Just a little bit of your heart |owlia

Le froid anglais ne lui avait jamais semblé aussi doux. Les yeux de Gigi se posèrent sur les doigts d'Owen qui jouait du piano. Elle se disait qu'elle avait une chance inouïe de l'avoir dans sa vie. Durant toute son enfance destructurée, elle s'était persuadée qu'elle ne serait jamais aimée. Seul Livio avait réussi à percer sa carapace et même si aujourd'hui leur relation était tumultueuse, elle ne pouvait nier qu'il l'avait aidé à s'ouvrir. Sans lui elle n'aurait sans doute pas cru qu'un jour un autre homme pouvait l'aimer. Ce fut surtout innatendu car Gigi était tombée amoureuse d'Owen très soudainement. Le britannique l'avait charmé non seulement par son apparence mais aussi parce qu'il dégageait bien plus.  Il était quelqu'un de bon, attentionné, généreux, honnête et affectueux. Elle l'aimait pour un million de raisons et pressentait que ce qu'il y avait entre eux était fort et unique. Ce sentiment, qu'elle partageait avec lui, était très peu compris par leur entourage. Tous deux vivaient si bien dans leur petite bulle, qu'ils n'y prêtaient peu d'attention. Ils avaient précipité les choses entre eux, que ce soit le premier soir où ils ont succombé dans les draps ou à leur premier je t'aime. Et maintenant, ils étaient fiancés. Owen avait sa demande et Gigi avait bien évidement répondu oui, le souffle coupé parce que son cœur allait exploser de bonheur.

Depuis leur escapade italienne, Gigi ne résistait pas à se pavaner et montrer fièrement son annulaire. Si les grands-parents d'Owen furent heureux pour eux, elle espérait que ses parents le soient aussi. Ils étaient venus séjourner pour leur annoncer et l'italienne pensait naïvement que cette nouvelle leur ferait plaisir. Après tout, cela se voyait qu'ils étaient fous l'un de l'autre? Elle n'avait d'yeux que pour lui, comment les gens ne pouvaient-ils pas s'en rendre compte? D'ailleurs, à cet instant, alors qu'elle frolait ses mains pour le rejoindre près du piano, elle le regardait amoureusement. Des bruits de talons firent interruption et la voix peu chaleureuse de sa future belle-mère les invita à les rejoindre dans leur véranda. Gigi avait l'habitude que l'on ne l'apprécie pas ou qu'on la catalogue pour avoir fait de la télé-réalité. Mais cette fois, elle se persuadait que ce mariage permettrait de prouver qu'ils étaient faits pour être ensemble. Tu crois qu'il existe un bon moment?  dit-elle avec une certaine nervosité.  Je te laisse faire.  C'est mieux que ça vienne de toi. Ils ne pourront pas résister à ton beau sourire. lui dit-elle pour se détendre de son propre stress.

Si Owen appréhendait annoncer leurs fiançailles à ses parents, Gigi savait qu'il essayait de ne pas trop le montrer. Elle tenta elle-même de se détendre mais l'intervention froide de sa belle-mère ne l'aidait franchement pas. Il déposa un baiser sur son front pour, elle supposait, la rassurer. L'italienne entoura de ses bras la nuque d'Owen et blottit quelques instants sa tête au creux de son épaule. Son parfum la rassurait inexplicablement. Ça va aller. Ne t'inquiètes pas. murmura-t-elle pour leur donner mutuellement, un peu de courage. En se détachant de son étreinte, elle croisa son regard et lui rendit un sourire encourageant.

Ensemble ils se dirigèrent vers la véranda où les parents d'Owen les attendaient. Il n'y avait pas cette atmosphère conviviale et chaleureuse comme régnait à la ferme, avec ses grands-parents. Gigi était moins à l'aise et avait du mal à regarder autre chose que le service à thé joliment dressé à table. Heureusement Monsieur Windson brisa le silence en servant le thé. Un thé de Marrakech, le meilleur avait-il précisé. Owen put profiter de l'occasion pour parler de leurs dernières vacances en Italie. Gigi avait bien du mal à ne pas se focaliser sur sa bague de fiançailles, qui représentait le plus beau souvenir de tous leurs voyages. Nous ne sommes pas rester très longtemps, nous tenions passer Noël à Bowen. admit Gigi qui serra la main de son fiancé. Elle eut un très court moment d'hésitation. Sa langue fourcha. En famille. rajouta-t-elle, en levant les yeux vers Owen. Elle lui tendait une perche. Son cœur commençait à s'emballer mais elle ignora complètement la pression qui serrait sa poitrine. À vrai dire, Gigi souriait. Elle réalisait que cet homme avait donné une chance incroyable à leur histoire. Il faisait d'elle une femme heureuse et comblée.

Impatiente mais à la fois anxieuse, Gigi appréhendait la façon dont ses beaux-parents accueilleront la nouvelle de leurs fiançailles. Pour se rassurer elle gardait sa main dans celle d'Owen et lui laissait le soin d'annoncer qu'il lui avait demander en mariage. Son cœur battait à tout rompre. Face à lui, elle ne cessait de sourire. Cette fossette, ses yeux, cette bouche. Cet être. Elle l'aimait comme une dingue, cet homme. J'ai dit oui ! répéta-t-elle en brandissant fièrement sa main, orné de sa bague de fiançailles. L'absence de réaction de ses beaux-parents désarma Giulia qui, observait à présent sa belle-mère avec un œil noir. Son tempérament aurait voulu hurler et implorer pourquoi diable elle ne pouvait pas simplement être heureuse pour son fils, qui lui, exprimait clairement qu'il était fou de joie par cette nouvelle. Cependant, avec difficulté, certes, mais elle se retint. Elle reprit précipitamment la parole, s'efforçant du mieux qu'elle pouvait de garder son calme. On sait que cela peut paraître précipité mais on est sûr de nous. On va se marier. Afin qu'il vienne à son secours, elle jeta un regard désespéré en direction d'Owen. Au même instant, une envie soudaine la bouscula et ce fut trop tard pour reculer. On veut se marier et on va se marier. Bientôt. Très bientôt. rajouta-t-elle d'un ton sans réplique. Ils n'avaient pas vraiment fixé de date, Gigi ne parvenait pas à décolèrer et voulait surtout leur faire montrer qu'ils ne reculeraient devant rien.

Si le manque de réaction vexa d'abord Gigi ce ne fut rien à côté du rire moqueur de sa belle-mère. Owen devança sa fiancée et répondit comme il le faisait toujours, avec son cœur. Gigi en avait presque les larmes aux yeux. Il l'avait soutenu et n'avait pas hésité à tenir tête à ses parents. Elle ressentit un élan de reconnaissance, pensant à quel point elle l'aimait plus que tout. Puis au tour de son beau-père de reprendre la parole, souhaitant à tout prix rencontrer les parents de l'italienne. Gigi haussa un sourcil et lui lança un regard hautain. Il était hors de question qu'il décide quoique ce soit sur leur mariage.  La question ne se pose même pas, je n'ai pas de famille. dit-elle avec froideur. Ce qui était à moitié vrai. A ses yeux, ses parents n'avaient plus de place dans sa vie. Car l'amour parental était bien le seul qu'elle n'ait jamais vu. Petite et même adolescente, elle avait attendu ne serait-ce qu'un geste d'affection. Mais ils ne venaient même pas aux visites médiatisés lorsqu'elle était placée dans les foyers ou ses familles d'accueil. Ces carences affectives l'avaient rendu vulnérable, méfiante et agressive envers le monde qui l'entoure. Très peu parvenait à briser sa carapace. Pourtant Owen l'avait fait et de façon incroyable, instantanément. Cet homme lui avait redonné foi à l'amour, alors qu'elle ne pensait plus pouvoir être aimé. Aujourd'hui c'était évident, il était l'homme de sa vie. Gigi se sentait blessée à chaque fois qu'on remettait en doute son histoire. Ses beaux-parents touchaient un point sensible. Piquée au vif, la colère montait crescendo. Elle ne pouvait pas se contenir et se retenir de ne pas répliquer. C'est quoi le problème? Je ne suis pas assez bien pour votre fils? Vous ne supportez pas que je le rend heureux? Avec tout le respect que je vous dois, va falloir vous y faire. s'emporta Gigi qui posa fermement sa main sur la jambe tremblante d'Owen. Elle ressentait aussi sa colère mais malheureusement elle n'arrivait pas à tempérer.