I need a godsend cure and that's what you are (charlie)

« Ah, parce que je suis en charge de ton éducation maintenant ? Bien, gare aux fessées alors. » se marra la brunette avec un regard en coin. Cette journée bien-être avec Jackson, c'était finalement ce dont elle avait précisément besoin en ce moment. Elle savait qu'elle pouvait toujours compter sur lui, sur ses autres amis aussi d'ailleurs, mais elle ne s'attendait pas à ce que leur discussion, plus sérieuse cette fois, lui apporte autant. Charlie se sentait un peu émotive, certes, mais elle se sentait à la fois apaisée de pouvoir exposer les tréfonds de son cerveau au garçon. Comme le passé l'avait prouvé à de multiples occasions, ils étaient sur la même longueur d'onde, parfois même sans le savoir. « C'est donc çaaaaa ! » s'exclama Charlie après une petite réflexion sur la masculinité. Elle ne put s'empêcher de rire un peu, même si ce que disait Jacks faisait sens et lui apporterait sûrement matière à réflexion plus tard. Mais là, ça faisait du bien de se remettre dans une atmosphère plus détendue. Pas parce que la question était réglée en quelques phrases, mais parce que c'était chouette de pouvoir parler de ça avec lui. Parce qu'elle se sentait mieux. Parce qu'il la faisait souvent sentir mieux. Toujours, même, en fait. Son colocataire poursuivit sur un ton moins sarcastique, avec des compliments qui firent monter le feu aux joues de la chirurgienne. Elle se mordit la lèvre, sincèrement touchée par ces mots, et son ego profitait du petit coup de boost bienvenu, aussi. Puis, venant de Jackson, ça lui faisait quelque chose, comme à chaque fois. Elle savait qu'il ne disait pas ça pour la flatter ou juste pour lui donner confiance en elle. Parce qu'elle aussi, elle voyait en lui cette personnalité incroyable, qu'elle aimait autant qu'elle respectait. C'était une connexion d'humain à humain qu'elle chérissait, et elle aimait encore plus le fait qu'ils puissent se le dire avec autant de facilité, sans barrières. Sa relation avec l'acrobate était beaucoup de choses, mais un des piliers en était la transparence, enrobée d'une douce affection. Elle se sentait de pouvoir toujours tout lui dire et réciproquement. « Quand bien même tu serais le seul - ce qui reste une probabilité -, ça me suffit amplement, si c'est pour me faire entendre des choses comme ça de temps à autres. » répondit-elle finalement, toujours avec ce sourire un peu gêné et adorable au coin des lèvres. « J'te retourne le compliment, by the way. » Le brun lui expliqua ensuite sa vision de lui-même, face aux hochements de tête de Charlie. « T'inquiète, quand il est question de se faire des films, t'es pas le seul. » soupira doucement la jeunette. Elle n'était pas certaine de qui il parlait, mais elle pouvait relate assez facilement à ses propos. « Mais j'comprends vraiment pas qui pourrait se contenter de ne pas aller plus loin avec toi. » sourit-elle juste après, croisant les iris du garçon. Après le petit rire bienvenu qui les secoua, Charlie se blottit un peu plus contre lui, pour se retrouver prisonnière de son regard, et de ce moment. Et ce fût avec une douce chaleur qu'elle accueillit son baiser, le prolongeant avec lenteur comme pour prendre le temps de lui transmettre toute l'affection qu'elle avait pour lui.

« T’as jamais eu besoin d’être en train de m’éduquer pour que j’aie à faire gaffe aux fessées. » Blaguas-tu. Puis, trêve de plaisanteries, la conversation prit une tournure bien plus sérieuse lorsque Charlie aborda ses relations amoureuses plutôt inexistantes. Elle se demandait ce qui clochait avec elle alors qu’à tes yeux, ton amie était une femme extraordinaire qui valait clairement qu’on se penche sur son cas … et sur son entre-jambe, uh. Tu mis ça sur le dos de la masculinité toxique parce que Charlie n’était pas que belle, elle était aussi très intelligente, et ça, ça pouvait en effrayer certains qui se sentiraient un peu trop cons à côté d’elle. Tant mieux, elle ne méritait pas de ces imbéciles-là. « Eh ouais ! » Claironnas-tu alors que Charlie venait de faire la lumière sur tout ça, grâce à toi. Vous aviez un ton léger mais tu ne pensais pas moins ce que tu venais de déclarer. D’ailleurs t’ajoutas que toi, elle ne t’effrayait pas Charlie, au contraire t’aurais été comblé et genre, honoré, d’être avec une femme comme elle. Si t’avais pas autant eu cette certitude que ça te prenait un mec avec qui finir tes jours, t’aurais probablement essayé de voir un peu plus loin que ça avec ta colocataire. Après tout, c’était tellement simple, facile et doux entre vous deux, une connexion si rare, ça voulait sans doute dire quelque chose. « J’vais acquiescer juste parce que je crois pas aux probabilités zéro, mais … en tout cas. » Évidemment que t’étais pas le seul à penser ça d’elle. Ou alors elle n’avait juste pas encore rencontré ces hommes qui penseraient comme toi. « Merci. » Dis-tu simplement quand elle te retourna le compliment. Puis, tu parlas de toi, de ta vision de tes relations et de ta tendance à t’imaginer mille scénarios qui finalement restaient toujours dans ta tête sans jamais prendre vie. T’étais trop lover boy, en fait. « Aaaah, et pourtant, tu le connais. » Osas-tu ajouter, tes joues s’empourprant légèrement en parlant de Perry. Mais tu regrettas tout de suite d’en avoir parlé, et une fois le sujet tassé et la blague sur votre niveau d’extraordinaire lancée, tu blottis ton corps contre celui de Charlie et fermas les yeux. Lorsque tu les rouvris, ses lèvres étaient juste là, invitantes, parfumées, et comme un aimant tu fus attiré jusqu’à celles-ci. Vos bouches se trouvèrent par surprise mais avec une douceur qui vous décrivait bien. Ce baiser se prolongea dans le temps, le temps en suspens, le hamac balançant légèrement de gauche à droite. Ce n’était pas la première fois que vous vous embrassiez, Charlie et toi, mais c’était la première fois que ça te déboussolait le cœur comme ça.

Au milieu de ces échanges tantôt introspectifs, tantôt plus légers grâce à leur humour, une connexion plus importante se créait entre eux. Une connexion apaisante et intelligente, c'était celle qui donnait tout son sens à leur amitié, et même à ce qui était parfois plus qu'une amitié. Ils savaient envelopper leurs mots d'un voile complice et malicieux sans que ça n'altère la véracité et la profondeur de leurs propos. C'était une chose que Charlie adorait dans leur communication. « Pas de quoi, François. » répondit la brune avec un petit pouffement de rire, mais ses iris azur exprimaient à quel point elle tenait Jackson en haute estime, dans sa tête et dans son cœur, autant que lui pour elle. L'acrobate lui parla de comment il s'impliquait malgré lui dans des possibles relations, et des déceptions qui en résultaient, d'une façon qui semblait inévitable. La jeune femme comprenait totalement ce qu'il lui disait, cela faisait écho dans son cœur qu'elle avait déjà soigné, souvent derrière une façade de désinvolture et de joie de vivre. Bien sûr qu'elle la gardait toujours, cette joie de vivre. Mais les gens avaient tendance à ne voir que ça, même quand elle pansait ses blessures à la nuit tombée. Ce qui était exactement le but recherché. Charlie avait beau être un ouragan émotionnel quand ça lui prenait, aussi facile à lire qu'un livre pour enfants, elle était également tellement connue pour être un feu d'artifices au quotidien que les gens n'y voyaient souvent que du feu. Mais c'était sans doute le lot de tout un chacun. Jackson mentionna qu'elle connaissait la personne – c'était donc bien une personne en particulier – qui était le centre de sa réflexion précédente, ce qui fit tiquer brièvement l'Australienne. Mais elle se perdit vite dans le regard tendre de Jackson, alors que leurs souffles s'entremêlaient avec cette douceur et ce naturel qui leur était ordinaire, presque. À croire que quelque part, ils étaient faits pour être plus que des amis. C'était un lien spécial, pour Charlie, qui différait d'une amitié pure et dure comme du béton. Avec Jules par exemple, c'était totalement différent. Il était son meilleur pote, son confident par excellence, celui sur lequel elle déversait ses occasionnels vomis émotifs, il l'avait vue à son plus haut et à son plus bas et ils étaient toujours restés soudés comme jamais. Elle retrouvait ça avec Jackson. Sauf que jamais, aussi beau gosse soit-il, ça ne lui serait venu en tête d'aller plus loin avec Jules. Tandis qu'avec Jacks... Avec Jacks, son cœur battait un peu plus fort chaque fois que ses lèvres croisaient la route des siennes. Constante qui se confirma une fois de plus, quand son pouls s'emballa alors que son colocataire réduisait la distance entre leurs visages, et qu'elle prit un plaisir plus qu'évident à ne pas laisser ce baiser s'envoler trop vite. Quand ils se détachèrent l'un de l'autre, toujours de cette façon douce et touchée de tendresse, Charlie souriait, son regard pétillait, plongé dans celui du garçon. « J'aime bien quand on fait ça. » souligna-t-elle, rougissant un peu. Elle avait parlé comme une gamine de huit ans à son premier baiser, mais sa phrase était empreinte de cette sincérité enrobée d'une douce innocence qui n'avait rien de graveleux derrière. Elle allait garder le silence, mais soudainement la remarque de Jackson lui revint en tête. « Wait... Je reviens en arrière : je connais qui ça ? » fit-elle en arquant un sourcil, sa curiosité soudainement piquée. Et à vrai dire, son inquiétude aussi.

C’est peut-être parce que t’avais jamais eu l’occasion, durant ton enfance et ton adolescence, de réellement apprendre à connaître quelqu’un, qu’aujourd’hui dès que tu découvrais une personne qui te plaisait et que t’avais la chance de revoir encore et encore, tu t’imaginais finir marié avec. Dans les faits tu ne brûlais aucune étape, au contraire si on prenait ta relation avec Perry t’avais rarement laissé entrevoir ton envie que ça aille plus loin, t’avais bien trop la trouille pour t’ouvrir à ce point. Surtout que connaissant Peach, lui était complètement ailleurs dans son cœur, encore dans le désir d’agrandir sa liste d’amants et d’amantes. Mais dans ta tête à toi ça tourbillonnait de scénarios et de plans pour le futur qui ne s’accompliraient jamais. Tu l’aimais bien, Perry, un peu trop même, alors tu comprenais aisément la situation amoureuse de Charlie qui avait l’impression de ne plaire à personne. T’étais pareil. Tu savais que tu plaisais, oui, mais toujours que physiquement, toujours que pour quelques nuits. T’étais du bang bang material, rien de plus, pas le mec avec qui on s’imagine finir sa vie. Tu fus quand même soulagé que Charlie ne relève pas ta confidence qu’elle connaissait l’homme en question dont tu parlais. T’avais laissé ça s’échapper de tes lèvres mais tu ne savais pas si tu étais prêt à ce que Charlie soit au courant. Qui sait, elle déciderait peut-être de se mettre à jouer aux entremetteuses ! Et clairement t’avais pas envie que Perry ressente une pression quelconque. Ce serait suffisant pour le faire fuir et t’avais pas envie qu’il parte. Pas maintenant jamais. Tout comme t’avais pas envie que Charlie parte non plus, cela dit. C’était un peu le même genre d’attachement qui ne s’explique pas. T’avais besoin d’elle, aussi, d’autant plus que vous viviez ensemble et que t’avais l’habitude de sa présence quotidienne. Tu ne savais vraiment pas comment tu ferais s’il fallait qu’un jour la distance se creuse entre vous. Pour éviter d’y penser tu la réduisis donc, cette distance encore inexistante, en posant tes lèvres sur les siennes puisque vos visages s’étaient appelés. Tu souris, les yeux brillants aussi, quand vos regards se retrouvèrent après avoir rouvert les paupières. « J’aime bien quand on fait ça aussi. C’est tellement simple, toi et moi. » Si seulement ça pouvait être comme ça avec d’autres. Ou alors si seulement vous vous donniez une chance, peut-être. Charlie coupa court à tes rêveries en revenant en arrière, sur cette fameuse révélation que t’aurais préféré garder pour toi. Tu soupiras, grognas, te plaignis, le tout en deux secondes en levant les yeux au ciel et en te replaçant dans le hamac, sur le dos. « Aaaaaaaaaaaah j’aurais préféré que t’oublies ce passage. » T’avais le cœur qui battait hyper vite, comme si t’étais sur le point d’annoncer un crime. T’avais l’impression que dans ta bouche tout était pâteux. Tu déglutis, le silence s’éternisait, alors tu pris une grande inspiration et avouas : « C’est Perry. » Maintenant que tu le disais à voix haute tu voyais bien à quel point c’était con d’avoir des sentiments pour Perry. Tout le monde savait qu’il n’était pas rendu là dans sa vie et qu’il ne le serait peut-être jamais.

De l'extérieur, on aurait dit un dialogue de mauvais film romantique, à peine étoffé. Mais pour Charlie, et elle espérait pour Jackson aussi, ça voulait dire beaucoup, ces mots simples. Comme des enfants amoureux qui n'avaient pas la maturité de comprendre leurs sentiments, mais qui les ressentaient, ils partageaient cette étincelle indescriptible qui les emmenait furtivement vers des possibles inexplorés. Oui, c'était tellement simple. Si bien que la jeune fille se demandait pourquoi ça ne lui avait jamais effleuré l'esprit d'aller plus loin avec l'acrobate. Sans doute parce que leur relation se suffisait à elle-même, qu'elle était lieu de certitudes, de réconfort, de facilité, de compréhension. Une connexion saine qui n'avait pas besoin de s'étaler au-delà, parce qu'ils lui donnaient la forme qu'ils souhaitaient, selon le moment et l'envie, qu'ils la modelaient au gré de leurs esprits parfois vagabonds. Malicieux et insolents, tendres et sécurisants. Aujourd'hui, Charlie y réfléchissait, soudainement. C'était peut-être dû à leur conversation, à son état d'esprit actuel, à où elle en était dans la vie, à son besoin de se retrouver quelque part. Jamais elle n'avait analysé son lien avec Jacks, et ça la percutait maintenant. Même si elle n'était pas certaine qu'elle voulait engager ses réflexions dans cette direction. Ça paraissait tentant, mais dangereux, aussi. Et pour rien au monde elle n'aurait mis en péril ce qu'ils partageaient. Une autre réflexion lui revint en mémoire, à temps pour la sauver de ces délibérations. Ou c'était en tout cas ce qu'elle croyait. « Pas de chance, j'oublie jamais rien, Reyes. » Totalement faux, Charlie oubliait plein de choses. Mais c'était souvent pas celles qu'elle aurait dû. Et si là, elle s'était exprimée avec une malice détachée, elle allait bien vite perdre ce sourire touché d'une pointe d'impertinence. Le langage corporel de Jackson se modifia du tout au tout, et Charlie fronça les sourcils, se sentant projetée dans le vague. Elle n'avait aucune idée du plat dans lequel elle avait mis les pieds, mais son colocataire vint bien vite éclairer sa lanterne. « QUOI ? » s'exclama-t-elle, sur le cul. Littéralement, d'ailleurs, parce qu'en se redressant brusquement dans le hamac, s'appuyant sur le tissu, elle bascula sur le côté pour se retrouver à terre. Elle aurait pas pu se sentir plus conne qu'à cet instant. D'abord parce qu'elle avait rien capté de ce qui se tramait entre Jacks et Perry, ensuite parce qu'elle venait de se viander royalement. Mais elle était plus hébétée par la nouvelle que par sa chute, et un énorme sourire pointa sur sa face éberluée, alors qu'elle se disait qu'elle allait peut-être même avoir un fou rire, sous le coup de la surprise et de la nervosité.

Tu t’étais souvent posé la question, en fait, Jackson. À savoir pourquoi t’arrivais pas à t’engager avec une fille alors que clairement, les sentiments pouvaient être là, l’attirance aussi. Qu’est-ce qui expliquait que t’étais borné à ce point, voulant à tout prix vivre une relation sérieuse avec un homme plutôt qu’avec une femme, alors que c’était pourtant avec la gente féminine que t’avais le plus de connexions profondes ? Il y avait d’abord eu Brooke et c’aurait pu être considéré comme du long terme si vous aviez su mettre des mots sur ce que vous étiez mais non, vous n'aviez jamais été un couple. Puis il y avait eu Lys et cette intensité qui vous était propre mais qui s’était estompée lorsque son amour avec Azriel avait enfin vu le jour. Et finalement, ta colocataire Charlie, qui dès le départ t’avait subjuguée par sa joie de vivre et ses étincelles dans les yeux. Tout était beau à travers son regard et tu savais que jamais la vie ne serait ennuyante à ses côtés. Alors pourquoi ne pas te souhaiter de te réveiller éternellement avec elle sur l’autre oreiller ? Chaque journée partirait du bon pied. Chaque journée serait une aventure. C’était à tout ça que tu songeais alors que vous vous embrassiez, avec une tendresse infinie qui témoignait de tout l’amour que vous vous portiez. Malheureusement c’était toujours Perry qui te revenait en tête, pour ébranler tes réflexions et tes certitudes. Perry revint aussi dans les pensées de Charlie, enfin, pas directement, mais sous sa forme d’homme mystère que t’avais évoqué un peu plus tôt. Merde, t’aurais préféré qu’elle oublie. « Ouais, jusqu’à maintenant je voyais ça comme une qualité, mais … » Tu esquissas un sourire moqueur. T’étais piégé, il fallait l’accepter. Alors, sans préparation, tu lui sortis juste que c’était Perry. Pas besoin de plus amples renseignements, vous saviez tous les deux qui c’était. Et comment il était. Charlie comprendrait ta grosse erreur d’être tombé sous son charme pour plus qu’une nuit. Elle s’exclama de surprise et, dans ce même élan, elle bascula hors du hamac. Tu faillis toi aussi en tomber puisqu’elle le fit balancer à gauche et droite, périlleusement, en raison de sa chute. Tu te redressas, habitué heureusement à garder ton équilibre dans les airs, et tu te penchas de l’autre côté du tissu pour voir Charlie allongée par terre. Enfin, allongée … plutôt écrasée. « Woh, ça va ? Tu t’es fait mal ? » Mais nan elle avait un grand sourire aux lèvres malgré l’étonnement, et toi tu secouas la tête en la regardant d’en haut. « Je sais, c’est une connerie, ok ? Mais c’est pas une blague et j’sais pas du tout comment gérer la situation. » C’était voué à l’échec. T’avais peut-être juste besoin que quelqu’un, qui vous connaissait tous les deux, te le confirme.

Le ton ironique que prit le brun la rassura un instant, c'est que ça ne devait pas être si terrible. Semi-soulagement de courte durée, car quand le nom de Perry franchit ses lèvres dont elle se rappelait encore le goût, Charlie en tomba de son hamac. Elle était partagée entre le choc et l'envie de rire, tellement elle ne s'y attendait pas. Si Jackson avait voulu jouer aux devinettes, jamais la brunette n'aurait pensé au beau blondinet, père de deux enfants, et à la maturité inférieure à la soustraction de l'âge de ceux-ci. Et puis, Perry quoi. Elle baby-sittait ses gamines depuis plusieurs années maintenant, si bien que la plus grande était finalement comme une petite soeur pour elle. Perry avec qui elle faisait des concours de lancers de cacahuètes. Perry avec qui elle argumentait pendant une heure pour savoir qui avait le meilleur surnom. Perry avec qui elle avait tiré à la courte paille pour savoir qui changerait la couche de Siobhan. Plus encore, Perry pour qui elle avait majoritairement fait du baby-sitting parce qu'il avait des dates. Et accessoirement, Perry qu'elle avait déjà failli embrasser, parce qu'ils s'entendaient aussi bien que des meilleurs copains de maternelle, qu'ils se marraient comme des baleines et parce qu'il était vachement beau gosse, aussi. « Non non, c'est plutôt mon cerveau qui fait mal là. » répondit-elle d'un air désillusionné. Elle ne put retenir un rire, quand même, parce qu'il fallait avouer que c'était cocasse. Les fesses au sol, elle rigolait d'elle-même aussi, de sa naïveté. Elle se releva d'une manière pour le moins originale, effectuant un cumulet avant pour se retrouver ensuite sur ses deux jambes, les bras en l'air, comme une championne de gymnastique. « Regarde, rien de cassé ! » fit-elle, avant de pousser la chose un peu plus loin et de faire la roue – une très belle roue d'ailleurs, depuis le temps qu'elle n'en avait plus fait -. Charlie, éternelle preuve vivante que le ridicule ne tuait pas. « Pardon, j'évacue la nouvelle comme je peux. » pouffa-t-elle en se lançant pour un poirier. Moins réussi, celui-là, parce qu'elle était pas aux J.O. Et qu'elle ne prit pas trop d'élan, histoire de pas vraiment se faire mal, cette fois. « Non mais en vrai, je te jure que je me moque pas. C'est juste... J'aurais jamais imaginé, enfin je tombe des nues, et des habillées aussi. » reprit l'Australienne sans se départir de l'attitude qu'on lui connaissait, extravagante et insouciante. « Eeeet... C'est quoi du coup exactement, cette situation ? » reprit la jeunette qui essayait toujours de s'habituer au fait d'avoir cette info. Et les images mentales qui allaient avec.

Que Charlie tombe du hamac à la révélation du prénom de Perry, tu ne t’y attendais pas vraiment. Tu la regardas avec surprise, toi qui étais encore allongé dans le hamac qui balançait maintenant dangereusement de gauche à droite en raison de la chute de ton amie qui avait un peu donné une poussée. Elle t’assura qu’elle allait bien, que c’était son cerveau qui faisait mal plus que son corps. « Ouais, avoir su que tu réagirais comme ça, je t’aurais peut-être un peu mieux préparée. » Mais pourquoi elle réagissait comme ça, d’ailleurs ? Ça te semblait assez exagéré, toi qui avais pourtant été le premier à t’imaginer que c’aurait l’effet d’une bombe sur Charlie. Sur n’importe qui connaissant Perry, en fait. Tout le monde savait que ce mec-là n’était pas prêt à se caser, toi-même tu le savais, mais tu t’étais fait prendre quand même par son charme. Ta colocataire se releva finalement de par terre, non pas sans faire quelques galipettes étonnantes ! « Tu m’avais caché tes talents de gymnaste. J’me cherche une partenaire d’acrobaties, justement ! » Lanças-tu en riant pendant qu’elle faisait la roue. On allait bientôt venir vous avertir de vous taire et de vous calmer, à nouveau, si vous continuez. C’était un vrai vacarme dans la zone des hamacs, et vous étiez juste deux. Charlie s’excusa, prétendant évacuer la nouvelle comme elle pouvait. « Mais pourquoi ça t’agite autant ? Viens pas me dire que toi aussi t’es amoureuse de lui … » Cette possibilité-là venait tout juste de t’effleurer l’esprit et tout d’un coup, tu flippas un peu. Bordel qu’est-ce que vous alliez faire si tous les deux vous en pinciez pour Peach ? Pleurer ensemble parce qu’il ne voulait rien savoir de plus ? Tu soupiras, avant de rire à la réponse de Charlie, qu’elle tombait des nues et des habillées. Elle avait le don de trouver les mots ! À sa question, tu pris une position assise dans le hamac, tes jambes pendant dans le vide. « Déjà, je suis désolé de ne pas t’en avoir parlé avant, tu vas flipper encore une fois mais … ça fait un peu plus d’un an qu’on se fréquente. Enfin, rien d’exclusif ni rien, pas de mot sur ce qu’on est, c’est bien là le problème. Ça fait plus d’un an que dès qu’on se croise on termine assurément la nuit ensemble, ça fait plus d’un an qu’on apprend à se connaître, qu’on s’apprécie de plus en plus, en tout cas de mon côté c’est ça, mais lui … J’sais pas. Il fait comme si c’était normal tout ça, qu’après plus d’un an on en soit encore à peu près au même stade … » Expliquas-tu, conscient qu’elle allait peut-être se sentir trahie d’avoir été laissée dans le noir tout ce temps.

C'était certai que préparée, elle n'y était pas du tout, la belle Australienne. Pourtant, maintenant qu'elle savait, elle ne comprenait pas comment elle n'avait rien vu. C'était vrai qu'elle avait vu Perry un peu moins souvent, qu'elle avait été prise par ses propres déboires, ce qui la rendait souvent aveugle à ceux des autres. Ce n'était pas qu'elle ne s'y intéressait pas, mais Charlie avait tendance à faire tellement de bruit qu'elle loupait souvent les signaux de son entourage, bien malgré elle. Elle était dispersée, toujours en mouvement, incapable de vraiment s'arrêter pour faire attention à ce qui l'entourait, sauf si on lui mettait le nez dedans. Comme Jackson venait de le faire. Et dans sa maladresse infinie, Charlie s'était relevée si brusquement qu'elle avait fait basculer le hamac, se retrouvant au sol, mais plus abasourdie par la nouvelle de Perry et son colocataire que par sa chute. « Ben demande à Perry, j'suis sûre que vous vous êtes bien entraînés aux galipettes ensemble ! » rétorqua-t-elle, l'air revêche, tirant la moue. C'était supposé être une plaisanterie, et il y avait une part de ça. Mais en le disant à voix haute, Charlie se rendait compte qu'elle l'avait un peu mauvaise. Pourtant, ça ne la regardait pas, elle n'avait pas à leur en vouloir. Mais cette information inattendue la titillait un peu, sans qu'elle ne sache trop mettre des mots dessus. « Mais whaaaat, mais pas du tout ! » s'offusqua d'ailleurs la jeune chirurgienne quand son colocataire présuma qu'elle était peut-être aussi amoureuse du jeune papa. N'importe quoi. Bien sûr que non, elle n'avait pas de sentiments pour Perry. Elle était la baby-sit' de ses enfants, de un, et deuxièmement, leur relation s'approchait plus de celle de gamins de maternelle. Même si les enfants en maternelle, ça se faisait des petits bisous, parfois. Événement qui avait failli se produire, si on y réfléchissait, bien que Charlie ait fui, comme toujours, quand elle était gênée et submergée par la possibilité de conséquences désastreuses. Parallèlement, on pouvait se dire qu'en creusant plus loin, elle n'avait jamais réfléchi aux sentiments qu'elle pouvait éprouver pour Jackson. Ils avaient un lien fort et particulier, et Charlie était toujours partie du principe que c'était amplement suffisant dans l'équilibre de sa vie. Tout comme sa complicité avec Perry faisait de lui quelqu'un de proche, qu'elle aimait vraiment beaucoup. Aucune de ces deux relations ne lui avait jamais apporté matière à réflexion, jusqu'à aujourd'hui, maintenant qu'elle en discutait avec l'acrobate, explorant le fond de leurs doutes et de leurs besoins. De leurs manques. Et de ce qu'ils avaient pourtant déjà. Alors que le garçon lui donnait plus d'explications, la mine de Charlie se renfrognait. La brunette avait beau être un petit rayon de soleil insouciant au quotidien, elle avait également des défauts, comme tout un chacun, qui pouvaient rapidement prendre le pas sur ses aspects les plus admirables. « Ça fait plaisir en tout cas de savoir qu'en un an, aucune des deux personnes dont je me pensais proche n'ait pensé à m'en parler, ni même voulu le faire. » marmonna la jeune fille, assise au sol face à Jackson qui agitait nerveusement ses jambes dans le vide. « J'croyais qu'on était du genre à tout se dire, enfin d'accord c'est pas comme si on se racontait toujours les détails intimes, mais... » souffla-t-elle, à court d'arguments pour expliciter son émotion, qui débordait déjà trop que pour qu'elle n'arrive à vraiment se préoccuper de ce que Jackson lui disait. Il essayait de lui parler de Perry et lui, et autant ça lui tenait à cœur d'être là pour ses proches, autant sa déception prenait le dessus, sans qu'elle n'arrive à la contrôler, ou même s'en rendre compte. Oui, elle se sentait trahie, même si ça n'avait pas lieu d'être. C'était comme ça, elle était comme ça. La vérité, c'était qu'elle était jalouse, même si ce n'était pas nouveau. Mais maintenant que les événements étaient mis en lumière, ce sentiment piquant s'insinuait en elle. Elle était jalouse de savoir que quelqu'un qu'elle connaissait très bien avait partagé les mêmes moments d'intimité avec Jackson que ce qu'elle avait connu, et derrière son dos, en plus. De savoir que la complicité enfantine et pourtant forte qu'elle partageait avec Perry avait de la concurrence, une concurrence qui gagnait haut la main. Et que personne n'avait jugé bon de l'en informer, l'excluant. « Beaucoup de choses sont normales pour lui visiblement, comme se taper mon coloc' tranquillou sans me le dire. Apparemment c'est pas un problème de tenter des choses avec une personne et de jouer à un jeu similaire avec une autre derrière en gardant tout le monde dans le flou comme si c'était la norme. C'pas très honnête, et pas très sympa de sa part, m'enfin de la tienne non plus, si on va par là. J'imagine que de lui ça devrait pas m'étonner, vu sa maturité légendaire. » maugréa-t-elle, croisant les bras d'un air boudeur, passant d'abord sa frustration sur Perry, et ajoutant son coloc' dans le tas sans parvenir à s'arrêter. Elle réagissait de façon injuste et utilisait sans doute des mots un peu trop forts, mais elle n'arrivait pas à doser sa réaction, maintenant qu'elle réalisait toutes les implications de la révélation de son ami.

Tu te serais attendu à pas mal de réactions de la part de Charlie, mais celle-là, tu ne la comprenais pas vraiment. Enfin, qu’elle soit tombée du hamac, ça c’était presque prévisible, dans sa maladresse légendaire. Mais qu’elle te pique une genre de crise de jalousie ? Tu ne savais pas trop comment l’interpréter mais en tout cas c’est comme ça que tu le sentis, lorsqu’elle te rétorqua de demander à Perry pour le partenaire d’acrobaties, puisque vous vous étiez bien entraînés visiblement. Tu fronças les sourcils. « C’était qu’une blague. » Et tout se bousculait dans ta tête, jusqu’à ce que tes réflexions s’arrêtent à quelque part de bien précis : Charlie était peut-être amoureuse de Perry, elle aussi. Ça expliquerait ces réactions démesurées et un peu frustrées. T’avais rarement eu à l’affronter de cette façon-là. Tu lui fis donc part du fond de ta pensée, que tu la croyais sous le charme du Youtubeur. Elle s’en offusqua. « Ooook, ok ! C’est juste que comment tu réagis, là, je sais pas, c’était bizarre. » Peut-être pour tasser le sujet, peut-être pour se rattraper, tu ne savais pas trop, Charlie te demanda ensuite plus d’explications sur cette fameuse situation dont tu parlais. Tu te lanças donc, t’excusant d’avance ne rien lui avoir dit pendant … plus d’un an. Tu vis son visage changer, à Charlie, rien qu’avec cette information. Elle se sentait trahie, mis de côté dans votre amitié, tu le sentais rien qu’à son regard qui se détourna du tien. Tu continuas quand même à bredouiller tes explications, mais tu ne t’écoutais même plus vraiment. T’avais mal au cœur de cette gaffe, de ne pas t’être confié à Charlie. Et pourquoi, d’ailleurs ? T’avais si peur que ça qu’on te pète ta bulle ? Qu’on te rappelle que Peach ne serait jamais prêt pour quoi que ce soit de sérieux ? C’était la justification la plus plausible. « On est proches, Charlie, c’est pas ça, tu sais bien que j’ai toujours envie de tout te dire … » Tu haussas les épaules, la mine basse. Tu te sentais vraiment coupable tout d’un coup. « J’pense que j’avais juste envie de garder ça pour moi, rien que pour moi, parce que je sais au fond que ça ne mène sûrement à rien et que j’avais pas envie de t’entendre me le dire … » Tu ne savais pas si elle comprendrait. T’étais conscient que c’était nul de ta part de ne pas avoir glissé même pas juste un tout petit mot de ta relation avec Perry à Charlie. Surtout qu’elle aurait sans doute pas été rabat-joie comme tu le craignais. Quoique … elle l’était, là, rabat-joie. Et tu ne t’étais pas attendu à ça de sa part. Elle poursuivit sa tirade boudeuse, et ce qu’elle dit te fit froncer les sourcils. « Qu’est-ce que tu veux dire, qu’il tente des choses avec une personne et joue à un jeu similaire avec une autre derrière ? Il me garde dans le flou par rapport à qui ? Tu sais des trucs que je sais pas ? » T’empressas-tu de demander, stressé tout d’un coup. Vexé aussi par les dernières paroles de Charlie, qui te donnait vraiment un rôle horrible, alors que tu ne pensais pas que c’était si pire que ça, d’avoir voulu fréquenter un mec sans le crier sur tous les toits à n'importe qui. Sauf que Charlie, elle était sous le même toit que toi, et elle était loin d'être n'importe qui …

Dans le fond, Charlie savait qu'elle réagissait de façon un peu injuste, autant envers Perry que Jackson. Mais le choc de l'annonce passée, tout ce qu'il lui restait était un goût amer d'exclusion. « Bizarre, vraiment ? T'as raison, c'est mille fois plus chelou que d'apprendre que sur l'année écoulée tu t'es tapé ton coloc' plusieurs fois alors que lui sortait en fait secrètement avec ton pote pour qui tu baby-sittes depuis des années. » rétorqua la brune, ramenant ses genoux contre sa poitrine, l'air boudeur. Elle n'avait aucune envie d'emprunter ce chemin avec Jacks, en vérité, une dispute entre eux était la dernière chose dont elle avait besoin. Mais elle ne pouvait s'empêcher de laisser sa frustration et son sentiment de trahison sortir à l'air libre, et estimait que sa réponse était justifiée, bien que plus acide que nécessaire. Jackson lui donna ses raisons pour ne pas lui en avoir parlé. Charlie se tut, incapable de répondre quelque chose de positif, alors même qu'elle percevait la souffrance latente derrière ses paroles. Cette relation chaotique avec Perry ne lui était pas que bénéfique, elle le sentait bien derrière ses mots, et le ton de sa voix. Un pan d'amitié et une touche d'affection profonde en elle voulait le soutenir, le rassurer, comme ils l'avaient fait un peu plus tôt. Mais à nouveau, ses émotions prenaient toute la place, l'empêchant d'exprimer ce qu'elle aurait voulu lui donner. Elle essayait de museler ce ressentiment qui se diffusait à travers son corps et ses pensées, c'était déjà un effort considérable de sa part. Mais elle savait deep down qu'elle n'avait aucune envie de se défouler sur son ami, de lui infliger ça. Son cerveau ne parvenait simplement pas encore à analyser tous les tenants et aboutissants de cette situation. Trop d'angles à analyser, trop peu de temps pour réfléchir à ce qui l'affectait vraiment dans tout ça. Certaines choses étaient plus claires, mais c'étaient malheureusement les conclusions qui faisaient le plus de mal à Charlie. Deux personnes avec qui elle pensait avoir un lien particulier, quelque chose de plus rare, lui donnaient maintenant la sensation d'avoir 365 couteaux dans le dos. Alors qu'elle tentait d'apaiser les émotions houleuses qui se bousculaient dans sa tête, Jackson renchérit, ce qui ne fit que raviver la tempête. Quelque part, à nouveau, elle comprenait ses peurs, son besoin d'être rassuré. Mais il l'exprimait d'une façon qui blessait encore plus l'ego de la jeune résidente. « Donc y a vraiment que ça qui t'intéresses, savoir si j'ai des informations à partager sur ton amant ? » fit-elle, irritée. Il fallait qu'elle tienne cette rancœur dérangeante en laisse si elle voulait vraiment éviter d'abîmer ce qu'elle avait avec son colocataire. Bien que... Si quelque chose se fissurait maintenant, ce n'était pas vraiment du fait de ses actes à elle, non ? Elle expira bruyamment, tentant d'éteindre le feu de cette colère qui risquait de faire des dégâts qu'elle regretterait. « Bref, non, j'en sais rien, vu qu'il me met pas plus au courant que toi de ses amourettes. Note, toi tu t'es pas gardé de passer des nuits avec moi alors que tu voyais Perry, donc l'un dans l'autre, c'est un partout s'il batifole à côté. » renifla l'Australienne, reprenant son calme, mais ne s'empêchant pas de cracher ses vérités aiguisées d'aigreur. Elle repensa à la fois où Perry et elle avaient failli s'embrasser, à leurs blagues ambiguës, parfois. Ça datait, néanmoins, elle n'était même pas sûre que Jackson et lui se fréquentaient déjà à ce moment. Puis de toute manière, c'est tout ce que ça avait toujours été, des blagues, n'est-ce pas ? Plus Charlie y repensait, revoyait ses moments avec Jackson, et était de plus parasitée par des images mentales des deux garçons ensemble, plus elle était perdue, son ouragan émotif au bord de la catastrophe, qu'elle tentait à tout prix d'éviter.

Tout de suite quand Charlie t’accusa d’avoir sorti avec Perry pendant que tu te la tapais, tu secouas la tête et tu rectifias, levant l’index pour le pointer entre vous deux : « Je ne sortais pas avec Perry. Je ne sors toujours pas avec lui d’ailleurs. On est rien, lui et moi, rien de défini, pas plus que toi et moi ! » Lanças-tu. Même qu’au fond, maintenant que t’y songeais, la situation se ressemblait pas mal. C’est vrai que Charlie et toi vous couchiez ensemble depuis tout ce temps, vous passiez du temps ensemble aussi, vous déconniez, vous vous entendiez hyper bien. Ça revenait au même qu’avec Perry. De belles connexions, une bonne chimie. C’est juste que comme tu t’étais toujours imaginé te mettre en couple avec un homme, t’avais jamais vraiment envisagé que ça aille plus loin avec ta colocataire, tandis qu’avec Perry, les sentiments étaient là, tu les avais laissés naître. Ce n’était pas ce que t’avais voulu et tu le fis un peu comprendre à Charlie, en lui affirmant que si tu ne lui avais rien dit, c’était que tu voulais rester sur ton nuage, dans ta petite bulle, et que t’avais eu peur qu’elle te la pète en te ramenant les deux pieds sur terre. Tu le savais bien que ça ne fonctionnerait pas, avec Perry. Il n’était pas boyfriend material, c’est lui-même qui te le rappelait assez souvent d’ailleurs, probablement pour que tu ne t’emballes pas trop. Mais t’avais voulu t’accrocher un peu quand même à l’espoir et pour cette raison, t’avais préféré ne pas trop parler de votre relation, même en tant que simples amants. C’est que ton regard t’aurait trahi. N’importe qui aurait deviné que Perry, ce n’était pas juste un bon coup comme un autre. Les paroles suivantes de Charlie te rendirent confus, t’avais l’impression qu’elle accusait le Youtubeur de quelque chose mais tu ne comprenais pas trop où elle voulait en venir. Quand t’investiguas davantage, elle s’emporta encore plus, si c’était possible. « Mais non, y’a pas que ça, fuck Charlie pourquoi tout ce que je dis tu le prends comme ça !? » Lanças-tu, à ton tour irrité. Tu ne pouvais pas t’empêcher d’être heurté par sa réaction, de ne pas trop comprendre, et de t’emporter à ton tour. Pourtant ce n’était pas ton genre de lever le ton mais t’avais l’impression que Charlie sortait ça de nulle part. « J’sais déjà qu’il batifole à côté, t’en fais pas pour ça. J’comprenais juste pas où tu voulais en venir. » Si ça se trouvait il avait un truc plus sérieux avec quelqu’un d’autre et te l’avais caché. C’était peut-être ça l’info que Charlie avait et que tu ne captais pas. T’étais juste vraiment confus de tout ce qui était en train de se passer. « C’est ça qui te dérange ? Que j’aie passé des nuits avec toi et que j’en partageais aussi d’autres avec Perry ? Je pensais que toi aussi, tu voyais d’autres personnes … On a jamais … on a jamais parlé de quoi que ce soit à propos de ça, à propos de nous, toi et moi. J’pensais pas que … » Tu la regardas, hésitas, et haussas les épaules. « Que ça pouvait te rendre jalouse. »  Osas-tu ajouter.

Charlie serra les dents quand Jackson lui répondit qu'il n'y avait rien, ni avec Perry ni avec elle. Premièrement, il y avait bien quelque chose avec Perry, sinon ils ne seraient pas en train d'en discuter avec véhémence. Deuxièmement, autant elle n'avait jamais eu une vision romantique de sa relation particulière avec son colocataire, autant balancé comme ça à haute voix, d'un revers de la langue, ça sonnait pas spécialement agréable aux oreilles de la brune. Il ne faisait qu'un constat véridique, elle le savait bien, mais l'entendre de cette façon lui fit froncer les sourcils, comme si on venait de balancer une pique supplémentaire à son ego. Soit. Jacks commençait visiblement à en avoir marre de se défendre, s'emportant d'un chouïa alors que c'était vraiment rare, venant de lui. De plus, il soulignait un bon point : une Charlie boudeuse et touchée dans son orgueil était une Charlie qui pouvait vous retourner n'importe quel phrase pour la prendre mal. Elle se contenta d'un reniflement renfrogné, les bras croisés, mais ne renchérit pas. Il avait raison sur ce coup-là et elle n'avait pas envie de remettre de l'huile sur le feu, qu'elle avait elle-même lancé. Enfin. Plus ou moins. Jackson sembla néanmoins revenir à son côté calme et raisonnable, et la jeune femme tentait de suivre le mouvement. Parce qu'elle n'avait aucune envie d'aller par là avec son ami. S'il y avait bien une chose qu'elle voulait éviter, c'était une dispute avec lui. Elle savait qu'elle pouvait avoir des réactions disproportionnées, même si elle n'appréciait guère qu'on lui mette le nez dedans. Mais la placidité du brun, son aura d'ordinaire calme et apaisante, était toujours venue à bout des tempêtes émotives de la belle Australienne. En autant de temps à vivre ensemble, il avait appris à gérer et éteindre les incendies de Charlie, et elle s'était laissée caresser par cette influence positive. Aujourd'hui était un jour où elle souhaitait faire de même. Parce que l'idée d'être en froid avec Jackson maintenant ne lui plaisait pas du tout, pire encore, ça la rendait foncièrement triste. Elle laissa donc le garçon tout le temps de parole dont il avait besoin, s'imprégnant du calme et de la maturité qui émanait de lui, prenant soin de ne pas le couper. Et par la même occasion, prenant le temps d'inspirer plus sereinement et de réfléchir. « Oui, ça me dérange, même si le fait qu'aucun de vous ne m'ait dit quoi que ce soit joue un gros rôle aussi là-dedans. » commença-t-elle, déployant des efforts considérables pour canaliser ses émotions et réfléchir à ce qui l'emmerdait vraiment dans tout ça, avec une perspective plus analytique. « Évidemment que je sais qu'on n'était pas exclusifs ou quoi que ce soit, Jacks. C'était juste un truc... Spécial entre nous, et non j'ai jamais pris le temps de réfléchir à ça avant et peut-être que j'aurais dû j'en sais rien, mais bref, c'est pas d'ça que je veux parler maintenant. » déballa-t-elle avant de s'arrêter pour reprendre sa respiration, ses paroles s'enchaînant déjà avec leur impatience habituelle. « Oui, je suis jalouse. Je suis comme ça, c'est pas une question de couple ou quoi. J'suis jalouse même si un type avec qui j'ai couché qu'une fois embrasse une autre meuf devant moi. C'est chiant mais c'est pas grave, ça passe. Et là, ouais j'suis jalouse que ce soit entre Perry et toi, parce que  vous êtes pas n'importe qui pour moi, parce que j'me sens conne de pas avoir été au courant, bref pour un tas de raisons, qui viennent de la relation que j'ai avec toi et de celle que j'ai avec Perry. » Charlie s'était efforcée d'être la plus transparente possible dans sa réponse, cherchant elle-même les réponses au fond d'elle au moment où elle tentait de faire comprendre à Jackson ce qui l'agaçait à ce point. Et ce qui, au final, la blessait, tout simplement.

Tu t’étais mal exprimé, tu ne voulais pas dire qu’il n’y avait rien, rien du tout, que ce soit avec Perry ou avec Charlie d’ailleurs. Il y avait bel et bien quelque chose, de grand et de fort d’ailleurs, autant avec l’un qu’avec l’autre. Mais ce n’était rien de défini, voilà ce que tu avais ajouté par la suite mais il était trop tard, le mal était fait, t’avais vu la mâchoire de Charlie se serrer. T’avais atteint une corde sensible, tu l’avais blessée, et tu t’en voulais même si c’était pour un putain de choix de mot. T’avais pourtant raison, vous n’aviez aucune étiquette, à moins que la brunette veuille celle d’amante, ce que tu ne trouvais pas franchement flatteur et surtout, pas à la hauteur de ce qu’elle représentait pour toi. Charlie elle était un peu tout à la fois : la colocataire, la meilleure amie, l’amante, la confidente, parfois on aurait pu croire qu’elle était ton amoureuse, ouais, tellement le cumul de tous ces rôles-là dans ta vie faisait en sorte qu’elle était l’une des personnes qui te connaissait le mieux. Mais il n’y avait pas de mot pour englober tous ces rôles-là. Vous n’étiez rien et vous étiez tout à la fois. C’est ça que tu aurais dû lui dire, Jackson, mais t’étais pas un grand poète, ces mots-là n’auraient jamais trouvé leur sens dans ta tête. À la place, tout sortait de travers et Charlie le prenait mal à tout coup. Tu le lui reprochas, d’ailleurs, parce que t’en avais marre de la voir se braquer à chaque fois que tu ouvrais la bouche, toi qui pensais passer une journée tranquille avec elle. Franchement pour un endroit zen, y’avait absolument rien de zen entre vous deux, depuis dix minutes. T’avais haussé le ton un moment mais tu t’étais rapidement repris, prenant un pas de recul – dans ta tête, pas physiquement – avant de revenir dans la discussion avec un questionnement quant à la source de la colère de Charlie. Comme elle l’avait fait pour toi, tu lui laissas le temps et l’espace pour répondre. « On a merdé, Perry et moi. En vérité c’est qu’j’savais même pas qu’un lien aussi fort vous unissait, lui et toi. Tu vois, Perry et moi … on n’parle pas trop. C’est aussi ce qui me laisse croire que ça n’ira jamais plus loin. Il reste en surface, il s’ouvre pas trop à moi sur sa vie, son passé, ses relations, tout ça. » Expliquas-tu d’abord. Tu aurais voulu t’approcher de Charlie, la toucher, la prendre dans tes bras, la réconforter. Mais comme t’étais la source de son inconfort actuel, tu préférais lui laisser l’espace dont elle pouvait avoir besoin. « T’es spéciale pour moi aussi, Charlie. Et j’pense qu’à quelque part, j’peux comprendre où tu veux en venir … Dans le sens où … Si tu commençais à dater plus sérieusement quelqu’un, et que ça voulait potentiellement dire que toi et moi ça se finirait, ça me ferait de la peine, ça me ferait mal. J’vivrais une genre de peine d’amour, si on peut le dire comme ça, parce que j’tiens à toi énormément, et à ce qu’on a, aussi. Mais j’pense que … qu’on sait tous les deux que ça arrivera un jour. Même si c’est pas maintenant. » Ce n’était pas maintenant, non, enfin pas pour toi, parce que de ton côté rien n’était clair avec Perry et vous étiez loin d’être exclusifs. « Je m’excuse de te l’avoir caché, Charl. » Dis-tu avec une moue triste et désolée.

L'ouragan émotionnel de Charlie sembla se diriger vers une accalmie, grâce à la douceur et la patience de son interlocuteur. Elle était toujours heurtée dans son ego, mais elle acceptait l'exercice de cette réflexion sur ce qui la dérangeait vraiment. Comme elle l'avait dit, elle savait parfaitement que Jacks et elle n'avaient jamais entrepris la moindre démarche vers quelque chose de plus concret, encore moins exclusif, et elle n'avait pas non plus de regrets dissimulés derrière ce fait. Elle l'aimait d'amour, son colocataire, c'était pas récent ni surprenant, parce qu'ils avaient accroché dès le début, et pas que dans leurs draps. Cela faisait partie de leur relation, mais ça n'en était qu'une infime partie et ça n'avait jamais pris de tournure romantique. Non, l'amour qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre, c'était celui d'un lien fusionnel et multiple, autant de bêtises que de confidences, autant d'amitié que de fraternité, une vie quotidienne partagée ensemble, et des nuits, bien moins fréquentes, réciproquement désirées. C'était un tout, qui faisait de leur relation quelque chose de si solide. Les attentions qu'ils pouvaient avoir l'un envers l'autre, l'instinct protecteur dans certains cas, la propension à être totalement déraisonnables ensemble dans d'autres. Et jamais Charlie ne voudrait prendre le risque de gâcher tout ça, même un instant. Ce qui la liait au garçon, c'était bien plus qu'un romantisme à sens unique ou une jalousie mal placée, bien, bien loin de là. Elle avait besoin de processer ce qu'il lui avait appris aujourd'hui, c'était certain. Mais elle ne voulait pas se laisser submerger par cette colère, par ces émotions envahissantes et vives qu'elle n'avait jamais bien su contrôler. Elle écoutait Jackson poursuivre, le regard toujours baissé, les sourcils un peu froncés, mais ses traits s'étaient perceptiblement détendus. Apparemment pas, pensa-t-elle très fort quand son ami avoua qu'il n'avait pas eu vent d'un lien si éloquent que ça entre Perry et elle. Elle relégua cependant cette réaction ailleurs dans son esprit, consciente qu'elle continuait à se braquer pour un rien et que ce n'était pas le moment de ressortir ses bombes de colère. La belle brune releva enfin ses iris iceberg vers son colocataire, hochant la tête à ces propos qui détaillaient un peu plus la situation dans laquelle il se retrouvait avec Perry. Elle comprenait ce qu'il voulait dire, connaissant suffisamment le jeune papa pour voir ce dont il parlait, bien que cet aspect de la personnalité de Perry ne l'ait jamais dérangée. Forcément. Y avait pas de raison, ils avaient toujours partagé une amitié basé sur la ressemblance de leur âge mental et des incroyables tranches de rire, ainsi qu'un humour très particulier en commun. Même si maintenant, elle se retrouvait contrariée qu'il n'ait jamais parlé de Jackson, qu'il ne se soit pas ouvert d'un chouïa sur sa vie plus personnelle. Ça aurait été un bon point, quand même, de mentionner au détour d'une conversation immature qu'il se faisait son coloc'. Mais soit. C'était pas sa perception de la chose qui importait, là tout de suite, mais celle de l'acrobate, et elle pouvait comprendre une infime partie de ce qu'il devait ressentir dans cette relation. Il enchaîna d'ailleurs pour glisser des mots veloutés sur leur relation à eux. Elle sourit, radoucie, apaisée. Son petit cœur mou loupa tout de même un battement sur la fin, quand Jackson conclut qu'ils savaient tous les deux qu'un jour, ce qu'il décrivait comme une peine d'amour, leur tomberait dessus. C'était vrai que célibataire, partager tant de moments avec un ami aussi proche, échanger tant de choses, du futile à l'intime, construire un lien indéfectible, ça semblait simple, facile, naturel. Et on en oubliait que quand les gens se mettaient en couple, ça pouvait changer la donne. Ça ne briserait pas une amitié, ça elle en était persuadée. Mais ça changeait des choses. Ça pouvait éloigner, abîmer, effacer. Et comme l'avait souligné le brun, c'était peut-être ça aussi, qui affectait Charlie. « Et ce sera pas si grave. J'vais sûrement encore te faire un drame digne de Titanic, mais ce sera pas grave. Tu s'ras toujours mon copain. » sourit-elle doucement, rassérénée et plus apaisée que ce qu'elle aurait cru, en voyant tout ce bout de chemin qu'elle partageait avec Jackson, et qu'elle voyait s'étendre encore sur des milliers de kilomètres dans le lointain. « Thanks. It's okay. » ajouta-t-elle avec un petit haussement d'épaules qui ressemblait à une acceptation de paix timide, mais son regard était on ne peut plus sincère, et avait retrouvé de son éclat radieux.

END