now you're here and all I can do is try to catch you up on the basic stuff (ava)

Je lâchai un petit d'accord à voix basse avant de continuer un peu notre visite. Je sentais que j'avais lâché un petit froid dans notre périple dans ce château de glace, plutôt adapté pensais-je amèrement. Seulement, j'appréciais les excuses de Concho. Je savais qu'il ne voulait pas me blesser mais je prenais déjà tout à coeur en temps normal alors avec les hormones de grossesse, cela n'arrangeait en rien les choses.

Je laissais un blanc s'installait, profitant du silence pour observer encore le lieu. J'en profitais également pour penser à un autre sujet de conversation, peut-être plus léger. Je me fis devancer par Concho qui commença ce nouveau sujet et j'en fus ravie. Suite à sa première phrase, je fus intriguée. Il me tardait vraiment de rencontrer celle qui faisait battre le coeur de mon ami. Elle devait être spéciale. Finalement, je lâchai un petit cri telle une enfant en entendant la suite de ses paroles. J'étais très heureuse pour lui, d'avoir un enfant avec celle qu'il aime, de pouvoir profiter de cette grossesse avec elle cette fois-ci et de pouvoir être là à cent pour cent, je sentais que ça lui manquait et, pour le coup, il venait tout juste de me le dire. Je me penchais alors vers lui et le pris dans mes bras dans un élan d'affection. Je lui fis alors savoir mon bonheur pour eux deux, d'une voix pleine d'émotion, encore une fois merci les hormones de passer des larmes de tristesse à celles de bonheur en un rien de temps.

"- Oh Concho c'est une excellente nouvelle ça ! Je suis ravie pour vous deux ! C'est génial. Elle est enceinte de combien de temps ? Le terme est prévu pour quand ? Toutes mes félicitations ! Effectivement, nous allons en avoir des choses à partager lorsque tu voudras bien me la présenter. Et nos enfants pourront grandir ensemble, c'est génial ça !"

Comme d'habitude, lorsque j'étais heureuse ou excitée, ma logorrhée prenait le dessus et je débutais un flot de mots impressionnant à la minute. Mes parents me reprenaient tout le temps lorsque j'étais enfant, me disant de me calmer et de réfléchir avant de parler. Evidemment, cela ne servait à rien et je dirais même que ma logorrhée se majorait avec les années.

Je le sentais moi aussi, ce froid, mais dans ma tête, j’étais le fautif, je l’avais causé. Je culpabilisais intérieurement d’avoir été trop loin dans mes propos, et j’étais persuadé que ce soir j’irais me coucher et que je me repasserais cette scène en tête encore et encore, me trouvant toujours un peu plus idiot. Ma maladresse aurait raison de moi, un jour. Ce silence-là, j’aurais pu l’apprécier si je savais qu’il n’émanait pas de la divergence d’opinion entre Ava et moi. J’aurais pu prendre le temps d’observer les belles sculptures, les murales, le décor. Malheureusement, même en les regardant, je ne les voyais pas vraiment. Je détestais le conflit, encore plus avec des gens que j’aimais beaucoup, ce qu’Ava était. Incapable de soutenir plus longtemps ce blanc, je me décidai à finalement lui lâcher la nouvelle à propos de la grossesse de Pippa. C’était mon intention de l’annoncer à la blonde, de toute façon, aujourd’hui. Je ne l’avais pas encore fait en raison de la délicatesse du sujet grossesse maintenant que je savais qu’Ava était enceinte d’Oliver, mais bon, what the hell, je ne pouvais pas le cacher à mon amie de Melbourne très longtemps non plus. Et si c’était maladroit d’en parler maintenant, alors je ferais juste m’enfoncer un peu plus encore pendant cette journée. Heureusement, la jeune femme poussa un cri de surprise et de joie, me prenant dans ses bras dans un élan d’affection. Tout de suite, toute la tension retomba. Je lâchai un rire heureux. « Elle est à douze semaines déjà. Ce sera un petit bébé de juillet. » Je réalisais le temps qui passait, au même moment de le dire. Trois mois. C’était déjà le tiers de la grossesse qui venait de s’écouler. « Attends t’es à combien toi ? Je t’ai même pas demandé … » Si ça se trouve Pippa et elle partageaient le même mois d’accouchement, qui sait. Ce serait dingue ! Elles iraient peut-être aux mêmes ateliers prénataux et postnataux, nos enfants grandiraient en même temps, iraient à la même école peut-être, tellement de possibilités ! J’étais surexcité, mais heureusement Ava l’était aussi.

Cette journée était surprenante de révélation notamment en terme de grossesse. Je ne m'attendais pas vraiment à ça en venant découvrir ce château de glace. Je pensais juste me balader, profiter des festivités pour cette fin d'année, la vie en avait décidé autrement. Mes émotions étaient ambiguës mais j'étais vraiment contente pour mon ami. D'ailleurs, je pouvais décerner une certaine fierté dans son regard et ça me donnait le sourire. Il méritait amplement d'être heureux, de vivre cette grossesse avec sa compagne dans les meilleures conditions possibles. Je lui faisais part de mes pensées :

"- C'est une excellente nouvelle pour toi Concho ! Tu dois être très content non ?"

A la question de Concho concernant l'avancée de ma grossesse, je posais la main sur mon ventre, le caressant avec tendresse. On ne pouvait plus le manquer maintenant. J'essayais de le cacher continuellement mais je n'y parvenais quasiment plus. Depuis le début de ma grossesse, je m'acharnais à cacher cette partie de mon anatomie. J'avais mis un certain temps à accepter ma condition et c'était encore compliqué pour moi. Dans un premier temps, c'était intense d'accepter cette grossesse, de l'annoncer aux autres était une étape que j'avais mis du temps à passer. et pour lequel j'avais encore quelques difficultés. J'avais peur d'être jugée de mon choix et le comportement de Concho confirmait mes craintes. Dans un second temps, j'avais du mal avec les changements de mon corps. Entre mon ventre qui grossissait à vu d'œil au cours de la journée, ma poitrine qui avait pris deux bonnets et mes jambes qui étaient pleines d'œdème, je peinais à mes déplacer. J'avais du mal avec ce corps mais j'apprenais doucement à l'appréhender tout en sachant pertinemment qu'il allait encore se transformer pendant les prochains mois.

"- Oh j'en suis à mon septième mois, je commence à ressembler à une pastèque c'est bon ahah. Ce petit être devrait être là pour début avril normalement. Ils ne vont pas avoir beaucoup d'écart."

J'étais contente d'enfin pouvoir en parler avec Concho ouvertement. C'était assez libérateur et j'avais une sensation de légèreté malgré notre récente conversation tendue. On pouvait d'ailleurs l'entendre dans mon timbre de voix qui s'était un peu apaisé après avoir été sec auparavant.

Ava semblait bien réagir à la nouvelle, malgré le timing un peu mauvais de ma confidence - après qu’on se soit un peu pris la tête, par ma faute. C’était aussi le moyen de récupérer le sort de la journée, de rétablir un peu l’ambiance. La blonde semblait sincèrement heureuse pour moi. Je lui souris en retour. « Oui, oui, je suis vraiment … aux anges. J’ai hâte à chacune des étapes qui nous attend … » Et surtout j’avais la trouille, la trouille que quelque chose se passe mal, que le bébé ne soit pas en santé, que l’accouchement de Pippa soit difficile, toutes ces craintes que je n’avais jamais eu “la chance” ou “l’occasion” de ressentir avant lors d’une grossesse, puisque mes deux autres enfants étaient nés sans que je puisse vivre ce précieux moment. Je me rendis alors compte que je n’avais même pas demandé à Ava où elle en était rendue, dans sa grossesse. J’avais été tellement concentré sur le fait qu’elle ne comptait pas le dire à Oliver, que j’avais complètement éclipsé ces questions pourtant tellement importantes à lui poser. Ce n’est que lorsqu’elle posa une main sur son ventre, laissant donc le tissu délimiter son ventre, que je m’aperçus que ce dernier était bien rebondi. « Sérieusement !? Je suis complètement aveugle alors, si tu ressembles à une pastèque … » Je ris. « Sept mois … Wouahou. Non mais ouais, je suis vraiment aveugle. Ou alors tu mets vraiment beaucoup d’efforts à le cacher. » Avais-je dit sur le ton de l’humour, même si dans les faits, cela montrait sans doute une triste vérité, ce que je réalisai ensuite. « Normalement ils devraient être dans la même année scolaire, aussi. » Constatais-je avec un sourire. « Ça y est on va être les parents lourds qui forcent beaucoup trop pour que leurs enfants soient potes. » Ce qui pouvait aussi avoir l’effet tout contraire et les conduire à se détester, s’ils n’avaient pas d’affinités naturelles.

En entendant les paroles de Concho sur le fait qu'il soit aveugle, j'eus un petit pincement au coeur. J'avais effectivement bien caché ma grossesse pour que personne ne la remarque, peut-être un peu trop car j'en gardais encore le réflexe même aujourd'hui où j'accueillais ma grossesse à bras ouverts. Néanmoins, au moment où je lissais alors ma robe, on pouvait très clairement distinguait un ventre de femme enceinte de sept mois. Je n'avais pas pris beaucoup de poids selon la sage femme, surtout au début, mais je rattrapais gentiment les courbes de "normalité". Je me tournais alors vers Concho, courbant un peu le dos pour que mon ventre ressorte un peu plus.

"- Là, tu vois que je ressemble à une pastèque. Mais à une jolie pastèque non ? Et c'est encore bien pire le soir. C'est une énooorme pastèque. Va falloir que tu t'habitues pour Pippa aussi mon vieux !"

Je rigolais de la forme de mon corps, préférant la dérision plutôt que la critique. Après tout, il accueillait une vie et j'en étais reconnaissante même s'il me tardait déjà de retrouver mon corps initial, plus sportif et moins encombrant à mon sens. Après avoir lâché ma robe, je posais ma main droite sur mon ventre et le caressais avec tendresse, sentant de plus en plus les coups du bébé à venir. Je remarquais que je faisais de plus en plus ce genre de gestes, peut-être que ça me permettait de prendre conscience des événements à venir. J'écoutais Concho parlait avec un petit sourire, j'étais contente de pouvoir partager ça avec lui et j'espérais pouvoir le faire prochainement avec Pippa qui partageait la même expérience que moi actuellement. J'imaginais déjà nos enfants jouaient ensemble dans un parc, se tirant les cheveux, l'un faisant pleurer l'autre.

"- Mais j'espère bien qu'ils vont être amis ! Imagine s'ils ne peuvent pas se sentir."

Je mimais alors l'épouvante tout en riant par la suite. L'ambiance entre nous était désormais beaucoup plus légère et je préférais largement cela. Concho était quelqu'un que j'appréciais beaucoup et, même si ses paroles, m'avaient blessées, j'étais du genre à pouvoir rapidement passer à autre chose. Je savais ce qu'il pensait mais j'allais de l'avant, ne revenant pas sur ce sujet épineux.

Un doux rire franchit la barrière de mes lèvres lorsqu’Ava courba le dos, dévoilant exagérément son ventre. Elle s’autoproclamait encore une pastèque, ce qui contribuait à me faire sourire. Elle le disait elle-même, il s’agissait là d’une très jolie pastèque. J’avais déjà hâte que Pippa ressemble à ça, en vérité. Je la trouverais magnifique - elle l’était déjà. « Les énormes pastèques, ce sont les plus belles. » Je souris, avant d’hocher la tête une fois. « Maintenant que je le remarque, oui, ça paraît. Et ça te va vraiment bien, Ava. » Il faudrait que je m’habitue pour Pippa, qu’elle me disait. Étant donné que j’avais raté la grossesse d’Ally ainsi que celle de Zelda, je ne pouvais en fait plus me contenir. Le ventre de Pippa, même alors qu’il n’était pas encore bien défini, pas comme celui de mon amie de Melbourne en tout cas, je l’appréciais déjà tellement. J’en prenais même des photos à chaque semaine pour bien illustrer chaque stade, chaque évolution de semaine en semaine. Pour l’album de la petite. Je m’étais promis de ne pas laisser de côté mes deux autres enfants pour autant, d’ailleurs je leur avais aussi acheté des albums, me promettant de les remplir tout autant, avec les informations que j’avais. Je n’aurais pas de photos de Max et moi quand il était bébé, ça me briserait toujours le coeur, ça, mais on se rattrapait désormais. Bref, je nous imaginais déjà, Ava et moi, en train de convaincre nos enfants de devenir les meilleurs amis du monde. Les parents un peu trop lourds, quoi. En même temps, ils auraient quasiment le même âge ! C’était normal qu’on veuille qu’ils passent du temps ensemble. Pendant leur play dates, on pourrait au moins passer du temps ensemble, entre adultes qui s’entendent bien, eux aussi. Ça me paraissait pas mal plus chouette que de passer du temps avec des parents avec qui je n’avais pas d’affinités. « J’en serais tellement dégoûté t’imagines même pas. » Dis-je avec un sourire, mais plaisantant qu’à moitié. Évidemment on ne forcerait personne, mais ce serait dommage. « Faudra en profiter lorsqu’ils seront bébés et qu’ils ne pourront pas encore décider par eux-mêmes avec qui ils passent du temps. »  Dis-je sans perdre mon esquisse de sourire, continuant à déambuler dans le château. « Ah, je crois que c’est l’entrée de la chapelle. Tu veux y jeter un coup d’oeil ? » Je n’y avais pas encore mis les pieds, mais apparemment elle était éclairée de centaines de bougie. Ça devait être joli et zen.

J'étais touchée par les paroles de Concho. Etant seule, majoritairement par volonté certes, depuis le début de ma grossesse, personne ne m'avait encore complimenté sur ce nouveau corps. Je l'avais plutôt critiqué, caché et un peu maltraité au début que complimenté, apprécié et caressé. Je me sentais un peu stupide, presque vaniteuse, d'apprécier autant ce compliment. Pourtant, il me fit du bien au moral. Je jetais un petit coup d'oeil vers ce ventre qui grossissait la journée comme je venais de le dire à Concho tout en continuant de le caresser tendrement de ma main droite. D'ailleurs, je commençais à voir mes pieds disparaître sous cette masse. Le soir, je ne les apercevais quasiment plus. Je ne manquais donc pas de remercier mon ami qui trouverait probablement bizarre de le remercier pour ce genre de compliment mais c'était important à mes yeux.

"- Merci Concho, vraiment."

L'idée que nos enfants ne s'entendent pas était évidemment naturelle. On ne pouvait forcer deux personnes à s'apprécier. Néanmoins, comme l'avait mentionné Concho, on pouvait faire un peu de forcing dès la naissance. Les faire jouer ensemble, les laisser faire des bêtises ensemble. Ainsi, les enfants seront plutôt proches et les parents aussi, ils pourront se lamenter de leurs progénitures ensemble. Je souriais déjà à cette idée. Je pris alors un air faussement sérieux avant de renchérir aux propos de Concho :

"- On va les forcer dès la naissance, ça devrait passer."

Avec toutes ces nouvelles en si peu de temps, j'avais presque oublié que nous étions en train de visiter un si beau monument. La suggestion de Concho tombait donc à pic et je lui répondais positivement. Nous nous engagions donc en direction de la chapelle. L'édifice était lumineux, de sa matière certes, mais aussi des sources de lumière disposaient aux quatre coins de la pièce. L'ambiance silencieuse rendait les choses d'autant plus belles. Je me tournais donc vers mon ami et lui murmurais :

"- C'est tellement beau."

« Bien sûr Ava, c’est que la vérité. » Dis-je en souriant, avant de froncer légèrement les sourcils. Je me rendais compte qu’au-delà de lui offrir des compliments, je pourrais peut-être lui offrir aussi un peu d’aide. « Tu le vis comment, la grossesse, seule ? Les rendez-vous, les suivis, les effets, tout ça … Tu sais, si t’as besoin d’aide parfois, je suis là. » Ça allait peut-être encore, mais dans quelques mois, à l’approche de l’accouchement, peut-être qu’Ava trouverait ça un peu plus difficile. En même temps, elle avait sans doute su s’entourer, déjà, depuis son arrivée en septembre dernier. Ava était assez sociable pour ça, je ne me faisais pas trop de soucis. Mais quand même, j’étais un ami de plus longue date, je voulais me montrer disponible pour elle. Et puis, on vivrait à peu près les mêmes choses, une fois le bébé arrivé. Les nuits courtes, le manque de temps, tout ça. Il faudrait s’entraider entre nouveaux parents. Et forcer nos enfants à passer du temps ensemble, aussi, héhé. Ava embarqua à fond dans mon idée, avançant même qu’il faudrait les forcer dès la naissance. Je ris de bon cœur. « Ils n’auront pas le choix. » On arriva finalement devant les portes de la petite chapelle de verre, à l’intérieur de laquelle des centaines de bougie illuminaient la pièce. Je proposai à Ava d’aller la découvrir, et on y pénétra avec un silence serein et respectueux. C’est que c’était magnifique, comme endroit, et une certaine paix y régnait. Ava se tourna vers moi et me murmura à quel point l’endroit était beau. « C’est con hein, c’est peut-être toutes les nouvelles de la journée mais … on dirait que ça me rend ému. » Admis-je dans un murmure dirigé vers la blonde, avant de lui prendre la main, juste comme ça.

J'étais une nouvelle fois touchée par la sollicitude de mon ami. Se sentir soutenue ainsi était un réconfort pour moi. Néanmoins, la question de Concho me désarçonna un petit peu. Encore une fois, c'était l'une des rares personnes à s'intéresser à ces aspects de ma vie. Evidemment, mes parents s'en étaient inquiétés également mais ma mère était vite passée à autre chose notamment sur des aspects très pratiques auxquels j'avoue ne pas avoir pensé. Le lendemain de mon annonce, elle m'avait donc emmené acheter une poussette et les premiers vêtements de nourrisson. D'ailleurs, je pense qu'elle était plus excitée que moi lors de ces achats. Je pris donc quelques secondes pour réfléchir à la manière dont j'allais parler de cette grossesse après l'avoir évidemment remercié. Bien que Concho soit un ami, j'avais encore du mal à assumer que j'avais envisagé d'avorter. Je ne souhaitais donc pas lui en parler et préférais rester sur des aspects plus positifs

"- Merci Concho. J'ai eu un peu de mal au début... Mais ça va beaucoup mieux, j'ai hâte de rencontrer ce petit bébé. En revanche, les nausées sont vraiment un enfer sur Terre, j'espère que ça va pour Pippa. J'ai du arrêter le travail un peu précocement. Apparemment, porter mes patients n'étaient pas envisageables. Pfff."

Cet aspect avait eu un véritable impact sur mon moral. Depuis mon arrivée sur Bowen, mon travail était l'une de mes préoccupations principales notamment car il me permettait de rencontrer du monde. J'avais aussi ce besoin de me sentir utile, de venir en aide aux autres et on me l'avait enlevé, c'était comme si on m'avait enlevé une petite partie de moi. Je m'étais donc retrouvée à ne rien faire soit une chose que je ne sais pas faire. J'ai dû apprendre à me reposer, m'ennuyer fermement chez moi et ce n'était pas chose facile quand on a l'habitude de courir à droite à gauche toute la journée. J'avais donc lâché ce "pfff" à moitié en rigolant car je comprenais également pourquoi on m'avait laissé sur le carreau. Dans mon état habituel, j'étais épuisée à la fin de ma journée alors enceinte, je peinais à retrouver mon lit. De plus, je risquais de me prendre des coups aux urgences, ça arrivait malheureusement trop régulièrement.

Alors que je pensais à mon travail, j'avais perdu le cours de la conversation avec Concho lorsque je sentis sa main dans la mienne qui me ramenait au moment présent. Effectivement, la journée avait été riche en émotions et en nouvelles, de bonnes heureusement. L'environnement rajoutait une petite touche de magie et je comprenais l'émotion qui prenait Concho. Le silence apaisant de la chapelle était envoutant et je répondis en murmurant à mon ami, lui tenant toujours la main et avec une émotion non dissimulée dans la voix :

"- Je ne dirai absolument pas que c'est con car ça me rend toute émue aussi."

Sans me demander de l’aide précisément, signe que pour le moment sans doute Ava se débrouillait très bien par elle-même, la jeune femme me parla surtout de ses nausées, de son arrêt de travail précoce. Au moins, si plus tard elle ressentait le besoin d’avoir un coup de main, elle savait que l’offre était là. Je venais de lancer ça dans l’univers, et ce serait à elle de la rattraper, si nécessaire. Je n’allais pas insister plus que ça, parce que ce serait comme si je sous-entendais que je ne pensais pas qu’elle pourrait y arriver seule. Ce n’était pas le cas. Je savais qu’Ava réussirait par elle-même. Mais elle n’était pas obligée de le faire seule. J’étais là. « J’ai hâte de rencontrer ton p’tit bébé aussi. » Déclarais-je sincèrement. J’espérais pouvoir avoir une belle place dans la vie de cet enfant-là, si on mettait à part les blagues à propos de forcer nos deux enfants à s’aimer. « Pippa s’en sort pas trop mal côté nausées, heureusement. Pour le boulot, tu ne pouvais pas faire des tâches un peu plus relaxe en attendant ? » Demandais-je, surpris que l’hôpital se prive d’une infirmière. Sans continuer à être aux urgences, ils auraient pu la réaffecter à d’autres services. Je comprenais que cela puisse affecter le moral d’Ava. Je vivais quelque chose de similaire à mon organisme, Head Ahead, puisque je ne pouvais plus offrir les cours de danse et chorégraphier. Tant que je ne pourrais pas me tenir debout sans l’aide d’une canne, il était hors de question que je pense à me remettre à la danse, évidemment. Au moins, je pouvais quand même continuer à m’occuper au travail avec la paperasse - même si clairement, ce n’était pas ce qui faisait de moi un homme heureux. Notre errance dans les couloirs du château de glace se termina face à la petite chapelle éclairée de centaines de bougies. C’était d’une beauté à couper le souffle, un décor hors du temps, hors de ce monde, qui me rendit assez émotif. Tenant la main de mon amie, je fermai les yeux, souriant aux propos de la blonde qui confirmaient les miens. « Je suis vraiment content que tu sois de retour dans ma vie, Ava. » Confiais-je, sous l’effet magique de ce moment, mais aussi parce que je le pensais sincèrement, depuis qu’elle s’était installée à Bowen.

J'écoutais Concho me parlait de Pippa et de sa grossesse qui se passait, semblerait il, idéalement pour le moment. J'étais contente pour elle même si je ne la connaissais pas encore. Rien de pire que de passer la moitié de sa journée la tête dans les toilettes, je pouvais en témoigner. Concho me parla aussi de mon travail et il était on ne peut mieux placer pour comprendre qu'il me manquait profondément. Tout comme lui, j'étais une passionnée de mon métier que j'exerçais avec ferveur. Malheureusement, il n'était apparemment pas compatible avec le fait d'être enceinte. On m'avait bien proposé une alternative mais c'était là incompatible avec l'hyperactive que je suis. J'en fis part à Concho avec une petite rire à la fin.

"- Heureusement pour elle. Qu'elle se repose aussi ! On m'a proposé un poste administratif oui mais tu penses franchement que je suis capable de rester assise plus de cinq minutes ? Alors qu'à côté, mes collègues courent pour aider les gens. Impossible. Je suis trop hyperactive pour ça."

Alors que nous terminions la visite de cette si belle chapelle, Concho me prit la main et nous échangions un regard plein de tendresse qui résumait bien cette amitié qui grandissait à vue d'œil surtout vu toutes les déclarations du jour.

"- Je suis également très contente que tu sois de retour dans ma vie Concho. Ca me fait très plaisir. Oliver serait surement content de savoir que tu es là pour moi."

Parler d'Oliver n'était plus si compliqué ces derniers temps. Malgré notre rupture, nous nous étions quittés en relativement bon terme. J'avais évidemment eu un temps de deuil de notre relation mais j'en gardais de très bons souvenirs, pleins de tendresse, de bonheur et de rires surtout. A la fin, Oliver était plutôt un bon ami que mon conjoint d'ailleurs.

Mes jambes commençaient sérieusement à être lourdes à mesure des mètres que l'on faisait. Même si le paysage était vraiment somptueux, je sentais la fatigue de la journée et de toutes ses nouvelles pesaient sur mes épaules. De plus, mon ventre commençait à me tirer comme à chaque fin de journée. Je le massais doucement avec une petite grimace. J'étais peinée de laisser Concho et cette belle journée se terminait mais il fallait accepter son corps, Concho était bien au courant de ça également.

"- Je commence à fatiguer et mes jambes pèsent une tonne. Je pense que la visite se termine pour nous deux..."

Je comprenais évidemment qu’Ava ne puisse pas s’imaginer enfermée dans un bureau d’administration alors que de l’autre côté, dans le couloir, c’était le chaos et l’urgence en tout temps. J’hochai la tête. « Ouais, pas faux. Au moins quand t’es chez toi, tu ne les vois pas, tes collègues qui courent partout. La tentation de vouloir aider tout le monde est moins là. » Même si, je le savais, Ava devait quand même se dire qu’elle voulait aller leur prêter main forte, même quand elle ne voyait pas l’état des urgences, même quand elle était assise sur son canapé, bien loin de l’hôpital. C’est ce qui faisait d’elle une si bonne infirmière, d’ailleurs, je n’en doutais pas. Elle avait la vocation. On entra finalement dans la petite chapelle illuminée de mille feux, et je pris la main d’Ava sur le coup de l’émotion. J’étais ému, ému de la beauté de la place, ému des bonnes nouvelles de la journée, ému qu’Ava soit de retour dans ma vie - je lui partageai d’ailleurs cette dernière portion de mes pensées. Quand elle me parla d’Oliver, je me contentai de serrer un peu plus fort sa main dans la mienne, avec un sourire. Je n’osais pas ajouter quoi que ce soit, de peur de dire une bêtise de plus. Elle avait raison, il serait sûrement rassuré de savoir qu’on s’était retrouvés à Bowen. Qu’elle n’était pas complètement seule dans une nouvelle région. La blonde, de sa main libre, se massa doucement le ventre en grimaçant de douleur et de fatigue. Cela annonçait la fin de notre visite. C’est pas grave, nous en aurions tout plein d’autres, beaux moments comme celui-là. « Pas de problème. Je vais rentrer aussi, je te raccompagne à l’entrée. » On sortit du château de glace, on se serra fort dans nos bras, et je repartis de mon côté, le sourire aux lèvres en imaginant les mois qui nous attendaient, mon amie et moi.

TERMINÉ