♩ Talk ♩ (ft. River)

Le Wojna’s était un peu devenu comme un deuxième chez moi au fils du temps. Enfin, non, quand même pas … mais disons que j’y avais mes petites habitudes, à force d’y aller. Depuis que j’avais emménagé dans mon nouvel appartement il y a bien six mois maintenant, j’y allais tous les jours. C’est juste en face de chez moi, c’est pas trop cher et c’est pratique pour moi qui n’ait pas le temps de cuisiner. En plus, à l’heure où j’y vais habituellement, il n’y a pas beaucoup de monde et ça me permet de discuter un peu avec le personnel du lieu. Ils sont tous assez sympas, et y a l’air d’avoir une bonne ambiance. Et … bon, j’avoue que j’ai un petit faible pour un des serveurs. River, qu’il s’appelle.

Enfin, quand je dis que j’ai un petit faible pour lui … je suis pas genre, amoureuse de lui ou quoi. C’est plutôt qu’il m’amuse. J’ai eu plusieurs fois l’occasion de l’observer - pendant que je me délectait de mon verre quotidien de leur rhum maison - et je me demande comment il a fait pour ne pas s’être déjà fait virer. Je veux dire … pour faire simple, il n’est pas toujours aussi commerçant qu’il est censé l’être. Parfois je le vois s’énerver pour une raison ou pour une autre (cette raison étant souvent un client un peu trop chiant à son goût) et j’avoue que ça me fait beaucoup rire. Intérieurement. Puis il est plutôt mignon en plus de ça, je ne vais pas mentir. Emettre l’hypothèse que je ne continue pas à venir au Wojna’s seulement pour les tapas et la proximité du lieu ne serait pas totalement un mensonge.

Comme tous les jours ou presque, River était de service cet après-midi-là. Je finis mon second verre (parfois je me fais plaisir et j’en prends plus qu’un seul, et parfois je le regrette) et sortis mon téléphone pour regarder l’heure. Quinze heures quarante. Bon … j’avais prit mon temps comme d’habitude. Mais je n’étais pas si pressée que ça après tout - je n’avais prévu grand-chose pour le reste de la journée. Rien, en fait. Peut-être continuer Cyberpunk, enfin sorti dans sa « vraie » version console, maintenant que je prenais vraiment du plaisir à y jouer ? Ouais, je pouvais faire ça … ou bien je pouvais juste rester encore un petit peu, histoire de finir de digérer tranquillement, de profiter de l’ambiance et de parler un peu avec les gens. Avec River, notamment.

Je profitai qu’il passe non loin de moi pour (gentiment) l’apostropher, avec un joli sourire : « Hé, River ! Je crois que je t’ai pas demandé comment tu allais aujourd’hui. » Oui, certes … y avait mieux pour ouvrir une conversation, je sais. Surtout qu’on pouvait voir facilement à sa tête qu’il n’allait pas super bien ; qu’il avait l’air contrarié. Ou bien c’était sa tête normale, allez savoir, j’ai horreur qu’on me fixe du regard quand on me parle alors je ne l’inflige pas aux autres. Bref. « Tu finis ton service bientôt ? J’ai rien à faire après et je me disais qu’on pouvait peut-être discuter un peu ? » Je me sentis obligée de préciser, parce qu’il pourrait croire l’inverse (à juste titre d’ailleurs, parce que c’est totalement mon genre de faire ça) : « T’inquiète hein, je vais pas te draguer ! ».  

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