te détester. C’est alors qu’arrivait une conversation fâcheuse. « J’te mentirai pas. C’est vrai, une seule » répondis-tu en hochant la tête. Tu ne pouvais pas lui mentir, juste tu ne lui dirai pas qui était cette femme parce qu’elle risquerait de faire une grosse crise de jalousie. Elle aussi, n’avait connu qu’un seul homme et ça datait de récemment en plus. « T’as pris peur, c’est tout. C’est pas être lâche » répondis-tu avec un sourire en coin, assez discret. Ça te faisait quelque chose d’entendre ça, tu sentais ton coeur se serrer. Mais elle avait bien le droit de faire ce qu’elle voulait avec qui elle le voulait. « Jamais » dis-tu simplement avant de reprendre. « J’ai toujours vu finir mes jours avec toi, et j’ai pas envie de vivre une histoire avec quelqu’un d’autre. Mais je comprendrai que toi tu le veuilles… » dis-tu attristé.

Souvent, Romy et Jamie s'étaient soutenues. Il fallait dire qu'elles étaient les deux seules femmes parmi tant d'hommes. Alors, la blonde avait souvent protégé son ex-belle-soeur. Et c'était ce qu'elle faisait encore aujourd'hui, en soufflant à Thomas que les femmes avaient toutes leurs raisons de garder leurs secrets pour elles. Ce n'était pas un manque de confiance, c'était un moyen de penser à soi avant tout. La jeune femme esquissa un sourire en entendant la question de Thomas. "Evidemment que je t'ai caché à mes frères. Je ne voulais pas qu'ils te menacent, qu'ils soient trop insistants envers toi. Et puis, j'avais envie de profiter de nous avant de le dire à ma famille." Etre à des milliers de kilomètres avait bien aidé même si elle se souviendrait à jamais de la tête de ses frères quand elle leur avait présenté Thomas. C'était mythique. Mais à présent, c'était Thomas qui cachait Romy à ses amis. En comprenant pourquoi, la jeune femme s'indigna en disant qu'elle n'était pas une de ces bombes sur lesquelles on se retournait. Mais ses mots la firent sourire. "Tu n'es pas objectif. On a été mariés !" C'était pourtant plaisant de le voir jaloux. "Si ce n'est pas de la jalousie, c'est quoi alors ?" le taquina-t-elle. Si elle se permettait de faire cela, c'était bien parce qu'elle était la première à être jalouse. Elle l'avait toujours été plus ou moins, mais cela s'était amplifié ces dernières années. Mais à l'instant, l'heure était au souvenir de ce premier rendez-vous. "Même avec la tête dans les toilettes. Souviens-toi que, quelques mois plus tard, je t'ai oui pour le meilleur et pour le pire." ça incluait même la tête dans les toilettes. La conversation suivante, en revanche, fut plus sérieuse mais extrêmement importante. Il était temps de mettre des mots sur ce qu'ils vivaient, sur ce qu'ils ressentaient. "Je m'en veux dans le sens où je vois tes efforts. Je les apprécie, même. Mais j'ai du mal à me laisser aller. Tout comme j'ai du mal à mettre mes distances." C'était pour tout cela qu'elle s'en voulait. Elle s'en voulait de ne pas laisser ses sentiments parler pour elle. D'avoir toujours peur. Elle avait envie de s'améliorer. Mais pour cela, elle avait besoin de réponses à ses questions peut-être intimes. En apprenant qu'il n'avait vu qu'une seule femme en cinq ans, Romy fut énormément surprise. "Je te crois." dit-elle, d'abord. "Et ça t'a fait quoi ? D'être avec une autre femme ?" Ce n'était pas une curiosité malsaine, elle ne s'attendait pas aux détails glauques. Elle voulait juste connaître son ressenti, savoir s'il avait vécu la même chose qu'elle. "Ce n'était pas de la peur, à proprement parler. C'était vraiment de la honte. C'est comme si... je ne sais pas.. je t'avais trompé." Son coeur, son corps, son esprit lui étaient encore tellement dédiés qu'elle avait vu le mal en ce dérapage. Alors qu'elle ne vivait que sa vie de femme. Pourtant, en entendant sa dernière réponse, elle sentit son coeur se délester d'un poids. Il s'était toujours vu finir ses jours avec elle. Elle sentit cependant sa tristesse sur ses derniers mots. Instinctivement, elle vint poser sa main sur son bras. "Je ne veux pas d'une autre histoire." dit-elle avec assurance. "J'ai encore du chemin à faire, mais je te promets de faire des efforts. J'ai envie de m'ouvrir de nouveau à toi." Elle esquissa un sourire et demanda : "Tu peux encore m'attendre un tout petit peu ?"

Les femmes étaient vraiment un mystère pour toi. Et tu avais remarqué ça depuis ta plus tendre enfance. Même si vous étiez très proche avec Jamie, c’était toujours compliqué de lui faire sortir les vers du nez à propos de ses relations sentimentales. Tu l’avais vu lorsqu’elle avait commencer à fréquenter Jonas, tu n’avais pas idée de qui étais ce type jusqu’à ce qu’elle décide de te le présenter. « J’avoue que j’aurai peut-être eu peur d’eux… et j’ai toujours peur qu’ils me sautent à la gorge » dis-tu en guise de confession, avant de lâcher un petit rire. Romy avait 5 frères, forcément c’est impressionnant pour un pauvre gamin qui fréquente la petite soeur de ces derniers. Alors même si vous étiez séparés par des milliers de kilomètres, ils auraient pu te faire flipper en quelques secondes. Heureusement, lorsque tu les avais rencontré la première fois, tout c’était bien passé. Mais depuis la rupture et surtout ta tromperie, ils te regardaient d’un mauvais oeil. Tu pensais que tu t’en sortais indemne juste grâce à Arthur, votre fils. « Bon peut-être mais t’es quand même magnifique et ça personne peut le contredire ! » dis-tu avec un sourire en coin. Elle avait raison, t’étais pas vraiment objectif mais la blonde était tellement parfaite à tes yeux. « Je vois pas de quoi tu parles » ajoutas-tu avant de rire, un peu gêné. Oui, t’étais extrêmement jaloux du regard des autres hommes sur ton ex-femme et ça depuis toujours. Lorsque tu étais avec elle sur les tapis rouges, tes premières sorties en tant qu’acteur, tu fusillais du regard chaque homme qui osait porter un regard sur la jeune femme. « Parce que tu m’as pas vu la tête dans les toilettes » dis-tu avec un rire. Le meilleur et le pire, vous aviez vécu ces choses là tous les deux. Certes, certains vous trouvaient fou de vous marier à 20 ans, avec un bébé en route mais pour vous c’était tellement évident. Ta famille t’avait soutenu et c’était le plus important à tes yeux. Tout ce que tu voulais c’était qu’elle devienne Madame Rankin et finir vos jours ensemble. « C’est compliqué… » dis-tu en te pinçant la lèvre. Elle avait mal à mettre des distances entre vous mais elle avait surtout du mal à rester loin de toi. « T’aurai préféré que je reste aux Etats-Unis ? » demandas-tu à la jeune femme, le regard perdu. T’avais pas envie d’entendre une réponse positive à cette question mais tu avais besoin de savoir. Ça aurait été peut-être plus facile. Les questions intimes commençaient. Tu savais que tu allais devoir parler de ta relation d’une nuit avec Freja. Mais tu taisais son nom, pour ne pas attiser la jalousie de Romy. « C’était… différent ? Je sais pas, j’ai passé un bon moment mais c’était pas pareil. Pas comme quand on était ensemble » dis-tu pour te justifier. Avec la norvégienne, tu avais passé une folle soirée mais c’était totalement différent de ce que tu vivais avec l’australienne lorsque vous étiez ensemble. Et c’est ça que tu voulais retrouver, cette vie d’avant. « Pourtant, tu as tous les droits de passer la nuit avec quelqu’un d’autre que moi… » dis-tu le coeur serré. Cette phrase ne te plaisait pas, mais celle de la blonde oui. Tu voyais qu’elle tenait encore à toi, et qu’elle n’oubliait pas ces 10 ans de mariage. Elle posait sa main sur ton bras, ce qui te donnait un frisson. Un bon frisson. Tu esquissais un sourire à ses paroles, heureux d’entendre ses mots. « J’t’attendrai jusqu’à la fin de mes jours s’il le faut » dis-tu en prenant sa main et en déposant un baiser dessus.

Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus, disait-on. Et cette expression prenait tout son sens en voyant Thomas galérer à décrypter les petits secrets de sa sœur. Il fallait juste qu'il accepte qu'elle ait ses mystères. S'il y avait quelque chose d'important, ou un homme à présenter, Jamie le fera quand elle le moment viendra. Romy la comprenait totalement, elle-même ayant fait la même chose avec ses frères. Vu sous cet angle-là, Thomas comprit mieux la pression qu'un grand frère pouvait donner sur sa sœur et le petit ami. « Tu vois ! » dit-elle avant de rire en comprenant qu'il avait toujours peur de ses frères. « Mais non, ils ne veulent pas te sauter à la gorge. Ils demandent souvent des nouvelles de toi. » confia-t-elle. Thomas s'était vite intégré dans la famille Lloyd. Lors des repas de famille, les frères Lloyd l'avaient pris sous son aile. Même si le divorce avait un peu refroidi le tout, ils respectaient tout de même Thomas. Alors qu'il insista sur le fait qu'elle était magnifique, la jeune femme se mit à rire. « Quand tu as une idée dans la tête, tu ne l'as pas ailleurs ! » Mais c'était flatteur de savoir qu'il la trouvait toujours belle, malgré les années qui passaient et les rides qui apparaissaient sur son visage de poupée. Mais après tous ces moments de franche rigolade où tout était si léger, ils durent tout de même aborder les sujets qui fâchaient. Il était temps de faire le point sur ce qu'ils avaient fait, sur l'état actuel de leur relation, sur ce qu'ils voulaient à présent. Alors que Romy lui expliquait cette difficulté à se laisser porter avec lui et, paradoxalement, d'être incapable de rester loin de lui, Thomas posa la question qui fâchait. « Au début, oui, j'aurais voulu que tu restes aux Etats-Unis. » Elle marqua un temps d'arrêt, songeuse. « Après, je savais que c'était ce qu'il y avait de mieux pour Arthur, de nous avoir tous les deux. Et puis, finalement, j'ai moi aussi trouvé mon compte dans le fait que tu sois venu sur Bowen. J'aime savoir que tu es là, pas très loin. Pendant 10 ans, je t'ai vu tous les jours. Je n'aurai pas supporté de ne plus te voir. » Même si oui, cela leur aurait permis d'aspirer à autre chose. Peut-être seraient-ils mariés à quelqu'un d'autre, avec d'autres enfants. Mais leur histoire avait décidé que ce n'était pas ce qui devait arriver. « Et toi, tu as regretté d'être venu ici ? » Ce n'était que le début des questions gênantes puisque vint le sujet de leurs relations d'une nuit. L'un et l'autre n'en avaient eu qu'une. Même si l'idée faisait mal, c'était aussi rassurant de voir qu'ils n'arrivaient pas à tourner la page. Aussi poussa-t-elle la curiosité jusqu'au bout en voulant savoir comment il avait ressenti cette nuit. « C'était... mieux ? » demanda-t-elle, en jouant nerveusement avec sa serviette. « Je la connais ? » ajouta-t-elle en relevant le regard vers lui. Se confiant ensuite sur sa propre nuit, Romy évoqua avec honte ce que, elle, elle avait ressenti. Sur l'instant, c'était bien oui. Mais au petit matin, c'était cette étrange impression de tromper Thomas qui l'avait envahi. Pourtant, comme il le disait, elle avait le droit de passer une nuit avec quelqu'un d'autre. « Je le sais, mais c'est un sentiment qui ne se contrôle pas. » C'était simplement sa façon de dire qu'il était le seul qu'elle voulait. Mais c'était difficile à dire clairement. Alors elle l'évoqua de façon détournée, en disant qu'elle était prête à faire des efforts, qu'elle était prête à s'ouvrir de nouveau à lui. Quand il lui prit la main, y déposant un tendre baiser, elle sourit, attendrie. Et son sourire s'élargit encore plus quand il lui avoua qu'il était prêt à attendre jusqu'à la fin de ses jours. « Je ne pense pas que ça ira jusque là. J'ai envie de profiter de toi avant qu'on ne devienne des croûtons. Déjà que la quarantaine te guette.... » dit-elle, taquine. Ça, c'était Romy et Thomas.

« Pourquoi alors quand je les vois, ils ont ce regard vicieux ? » demandas-tu en fronçant les sourcils. Tu savais que les frères de Romy avaient mal vécu le divorce, parce que tu faisais partie de la famille mais tu avais trahi la blonde. Quand tu allais chercher Arthur chez eux, ils te regardaient en chien de faïence et ça te foutait la trouille faut dire. « J’suis vraiment comme ça avec Jamie ? A trop la protéger ? » demandas-tu plus sérieusement à ton ex-femme. C’était délicat, mais tu faisais toujours tout pour qu’elle soit bien, et qu’elle aille bien. La famille avant tout, ta grand-mère te l’avait bien fais comprendre. Et tu étais têtu, ça aussi c’était peut-être un défaut. Protecteur et têtu. « Ça c’est sûr » dis-tu en riant avec l’enseignante. Mais elle était belle, et magnifique et ça, c’était indéniable. Personne ne te ferai jamais changer d’avis. Même si elle te déteste, même si elle devient exécrable ou qu’elle vieillit avec l’âge, tu la trouvera magnifique jusqu’à ce qu’on t’enterre. Tu posais une question fâcheuse à Romy. A savoir si elle aurait préféré que tu restes à Los Angeles et que tu ne les suives pas, avec Arthur, à Bowen. Sa réponse te faisait mal, au début. Mais la suite te soulageait. Elle n’avait pas envie complètement que tu disparaisse de sa vie. « J’ai jamais voulu m’imposer mais j’pouvais pas rester loin de notre fils… » dis-tu simplement avant de reprendre. « Et loin de toi » avouas-tu en plongeant tes yeux dans les siens. « Même si c’était que quelques semaines, la maison était trop vide pour moi, on y avait tous nos souvenirs ensemble et j’avais besoin de te voir. Comme tu dis, je supportais pas de ne pas te voir après nos dix ans de vie de couple » dis-tu avec un mince sourire aux lèvres. Elle avait été rapidement la femme de ta vie, celle que tu aimes par dessus tout et avec qui tu avais emménagé dans un appartement ridiculement petit pendant vos études. « Jamais. Je fais quelque chose que j’aime en élevant des chevaux, je suis près de mon fils, près de toi. Alors je suis le plus heureux des hommes » répondis-tu avec un sourire. Et puis, Jamie était à Sydney à cette époque là. Et ta tante était déjà à Bowen. Puis la délicatesse entrait en jeu. Les amourettes d’un soir. C’était délicat pour toi d’en parler. Surtout de parler de la fille avec qui tu avais partagé une nuit, parce que Romy ne l’appréciait pas forcément. « Non, c’était pas mieux. Ca ne pourra jamais être mieux » dis-tu en prenant sa main dans la tienne, la regardant dans le blanc des yeux. Avant de répondre à sa question de si elle connaissait cette femme, tu tiquais. « Je sais pas, mais tu veux pas savoir qui c’est. Comme je préfère pas savoir avec qui tu as couché, ça me fait déjà mal rien que de penser qu’il y avait un autre homme dans ton lit » avouas-tu à la blonde, d’un calme olympien. Même si c’était vrai, ça te déchirait de savoir qu’elle avait partagé une nuit avec quelqu’un d’autre. Tu souris lorsqu’elle t’avoua qu’elle avait eu l’impression de te tromper. « Je vois » dis-tu simplement. Toi tu l’avais vraiment trompé et ce sentiment, tu l’avais eu le lendemain de cette coucherie. Tu avais embrassé sa main, ce qui la faisait sourire et ça te rendait heureux de la voir sourire comme ça. « J’ai mon fils qui me donne une deuxième jeunesse, alors ça me touche même pas » dis-tu en tirant la langue, plaisantant avec la blonde. Mais c’est vrai, la quarantaine arrivait à grand pas et ça te faisait peur de vieillir.

  « Je ne vois pas où ils ont le regard vicieux. »  dit-elle, surprise. « Ou alors ils le font derrière mon dos. » Et c'était sûrement ça. C'était le genre de ses frères de menacer derrière son dos pour ne pas récolter les remontrances de la jeune femme. « De toute façon, ils n'ont pas leur mot à dire. » Ils n'étaient pas dans ces histoires dramatiques, où nobles et roturiers se déchiraient pour des amours interdits. Mais ils jouaient leur rôle de grand frère, tout comme Thomas le faisait pour Jamie. En entendant la question de son ex-mari, Romy esquissa un sourire attendri. « Tu la protèges comme un grand frère doit le faire. Même si c'est parfois chiant, ça fait toujours du bien de savoir que quelqu'un assure ses arrières. » Elle s'arrêta un instant avant de demander : « Elle t'a déjà reproché d'être trop protecteur avec elle ? » Sûrement pas. Thomas et Jamie avaient une histoire familiale chargée. Pendant des années, ils n'avaient pu compter que sur l'un et l'autre. Puis Romy était arrivée et Arthur, grandissant le cercle familial. Jusqu'à ce que tout capote. La conversation se fit plus sérieuse, mettant à plat ce qu'ils auraient dû mettre à plat depuis longtemps. Si Romy avait d'abord détesté voir Thomas à Bowen, elle avait finalement fini par mettre de l'eau dans son vin. Grâce à Arthur, d'abord. Puis en prenant en compte l'affection qui restait pour l'aîné Rankin. Elle sentit son cœur se serrer quand il évoqua leur maison vide, les souvenirs, la distance. Son départ des Etats-Unis s'était donc fait naturellement. Mais Romy avait besoin d'entendre qu'il n'avait pas de regrets, qu'il avait réussi à faire sa vie ici. Quand il l'affirma, un sourire s'afficha sur ses lèvres. « C'est vrai que dans notre malheur, tu as eu la chance de construire quelque chose qui te tenait à cœur. Et puis, tu as ta famille près de toi. » Elle marqua néanmoins une pause : « Après, ça n'excuse pas mon départ brusque, mais je ne pouvais plus rester à Los Angeles. Quand je t'ai vu arrivé ici, j'ai culpabilisé. J'avais peur de retirer ton rêve. » Elle posa son regard sur lui. « ça ne te manque pas d'être acteur, la vie de paillettes, les regards tournés vers toi ? » Il avait fallu qu'il caracole en tête des séries phares pour que leur histoire commence à prendre un coup, pour qu'ils se séparent doucement. Lui passait ses soirées, en costard, sous le feu des projecteurs, quand elle, elle restait en peignoir à la maison, à s'occuper de leur fils. Peut-être que la tromperie avait été inévitable, finalement. Ou presque. Le prochain sujet étonna Romy par sa réponse. Là où elle avait cru qu'il s'amuserait de son célibat, en enchaînant les coups d'un soir ou les amitiés avec bénéfice, elle fut surprise d'apprendre qu'il n'y avait qu'une femme. C'était à la fois douloureux d'entre cela, à la fois rassurant de savoir qu'il ne l'avait pas tant oublié que cela. Ce n'était même pas mieux, comme il l'assura, le regard si sincère. Mais Romy aurait pu se contenter de cela, mais elle essaya de savoir si elle la connaissait. La réaction de Thomas était parlante, tout comme ses mots. « Donc... je la connais. » dit-elle presque sûre d'elle. Mais la suite de ses mots parvint à la convaincre de ne pas en savoir plus. « Oui, je comprends. » murmura-t-elle. « ça restera notre jardin secret, une simple parenthèse. » Une parenthèse dans une histoire qui pourrait peut-être reprendre. Ce sentiment de l'avoir trompé, alors qu'il n'en était rien, était parlant. Ça se voyait que Romy avait toujours quelque chose pour lui. Tout la trahissait : ses regards, ses sourires heureux alors qu'elle se contentait simplement d'un contact entre leurs mains. Et leurs plaisanteries. « Arthur ne me dit pas la même chose ! Il m'a lâché la dernière fois que tu ne comprenais rien à TikTok! » Ceci dit, Romy n'était pas mieux lotie. « De toute façon, même avec une quarantaine, une cinquantaine et plus encore, des rides et des cheveux blancs, tu seras toujours le plus beau à mes yeux. » Romy ne l'avait jamais caché. Thomas était son idéal. Son idéal physique et moral. Ce n'était pas pour rien qu'eux deux, c'était une histoire vieille de 17 ans.

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