I remember you were laughing so let's just laugh again (noël)

Depuis quelques temps, j’étais un peu plus ouverte aux sorties et au monde extérieure. Je restais tout de même très raisonnable, évidemment, mais je ne refusais plus d’aller aux soirées auxquelles j’étais invitée. J’y allais même avec plaisir. Cela me faisait voir du monde et me donnait l’impression d’être à peu près normale pendant quelques heures. Enfin… Presque normale. Parce qu'à en juger par le comportement de certaines filles, j’étais à des années lumières d’être une jeune femme moderne. Cela dit, j’étais contente de ne pas boire jusqu’à vomir mes tripes sur la moquette ni de ne pas me coller au premier venu comme si ma vie en dépendait. Je restais plutôt passive, en fait. J’étais spectatrice et m’amusais ou me lamentais de ce que je voyais. C'était plutôt divertissant. Ce soir-là, c’était l’anniversaire d’une copine d’enfance. La fille d’un des nombreux amis de mon père avec qui je n’avais jamais réellement eu d’affinités mais que j’invitais tous les ans à mon anniversaire par pure habitude. Elle me rendait la pareille chaque année et même si je ne la détestais pas, je ne pouvais pas dire que nous étions amies pour autant. On se connaissait à peine, pour être honnête. Elle avait organisé une soirée branchée dans la boite du nuit du coin et même si ce n'était pas le genre de lieux que je fréquentais habituellement, j’avais tout de même décidée de m'y rendre pour deux raisons : premièrement parce que Nicholas travaillait ce soir-là et que je ne voulais pas être toute seule. Deuxièmement parce que je savais que Noël serait à cette fête et que je voulais garder un œil sur lui, histoire de voir s’il allait bien. Depuis notre dernière rencontre je m’inquiétais beaucoup pour lui. Je n’osais pas aller le voir ni même l’appeler parce que je ne voulais pas compliquer les choses mais il ne se passait pas une heure sans que je l’imagine en train d’agoniser dans sa salle de bain après avoir injecté trop de drogue dans son organisme. Notre relation était compliquée (voire même très compliquée) mais ça ne m'empêchait pas de tenir à lui malgré tout. Et j'étais morte de trouille à l'idée qu'il recommence à se tuer à petit feu.

Je l’avais observée discrètement toute la soirée sans jamais avoir le courage d’aller lui parler. C’était peut-être mieux comme ça d’ailleurs, je n’étais pas sûre de vouloir l’affronter en face. Mais quand je le vis enchaîner verre sur verre jusqu’à tituber à moitié, je me dis qu’il était temps de réagir. Je savais très bien gérer Noël quand il était saoul. J’avais déjà veillé sur lui plusieurs fois quand il avait bu et jouer les chaperons ne me dérangeait pas. C'était mon rôle de prédiléction. Après avoir pris une profonde inspiration pour me donner la force d’avancer, j’allai à sa rencontre et me postai juste à côté de lui. « Salut… » Le voir comme ça ne me réjouissait pas. J’ignorais s’il serait content de me voir ou s’il me demanderait de partir en gueulant à moitié mais je devais tenter le coup. « Je pense que tu ferais bien de poser ton verre… Tu as déjà bien assez bu comme ça, tu crois pas ? »  Pas de reproches ni de ton autoritaire ou quoi que ce soit. Juste mon air bienveillant habituel parce que je m’inquiétais réellement pour lui. Je n’avais ni le droit ni l’envie de lui faire la morale. Mais puisque nous étions de nouveau réunis pour la soirée, je me devais de veiller sur lui et de faire en sorte qu’il ne fasse pas n’importe quoi. Aussi étrange que cela puisse être, je me sentais responsable de lui. Et j’agissais souvent comme une mère poule sans même m’en rendre compte… Mais savoir qu’il gâchait sa vie me rendait dingue. Il méritait bien mieux que cela. Je lui adressai finalement un petit sourire. J’étais contente de le voir mais aussi très gênée. Après notre dernière conversation, je ne savais plus vraiment comment agir avec lui… Et puis, il y avait Nicholas. Je savais qu’il ne voyait pas ma relation avec Noël d’un très bon œil – et il avait toutes les raisons pour – et je ne voulais surtout pas le blesser. Je tenais à lui plus qu’à n’importe qui. Cela dit, je ne pouvais pas non plus abandonner Noël. Surtout pas alors qu’il était complètement bourré, là, devant moi. Je le connaissais assez pour savoir qu’il enchaînait les conneries quand il avait trop d’alcool dans le sang… Surtout quand il allait mal. Et à priori, ces derniers temps, il était loin d’être au meilleur de sa forme.  

« Powwwquoi ? Tu as peur que je t'embrasse c'est çaaaaaaaa ? » Je soupirais doucement alors qu'il s'approchait dangereusement de moi. Cette soirée n'allait pas être de tout repos, apparemment. Il fit ensuite une remarque plus que désobligeante à laquelle je ne pus m'empêcher de répondre. « Non, je suis simplement ton amie. Et je ne te fais pas la morale, je dis ça pour ton bien c'est tout. » J'étais d'ores-et-déjà agacée par son attitude et pourtant, je ne pouvais pas me résigner à l'abandonner là. Je lui avais promis que cette fois-ci, il aurait du mal à se débarrasser de moi et je comptais bien tenir parole. Sans que je m'y attende le moins du monde, il se leva brusquement et se ridiculisa devant les gens qui nous entouraient. Ou me ridiculisa... Je n'aimais pas du tout la façon dont il venait de parler de moi mais je mettais ça sur le compte de l'alcool. Et de la tristesse. Offrant un sourire gêné aux personnes qui nous regardaient avec d grands yeux étonnés, je me postai devant Noël et lui attrape le bras pour le calmer. « Noël, arrête ça toute de suite tu veux ? Ça ne regarde personne. Et puis tu dis n'importe quoi. » Je soupirai à nouveau avant de lui arracher la bière qu'il avait dans les mains. « Tu sais que je suis têtue. Et s'il faut que je reste collée à toi toute la soirée pour que tu évites de faire des conneries, je le ferais. » J'avais dit cela en le regardant dans les yeux, comme pour le provoquer et lui montrer que j'étais sérieuse. « Pourquoi tu t'es mis dans un état pareil ? », demandai-je finalement, plus inquiète qu'en colère.