Rock your body - Asher

J’ai emménagé à Bowen depuis à peine une semaine et franchement, je ne m’y sens plus chez moi. Plus à ma place. C’est pourtant la ville de mon enfance, là où vivent tous mes proches… Mais il me manque quelque chose. Un foyer chaleureux peut-être. Je vois mes enfants souvent – je les force à passer du temps avec leur père, soyons honnêtes. J’essaye de croiser Jude le plus souvent possible, pour discuter et essayer de recréer un semblant de lien. Elle, au contraire, fait en sorte de m’éviter un maximum, ce que je peux comprendre. Ça me rend dingue, car je sais qu’elle a raison de vouloir ce divorce, ne plus rien avoir affaire avec moi, mais je n’arrive pas à m’y résoudre. Je travaille aussi dans un nouveau cabinet où règne une belle joie de vivre. Seulement, le soir, je retrouve une maison vide, silencieuse, sans vie. Elle me donne le cafard et me rappelle ce que j’ai perdu. En fin de compte, je n’ai jamais vraiment vécu seul jusqu’à maintenant. Passant de la demeure familiale, aux dortoirs de la fac, à l’appartement que nous occupions avec celle qui à l’époque n’était que ma petite amie. Et bien, je ne recommande pas l’expérience, ce n’est pas le paradis d’être indépendant. La journée, j’arrive à m’occuper l’esprit suffisamment pour ne pas penser, mais la nuit, c’est un calvaire. Je me mets à regretter mes actions, mes choix. J’invente tous les scénarios possibles où les « si » refondent mon monde. Mais au final, la réalité est comme elle est et je ne peux m’en prendre qu’à moi-même. En cette fin de jeudi, j’ai besoin de me dépenser. Ce n’est plus possible, il faut que ça sorte. J’ai beau essayer de courir pendant plusieurs heures, mon corps n’évacue pas le stress et la frustration qui l’encombre. Je décide de me rendre dans une salle de sport, une salle de boxe plus spécifiquement. L’idée de taper dans un sac de sable me séduit. Je n’ai jamais essayé, mais cela ne doit pas être si compliqué. Je veux juste réussir à évacuer la tension présente dans mes muscles, je n’ai pas besoin de gagner en force ou de bien taper. Juste : que ça sorte. Je débarque après le travail vêtu de l’un de mes costumes habituels, mon sac de sport à la main. Je paye mon entrée avant d’aller dans les vestiaires. J’arrive à trouver un semblant d’intimité pour me changer et range soigneusement mes vêtements dans un casier. Ce n’est pas le moment de foutre mes fringues en l’air. Je rejoins la salle, pressé d’en découdre avec un sac qui n’a rien demandé. L’endroit n’est pas tellement fréquenté et j’en suis étonné. Je pose ma gourde et mon téléphone dans un coin avant de faire des gestes décousus dans le but d’échauffer mes muscles. Je me souviens encore de mes entraînements de football américain et j’en extirpe des vestiges pour bouger avec une certaine logique. Je dois avoir l’air d’un pantin, mais je transpire donc je suppose que ce que je fais n’est pas totalement inefficace. Finalement, je me lance pour frapper dans ma cible. Mon bras est mou comme du chewing-gum et lors de l’impact, j’ai un peu mal au poignet. Ce n’est pas censé se passer comme ça… Je persévère en tentant d’imiter les autres mecs présents autour de moi.

@Asher Robertson

Jeudi, fin de journée sur Bowen. Asher avait passé sa journée à la salle, c'était une première. Il prenait doucement ses marques, non pas sur le ring, les gants aux poings, mais à diriger les autres. C'était encore tout nouveau, il apprenait. Il avait l’impression d'être gauche, de ne pas savoir comment faire. Pourtant il en avait passé des heures avec un entraîneur, plein d’entraîneurs différents, même, au long de sa carrière, il connaissait parfaitement les questions à poser, avant de commencer, les différentes étapes. Cependant il fallait croire qu'être de l'autre côté, c'était parfaitement différent. Il venait de faire trois jours de formation intensive, il en avait encore d'autres de prévues d’ici les prochaines semaines, il prenait les choses au sérieux. C’aurait été plus simple de juste se servir de son expérience de boxeur pro, de brandir ses ceintures et d'y aller un peu les mains dans les poches. Mais Ash avait envie d'entrer par la grande porte, de faire les choses correctement. Il avait toujours pris sa carrière très au sérieux et c’était encore le cas, peut-être même plus aujourd'hui, dans cette nouvelle étape. Lui qui avait quitté l’école à dix-huit ans sans aucun vrai diplôme en poche, il retournait sur les bancs de classes. Il potassait les soirs, sur les méthodes d'entraînement, sur la psychologie aussi. Il vivait peut-être à Bowen, dans une petite ville, il s’investissait dans un petit club, celui qui l'avait vu donner ses premiers coups timides. Mais il ne voulait être nulle part ailleurs. Après les premiers mois difficiles, lors de son emménagement ici, il se sentait finalement à sa place, un an plus tard. Les choses s'alignaient étrangement, il avait même retrouvé sa meilleure amie, avec qui il rattrapait les années perdues de manière particulière. Il pensait un peu à tout ça en sortant des vestiaires et en enfilant ses gants. Honnêtement ça cogitait pas mal là dedans depuis quelques semaines et puisqu'il était trop occupé par sa formation en journée, il s'entraînait un peu le matin et le soir c'était sa récréation. Il commençait par un échauffement, puis s’il y avait un habitué volontaire pour l'affronter, il se défoulait sur le ring. Il fallait admettre que beaucoup disaient vouloir se battre avec lui mais peu osaient vraiment. Il impressionnait, Rob, il le savait, même si c'était pas mal frustrant de ne plus trouver d’adversaires à sa taille. Mais il avait accepté qu’il avait changé de vie, qu'il passait à autre chose, il était vieux, retraité, fini. Une fois ses gants en place, il fit quelques mouvements pour réveiller ses jambes et des bras, toute sa vieille carcasse, puis il s’avança vers un sac. La salle était calme ce soir, il appréciait ce presque silence, les sportifs présents étaient tous là pour la même chose, pour s’entraîner tranquillement, la plupart étaient des têtes connues. Sauf ce gars là, avec ses bras en mousse et ses jambes trop raides, lui, on voyait qu'il était nouveau dès le premier coup d’œil. Il avait la mèche parfaitement rangée, Asher aurait pu parier qu’il avait les ongles manucurés. Mais la rage dans ses yeux ne faisait aucun doute, il avait besoin de se défouler. Le boxeur aurait pu le laisser frapper sans rien dire, mais la façon dont il cassait ses poignets, là, ce n'était pas possible, il allait finir par se faire mal. Alors le champion s’approcha. Salut ! C'est la première fois qu’on te voit ici, j'me trompe ? Il n’y avait rien d’agressif dans sa question, ni de moqueur, il était toujours amical avec les nouvelles recrues. Besoin de conseils ? Il avait croisé ses bras sur son t-shirt en attendant la réponse de Monsieur Propre. Il n'allait pas lui dire, d'emblée qu'il frappait mal, autant être encourageant.

@Liam Lawson

De toute évidence, je ne suis plus aussi doué en sport qu’à l’époque de l’université. Si j’ai gardé l’habitude d’aller courir plusieurs fois par semaine et de faire un peu de musculation de temps en temps, ce n’est que pour ma santé. Pour entretenir ce corps d’avocat toujours assis derrière un bureau. Il faut avouer que la sédentarité est un fléau, je ne bouge pas suffisamment. J’accuse mon travail, mais finalement, il n’y a pas que ça. Pourquoi rester actif quand on peut tout avoir à portée de main ? Il suffit d’un téléphone pour faire ses courses, commander à manger, et même lancer l’aspirateur ou fermer les volets. Surtout lorsqu’on vit seul, sans enfant à charge. Je peux comprendre ceux qui ne s’encombrent plus de ces tâches. De mon côté, j’ai quand même besoin de prendre l’air. Surtout en ce moment, je suis sur les nerfs et je dois trouver un moyen d’évacuer la frustration qu’engendre ma vie actuelle. Enfin, le semblant de quotidien qu’elle est devenue. C’est donc ainsi que je me retrouve dans une salle de boxe en cette fin de journée. Encore une idée farfelue, sortie de mon chapeau pour essayer de me détendre. J’essaye de taper dans le sac de sable du mieux que je peux. Il faut bien reconnaître que je ne suis pas très efficace. Je sens les regards des habitués autour de moi. J’ai le sentiment d’être jugé, comme un bouton en plein front. Ils doivent se demander ce que je fais là. Au fond, je me pose aussi la question. Mais je ne me laisse pas impressionner par ces mecs musclés et tente de faire de mon mieux. Finalement, l’un d’entre eux avance vers moi. Qu’est-ce qu’il me veut ? « Salut ! Bien vue, je viens juste de me lancer. » Je suis un peu sur la défensive, ne comprenant pas trop pourquoi cet inconnu m’aborde. Je jette un œil à ses gants usés. « Toi en revanche, tu connais bien l’endroit, j’imagine. » Il a l’allure typique du boxeur. Non pas que j’en connaisse beaucoup, mais avec ses cheveux courts et ses bras dont la circonférence approche celle de mes mollets… Je pense être sur la bonne piste. Il lui manque juste un bleu au visage ou une lèvre fendue pour compléter le tableau. En outre, ses traits évoquent quelque chose en moi, sans que je sois capable de me rappeler de l'origine. Le gaillard me propose ses conseils. Je hausse les épaules. Je ne pensais pas en avoir besoin, mais je dois bien reconnaître que ma technique est un peu rouillée. Ou carrément nulle, question de point de vue. « Avec plaisir, j’aimerais bien frapper sans me briser le poignet. Si tu as du temps à perdre. » Dis-je avec un petit rire. J’ai l’impression d’être une cause perdue. S’il tient à me montrer comment casser la gueule à ce sac de sable, je ne vais pas l’en empêcher. Je me mets dans ce que je pense être la position à suivre et tente de fléchir un peu mes jambes. Poings en avant, je regarde mon coach improvisé. « Je t’écoute. »

@Asher Robertson

Asher ne jugeait pas les nouveaux arrivants, du moins il ne les raillait pas. Il fallait bien commencer un jour, chacun son niveau, son rythme, son déclic. Dans cette salle, tout le monde pouvait se sentir libre, il n'y avait pas de compétition, pas de problème d’égo. C’était déjà ainsi quand il y avait mis les pieds, tout gamin, près de trente ans plus tôt. Et le boxeur avait été heureux de constater que peu de choses avaient changé malgré les années. C'était pour cette exacte raison qu'il y était revenu et qu'à présent il s’investissait de plus en plus dans la vie du club. Ce mec, là, Monsieur Propre, il avait tout l'air d'un gars qui avait vu de la lumière et était entré. Cependant ça ne voulait pas dire qu'il ne fallait pas s’en occuper, l’accueillir correctement, le guider. Peut-être avait-il du potentiel, ou non, peut-être que frapper un sac pour passer ses nerfs lui suffisait. Chacun ses raisons et sa motivation à prendre les gants. Ash essayait d’avoir de la bienveillance envers les autres. Alors il s'approchait de lui pour une première prise de contact. Et dire que quelques mois plus tôt il restait au fond de la salle, casque sur les oreilles, musique à fond, capuche sur la tête, pour que personne ne l'emmerde ou ne le reconnaisse, il a avait fait un sacré bout de chemin. Bienvenue alors, il faut se lancer un jour. Le ton était encourageant, bien que le champion sente que l'autre restait sur la retenue. Ce nouveau l’observait, il se méfiait. Pourtant il n’avait aucun raison, Ash ne comptait pas le bouffer. Il avait effectivement l'allure du boxeur, montagne de muscles, avec ses gants qui avaient donné quelques coups et ses oreilles qui en avaient pris quelques autres, son nez de travers parce qu'à une époque il avait du répondant face à lui. Aujourd'hui il n’avait pas grand risque d'avoir une trace de cocard ou d’autres coups. Il se battait beaucoup moins qu'avant et ses adversaires étaient bien plus timides que les autres champions qu'il avait côtoyé. C’était certes nettement moins intéressant, il fallait bien l’admettre, mais Rob avait fair le deuil de cette vie là. Et puis, parfois, il avait de bonnes surprises avec des combats intéressants. Parfois Asher perdait, sans même retenir ses coups, bien que ce fût rare. J’le connais plutôt bien. Oui. Confirmait-il avec un sourire. Il lui proposa alors de le conseiller, sans avoir l'air supérieur pour autant. Et quand l’inconnu accepta sans grande conviction, il lâcha un petit rire. C'est pas du temps perdu, si ça nous évite d'appeler une ambulance pour un poignet cassé ! Le gars se mettait déjà en position, finalement plus motivé que le barbu l'aurait cru. Il haussa un sourcil en observant sa façon de se tenir. Tes jambes sont raides et tes bras sont mous. Pourtant t’as du muscle dans tes biceps, sers-toi en. Sers les poings dans tes gants et fléchit un peu tes jambes, bien ancré dans le sol et en même temps prêt à bondir. Asher se mit dans la position adéquate pour lui montrer. Puis il donna un coup puissant dans le sac. Tu vois ? À toi. C'est quoi ton nom d'ailleurs ? Quitte à lui donner un cours, autant l'appeler par son prénom, pas sûr que Monsieur Propre lui plaise tellement.

@Liam Lawson

Je n’ai jamais été une personne violente. Dans mon adolescence, il est arrivé que des rencontres de football américain se passent mal, que le match se solde par une bagarre générale. Sauf que j’étais de ceux qui donnent tout sur le terrain, qui ont tout dans les jambes. Je ne réglais pas mes comptes en dehors, c’est bon pour se blesser et ne plus pouvoir jouer. Ce que je détestais. Je ne me suis jamais vraiment battu, juste un coup-de-poing ou deux sur des mecs dont je ne me souviens plus. J’étais plus du genre à calmer mes amis quand leurs esprits s’échauffaient un peu trop à cause de l’alcool. Je n’aimais pas les voir se taper dessus pour des broutilles. C’est toujours le cas : faites l’amour, pas la guerre, tout ça, tout ça. Mon apparence ressemble plutôt à celle d’un homme d’affaires. Mon père me disait que j’étais voué à devenir un gratte-papier et je le suis désormais jusqu’au bout des ongles. J’en suis fière quand je me tiens face à un juge, dans un tribunal, mais sur le parquet d’une salle de sport cela ne me sert pas à grand-chose. Au contraire, on me fixe comme si je n’étais pas à ma place. Je veux juste me défouler contre ce sac de sable et vider mes muscles de la frustration qui me colle à la peau. Quand ce type m’aborde, je ne sais pas comment le prendre. Ses intentions semblent louables, mais je ne peux m’empêcher d’être sur la défensive. Il me souhaite la bienvenue et j’esquisse un petit sourire. « Merci. » Lui est clairement un habitué du coin. Il a la dégaine du boxeur professionnel : c’est une montagne de muscle. Je ne l’envie pas. Il doit ingurgiter une quantité astronomique de protéines pour entretenir tout ça. Le brun confirme mon hypothèse et me propose ses conseils. Je ne peux refuser, cela se voit clairement que je ne sais pas comment utiliser les gants qui trônent sur mes poignets. Je le préviens, cela risque de prendre du temps. Je suis un bon élève quand il s’agit du code civil, mais je ne garantis rien en matière de frappe. « Je préfère éviter, ouais ! » Je rigole doucement. Je tiens à éviter de finir en ambulance cette journée déjà médiocre. Je suis prêt à écouter les moindres conseils de ce coach improvisé. Me mettant en position, j’attends ses remarques. Je sens son regard sur mes jambes, me sens jugé au passage. Les commentaires arrivent vite et en effet, je ne me tiens pas bien. J’ai le droit à une démonstration de Monsieur Muscles et j’imprime sa technique dans ma petite tête. « Je vois… » J’essaye de suivre ses consignes en fléchissant sur mes cuisses. Mes pieds ne font qu’un avec le sol, du moins j’en ai la conviction. Je ferme les poings dans mes gants, tente de gainer un peu mes bras et fini par donner un coup dans le sac. L’effet est déjà plus cohérent par rapport à mes essais précédents. On est loin de la perfection, mais c’est un début. « C’est mieux ? » Je demande quand même au boxeur. Concentré, j’ai oublié de me présenter. « Liam, enchanté. » Je ne peux lui serrer la main, les gants nous en empêchent, mais l’intention est présente. « Et toi, tu es ? » Je suis curieux de mettre un nom sur ce visage cabossé.

@Asher Robertson

Asher n'était pas violent non plus, malgré ce que beaucoup de gens pensaient. Le raccourci était facile, il en était conscient et n’en voulait pas à ceux qui le faisaient. Cependant il s'employait à casser le mythe, ce n'était pas parce qu'il était boxeur qu'il devait forcément être une brute en puissance. Il n'avait jamais aimé se battre en dehors d’un ring, c'était d’ailleurs assez rarement arrivé, quelques fois quand il était gamin, parce qu'il était pas mal sanguin, mais plus tard il avait toujours fait en sorte de garder le maximum de self control. Ça ne l’empêchait pas d'être un emmerdeur avec la langue bien pendue, de dire ce qu'il pensait quand il en avait envie, de gueuler plus fort que les autres. Encore aujourd'hui ! Mais ses poings il les gardait pour les combats, la compétition. Et puis ç'aurait été bien malin de se battre sous le coup de la colère alors qu'il était devenu une personnalité publique. De toute manière c'était de l’histoire ancienne, à présent il était en passe de devenir entraîneur dans cette petite salle de sport, dans la petite bourgade de Bowen où peu de choses exaltantes risquaient d'arriver. Néanmoins c’était son choix, Asher l’assumait totalement, il avait besoin de cette tranquillité, d'un retour à la normalité après des années sous les projecteurs. Alors il accueillait le nouvel arrivant comme il le ferait avec n'importe qui, visiblement cet homme avait besoin d'être guidé. Ils étaient tous les deux d'accord sur le fait qu’éviter les urgences, c’était pour le mieux. Monsieur Propre se mit en position mais il pouvait clairement mieux faire et Ash ne se cacha pas pour lui dire. Il jugeait sa position, pas pour se moquer de lui, mais bien pour qu’il s’améliore. Alors peut-être que ce gars n'était là que pour se défouler, une fois, après une journée de merde, ça arrivait. Au moins il aura gagné quelques conseils, ça ne pouvait jamais être mauvais. Donc Rob lui fit une petite démonstration rapide avant de le laisser faire. Le nouveau ne moufta pas, essayant de recopier sa technique. Le boxeur hocha la tête. C’est mieux. Encore raide, mais ça peut s'améliorer. Il lui demanda son prénom histoire de savoir à qui s’adresser. Ok Liam. Moi c'est Asher. Pas de enchanté pour lui, c'était un peu trop pompeux. Il n'était pas froissé le moins du monde que l'autre ne le connaisse pas, après tout il n’avait pas l’air d'être le genre à suivre les compétitions de boxe. Plutôt le cours de la bourse. T’es là pourquoi Liam, te défouler après une sale journée ou t’as envie d’apprendre ? Il est possible de prendre des cours si t’as envie.  Pas mauvais comme commercial, l'ancien champion, le vieux patron de la salle allait être fier de lui !

@Liam Lawson

Je n’ai jamais pensé à pratiquer ce sport qu’est la boxe. Ce n’est que depuis que ma vie part dans tous les sens que je ressens le besoin de taper dans quelque chose. Je préfère viser un sac de sable plutôt que de passer mes nerfs sur des assiettes en explosant de rage ou de frustration dans mon appartement. Habituellement, je ne suis pas un type nerveux, au contraire, plutôt posé. Mais les événements familiaux récents me mettent dans des états pas possibles. Voilà pourquoi je me retrouve à écouter les conseils d’un inconnu au milieu d’une salle de sport. Ce Monsieur Muscles m’intrigue, il est sorti de nulle part pour me proposer son aide et c’est plutôt sympa de sa part, mais un petit peu surprenant. Après sa démonstration, j’essaye à mon tour de frapper en reproduisant ses gestes. La sensation est déjà plus agréable, je n’ai plus l’impression de me casser le poignet au moindre mouvement. Mon coach improvisé approuve et mes lèvres se fendent d’un petit sourire. C’est mieux… Le début d’une amélioration, alors je suis content. Ouais, il en faut peu pour être heureux. Les présentations s’enchaînent ensuite et je peux maintenant mettre un prénom sur son visage. « Cool. » Que dire de plus après tout ? Je me replace en position. Mes jambes se détendent légèrement, mes bras se gainent et mes poings tapent à nouveau dans ce grand sac. Paff, paff ! Le bruit des gants sur le cuir retenti. « C’est satisfaisant en fait. » Franchement, je ne pensais pas apprécier autant l’exercice. C’est à la fois physique et mental, tout à fait ce dont j’ai besoin. La question d’Asher vient me surprend. Qu’est-ce que je fais là ? Je peux dire que j’ai vu de la lumière et suis rentré ? Ai-je des points de ressemblance avec un papillon ? Aucune idée, j’ai agi sur un coup de tête, mais l’expérience n’est pas désagréable. Je hausse les épaules, peu certain de ma réponse. « Un peu des deux. Je suis venu à la base parce que j’ai envie d’évacuer, pas une journée, mais un mois pourri. Et finalement, ça me plaît bien… Ouais, je vais peut-être me renseigner pour des cours. » Cela me paraît être une bonne idée. Découvrir de nouvelles choses, c’est toujours sympathique. Et puis, j’ai du temps à disposition à présent : plus d’adolescent à gérer tous les soirs, une vie de célibataire et moins de clients à suivre. Rien que d’y repenser, cela me déprime. On tellement loin de mon quotidien habituel. Je me reconcentre sur ce mec qui est plutôt gentil malgré ses airs de bouledogue. « Tu es entraîneur ou quelque chose dans le genre ? » Cela peut expliquer son approche et sa pédagogie. Plus, je l’observe et plus j’ai l’impression de l’avoir déjà vue quelque part. Il est peut-être connu ? Je n’arrive pas à remettre en place les pièces du puzzle. « T’as déjà joué dans une pub, non ? » Je suppose.
@Asher Robertson  

La boxe ç'avait été un coup de foudre, une évidence, pour Asher. Son père l'avait mis très jeune aux sports de combat pour canaliser son énergie débordante. Des sports un peu moins violents, des arts martiaux avec de belles valeurs, le judo, le karaté. Ça lui plaisait mais sans le passionner. Et puis un jour il avait découvert la boxe, un peu par hasard, un cours qui se déroulait à l'autre bout d’un gymnase. Il avait une petite dizaine d’années seulement mais c’était devenu son évidence. Il avait soulé ses parents pour qu'ils l’y inscrivent, qu'ils lui offrent une paire de gants. Le premier qui avait cédé avait été son grand-père, un été, il lui avait offert un stage d’initiation de quelques jours, dans l’exacte salle où il se trouvait actuellement. Il se rappelait encore l’odeur du vieux matériel un peu poussiéreux mélangé à celui de la transpiration, c'était particulier mais il s’y était senti bien. Durant quatre ou cinq jours il avait vibré pour ce sport, il en avait presque oublié sa meilleure copine. Heureusement Jude était venue le voir quasiment à chaque fois, un peu jalouse qu'il passe moins de temps avec elle. Et ces moments-là, à découvrir la boxe, sous le regard de la petite brunette, n'avaient fait que confirmer qu’il était tombé amoureux, de deux façons bien distinctes. Mais comme la vie était faite de choix, il avait fait celui de la raison, de son avenir. Une carrière plutôt que l’amour, un coup de poker, sans savoir s’il avait un avenir dans ce milieu, s'il était assez bon. Il s'était révélé être bon, très bon, même, l’un des meilleurs de sa génération. Il avait adoré cette vie là. Et un peu oublié la petite brune, par conséquent. Revenir à Bowen c’était se confronter à son passé, à ses choix. C'était prendre le risque de se prendre une vague de souvenir en pleine gueule, pire qu'un uppercut. Risquer de la retrouver aussi. Et c'était arrivé. Seulement il n’imaginais pas à quel point la vie était joueuse et qu'il se trouvait actuellement face au mari de Jude. Comment le deviner en même temps ? Ce gars était un homme parmi tant d'autres, frustré, en colère, peut-être triste, qu'importe au fond. Il avait besoin de se défouler et il avait trouvé l’endroit idéal. Après une petite correction de la part du champion, Liam donna quelques autre coups de dans le sac. Au fur et à mesure il se détendait et ses gestes se faisaient plus précis. Asher se dit qu'il l'avait peut-être jugé un peu vite, il semblait être capable d'apprendre rapidement. Il sourit quand Monsieur Propre avoua y prendre du plaisir. Ouais, c'est très satisfaisant ! Il n'avait rien trouvé de mieux, pour se vider la tête, pour tout un tas de raisons en fait, que d'enfiler ses gants et venir frapper un sac. Il finit par lui poser la question sur sa présence ici. La réponse sincère lui fit hocher la tête. Si c'est carrément un mois, je te préscriais bien plusieurs séances de frappe alors. Appelez le docteur Muscles ! J'pense que tu t'amuserais bien, on a un bon groupe de seniors de tous niveaux, c'est sympa, pas prise de tête. Bah quoi, seniors ? Il n'avait pas l’air d'être de la première jeunesse le gratte papier, il avait bien une petite quarantaine d’années lui aussi, ce n'était pas une tare ! Ash esquissa un sourire, avec les quelques indices qu'il lui avait lâché il était évident qu'il n’était pas prof de natation synchronisée. Quelque chose dans le genre, ouais. J’suis en reconversion pour devenir coach. Il sentait bien le regard de l'autre sur lui, il le sondait, se posait des questions, finalement il se décida sur une proposition qui arracha un petit rire à l’ex champion. Heureusement qu'il n'avait pas un ego surdimensionné, il aurait pu se vexer. Entre autres. J’étais boxeur pro dans une autre vie. Il lui designa le sac d’un mouvement de tête. C'était bien beau de discuter, mais il pouvait frapper en même temps, sinon ses muscles risquaient de se refroidir et ce ne serait pas bon. Allez, donne-moi quelques coups là. Sois plus souple sur tes appuis.

@Liam Lawson