Cars and men (w/Theodore)

Mon amour pour les voitures n'étaient un secret pour personne. Je passais beaucoup de temps sur les circuits et je croisais énormément de passionnés comme moi. Certains sortaient du lot, comme par exemple Theodore, qui à partir de peu avait réussi à se faufiler très souvent dans le garage de mon écurie. Ce jeune homme était un vrai passionné de mécanique, certes il le faisait afin de gagner des paris, mais il chercher à comprendre pour s'améliorer. Cette détermination m'avait frappé dès le premier jour. Il était meilleur que certains de nos jeunes en apprentissage, très pointilleux... Et gentil. Je lui filais parfois mes avis sur les courses, le guidant dans la bonne direction pour ses paris.
Aujourd'hui était un peu différent, ce n'était pas sur un circuit que l'on se retrouvait, mais chez moi. Je lui avais proposé de venir jeter un oeil aux moteurs de mes voitures. Il y en avait pour tous les gouts, de la puissante à la berline familiale. J'aimais mes voitures, elles étaient toutes impeccables... J'en prenais grand soin et j'avais transmis ça à ma fille, qui passait son temps à vouloir les nettoyer et se mettre derrière le volant. Je sentais déjà la carrière dans les sports automobiles, car elle me réclamait déjà de monter sur les karts, ou même avec moi dans les F1.
J'attendais Théo en buvant un café noir. J'avais le programme de ma semaine sous les yeux et en le regardant je me sentais déjà épuisé. Il y avait des rendez vous, des obligations et un départ à l'étranger à la fin de semaine. Il me manquait juste les heures de sommeil dans l'équation.

Salut. Dis-je en le voyant arriver.

Theodore ne se faisait pas vraiment facilement de nouveau ami, il n’était pas l’être le plus sociable qui soit. Il sait être sympa avec les gens, communiquer sa bonne humeur et même taper la conversation avec n’importe qui tant que le sujet est un minimum intéressant à ses yeux. Il avait cependant beaucoup plus de difficultés à se lier d’amitié avec quelqu’un. Il faut dire qu’il a longtemps fait partie d’un cercle très fermé, beaucoup trop select pour qu’il arrive aisément à trouver des points commun avec des personnes qui ne viennent pas du même milieu que lui : celui du spectacle. Knox fait le show à sa manière, les courses automobiles sont un vrai spectacle pour qui aime ça. Ça n’intéresse pas réellement l’illusionniste que de conduire un jour ce genre de véhicules à ses yeux hautement dangereux et il n’a pas grandi là-dedans. Il adore conduire sa voiture, mais ça s’arrête là. Donc il est vrai que contrairement aux autres fans de l’écurie de Knox, il ne s’intéressait pas au fait d’essayer un tour sur la piste, mais son intérêt se portait totalement sur l’aspect mécanique de la chose.

Ils ont sympathisé ainsi, Theodore avait évoqué les paris qu’il pouvait faire et sa volonté d’affiner ses connaissances et mieux miser. C’est rare qu’il expose ainsi son addiction aux jeux, bien sûr il n’a pas dit avoir un problème. Il disait faire ça de temps en temps, mais qui parie de temps en temps et cherche à ce point à se documenter sur le sujet ? L’amitié c’était pour déguiser ça, et puis finalement, il doit bien admettre apprécier Knox en tant qu’humain.

A l’invitation de boire une café, ou autre chose, dans la résidence de Knox, il avait répondu positivement, même s’ils avaient eut toute la peine du monde à fixer une date. Leurs vies respectives étaient bien remplies et puis, Theodore aimait passer une bonne partie de son temps libre avec Nastya. Ce qui lui donne l’impression de se comporter comme un ado amoureux, d’une certaine manière, il l’est plus ou moins.

“ Salut ! “ Répond l’illusionniste en s’approchant de Knox dégustant ce qui semble être un café, l’air franchement crevé. Il retiens difficilement un petit rire à cette première analyse “ Ça va, j’te réveille peut-être ? “ Il fit une poignée de main à son ami pour le saluer avant de s’asseoir sans trop attendre d’être invité. Plutôt ravi de voir quelqu’un d’autre d’au moins aussi fatigué que lui. “ Est-ce qu’on est devenus assez vieux pour prétendre rêver de faire une sieste d’aussi bonne heure dans une journée ? “

L'amour pour les sports automobiles m'avait été transmis par mon paternel. Des mon plus jeune âge je m'étais retrouvé sur les circuits et j'avais pu découvrir ce monde si particulier. J'étais conscient de ma chance, mais mon succès n'était pas uniquement du à mon pédigrée. J'avais passé des heures à m'entrainer, à travailler pour réussir à atteindre le niveau que j'avais à ce jour. Et aujourd'hui j'avais la chance d'avoir un garage rempli de voiture magnifique. Ma collection était importante, bien plus que ce qu'il y avait là, mais mes favorites se trouvaient au plus près de chez moi. Les moteurs de ces automobiles étaient tous plus puissants que les autres, et comme je connaissais un amateur de mécanique, je lui avais proposé de venir voir. Theo ne s'intéressait pas à la mécanique sans but, il le faisait afin d'être meilleur dans ses paris, mais je m'en foutais, car j'y voyais là un mec passionné - même si j'étais un peu à côté de la plaque -.

Écoute, pour se réveiller, il faudrait déjà avoir le temps de dormir. Dis-je en reprenant une grande gorgée de café. Quand je mets la petite à la sieste, j'ai toujours envie de rester avec elle, mais il y a toujours autre chose à faire.

L'idée de dormir était tentante, mais irréelle vu l'état de mon planning. Il valait mieux pour moi que je n'y pense pas trop. Je mis ma tasse de côté avant d'avancer avec mon invité vers les voitures. Je passais sans m'arrêter devant la Range Rover que j'utilisais au quotidien et qui avait un moteur classique. Fais toi plaisir, choisit celles que tu veux regarder, elles sont toutes ouvertes. Lui indiquais-je avant de me mettre devant une magnifique Ferrari que j'aimais énormément. Ce n'était ni la plus belle, ni la plus chère, je me l'étais juste acheté après ma première victoire. Elle avait une valeur sentimentale importante. Si tu veux plus de lumière, tu as tout ce qu'il faut à l'arrière du garage. Pareil si tu veux boire ou manger un truc. Je pouvais presque vivre ici, il y avait tout, mais c'était plutôt normal vu que j'y passais beaucoup de temps. J'étais d'ailleurs en train de passer cette passion à Pénélope qui me suivait à la trace lorsqu'elle me voyait aller près des voitures.

Quoi de neuf niveau paris ? De la chance ?

“J’imagine… “ Il ne se contente pas d’imaginer, Theodore est insomniaque depuis la mort de son père alors qu’il n’avait que sept ans. La nuit, ses pensées s’agitent. C’est ce qui le pousse dans les bras des jeux d’argent. C’est tellement pratique pour n’avoir à penser à rien d’autre, fixer un objectif, une idée. Ça l’aide à se concentrer, même si ça le détruit à petit feu. C’est si discret, il n’a pas l’air mal le Théodore. Il est toujours de bonne humeur, reposé, il n’a aucun signe d’agressivité et sait masquer son manque et ses activités de jeux. Il se cache, pas par honte, mais parce que les autres ne le comprennent pas et ça l’agace. Theodore a l’habitude de rester dans son coin, parce qu’il s’est toujours senti à part, incompris. Son quotient intellectuel ne se limite pas juste lui permettre d’engranger des connaissances tel un puits sans fond, mais ce sont ces données qui peuvent le tourmenter pendant des heures. Il serait capable de bloquer des heures, des jours sans manger, devant une simple équation qu’il ne peut résoudre. Par besoin de démmêler les informations, d’en avoir le contrôle. Le bordel dans sa tête, il ne le partage avec personne.

Mettre la petite à la sieste, voila bien quelque chose qu’il ne connaitra non plus jamais avec Penny, sa fille. Quinze ans sans la connaitre, il digère tant bien que mal cette réalité pour profiter de l’instant présent. “ La plupart des gens trouvent toujours le moyen de ne rien faire, on ne doit vraiment pas être foutu comme tout le monde. “ Ils aiment tous les deux beaucoup trop leur travail pour s’en détourner, des métiers passions, ça ne court pas les rues. Il accompagnait Knox dans le garage, s’arrêtant aussi devant la Ferrari, il ne savait pas s’il avait fait suffisamment fortune pour s’offrir ce genre de véhicule, et puis… Theodore aime rester discret, il a toujours été quelqu’un d’un peu réservé, sociable mais pudique. “ C’est pas un modèle récent, par rapport aux autres… “ C’est qu’il commence à s’y connaitre, mais c’était plus une invitation à lui raconter l’histoire de ce bolide. “ De la chance ? “ Il avait presque envie de rire, mais n’en fis rien. Il sait que les gens ne trouvent trop prétentieux lorsqu’il dit que ça n’a rien à voir avec la chance, mais qu’il contrôle le jeu. C’est le problème avec l’addiction, il est persuadé qu’il maitrise les jeux, quelqu’ils soient, même ceux du hasard ! Il est persuadé que l’argent perdu fait partie de ses stratégies pour gagner plus le coup suivant. Tellement intelligent et pourtant tellement biaisé par cette saleté de dépendance… S’il n’avait pas tous ces troubles affectifs, nul doute qu’il n’en serait pas là aujourd’hui. “ Plutôt pas mal… Mais c’est pas vraiment la saison des grands prix en F1 en ce moment. “ Il ne va pas non plus préciser qu’en attendant, il s’est à nouveau tourné vers son premier amour en matière de paris sportif : le basketball américain.

J'aimerai parfois être comme tous ces gens et pouvoir poser mon cul sur le canapé cinq minutes sans rien avoir à faire.  Je confirmais, car j'avais du mal à suivre la cadence en ce moment. J'avais accepté beaucoup trop de projets, de boulot, je m'entrainais et je devais suivre toutes les activités de Pénélope... J'étais dépassé avant même d'avoir commencé la journée. Rien que ça c'était épuisant. Théodore semblait être dans le même cas que moi, peut être pour des raisons différentes des miennes, mais quand même. Je n'allais pas le pousser à m'en parler s'il ne le souhaitait pas, nous n'étions pas intimes comme ça.
Le jeune homme était entré dans mon garage et regardait tout autour de lui pour choisir une victime. Ce fut sur la plus ancienne Ferrari qu'il s'arrêta. Celle que mon père m'avait offerte après ma première victoire en Grand Prix. C'était une petite, un bijou que je n'osais pas conduire tant elle avait une valeur sentimentale à mes yeux. Je lui expliquais un peu l'histoire de ce bolide, comment mon père l'avait récupéré auprès d'un collectionneur avant de me la donner. Je l'aimais énormément et cela devait s'entendre lorsque j'en parlais.

Maladroitement, je parlais de chance en évoquant les paris qu'il faisait. Je savais pertinemment que ce n'était pas le cas pourtant. Il m'arrivait parfois de parier, mais je gagnais rarement, car je pariais avec mon cœur - les pires paris -. Il était beaucoup plus doué que moi dans le domaine, car il calculait tous ses coups avec précisions. Il réfléchissait avant de poser son argent, et même si parfois il perdait, ça ne l'empêchait pas de reprendre sa tactique et de gagner le coup suivant.

On est bientôt à la coupure estivale en effet. Ça me faisait toujours étrange de dire cela, car en temps qu'Australien le mois d'aout n'avait rien à voir avec l'été. Ça allait être l'occasion de lever un peu le pied et de m'occuper de moi même. Du moins c'était le planning. Je n'y croyais qu'à moitié, mais bon... Au moins j'avais un peu d'espoir.
Je m'assis sur le capot de ma Range Rover. C'était l'endroit idéal pour avoir un bon point de vue sur tout le garage. Je passais en revu les différentes voitures que je possédais. Je pensais également à celle qui remplissait mon garage à Monaco. Puis il y avait celles qui me faisaient de l’œil mais que je ne possédais pas encore. J'étais un amoureux des belles voitures. C'était mon dada et je profitais de travailler auprès des manufacteurs pour obtenir les plus belles d'entre elles.

“ Je suis certain que tu t’ennuierai rapidement, parce que si tu le voulais, tu pourrais ne rien faire… C’est juste pas dans ta nature. “ Ni dans celle de Theodore, il a constamment besoin de s’occuper, surtout l’esprit. C’est pas pour rien qu’il est tombé dans cette addiction, parce que les jeux d’argent qui font réfléchir, ça lui fait du bien. Il ne supporte pas de rester assis à ne rien faire. Il était loin de penser que d’ici peu il sera bien obligé de le faire, depuis un lit d’hôpital.

L’illusionniste se déplace dans le garage, l’air débordé de Knox pourrait presque donner l’impression de déranger, mais cela convient à Theodore que Knox ait l’esprit ailleurs, il a de quoi s’occuper tout seul au milieu de ces belles voitures. Ils parlent le même langage, celui des bourreaux de travail. Néanmoins, Theodore compte bien lever le pied pour passer plus de temps avec la raison de sa venue à Bowen, sa fille Jenny.

Il écoute l’histoire du véhicule un peu daté, en comparaison des autres voitures présentes. Theodore ne s’imagine pas conduire ce genre d’engin, il apprécie les courses pour une toute autre raison. Chacun son domaine, son plaisir dans le sport.

La saison des courses auto était passée, mais ça ne veut pas dire que l’on peut cesser de se documenter sur le sujet. Ce serait prendre le risque de prendre du retard et perdre bêtement. Il ne joue pas vraiment pour l’argent, même s’il s’en fais beaucoup ainsi.

Les minutes s’égrainent au fil des paroles de Knox, il lui parle de différents modèles et Theodore se contente d’écouter, d’apprendre. Il sait reconnaitre quand il n’a rien à dire, il faut savoir apprendre de l’expert. “ Franchement, je pense qu’avec tout ça, je devrais encore mieux jouer la prochaine fois. “ Il sait que Knox aussi, n’aime pas particulièrement perdre, on n’est pas sportif pour autre chose que la gagne ! “ En tout cas, ça me fait toujours plaisir de te parler, on voit que t’es un vrai passionné, je pourrais t'écouter pendant des heures !  “ Il a toujours eut une grande affection pour les passionnés, parce qu’ils sont vraiment en vie, eux.

“ Je sais que ça ne sera pas aussi grandiose que le spectacle à Vegas, mais si tu veux revenir me voir, je fais encore quelques dates en ville… J’ai l’impression de prendre ma retraite avec le complexe d’escape game, c’est une sensation plutôt particulière... Hm. “ Parce qu’il est jeune. Knox peut comprendre ça, en quelque sorte. Toujours dans le même domaine, pour pour pratiquer autrement.

Je ne connaissais pas tout sur tout aux voitures, mais j'avais une passion pour ces dernières qui me permettaient d'emmagasiner énormément d'informations à leur sujet. C'était un peu le même principe avec les F1. Je n'aurais jamais été capable de démonter et remonter un moteur par moi même, mais je comprenais le principe. Le monde de l'automobile me berçait depuis que j'étais tout gamin.

Je laissais vadrouiller Théodore dans le garage, il n'y avait pas besoin de parler. Sans chichis il regardait les voitures, me posant des questions uniquement lorsqu'il en avait envie. J'y répondais de bon cœur, car je savais que ça allait l'aider pour ses prochains paris. Il avait compris qu'en s'appuyant sur des connaissances scientifiques, il avait plus de chance de remporter ce qu'il misait. Exactement comme moi et mon besoin presque compulsif de toujours vouloir gagner. J'étais le pire mauvais perdant. Combien de fois je m'étais mis à râler en tapant du poing à la fin d'une course pour avoir fini second ou pire... Au moins je ne m'énervais que sur moi la plupart du temps.

Je viendrais avec plaisir, il faut juste que je trouve quelqu'un pour me garder Pento. Dis-je avec enthousiasme. Son show de Vegas était grandiose et j'avais adoré y aller. J'aurais probablement pu emmener ma petite si elle avait été un petit peu plus grande, et surtout capable de se coucher après vingt heure. Ce n'est pas vraiment une retraite, non ? En tout cas j'aime beaucoup le concept de l'escape game. J'allais y passer c'était certain, j'aimais me torturer l'esprit pour résoudre des énigmes et me dépasser.

Je mis à bailler et sentant mes paupières se faire lourdes, je partis me faire un café dans un coin du garage en le laissant se balader. Sans caféine, je ne tiendrais pas, j'étais en train de m'épuiser et ça n'allait pas aller en s'arrangeant si je redevenais pilote. Je ne parlais que très peu de ce projet, car ce n'était pas encore fait, mais j'y travaillais.

Theodore aime venir ici, il n’a pas forcément le temps d’être là, mais il s’en fiche. Il aime prendre ce luxe, parce qu’il a choisi de changer sa vie, de laisser plus de place pour autre chose que le travail. Malheureusement, son gout du jeu est toujours présent, puissant, écrasant. Knox l’alimente, à son insu. Cette visite de courtoisie n’était pas totalement désintéressée, bien qu’il était plaisant de discuter avec lui, l’attention de Theo se tournait aussi sur les bolides, sur les détails techniques qui fait qu’un véhicule performe moins bien qu’un autre.

“ Je serais ravi d’avoir ton avis, et voir si tu t’en sors ! “ Les énigmes sont pointues, il le sait, certains joueurs sont vexés, il sait que Knox pourrait l’être. Ils sont un peu pareils : mauvais perdants. Ça l’amuse un peu Theodore, d’en voir certain rager, vouloir négocier avec lui la connaissance de la solution. “ Une retraite de la scène on dira. “ Ça nuance peut-être le terme, mais pour lui, c’est un peu semblable. Il ne pensait pas mourir sur les planches, mais encore s’y produire de longues années. Ce revirement de situation n’est pas déplaisante, juste déroutant. S’adapter a toujours été son fort, mais curieusement cette fois c’est un peu plus compliqué.

Il vient lui tapoter l’épaule alors que Knox se verse un nouveau café. “ Je vais te laisser, j’ai pas mal d’administratif en cours. Et toi… Tâche de faire une sieste avant de ressembler à un zombie digne d’une salle d’escape game. “ Il plaisante, mais il s’inquiète sincèrement, sans vouloir entrer sur ce terrain-là. Parler de leurs problèmes respectifs, non merci. Non pas qu’il ne s’intéresse pas à Knox, mais il ne voudrait pas que ça devienne réciproque.

Après lui avoir serré la main et assuré connaitre le chemin de la sortie, Theodore prit congé de l’ancien pilote avec plein d’idées en tête pour la suite de ses paris et travaux. Ça bouillonne non stop dans sa tête…