long way along the seafront.

Citation :

ciao' mec.
je passe te prendre à treize-heures (pm).
prépare un sac et prend ton maillot d'bain, j'ai b'soin d'prendre l'air.
ps: c'était pas une proposition, t'as pas l'choix.

Yep, t'hallucines pas, j'ai utilisé mon téléphone portable. J'sais, j'ai dit que j'en avais pas, mais en fait, j'ai menti. En arrivant à Bowen, Spyke a tenu a ce qu'il puisse me joindre n'importe quand et n'importe où. Il a finalement réussi à m'convaincre de m'acheter un téléphone. J'ai pris le moins cher, pas comme si j'roulais sur l'or aussi. Un vieux nokia, même pas tactile, mais on s'en fiche, il écrit des sms et il téléphone, donc ça m'convient.

C'est en terminant mon service à la poste, ce matin, que j'ai écris ce message à Thad. Ouais, c'matin j'étais au guichet... d'habitude, j'm'occupais uniquement de livrer les journaux en chevauchant ma superbe bicyclette jaune mais ce matin, la Ginette était absente et il fallait quelqu'un pour la remplacer. Dieu merci, elle ne bossait qu'à trente pourcent, donc j'avais eu besoin de la remplacer que quelques heures uniquement. A midi, j'étais libéré de mon calvaire. J'avais les zigomatiques carrément défoncés à force de sourire à tout bout d'champs et j'étais clairement énervé. J'avais quitté la ville rapidement pour rejoindre l'appartement. J'avais besoin de m'changer les idées et qui mieux que mon meilleure pote pour ça... Non, j'te cause pas de Spyke. Eukayy, faut savoir que Spyke et moi, on a une relation un peu compliquée. Et j'peux pas non plus m'comporter avec lui comme avec n'importe qui d'autre... j'suis conscient de ses sentiments pour moi depuis notre arrivée uniquement et ça a un peu tout changé entre nous. La bourde, parce que maintenant, chaque fois qu'il me fout une fessée ou qu'il se blottit contre moi, j'ai peur qu'il pense qu'il y a une ouverture. Alors j'ai calmé le jeu, et heureusement pour moi, j'ai fait la connaissance de Thad... Un hétéro, un vrai. En plus, il vit dans une caravane, si ça c'est pas la classe.

Alors j'enfile mon maillot de bain, un débardeur blanc et une casquette. Je quitte l'appart' sur la pointe des pieds, je prends les clés de ma VW et je l'allume. Je suis contre l'idée même de tout ce qui est récent et moderne. Moi j'vis dans les années cinquante et ça m'convient parfaitement. J'ai dû, forcément, faire certaines adaptations (dont le téléphone portable), mais dans l'ensemble, je reste assez vieux-jeu. Et ça, Thad il l'a bien compris, d'ailleurs, c'est ce qu'il apprécie chez moi. J'suis un mec simple, j'me prends pas la tête et j'aime que les choses soient simples. Avec lui, elles le sont, et c'est bien pour ça que j'profite de cet après midi de congé pour l'emmener avec moi. Ouais, j'avoue j'ai écris un message à Spyke, juste pour le prévenir... j'devrais pas parce que j'ai l'impression qu'il est un peu jaloux de ma relation avec Thad. Mais bon, faudrait pas qu'il s'inquiète en rentrant ce soir.

Quand j'me gare devant la caravane de Thad, il m'attend de pied ferme, tout sourire. Je peux pas m'empêcher de sourire aussi en lui ouvrant la portière. Ouais, j'ai pas une décapotable mais j'ai une voiture qui roule, c'est mieux que rien. Je le laisse s'installer avant de lui dire. « Content de te voir. Désolé si j'ai bousculé tes plans pour la journée, j'avais besoin d'prendre le large... matinée de merde. » et pis y avait pas que ça. J'ai besoin de parler de Spyke à quelqu'un, parce que mine de rien... j'me sens un peu pris entre deux feux. Parce que moi j'l'aime beaucoup, mais pas comme ça... Et j'suis pas sûr de pouvoir un jour l'aimer à ce point-là. J'en frissonne rien qu'en y pensant, quelle horreur ! « J'me suis dit qu'on pouvait remonter la côte jusqu'à Townsville. Les paysages sont magnifiques. ».

Petite balade en mer avec des clients, y a pire que de faire visiter les environs en scooter des mers. Il est juste content de ne plus avoir à répondre aux questions incessantes de l'une d'elle. Retour à son stand, il en profite pour jeter un coup d’œil à son téléphone portable. Un nouveau message de Jools. Thad rigole en le lisant, ça ressemble plus à un ordre qu'à une proposition. Il secoue la tête amusé quand il arrive à la partie sur le maillot de bain, comme si il ne passer déjà pas tout son temps avec son maillot sur lui. Heureusement qu'il n'avait pas un boulot avec des horaires fixes sinon il aurait probablement eu du mal à se tirer comme ça en pleine journée. Il vérifie quand même qu'il n'a aucun cours de prévu pour l'après midi. RAS, il est libre de partir en excursion. Il ne prend pas la peine de répondre, après tout, ce n'est pas comme si Jools lui avait vraiment laisser le choix. Il ferme son stand pour la journée, prenant le temps de bien tout fermer à clef.

20 minutes de vélo et le voilà chez lui, sa bonne vieille caravane délabré qu'il n'échangerait contre rien au monde. Son premier objectif est de trouver un sac dans tout son bordel, l'entreprise nécessite une bonne dizaine de minutes. Une fois localisé le sac, il fourre une serviette de plage dedans. A vrai dire il n'est pas certain de ce qu'il est censé emmené. Puis même si il manquai de quelque chose , il ferait avec. Il ramasse un T-shirt qui traîne sur sa table, le renifle pour voir si il ne pue pas trop et l'enfile. Et voilà comment se préparer en deux temps, trois mouvements. Il vérifie sur son portable qu'il lui reste encore un peu de temps avant l'arrivée de Jools. Affirmatif, il entreprend de se rouler un joint en vitesse. La plupart des gens étaient rarement à l'heure, alors il aurait bien le temps de fumer un peu avant son arrivé.

A peine dehors qu'un de ses voisins l'interpelle, il répond de façon enjoué comme à son habitude. On lui tient un peu trop la jambe à son goût. Enfin débarrassé que voilà Jools qui débarque avec sa caisse. Un sourire a envahi son visage à la perspective d'une aprem en dehors de la ville, ses déplacements en vélo sont plutôt limités. Avant de monter dans la voiture, il l'observe un peu en fronçant les sourcils, c'est loin d'être une bagnole écologique. Il se retient de dire quoi que ce soit sur le sujet, il a accepté de monter dans la voiture malgré ses convictions, pas la peine de lui faire un sermon maintenant. « T'inquiète, je m'en plains pas. J'avais rien de palpitant de prévu. ». Il lui sourit  tout en cherchant un peu sa position dans le siège. Son spliff toujours à la main essayant de ne pas trop l'abîmé. « Yeah ! C'est cool. Ça me changera des décors de Bowen. ». C'est vrai que Bowen était pas super grand, alors on avait vite fait le tour, après plusieurs années n'en parlons même pas. « Elle avait quoi de si terrible ta matinée ? Tu t'es fais courser par un clébard pendant ta tournée ou un truc dans le genre? ». Il se retient un peu de rigoler, parce que si c'était le cas, il aurait adoré voir la scène « Dit, je peux fumer dans la voiture ? ».

Voir Thad me fait toujours plaisir, bien plus plaisir que de voir n'importe qui d'autre (à l'exception de Spike, évidemment). Son caractère enjoué et son style atypique me rend complètement chèvre... Thad est gentil, simple, généreux et, comme moi, il vit dans une bulle qui lui est propre, loin des standards imposés par une société de consommation complètement abrutie. Lui, il reste simple et comme moi, il aime la nature, les plaisirs simples. Bref, j'aime beaucoup Thad ! Il est cool. Alors quand il s'assoit à mes côtés dans le véhicule, j'peux pas me départir de mon sourire béat. C'est pas que j'l'admire, c'est juste que j'l'adore. « T'inquiète, je m'en plains pas. J'avais rien de palpitant de prévu. » J'hoche de la tête en riant doucement, je tourne les clés dans le contact et le moteur s'allume. Je sens la voiture vibrer sous mon postérieur, une sensation que j'ai toujours trouvée assez excitante... (non pas que j'aime avoir le cul qui vibre) Mon véhicule, c'est un peu ma porte de sortie. J'aime savoir qu'à n'importe quel moment, si j'étouffe, je peux m'enfuir, partir, prendre le large. J'suis pas un mec compliqué, vous savez. Une petite crique paumée, un peu d'eau et du calme, et je suis sevré. J'ai pas b'soin d'plus pour me changer les idées. Alors oui, j'aurai dû prendre la fuite avec Spike, comme toujours, mais aujourd'hui, j'étais pas d'humeur à marcher sur des oeufs. Non, j'avais envie d'être peinard. D'matter des gonzesses si l'occasion se présentait sans avoir peur de le déranger. « Tant mieux pour moi, dans c'cas. » Je pousse légèrement la pédale des gaz et la voiture s'emballe. Je quitte les lieux doucement, rejoins la route et puis, j'ouvre la fenêtre à côté de moi.

« Elle avait quoi de si terrible ta matinée ? Tu t'es fais courser par un clébard pendant ta tournée ou un truc dans le genre? » J'étouffe un léger rire en imaginant la scène. Malheureusement, ç'aurait été plus drôle que dérangeant et ma matinée n'aurait pas été aussi catastrophique, si seulement j'avais été à l'extérieur. « Non, rien d'tout ça. J'ai dû remplacer une grosse bonne femme au guichet qui s'était fait un tour de rein en essayant d'attraper une boîte de biscuits au chocolat dans son armoire. » Je souris légèrement en tournant mon visage vers Thad. Je rejoins la route enfin lorsque je réalise qu'il tient à sa main un joint... La grande classe, c'est bien ce que j'aime chez lui. C'naturel, cette simplicité. Il n'a pas peur que j'le juge, non, il se comporte avec moi comme avec n'importe qui. Et j'sais que j'peux faire pareil. « Bien sûr, tu peux sans autre. J'vais m'en griller une aussi, tiens. » De la main droite, je tiens le volant, de la gauche, j'attrape mon paquet de clope dans la portière et en sors une clope. Habilement, je glisse une cigarette jusqu'au creux de mes lèvres et inspire en l'allumant. Une première bouffée de tabac empli mes poumons, un effet relaxant, tranquillisant. Je vide mon esprit... Il faut que je parle à Thad de Spike, mais pas tout de suite. On a la journée devant nous. « Et ton début de journée ? T'as vendu des planches ? » Dans quelques minutes, nous quitterons Bowen et son décors monotone. Je suivrai la route jusqu'à Townsville, et puis, nous nous baignerons... J'ai hâte d'y être, hâte de passer du temps avec Thad.