speeding cars -r.

La route se faisait plutôt longue, mes yeux commençaient à se fermer lentement. Il fallut que je monte la musique au maximum afin de ne pas sombrer dans les bras de Morphée, qui tentait de m'attirer dans son trou noir si confortable et reposant. Je gardais les yeux rivés sur la route, et les lignes jaunes au centre défilaient devant moi en perdant tout leur sens. Il était tard, ou tôt, c'est au choix. Je ne sais pas, je ne sais plus, peut-être deux ou trois heures du matin. Regarde ton tableau de bord, me direz-vous. Non, dans cette vieille bagnole, on ne voyait presque plus la lumière qui affichait l'heure. Je n'avais pas envie de me forcer les yeux pour mieux la voir. Je devais les garder sur la route ; j'étais déjà bien assez distrait. Les violons de l'album du vingt-cinquième anniversaire de Zelda montaient au rythme des pentes qui me ramenaient à Bowen. J'avais quitté la ville pour mon boulot. Je revenais d'un petit séjour de deux jours payé par la compagnie qui m'avait embauché. Pas mal. Mais j'avais les yeux fatigués par le temps passé à fixer l'écran de la télévision où un nouveau jeu encore en test m'était offert d'essayer, et de critiquer. Alors j'avais besoin de quelque chose pour me tenir éveillé sur le chemin du retour.

Un bruit sourd de moteur. Des klaxons pressés, pressants. Je regardai dans le rétroviseur et aperçut deux paires de phares qui s'en venaient vers moi à toute vitesse. Je me rangeai sur le côté et deux voitures accélérèrent davantage, me dépassant en une fraction de secondes. Mon coeur battait plus vite, tout d'un coup. Je n'avais plus envie de dormir. Quelques secondes plus tard, j'entendis des cris au loin. Assez proche, quand même. Je m'assurai donc d'être de nouveau seul sur la route et je repris mon chemin, suivant le son des voix, des rires et des cris. J'arrivai bien vite à un espèce de rassemblement louche, où les deux voitures de tout à l'heure s'étaient arrêtées sur le bord de la route, entourées de la bande de gens un peu fous. Je sortis de la voiture et rejoignit la foule. Arrivé côte à côte avec d'autres spectateurs, je déclarai : « On se croirait dans Need For Speed Underground, c'est gé-nial. » J'avais un grand sourire enfantin au visage. Suite à ma surprise, la compréhension de l'événement s'était finalement mise en place dans ma tête. Des courses de voitures illégales. Comme dans mes jeux vidéo favoris. Putain, ça me donnait envie de jouer à Midtown Madness sur mon PC, comme dans le bon vieux temps où je roulais à 200 kilomètres à l'heure sur le pont de San Francisco. Dans mes rêves les plus fous, ouais.

La foule est là, les voitures ont fait le tour de la piste improvisée dans les rues de Bowen, les gens sont chaud, ça hurle, ça cri, t’es fière que ça marche ici aussi, c’est pas facile quand t’arrives dans un nouveau coin sans connaître personne, sauf que toi, on commence à te connaître dans le milieu, faut dire qu’une fille là-dedans ça passe pas inaperçu. T’es assez fière de ta petite entreprise, oh si les parents savaient comment tu gagnes réellement ta vie, ils s’en mordraient les doigts. Tu t’es contentée de dire que t’étais secrétaire dans un cabinet d’avocat, histoire que ça colle à tes études, même si ils ont bien du mal à comprendre à comprendre pourquoi tu n’es qu’une secrétaire et pas une avocate, faut dire qu’être diplômée d’Harvard c’est pas n’importe quoi. Mais tu t’en balances de tout ça, la seule chose qui compte pour toi c’est tes courses. Les voitures arrivent, certains parieurs sautent de joie, d’autre font la gueule. Le gagnant de la course, sur le capot de sa r8, ouvrait sa bouteille de champagne en arrosant les bimbos qui se trouvait face à lui. toi t’observais la scène avec un malin rictus dessiné sur le coin de tes lèvres. fallait aussi se préparer pour la prochaine course, bientôt ça allait être ton tour de conduire, tu sais que tu pouvais laisser Jim s’occuper du truc, t’avais confiance en ce minot et tu savais qu’il ne pourrait te la mettre à l’envers. De toute façon tu savais tout de lui, il savait tout de toi, même ta tendance à être violente, voire très violente, il n’oserait pas. Soudain, t’entendis cette voix s’exclamer comme si c’était la première fois qu’il voyait une course, tu ne pus t’empêcher de tourner la tête vers ce grand mec brun qui s’était mêlé à la foule, il avait l’air d’un gosse et tu ne pus t’empêcher de sourire. Tu t’approchais de lui « première fois ? »

Une jeune demoiselle devant qui je me tenais se tourna après mon commentaire plus qu'excité devant cet événement hors du commun - pour moi, en tout cas. Elle avait des cheveux bruns pâles mais surtout, surtout, un regard perçant. J'en étais même intimidé, tout d'un coup. J'avais l'impression d'être un gamin qui ne connaît rien à la vie, en face d'un maître qui a réponse à tout. Bon, j'exagère peut-être un peu mais cette femme dégageait réellement quelque chose d'indescriptible. Un désir de liberté infinie. Une rébellion constante en tête. Le chaos et l'anarchie. Elle s'approcha alors de moi, et j'essayai de me faire petit, comme pour me fondre à la foule - pourtant, elle n'avait pas l'air méchante, non, ce n'était pas cela. Elle me demanda alors si c'était ma première fois. Je rougis. J'étais gêné, intimidé, et je me sentais un peu con et pas à ma place. « Euh ... oui ... » Dis-je en regardant de nouveau autour de moi, balayant la scène du regard. « Enfin, je suis très familier avec ce genre d'événement mais ... j'en avais jamais vu en vrai ... juste dans ... dans mes jeux de course. » Les pneus qui crissent au sol, les moteurs qui se font le concours du plus bruyant, les filles toutes plus sexy les unes que les autres, les cris des spectateurs. C'était à peu près la même chose. Mais en vrai, c'était beaucoup plus effrayant que dans mon jeu vidéo. Le taux d'adrénaline en moi montait depuis mon arrivée, et je n'étais même pas dans la compétition. Le fait que ces courses soient illégales n'aidaient en rien mon sentiment inconfortable mais allumé. Oui, ça m'animait, tout ça. « Comment ça se fait que la police ait pas déjà débarqué ? C'est pas disons ... ce qu'il y a de plus ... discret. » Peut-être la police jouait-elle au sourd et à l'aveugle pour ne pas s'attirer les foudres de ce groupe ? Je ne les connaissais pas - peut-être avaient-ils une sale réputation.