As long as there is you and me (charléo)

Jamais Charlie n'avait eut le souvenir de voir Léo aussi mal, et ça lui faisait tellement de la peine pour lui, dont elle considérait plus qu'un ami depuis qu'elle l'avait retrouvé ici à Bowen. Il avait été un repère, un pillier, surtout lors des  coups durs ; il avait toujours été présent pour la blonde. Aujourd'hui, c'était à son tour d'épauler son ami qui vivait une mauvaise passe. Il devait être au plus mal, il y avait de quoi, celle qu'il aimait, l'avait trompé et était tombé enceinte sans savoir lequel des deux étaient le père. Avec le recul elle ne souhaitait pas prendre partie ni pour Léo ni pour Alba. Il est vrai que dernièrement, elle voyait beaucoup plus Léo qui lui, lui avait tout raconté. Alba, elle, cependant, fuyait sûrement cette confrontation par honte. Charlie se disait que peut-être qu'elle finirait par s'ouvrir à elle, en tout cas elle lui laissait le temps qu'il faudrait pour. En attendant, elle faisait au mieux pour occuper l'esprit (ou plutôt l'estomac) de Léo, quitte à passer en coup de vent et s'assurer qu'il prenait juste soin de se nourrir.  Cet fin d'après-midi elle avait prétexté avoir absolument besoin de ses papilles pour une dégustation de ses nouvelles recettes. Elle n'avait pas plus belle arme pour faire diversion que sa pâtisserie. Au passage, c'était aussi l'occasion de lui annoncer ses fiançailles avec Woody, elle espérait que Léo prenne la nouvelle avec moins d'amertume que son frère Jules. J'espère que tu meurs de faim? annonça la Cheffe Pâtissière en désignant son panier en osier avant de le prendre dans ses bras et de l'enlacer chaleureusement. Elle se redressa et s'écarta sans relâcher son étreinte. Est-ce que t'es prêt à ce que je te raconte un truc de FOU? ne résista-t-elle pas à lui demander d'entrée de jeu.

@Léo Emerson  

Depuis quelques mois Léo n'était plus vraiment lui-même. Pas celui que tout le monde connaissait, l'homme toujours enjoué, toujours avenant, il n'était plus celui-là. Il traînait sa peau comme une âme en peine, qu'il était, tous les jours, sans réussir à s'en remettre. Et il y avait de quoi, il avait été trompé, trahi, par la femme qu'il aimait. Lui qui avait si souvent fait pleurer les femmes, il apprenait sa leçon, en serrant les dents, ramassant son cœur en miettes. Ils aurait voulu oublier Alba, mais c'aurait été trop doux, trop simple. A la vie à la mort, ils étaient liés jusqu'au bout, par un petit garçon qui n'avait rien à voir avec leurs conflits. Alors les semaines où il avait Jon, Léo essayait de donner le change, il profitait de son fils, ce qui l'épuisait. Et la semaine suivante, il était généralement une épave. Il savait que ses proches s'inquiétaient et il aurait préféré n'infliger ce spectacle à personne, d'ailleurs s'il n'y avait pas eu Jonah, le photographe aurait sauté dans le premier avion pour disparaître. Charlie prenait souvent de ses nouvelles, elle veillait sur lui, tout comme il l'avait fait quelques mois plus tôt. Et ce jour là, elle ne lui avait d'ailleurs pas laissé le choix, elle comptait sur lui pour tester de nouveaux gâteaux. Ils savaient tous les deux que ce n'était qu'un prétexte, mais Léo n'avait pas eu le cœur à l'envoyer promener. Il l'accueilli la mine sombre, le visage mangé par la barbe et les cheveux, alors qu'elle était éblouissante, elle transpirait le bonheur. En d'autres circonstances il se serait sincèrement réjoui de la voir si heureuse, surtout qu'il savait qu'elle avait traversé le pire, mais il avait du mal à se montrer enjoué en la laissant entrer. Il fut plaqué contre son corps frêle dans une étreinte des plus chaleureuses, Charlie faisait tout pour s'assurer qu'il ne s'écroulait pas. Léo joua le jeu de la serrer dans ses bras et accepta la vague de chaleur qui l'envahit, cette douceur serait de courte durée, comme un pansement qui soulageait, mais qui ne durerait pas. Je n'ai rien mangé depuis des jours juste pour ça ! C'était à peine faux, disons qu'il avait tendance à avaler plus de liquide que de solide, ces derniers temps. Il haussa les sourcils en la fixant sans comprendre. Raconte, mais tu sais plus rien ne peut me surprendre, j'en ai bien peur ! Il se sentait tellement désabusé, mais la joie de son amie était communicative.

Qu'il avait l'air toujours aussi triste, son Léo. Charlie le voyait bien et elle savait que ses visites n'étaient pas le remède à ses maux, mais elle osait croire que cela puisse lui changer un peu ses idées moroses. Elle avait tellement de peine pour son ami, qu'elle aurait fait n'importe quoi pour revoir ce vrai sourire, et pas cette pâle imitation qu'il lui offrait ces derniers temps. Elle posa quelque part son panier en osier et le salua avec un méga câlin. Dans son étreinte, elle essayait de lui offrir un peu de réconfort. Toujours dans l'objectif de dérider le beau visage du photographe elle lui annonça avoir une nouvelle folle. Une main sur son épaule, avec l'autre elle cacha son visage pour mettre en évidence cette autre main. Celle ornée de sa magnifique bague de fiançailles. Sublime simple et brillante, comme à son image ; du moins elle l'espérait. Tu devines? lui demanda Charlie alors que la bague parlait pour elle-même. Et puis il savait Léo, que la blonde ne faisait que parler de Woody depuis des mois et des mois entiers à se morfondre sur son sort à espérer en vain. Et le jour où Woody avait voulu la revoir, il avait été l'une et rare personne a avoir été prévenu. Bien entendu aucun d'entre eux n'aurait pu s'attendre à cette demande en mariage. Cela pouvait paraître précipité, insensé, mais Woody l'avait fait et Charlie, follement amoureuse, ne pouvait qu'accepter. Quelque part, elle cherchait entendre de Léo un avis positif sur sa décision. Parce qu'il la connaissait bien elle et qu'il connaissait bien Woody. Ce n'est pas qu'elle cherchait quelconque approbation, mais ce fut un réel coup dur de voir que son frère pensait qu'elle faisait une erreur. En y repensant elle perdit son beau sourire, et attrapa son panier en osier pour se diriger vers la cuisine de Léo.  Jules n'approuve pas. Je te préviens, mon lapin, je ne suis pas prête à t'entendre dire autre chose que "oh elle est jolie ta bague". Les "attention Charlie, tu fais une connerie" ne sont pas acceptés non plus, sous peine que je te prive ou te force de dégustation pendant 15 jours, ça dépend qu'est-ce-qui est le plus détestable pour toi...

Léo savait bien que cette dégustation n'était qu'un prétexte comme un autre, seulement il était persuadé que pour Charlie c'était un moyen de s'assurer qu'il ne sombrait pas, alors qu'en fait, elle avait une grande annonce à lui faire. Et, finalement, c'était aussi un très bon moyen de lui faire oublier sa peine, l'espace d'un instant. Il aimait suffisamment Charlie pour être capable de se réjouir pour elle, au lieu de s'apitoyer sur son sort. Il observa son petit manège quelques secondes, cette main sur son visage, exagérément proche de celui du photographe, pour être sûr qu'il ne loupe pas le caillou qui ornait son annulaire. Oh Charlie ! Il laissa échapper cette expression de surprise, même s'il n'était pas vraiment certain de comprendre, est-ce que c'était vraiment Woody ? Il avait été assez fou pour demander la blonde en mariage ? Et dire que quelques mois plus tôt il ne voulait même plus l'affronter tellement il était dévasté. Il l'écouta déblatérer, elle avait trop peur qu'il critique cette nouvelle. Un mince sourire, peu convainquant mais malgré tout sincère, se dessina sur les lèvres du photographe. Elle est très belle cette bague. Et j'imagine que tu as dit oui alors ? Et que c'est Woody, le fou qui veut se laisser passer la corde au cou ? Il ne put s'empêcher de songer une seconde que s'il avait fait ce genre de demande à Alba elle serait peut-être toujours là aujourd'hui, elle ne l'aurait pas trompé, elle aurait enfin confiance en lui, peut-être que c'était ça qui lui manquait à Léo, un peu plus d'engagement dans ses relations. Mais il ne s'agissait pas de lui aujourd'hui. Et d'ailleurs, en parlant de ça, qu'est ce qu'on déguste aujourd'hui alors ? Parce que ce n'est pas le tout, mais j'ai faim moi. Il sortait déjà du jus de fruit de son frigo.

Sans surprise, Léo fut étonné par la grande nouvelle annoncée par Charlie. Très fière de pavaner sa bague de fiançailles, elle ne parvenait pas non plus à modérer cet air comblé qui ne le quittait plus depuis. Avant qu'ils abordent davantage le sujet, elle préféra lui demander qu'il n'intervienne pas en lui disant qu'elle faisait une terrible erreur, comme son frère l'avait fait. Avant que sa relation devienne sérieuse avec Woody, Léo l'avait prévenu de faire attention. En effet il traînait une réputation de briseur de cœur, et pourtant aujourd'hui il avait pris la décision de l'épouser. Bien sûr que j'ai dit oui! À Woody, qui d'autre?  Il est fou, c'est clair, je m'y attendais tellement pas, je te jure! confia Charlie qui revoyait la scène en boucle dans sa tête. C'était un moment si romantique, si émouvant et si innattendu. Inutile de lui planter le décor de cette merveilleuse demande, Charlie voulait préserver un minimum Léo qui devait encore avoir un goût amer de tout ce qui était amour à l'eau de rose. Elle ne voulait donc pas étaler trop longtemps son bonheur, ou du moins éviter les détails qui pourraient le blesser. D'un pas léger elle se dirigea dans la cuisine du photographe et sortit une à une les boîtes de son panier en osier.  D'abord tiens cette petite boîte, tu la gardes au frais c'est une mousse au chocolat praliné, Jon adore, tu lui demanderas. Donc là, j'ai une tartelette avec une pâte sucrée, biscuit à l'amande, une mousse à la noix de coco, une compotée de framboises et framboises fraîches. Ici, un chou avec son craquelin, crème à la vanille de Madagascar, coulis d'abricot. Le dernier un macaron garni d'une crème infusée au thé noir, fleur d'oranger, agrumes et miel. Il y avait de quoi diversifier les envies et les papilles de Léo. Tel qu'elle le voyait ainsi, la mine basse, c'était la seule chose dont elle était en capacité de satisfaire. Il continuerait à être triste, oui, mais au moins le l'estomac repu. Au fond cela l'atteignait, elle aussi, de le voir si mal. Il l'aimait Alba, et elle savait aussi qu'elle aussi, l'aimait. Sans avoir parlé à son amie, Charlie se doutait pourtant de qu'elle aurait pu dire pour se justifier. Elle avait merdé, peut-être parce que le doute et la confiance l'avait fait flanché. Son silence en disait long, Alba devait regretter. Mais ça, Léo n'était sûrement pas prêt à l'entendre.

Elle était excitée comme une puce, Charlie, Léo l'observait, elle avait le regard qui pétillait et sa main toujours en mouvement comme si elle voulait montrer à la Terre entière qu'elle était fiancée. Est-ce que c'était donc ça, l'effet qu'une bague faisait à toutes les filles ?! Léo ne pouvait s'empêcher de se le demander, presque amer. Il en avait acheté deux, des bagues, dans sa vie, la première pour Anna, elle n'avait jamais accepté de l'épouser et elle avait eu raison, elle se savait condamnée et ce n'était, au fond, qu'un moyen pour Léo de se rassurer sur la peur que c'était de la voir mourir à petit feu. Et la deuxième pour Grace, il l'avait également acheté pour de mauvaises raisons, Grace croyait en Dieu, elle était une fervente pratiquante et il l'en avait détourné, il l'aurait épousée, non pas parce qu'il croyait au mariage, mais parce qu'il voulait qu'elle soit en paix avec cette relation presque interdite. Il n'avait jamais pu poser son genou à terre, elle l'avait quitté avant. Il avait fini par lui offrir cette bague, comme un beau cadeau d'adieu, qu'elle avait accepté avec beaucoup d'émotion. Léo ne croyait pas au mariage, pour lui c'était un engagement effrayait et inutile. Mais il pouvait comprendre Charlie, parce que finalement, là, il ne s'agissait pas de se faire passer la bague au doigt, pour la blonde, mais bien d'avoir retrouvé son Woody et son sourire par la même occasion, alors qu'elle pensait avoir perdu les deux quelques mois plus tôt. Qui d'autre, j'en sais rien moi ! Ca pourrait être n'importe qui, du moment qu'il te présente une bague ! Il se moquait gentiment, mais il était sincèrement heureux pour elle. Félicitations Charlie. S'il avait été dans un meilleur état, il aurait pu blaguer sur le fait que l'un ou l'autre avait intérêt de le choisir comme témoin, puisqu'il avait aidé Woody à sortir de son trou. Mais il n'avait pas tellement envie de penser à la fête de toute façon un mariage, il fallait bien un an pour le préparer, d'ici là il irait peut-être mieux. Il attrapa la boite qu'elle lui tendit. Alors cette mousse est pour Jon, pas pour moi ? Moi aussi j'aime la mousse au chocolat. Il l'écouta lui faire le menu de tout ce qu'elle avait ramené. Tu as invité les voisins aussi ? On ne va jamais manger tout ça là, si ?! Il ouvrit la boite face à eux et prit des cuillères et couteaux pour couper le tout. Qu'est ce que tu entendais par "Jules n'approuve pas" ? Léo savait que le frère Keynes n'était pas vraiment fan de Woody, mais il s'agissait tout de même du mariage de sa jumelle, il devait au moins se réjouir un minimum.