Alexis ϟ Give your heart a break

C’est la larme à l’œil que je conduisis jusqu’à la maison, seule dans la voiture à présent. Je venais tout juste d’aller déposer Analeigh au point de départ de la colonie de vacances dans laquelle je l’avais inscrite pour la semaine à suivre. Ce n’était certainement pas parce que je manquais de temps, puisque j’avais exactement le même nombre de semaines de vacances que ma fille. C’était plutôt parce que je jugeais préférable qu’elle ne soit pas dans les parages, qu’elle s’amuse avec ses amis, tandis que Jared et moi allions mettre en place la procédure de divorce afin que tout soit réglé le plus rapidement possible. Apparemment, il avait réussi à trouver quelqu’un pour l’héberger, compte tenu qu’il n’était pas rentré la nuit précédente, et c’était tant mieux, parce que je ne voulais pas qu’il rentre, je ne voulais plus avoir de rapport quelconque avec lui, et je ne voulais surtout pas qu’il vienne embêter Analeigh. Avoir une telle pensée me fendait le cœur, mais certainement pas autant que de me faire à l’idée que je ne pourrais pas voir ma fille pendant une semaine à cause de ces procédures ridicules, même si je savais qu’au fond, c’était pour son bien. Elle n’avait pas à supporter tout cela, elle ne le méritait pas. Heureusement, cette idée me redonna un peu de courage pour essuyer mes larmes une fois arrivée devant la demeure. Je coupai le contact et prit mes clés dans mon sac à main, sans savoir que je n’en aurais pas besoin, puisque lorsque je mis la main sur la poignée de la porte, celle-ci était déverrouillée. Persuadée que c’était Jared, je dis sèchement : « Je ne veux pas te voir ici ! Fiche le camp ! », mais en avançant un peu plus dans la demeure, lorsque je vis la silhouette qui se découpait dans la pièce que je venais de franchir, mon cœur manqua un temps, et je fus si choquée que j’en laissai tomber mon sac par terre, lâchant dans un souffle : « Alexis… C’est toi ? »

Le voyage avait été long, mais j’étais enfin arrivé à Bowen, j’étais désormais en retraite, je n’avais plus de boulot. Je ne parlais plus à mes parents donc inutile de me rendre chez eux, mon seul pied à terre c’est chez mon frère. Je suis fortement jaloux de lui mais nous sommes toujours en contact, si je puis dire cela. Je décidais alors, après avoir récupérer mes bagages et acheté un petit quelque chose à ma filleule, de me rendre chez mon frère afin de lui demander s’il pouvait m’héberger quelques jours le temps que je trouve un boulot, que je me trouve par la suite un appart et que je puisse payer mon loyer surtout. J’arrivais chez lui, j’ai frappé, sonné, personne. Je savais qu’une clé de secours, si je pouvais appeler cela comme ça, se trouvait dans la boite à fleur. Je me permettais donc de la chercher et d’ouvrir la porte afin d’attendre à l’intérieur que quelqu’un arrive. Après m’être servi un verre d’eau, oui je fais légèrement comme si j’étais chez moi, j’allais attendre sur le balcon, il faisait beau, c’était agréable de se trouver là et d’attendre. Au bout d’un moment, j’entendais la porte claquer et une voix féminine rétorquer « Je ne veux pas te voir ici ! Fiche le camp ! ». J’étais surpris, je ne m’attendais pas à ça… Mais je savais une chose, j’avais reconnu cette voix, c’était Kaliska. Je me retournais alors, comme pour quitter le balcon quand soudain je me trouvais face à elle. « Alexis… C’est toi ? » Je ne bougeais plus, j’étais tétanisé. Je ne m’attendais pas à tomber sur Kaliska ainsi. Elle était belle, toujours aussi belle, voire encore plus belle qu’avant. J’étais content de la voir, elle me manquait tellement…je n’avais cessé de l’aimer depuis cette nuit-là, mais elle ne le savait pas et de toute façon, c’était la femme de mon frère. Mais pourquoi avait-elle dit « Je ne veux pas te voir ici ! Fiche le camp ! ». Cela m’intriguait. « Oui c’est moi…est-ce que c’est à moi que tu as demandé de foutre le camp d’ici ? » Je m’approchais d’elle sans vraiment m’en rendre compte, nous n’étions plus qu’à quelques centimètres l’un de l’autre, je voulais la prendre dans mes bras mais je n’osais pas. L’envie fut plus forte que ma raison, j’enlaçais mes bras autour d’elle avant de l’attirer contre moi.

 « Euh… Non… », voilà la seule chose que j’arrivai à dire à Alexis lorsque celui-ci me demanda si je m’adressais à lui. Embarrassée, choquée, troublée, je n’arrivai pas à lui en dire davantage, alors qu’au fond de moi, j’aurais tant eu envie de lui en dire plus. J’aurais eu envie de lui dire que jamais je ne pourrais lui tenir un tel propos, que pour lui, la porte était grandement ouverte à tout moment. Sinon, pourquoi lui aurais-je parlé de la clé cachée dans la boîte à fleurs ? Malheureusement, je n’arrivai pas à dire quoi que ce soit d’autre. Les mots étaient bloqués dans mon esprit, j’étais trop gênée pour lui dire cela, surtout que c’était probablement une des premières fois qu’on se trouvait ainsi, seuls, et ce depuis maintenant six ans. C’était bien connu qu’Alexis était toujours le bienvenu dans la demeure, mais malgré tout, cette solitude, ce moment de proximité me rendait encore plus déstabilisée, si bien que je me demandai l’espace d’une seconde si je ne ferais pas mieux de m’appuyer sur la table de la cuisine avant de sentir mes jambes se dérober et tomber par terre, ce que je serais bien capable de faire dans cette situation on ne peut plus délicate.

Cependant, avant que je puisse faire quoi que ce soit, la situation devint encore plus tendue lorsque je me rendis compte qu’Alexis était encore plus proche de moi que lorsque mon regard avait croisé sa stature. Je sentis mon cœur battre la chamade, et pendant un instant, j’eus une immense envie d’approcher mes lèvres des siennes et de l’embrasser, comme je me l’étais imaginé tant de fois depuis six ans, sauf que je n’osai pas. Je ne pouvais pas faire ça, je le savais, je le sentais. Que serais-je si quelques heures après avoir mis mon mari à la porte, je tombais dans les bras de son frère ? Enfin, tomber dans ses bras était là qu’une image, parce que littéralement, sans que je puisse faire quoi que ce soit, j’étais dans les bras d’Alexis, et je ne cherchai même pas à m’en échapper, parce qu’aussi étrange ce contact soit après tant de temps, il n’en restait pas moins qu’il était si réconfortant que je ne pouvais pas ne pas en profiter. Je me laissai donc aller, et je me blottit contre lui pendant un instant, en profitant pour humer discrètement son parfum que je trouvais toujours aussi divin, si ce n’était pas davantage maintenant que je n’avais pas su l’approcher depuis longtemps. J’aurais aimé rester toute la journée, toute la soirée dans ses bras, mais encore une fois, cette barrière que j’avais érigée ne me le permettait pas. De ce fait, après un court moment, histoire d’éviter de commencer à chialer sur son épaule, je me ressaisis, reculai d’un pas – ce qui me laissait garder une certaine proximité avec Alexis – et je demandai : « Qu’est-ce qui t’amène ici ? Tu…. Tu es en permission ? »

J’étais rassuré que ce ne soit pas à moi qu’elle parlait lorsqu’elle avait dit à la personne à qui elle s’adressait qu’elle ne voulait pas la voir ici. J’avais eu peur, si c’était à moi qu’elle parlait je serais obligé de dormir je ne sais où mais c’est surtout que je ne comprendrais pas sa réaction car à ma connaissance, je n’avais rien fait de mal. Sachant que ce n’était pas à moi que m’étais destiné ce qu’elle avait dit, je voulais savoir à qui elle parlait.

Quand je l’eus prise dans mes bras, j’aurais aimé la garder contre moi longtemps…et pourquoi pas même aller plus loin…si ça allait plus loin, ce ne serait pas purement sexuel, du moins pas pour moi, au contraire de la première fois où nous avons couché ensemble. Aujourd’hui je l’aimais, sincèrement, passionnément et ça me rendais fou que mon frère ait une femme comme ça, il ne la méritait pas et je ne supportais pas qu’il ne s’occupe pas de sa famille, ça me rendait dingue. Je savais qu’il était odieux avec sa femme ainsi qu’avec sa fille mais du moment qu’il ne leur levait pas la main dessus, à vrai dire je pouvais « tolérer » son comportement.

Elle s’était retiré de notre étreinte, ce que je regrettais mais je n’avais pas trop le choix, nous ne pouvions pas rester dans les bras l’un de l’autre tout le temps. Surtout que si mon frère arrivait entre temps on risquerait de l’entendre. Je laissais échapper un petit rire à ce qu’elle dit malgré que sa question soit des plus sérieuses. « En quelque sorte, enfin pour faire plus simple, je suis en retraite. Je suis de retour à Bowen, définitivement… »

Mon premier réflexe quand j’entendis Alexis rire suite à ma question, ce fut de froncer légèrement les sourcils, quelque peu perplexe. À vrai dire, je ne savais pas vraiment comment l’interpréter, ni comment réagir face à ce fameux rire, bien qu’il soit court et aurait très bien pu laisser transparaitre une nervosité, un truc du genre, ne voyant pas autre chose. Après tout, je ne pensais pas avoir posé une question stupide, considérant qu’au fil des années, j’avais quand même réussi à apprendre ce qu’était une permission dans le monde militaire, et que c’était arrivé quelques fois qu’Alexis rentre à Bowen temporairement pour venir voir Analeigh, ce qui me rendait heureuse aussi, à vrai dire. Bref, tout semblait être une question bien classique, mais visiblement, sa réponse n’aurait rien de classique, vu ce petit rire qu’il venait de lâcher…
Comme de fait, Alexis dit quelque chose à quoi je ne m’attendais pas du tout, à savoir qu’il était de retour pour de bon, que l’armée lui avait accordé sa retraite. Ce fut là un nouveau choc ; outre le fait que le mot « retraite » était bien étrange quand il s’adressait à une personne dans le trentaine à mes oreilles, je réalisai progressivement qu’Alexis était maintenant là pas seulement pour une semaine, deux ou trois, mais pour toutes les semaines à venir, tous les mois à venir, tout le temps. C’était une surprise, et je ne le cachai pas, compte tenu que je le regardai avec des yeux bien écarquillés, mais au fond de moi, j’en étais à la fois heureuse et troublée ; heureuse surtout pour Analeigh, qui allait voir son parrain qu’elle aimait tant plus souvent, mais troublée aussi parce que maintenant, je savais que je n’avais plus d’échappatoire par rapport à ce qui s’était passé entre nous il y a six ans. Le métier d’Alexis nous avait toujours empêchés de parler directement de ce qui était arrivé, et de ce fait, jamais je n’avais su lui parler de mes sentiments, mais maintenant que ce métier n’était plus, je ne savais plus quoi faire, même si je me savais heureuse aussi, parce que cela voulait dire que je le verrais plus souvent, et c’était définitivement un plus, surtout en ce moment. Malgré tout, je ne sus répondre mieux que : « Sérieusement ? C’est… C’est génial ! Je suis sûre qu’Ana’ sera folle de joie ! Tu lui manques beaucoup, tu sais ? » *Et tu me manques à moi aussi, Alexis, beaucoup plus que tu ne le crois…* Voilà ce que je ne sus pas rajouter alors que je le considérais avec un petit sourire.

Sérieusement ? Non je te faisais une blague… Bien sûr que je suis sérieux, je ne pense pas que je rigolerais avec ce genre de chose. J’étais trop heureux à l’idée que j’allais pouvoir passer beaucoup plus de temps avec ma filleule, elle me manquait beaucoup et je m’en voulais de ne pas pouvoir être là pour elle comme je me devais de l’être. Elle n’avait que 6 ans mais elle était intelligente et elle comprenait qu’à cause de mon travail je ne pouvais pas être là tout le temps mais que je faisais tout mon possible. J’espérais qu’elle serait ravie de savoir que je serais à Bowen tout le temps maintenant. D’ailleurs, Kaliska était sûre qu’elle serait folle de joie, ça me ferait vraiment mal qu’elle ne le soit pas, mais je doutais de ça, c’était presque impossible qu’elle ne soit pas contente ! Je souris à ce qu’elle dit, j’étais content. « Je pense qu’elle sera contente aussi…elle est où d’ailleurs ? Elle qui ne te lâche jamais ?! Elle me manque aussi, je suis vraiment heureux à l’idée que je vais pouvoir la voir beaucoup plus souvent. » *et toi aussi d’ailleurs Kaliska…je n’ai cessé de penser à toi depuis cette nuit-là, impossible pour moi de t’oublier* c’est évident que je ne lui disais pas cela, je n’avais pas envie de m’en prendre une. Peut-être qu’avec le temps je parviendrais à lui dire ce que je ressens mais là dans l’immédiat, je ne me sentais pas du tout prêt. « Comment va Jared ? » Certes j’avais beaucoup de mal à supporter mon frère mais j’étais chez lui alors je demandais de ses nouvelles même si au fond j’en avais strictement rien à faire.

Sitôt que j’entendis Alexis me demander où Analeigh était, je me sentis stupide de l’avoir envoyée en colonie de vacances. Si j’avais su une heure plus tôt que son parrain était de retour, il est certain que je ne l’aurais pas envoyée, puisque je savais qu’elle aurait été plus que ravie de passer du temps avec lui, et moi, j’aurais été ravie de les voir ensemble, puisqu’ils s’entendaient plus que bien. Alexis et Analeigh, c’était le spectacle le plus rapproché d’une relation père-fille que j’avais vue, puisque Jared ne s’était comporté de la sorte avec sa propre fille, même si elle s’était efforcée de nombreuses fois de se montrer heureuse de le voir quand il rentrait du travail. Maintenant, j’avais l’impression de priver Analeigh de tout cela pendant une semaine, et cela me fit faire un sourire nerveux, embarrassée par ma propre bêtise. Cependant, alors que je cherchais mes mots pour expliquer où elle était, puisque pour le moment, je n’avais su que dire « Elle n’est pas là, elle est… », avant d’être interrompue non seulement par ma gêne, mais aussi par le fait que quelques secondes après, Alexis me demanda comment allait Jared. Ce fut alors le catalyseur, et je ne sus pas me retenir plus longtemps. Je pinçai les lèvres pour retenir mes larmes de détresse, de nervosité, ce qui fit en sorte que sans le vouloir, je dis, avec presque du sarcasme : « Je n’en sais rien, et je n’ai pas envie de savoir… » Réalisant ce que j’avais dit, je baissai la tête, sentant les larmes couler sur mes joues. J’inspirai profondément, et je relevai les yeux, portant un regard triste sur Alexis tandis que j’affirmais, la voix enrouée : « Pardon… C’est juste que… Il n’habite plus ici maintenant… » Je marquai une pause pour terminer en disant : « C’est fini, on va divorcer… J’ai envoyé Analeigh en colonies de vacances pour qu’elle ne doive pas supporter tout ça, elle en a déjà assez bavé avec Jared… J’en ai assez… »

Kaliska venait de m’annoncer quoi, que Jared ne vivait plus ici. Cela m’étonnait, je m’apprêtais à lui demander pourquoi mais elle me répondit sans même que je ne pose de question. En réalité, elle avait demandé le divorce. Cela signifiait en gros que Jared ne reviendrait jamais ici, mise à part pour récupérer quelques affaires. Pour faire plus simple, Kaliska était libre. Mais je ne savais pas si elle était heureuse de divorcer car elle ne l’aimait plus ou autre ou bien si c’était juste par rapport à son comportement vis-à-vis de ma filleule qui est sa fille, Analeigh.

C’était surement méchant, égoïste, moi j’étais heureux d’apprendre cette nouvelle, je me sentais presque revivre. La femme que j’aimais allait bientôt être célibataire pour de bon et pas seulement en instance de divorce. La seule chose qui me chagrinait c’était qu’Analeigh n’était pas là. Kaliska venait de me dire qu’elle l’avait envoyé en colonie pour ne pas l’importuner du divorce de ses parents et j’étais d’accord avec Kaliska car Jared lui avait fait assez de mal. En revanche, je ne savais pas si Analeigh était au courant du divorce de ses parents mais si ce n’était pas le cas, elle le saurait surement très vite et à mon avis je n’étais pas sûr que cela l’attriste.

« Je suis content que Jared ne vive plus ici… » Sans m’en rendre compte, je venais de parler. Je n’avais pas parlé fort mais sans doute m’avait-elle entendu, elle allait surement se demander pourquoi je venais de dire cela et à vrai dire je n’avais aucune idée de ce que je pourrais lui répondre, j’aviserai à ce moment-là. J’étais gêné mais tentais de ne pas le laisser paraître. « Ana’ est au courant pour vous deux, enfin que c’est fini ? Et sinon, elle va bien ? C’est dommage qu’elle ne soit pas là mais bon, comme je ne repars plus, je vais pouvoir la voir. » Je m’arrêtais un moment. « Mais j’y pense…je voulais savoir si tu pouvais m’héberger quelques temps ? Histoire que je trouve un nouveau boulot, un appart’…car Jared n’est plus là et tu n’as pas forcément envie d’avoir son frère sous ton toit désormais, surtout après ce qu’il s’est passé, enfin je ne sais pas… »

Je n’aurais pas su dire à quel type de réaction je m’attendais de la part d’Alexis après lui avoir annoncé que je demandais le divorce, mais une chose est sûre, c’est que jamais je n’aurais imaginé qu’il me dise du tac au tac qu’il était content de cette décision, sans aucun filtre. Ce fut alors plus fort que moi, je me dus de le toiser du regard, cherchant ce qui l’a poussé à dire une chose pareille. Pendant un instant, j’espère au plus profond de moi-même que c’est parce qu’il a toujours des sentiments pour moi, donc que voir Jared partir est un soulagement, une libération. Ce serait utopique, mais je ne peux m’empêcher de le penser, compte tenu que jamais je n’avais su ce qu’Alexis ressentait depuis cette fameuse nuit que nous avions passé ensemble. Visiblement, ce ne serait pas maintenant que je le saurais, puisque bien rapidement, le jeune homme chercha à se rattraper en changeant complètement de sujet. Cela me déstabilise un peu, mais puisque je me sens déjà mal de l’annonce que je viens de faire, je réussis à ne pas le faire trop paraître, et tandis que je hoche la tête pour assurer Alexis que sa filleule va bien, je rajoute : « Non elle ne le sait pas. Je veux lui dire quand elle sera rentrée, je n’ai même pas trouvé les mots pour lui expliquer encore, elle n’a que six ans… » Par ces mots, je ne remettais pas en doute les compétences de ma fille, mais expliquer un divorce à un enfant de cet âge, c’était difficile pour n’importe qui, surtout dans une situation pareille. Après, peut-être que je pourrais compter sur Alexis pour m’aider à lui dire la vérité sur notre séparation, surtout que selon ses propos, quand il changea de nouveau de sujet, il comptait rester un petit moment, souhaitant même habiter ici en attendant de se trouver un toit. Cette requête eut un autre effet étrange sur moi, puisque comme il venait de le mentionner, l’avoir ici tandis que Jared venait de partir, ce serait étrange. Non pas parce que c’était son frère, mais parce que depuis six ans maintenant, je m’efforçais de ne pas lui parler de ce qui s’était passé, de mes sentiments pour lui, justement parce que Jared était là. Maintenant qu’il était parti, on dirait que tout changeait brusquement, et je n’arrivais pas encore à assumer le tout. Malgré ça, je ne pouvais pas me permettre de mettre Alexis dehors, et de ce fait, je lui répondis, un peu hésitante, les bras croisés en les frictionnant un peu de mes mains : « Oh non, t’inquiète pas pour ça. Ça ne change rien au fait que tu es toujours le bienvenu ici. D’ailleurs, si tu veux, tu peux aller te mettre à l’aise, je crois que tu sais où se trouve la chambre d’amis. »

Kaliska m’assurait que ma filleule allait bien et me disait qu’elle n’était pas au courant du divorce de ses parents, ce n’était déjà pas quelque chose de facile à expliquer à un adulte alors encore moins à une enfant de six ans. « Je t’aiderai si tu veux… je me doute que ce ne sera pas facile de le lui dire. Tu penses qu’elle va le prendre comment ? J’espère que cela ne va pas la rendre trop triste. » C’était aussi un peu mon rôle de soutenir la mère de ma filleule, je me devais d’être présent pour les deux surtout que mon frère n’allait plus les aider maintenant, étant donné qu’il n’était pas là pour elles avant, je devais donc agir avec Ana’ comme si j’étais son père, c’est un peu le principe d’un parrain. Enfin bref, je serais là pour elles quoi qu’il puisse se passer.

J’angoissais un peu qu’elle me demande de ne pas rester chez elle à cause du fait qu’elle soit en instance de divorce avec mon frère. Finalement, elle me disait qu’il n’y avait pas de problème, j’étais rassuré, content. Premièrement, si elle m’avait demandé de partir je ne savais pas où j’aurai dormi et deuxièmement, j’allais l’avoir tout pour moi donc un moyen de tenter de me rapprocher un peu d’elle.

La chambre d’ami ? Bien sûr que je sais où elle se trouve, c’était la chambre où je dormais à chaque fois que je venais. Je hochais la tête pour dire oui en réponse à sa question. Je lui lançais un sourire, attrapais mon sac et allais vers la chambre d’ami afin de déposer mes affaires. « Je reviens, je vais déposer mes affaires. » A peine avais-je fini de parler que j’étais presque dans la chambre. Je déposais mon sac sur le lit, l’ouvrais et mis mes affaires dans l’armoire, je n’avais pas grand-chose donc ça allait, je n’en avais jamais pour longtemps à sortir puis ranger mes affaires. Cependant ce que j’avais suffisait largement et de toute façon si j’avais besoin, je m’achèterais des vêtements sur place, ce serait plus pratique de que les trimballer.

« C’est gentil… Je sais pas comment elle pourrait prendre une telle nouvelle, mais si elle sait que tu es à la maison, ça passera déjà mieux. » fut la réponse que je fis avec un sourire triste lorsqu’Alexis me demanda comment Analeigh pourrait prendre la nouvelle. Je n’osais pas supposer qu’elle serait contente, surtout avec la dernière dispute qui était survenue dans la maison avec Jared, qui tournait autour du fait qu’il insultait Ana’. Ce souvenir me faisait beaucoup trop mal et était beaucoup trop récent pour que j’arrive à le raconter. Un jour, peut-être, je pourrais tout dire à Alexis, relater comment j’avais décidé de mettre fin à mon mariage avec Jared après six ans de vie commune. Il faudrait même que je lui dise à un certain point, mais pas ici, pas maintenant, je n’en avais pas la force. En réalité, je n’avais pas la force de faire grand-chose, pour tout dire. Preuve étant que lorsqu’Alexis me dit qu’il allait déposer ses affaires dans la chambre d’amis, la seule chose que je fis, ce fut de hocher la tête et marmonner un « D’accord. » avant de le regarder monter à l’étage avec ses valises et rester plantée dans la cuisine, les bras croiser, à fixer le vide où se trouvait mon beau-frère quelques instants auparavant, comme s’il y avait un vide dans mes pensées, comme si j’étais devenue soudainement une statue qui ne ressentait plus rien. Je n’avais pas Analeigh pour me sauter dans les bras, me demander de jouer à la poupée avec elle, ou au Monopoly pour enfants. Comment j’allais tenir une semaine sans elle ? Je savais bien que je n’étais pas toute seule, mais compte tenu du fait que jamais je n’avais réussi à m’expliquer avec Alexis, c’était tout comme tel. Je n’osais plus l’approcher, je n’osais plus le toucher, même si ce n’était pas l’envie qui manquait. À cette pensée, une larme roula sur ma joue, et lorsque je la chassai du bout des doigts, ce fut comme si soudainement, toutes mes réticences se lâchèrent d’un coup. Pour la première fois depuis des années, j’eus envie de laisser parler mes pulsions. Après tout, qu’est-ce qui me retenait, à présent ? Rien du tout. C’était stupide, j’allais probablement le regretter, mais si je ne voulais pas craquer et fondre en larmes, c’était la seule chose que je pouvais faire, que je me devais de faire. Je montai donc à l’étage d’un pas précipité, et sans crier gare, sans frapper à la porte, j’entrai dans la chambre d’amis, lâchant un simple : « Alex, je… » pour annoncer ma présence. Je ne terminai même pas ma phrase. Je me dirigeai d’un pas assuré vers le jeune homme, puis je me redressai sur la pointe des pieds pour déposer mes lèvres sur les siennes afin de lui donner un baiser fougueux et passionné.

« Alex, je… » Je me retournais pour lui faire face, comme elle n’avait pas continué sa phrase je m’apprêtais à lui dire « Tu ? » Mais je n’eus pas le temps de me rendre compte de quoi que ce soit qu’elle était déjà en train de m’embrasser. Je ne la repoussais pas, pourquoi faire ? J’attendais ça depuis tellement longtemps…six ans exactement, depuis la nuit où nous avions couché ensemble. Je prolongeais même le baiser qu’elle m’offrait, j’avais l’impression de rêver tant c’était bon de sentir ses lèvres contre les miennes. Lorsque l’on finit par rompre le baiser, j’avais envie de plus, je ne voulais pas m’arrêter là, pas maintenant. Je la fixais, je la dévorais du regard, elle venait d’éveiller des désirs enfouis depuis six ans que j’avais pour elle en m’embrassant. Nous étions près l’un de l’autre, je caressais son visage, je brûlais d’envie de l’embrasser à nouveau et plus encore. Je ne pus me retenir plus longtemps, je l’embrassais avec fougue prenant son visage entre mes mains puis je les glissais le long de ses hanches lentement, si jamais elle ne voulait pas aller plus loin, qu’elle regrettait de m’avoir embrassé, elle pourrait me repousser, si jamais elle ne le faisait pas, nous finirions très certainement dans le même lit comme il y a six ans.

Sitôt que j’eus posé mes lèvres sur la bouche d’Alexis, je sentis mon cœur battre à tout rompre. Pourquoi ? Parce que non seulement, j’étais morte de trouille à l’idée qu’il me repousse, mais quand je vis que ce n’était pas le cas, l’accélération de mes battements de cœur ne s’expliquait que par une chose ; cette sensation de bien-être qui m’envahissait pour la première fois depuis six ans. Jamais je n’avais ressenti ça avec Jared, alors que pourtant, nous étions mariés auparavant. Il faut dire que ses marques d’affection n’avaient rien de magique, rien de délicat. C’était la première fois depuis longtemps que quelqu’un me montrait un signe de tendresse, et cela me fit sincèrement le plus grand bien. Tandis que le baiser se prolongeait, je ne me sentais pas coupable, loin de là. Ce fut seulement lorsque le baiser prit fin que je me mordillai la lèvre inférieure en considérant Alexis, craignant d’avoir fait une bêtise, même si je savais qu’au fond, ce n’en était pas une ; j’avais besoin de ça, de quelqu’un qui pouvait me faire croire qu’on pouvait être aimé malgré tout. De ce fait, lorsque ce fut le jeune homme qui m’embrassa, cette fois-ci, je fus aux anges. Je passai mes bras autour de son cou, prolongeant le baiser avec ferveur, ne sentant même pas mes larmes de soulagement, de bonheur, couler sur mes joues, puisque jamais je n’aurais cru revivre ça un jour. Émue, lorsque je fus à bout de souffle suite à ce second baiser, sans détacher mes bras de ses épaules, je lui dis : « Je… Tu m’as tant manqué… »

Mes mains avaient lentement glissées sur ses hanches, elle m’avait laissé faire. Le second baiser que nous avions échangé avait été plus intense que le premier, cela signifiait donc qu’elle ne regrettait pas le premier. J’esquissais un petit sourire à ce qu’elle dit. Je lui avais manqué, tout comme elle m’avait manqué. « Tu m’as manqué toi aussi… » Je passais délicatement mes mains sous son haut, je ne voulais pas la brusquer, la frustrer, je voulais être certain qu’elle en avait aussi, je ne voulais pas la pousser à quelque chose qu’elle regretterait car cela ne me plairait pas. Selon moi, ce genre de chose doit être désiré par les deux personnes, il y a six ans nous étions tombés dans les bras l’un de l’autre, nous le voulions. Elle avait peut-être regretté ensuite, moi aussi car à cause de tout ça j’étais tombé amoureux de Kaliska et ça me rendait fou de voir mon frère avec. Aujourd’hui, je pouvais presque dire que j’avais champ libre, mon frère et elle allaient divorcer, cela signifiait que si je voulais Kaliska, je pouvais l’avoir. Je déposais mes lèvres dans son cou y déposant quelques baisers passionnés, j’avais envie d’elle et ce depuis six ans maintenant. Je venais mordiller doucement son oreille lui chuchotant : « J’ai envie de toi Kaliska… » Il ne me fallut pas longtemps pour lui ôter son haut caressant sa peau tendrement.

Je sentis mon cœur s’emballer quand j’entendis Alexis me rendre la pareille, n’arrivant pas à croire pendant un instant ce qui se passait, que j’aie pu réellement lui manquer. Toutefois, les frissons qui me parcoururent l’échine lorsqu’il glissa ses mains sous mon haut me confirmèrent comme quoi tout était réel, que pour la première fois depuis six ans, je pourrais peut-être laisser libre-cours à mes envies, mes fantasmes. Je poussai un soupir lorsque je sentis les baisers qu’il déposa dans mon cou, et je m’empressai de le serrer contre moi pour qu’il ne me lâche pas, pour qu’il ne me lâche jamais, comme si j’avais peur qu’il me repousse. Cependant, cette crainte, elle disparut rapidement lorsqu’il me dit qu’il avait envie de moi. Ce fut comme un rêve qui se réalisait, si bien que sous le coup de l’émotion, je ne sus pas répondre, me contentant de lever mes bras au-dessus de ma tête pour le laisser enlever mon haut. Au moment où je retrouvai le contact visuel avec lui, je le regardai dans les yeux, et je lui dis, le plus honnêtement possible : « Ça fait six ans que j’ai envie de toi… », ne réalisant pas tout de suite qu’à ce point, c’était plus qu’une envie, c’était devenu un besoin, une nécessité. D’ailleurs, cela devint plus évident quand je me montrai légèrement brusque, pressée, lorsque je m’emparai de la chemise d’Alexis pour la déboutonner, lui retirer, et aller chercher un nouveau baiser sur ses lèvres lorsque le vêtement tomba derrière lui.