holdin on. (thad)

Tu n’as probablement jamais été aussi « heureuse » que de travailler, c’est du même niveau que tes instants niais d’égarement de fille amoureuse. Oui, en venant d’une famille où tout est facile, ce n’est pas quelque chose que tu connaissais vraiment : tu admets enfin que tes illustrations pour les livres n’était qu’un jeu (d’enfant) à côté de ceux qui gagnent leur vie. Et puis, c’est bien la seule chose tangible qui te permet de rester dans ce pays. T’avais limite commencé à faire tes bagages et tout jusqu’à ce que tu tombes sur cette annonce de dernière minute qui a fait de toi une barmaid. Néanmoins, ce n’est pas quelque chose que tu cries sur les toits : tu serais prête à parier qu’on ne te croirait pas. Et puis, dans l’immédiat, cela t’évite également de devoir payer ta tournée. Tu n’aurais jamais cru penser cela, mais c’est relativement drôle d’observer tout ce qu’il se passe de ce côté là… Encore mieux : ta maladresse ne t’a pas encore trahie, alors t’as plutôt l’esprit tranquille. Tu te retrouves même assez rapidement avec un peu plus de « responsabilités » comme celle d’assurer la fermeture du bar, toute seule, comme une grande. Autre raison pour expliquer ton constant sourire depuis quelque jour. Après avoir mis le dernier client à la porte, tu te permets une bière avant de retourner ranger et de rentrer rapidement chez toi, parce qu’au final, c’est flippant de se retrouver seul ici. Pas de bruit. Personne, ou presque, dans la rue. Tu te retiens de faire ta chochotte et d’appeler quelqu’un pour venir te chercher.

Encore une fois, il a oublié de recharger son téléphone et se retrouve en galère. Il était avec ses potes à célébrer, il l'aurait bien annoncé à Poppy, mais avec son nouveau boulot c'est à peine s'il a eu l'occasion de la voir ces derniers temps. En plus de ça, il a interdiction de se rendre à son boulot, parce que soit disant il serait une trop grande distraction. Un petit coup de nez, il monte sur son vélo roulant plus doucement qu'à l'accoutumer. Pas trop envie de se manger un accident en pleine nuit, lorsque y a personne aux alentours et que son portable est inutilisable. C'est qu'il deviendrait presque raisonnable le petit. Il choisit de faire un crochet par le bar en premier, voir si elle travaille encore, il faut avouer qu'il a un peu perdu la notion du temps. Bingo, il y a encore de la lumière. Il pose son vélo contre un mur sans prendre la peine de l'attacher, après tout ils vivent à Bowen et pas à Sydney. La porte est encore ouverte, alors il se laisse rentrer. « Y a quelqu'un ? ». Il préfère signaler sa présence, il a pas trop envie de se faire agresser par le proprio du bar à coups de batte de baseball. Rien qu'en y pensant, il préfère rester proche de la porte au cas où. Bien évidemment, il a omis de parler de ses antécédents avec le propriétaire du bar. Comment expliquer à sa copine que son nouveau boss l'a en quelque sorte banni à jamais de son établissement et lui profère des menaces de morts à chaque fois qu'il le croise en ville. Une porte s'ouvre et sa petite américaine apparaît. Un immense sourire un peu alcoolisé s'affiche sur son visage. « J'ai une super nouvelle ! ». Il est un peu trop excité et doit avoir parlé un peu trop fort. En repensant à sa caravane sa mine s'assombrit un peu. « Ma plante est morte.. ». Il passe d'une chose à une autre, sans se rendre compte qu'il ne doit pas paraître très cohérent en ce moment.

En train de fini ton ménage derrière et toujours aussi peu rassurée d’être seule ici à cette heure, tu fais quelques pas en arrière pour voir qui peut bien être arrivé maintenant. Non mais sérieusement, il faudrait que tu calmes tes nerfs. Quelle personne censée viendrait te « faire du mal » en annonçant sa présence ? Yeux qui finissent par s’illuminer (rien que ça, et ouais) : oh, même plus besoin de passer un appel pour que ton pseudo « garde du corps » personnel (ou copain) débarque à la fermeture. Tu commences à sourire, si ce n’est sautiller sur place, suite à ces bonnes paroles. « Une… » Tu n’as même pas le temps de l’embrasser en guise de bonjour, ni de finir ta phrase que Thad reprend. Tu fronces les sourcils, perplexe. Ses propos n’ont ni queue, ni tête. En tout cas, ce n’est pas toi qui iras pleurer la mort de sa plante. « Attends, on doit pas avoir la même signification de bonne nouvelle… » Tu soupires. Pas cohérent, donc probablement pas sobre, mais tu t’es faite à ces « occasions » depuis le temps. Tu le traines par la main jusqu’au tabouret le plus proche, puis tu retournes de l’autre côté du bar. Quitte à parler, autant ne pas souffrir de déshydratation, et puis ce n’est pas une bière de plus qui vous sera fatal. « Vas y, tu voulais dire quoi ? » Retour de son côté, tu t’assieds en face. Évidemment, tu as une petite idée de ce que monsieur a à t’annoncer, mais autant qu’il exprime sa petite fierté à haute voix, non ?

Expression horrifiée. Comment peut-elle penser une seule seconde que c'est de ça qu'il s'agit quand il évoque une bonne nouvelle. « T'es con c'est pas ça la bonne nouvelle. ». Il se laisse guider jusqu'au tabouret sans broncher, ça lui fera pas de mal de se poser un peu. Il est un peu dérouté de la voir de l'autre côté du bar, non pas qu'elle soit une inconditionnelle de ce genre d'endroit en temps normal. Poppy : barman, personne n'aurait parié là-dessus. En la voyant leur servir une bière, il en oublierait presque cette histoire de plante. « Oh yeah, tu gères. ». Elle n'a même pas le temps de revenir de son côté qu'il a déjà saisi un des verres pour le vider d'une grande partie de son contenu. Comme souvent, elle le replonge tout de suite dans le coeur de la conversation. « Ah ouais. J'ai récupéré ma caravane, elle était restée en plein soleil tout ce temps, ma plante ressemblait plus à rien. ». Il aurait besoin d'au minimum deux mois pour en faire démarrer une nouvelle, tout son fric allait encore partir dans la poche de dealeurs. Comme s'il avait besoin de ça après tout l'argent qu'il avait dû cracher pour récupérer sa caravane. « Au moins, je vais pouvoir dormir chez moi ce soir. ». Il reprend une gorgée de sa bière avant de se tourner sur son tabouret de façon à lui faire face. « Et toi le boulot ? Pas trop de vieux relous qui te mettent des mains au cul j'espère ? ». Il bombe un peu son torse tentant de prendre un air menaçant. « Un mot et j'enfile mon T-shirt superman pour venir les dissuader. ». À cette heure-là même une fillette de huit ans n'aurait pas peur de lui, pendant une seconde il envisage de monter sur le tabouret pour faire style il s'envole, mais en sentant le tabouret pas très stable il s'abstient. C'est pas trop dans son intérêt de se casser une jambe maintenant.

Tu grimaces en repensant à son « con », loin d’être vexée, plus de la façon d’une gamine de trois ou quatre ans. Tu l’as un peu voulu en même temps. « C’est toujours ça. Je saurai où aller si je fais un cauchemar. Non, sérieusement, je suis contente pour toi. » Tu hausses les épaules. Si ce n’est pas le grand confort chez Thad, tu compatis dans le sens où t’aimes bien avoir tes affaires, dormir dans ton lit et tout ce qui va avec. C’est peut être également son cas, qui sait. Tu bois une gorgée à ton tour et soupires. « Ce possessif. » Entre nous, ton côté féminin est un brin flatté, bien que tu doutes franchement de ses capacités. Entre son manque de sérieux dans la journée et le fait d’être stone en soirée, tu n’es pas certaine de pouvoir compter sur lui pour ce genre de chose. « J’ai recroisé le type qu’on avait vu la première fois qu’on a pris un verre ensemble. Tu te rappelles ? » Ce n’est même pas une question de jouer avec la potentielle jalousie de Thad (tu n’es pas encore fixée sur le sujet), mais bien la réalité. Bar différent, mais la même tête avec autant d’alcool dans le sang que la dernière fois. « T’avais pas du trop le traumatiser, parce qu’à défaut de mettre une main au cul, il a quand même été plutôt collant jusqu’à la fin du service. » Ou plutôt jusqu’à ce que vous deviez le mettre dehors. En attendant, y’a ton copain qui commence à faire le mec viril sous tes yeux et tu n’es pas capable de te retenir de rire. « Faudrait te trouver un nom de super héros, non ? »

Elle a le don de le ramener sur terre. Froncement de sourcil confus à la mention du gros lourd, puis yeux écarquillés. Elle lui lache ça normal comme si c'était pas grave et en plus elle met en doute son influence. Thad Hogan aurait put-être un gentleman et la laisser avoir le dernier mot, mais c'est loin d'être le cas. « Je pense plutôt que c'est toi qui l'a pas marqué et qu'il avait zappé t'avoir déjà dragué. ». C'est petit, mais c'était plus fort que lui. Petite mine renfrognée, pour une fois qu'il veut faire le prince charmant, il se fait rembarrer par sa princesse. « J'ai pas l'étoffe d'un super héros, je vais pas me casser le cul à chercher un nom ! ». Il joue avec son verre de bière pour s'occuper les mains, restant pensif pendant quelques instants. C'est le problème quand il boit parfois, enfin quand il boit et qu'il commence à se monter la tête. Beaucoup de gens le prennent pour un type un peu simplet, qui réfléchit peu et préfère agir. Plusieurs informations lui viennent en tête, il est tout d'un coup bombarder par ses insécurités concernant leur relation. « Je suis quoi pour toi ? Juste une amourette de vacances ? Ton histoire exotique avec un sexy surfeur australien que tu raconteras à tes copines dans tes cocktails bien habillé une fois que tu seras rentrée chez toi ? ». Son ton n'est pas méchant ni même accusateur, mais dénué de sa gaieté habituelle. La peur sans aucun doute, de se sentir sans contrôle sur la situation, alors qu'il ne voit plus trop la vie sans elle aujourd'hui. « Et si Perry décidait d'aller s'installer à Tokyo sur un coup de tête ? Tu le suivrais aussi ? Parce que de là où je me trouve, c'est un peu l'impression que ça donne, avec ce job pourri que tu peux quitter à tout moment. ». Il a l'impression désagréable que leur relation a une date de péremption dans l'esprit de Poppy, si c'est le cas, il préfère être fixé maintenant. Cette fois, il prend une large gorgée de sa bière pour affronter la réalité.

Pourquoi pas ? Tu hausses les épaules, pas particulièrement vexée par le fait de ne pas « l’avoir marqué ». Ce n’était, et n’est, pas ton genre de vouloir attirer l’attention de la sorte. Néanmoins, tu ne comprends pas la réaction qui suit. Où est passé Thad et son humour quasiment légendaire ? Tu retournes à ta bière jusqu’à ce que Bowen devienne Hiroshima. C’est une véritable bombe qu’il vient de lâcher. Tu connaissais les crises de la quarantaine, de la cinquantaine, mais pas la crise intitulée « un an de couple ». Tu le laisses s’exprimer jusqu’au bout, puis tu hésites à rire, mais monsieur semble bien sérieux, et toi sur le cul. Bon d’accord, vu ce que tu faisais en guise d’occupation depuis ton arrivée en Australie, il aurait pu être une amourette de « vacances ». Et tu aurais fait sensation en racontant cette histoire à tes copines de « cocktails bien habillés ». « C’était soit ce job pourri, soit une relation à distance. Pas mon truc la dernière idée, personnellement. » Et puis, ça ne fonctionne jamais ces conneries, sauf dans les films (et encore). Ah si, il existait une troisième option : mariage, mais ce n’est pas le genre de décision que l’on prend sur un coup de tête au bout d’un peu moins d’une année ensemble. « Oh et d’ailleurs… Perry a déjà quitté le pays pour élever des lamas je ne sais plus trop où. » T’as finalement réussi à couper le cordon et tu es toujours ici. Ouais, t’as peut-être bien changé, au cours de ces douze derniers mois, la faute à qui ? Alors qu’est-ce qu’il lui prend de flipper de la sorte maintenant ? « Okay, c’est quoi le problème ? » Tu n’as pas haussé le ton non plus, mais tu assumes le côté froid que Thad pourrait éventuellement te reprocher.

Il s'est pas mangé de tarte dans la gueule, mais elle n'a pas l'air particulièrement ravie pour autant. Il grimace aussi à l'évocation d'une relation à distance, lui qui n'a pas internet et qui oublie son portable un jour sur deux, définitivement pas une bonne idée. C'est sa seconde réplique qui le fait plus réagir, sa première réaction est d'être soulagé d'apprendre qu'elle est toujours là. La seconde est d'être un peu déçu qu'elle n'ait pas pensé à le mettre au courant de ce genre de nouvelle. « T'aurais pu me le dire... ». Petite voix, un peu honteux de s'être emballer pour pas grand-chose, mais c'est le genre de truc qu'il aurait voulu savoir. Peut-être que ça lui aurait évité son monologue de drama queen. Le regard un peu fuyant, il ne sait pas trop quoi dire. Il se sent con. Il vient juste de tilter sur l'histoire des lamas, trop focalisé sur le sous-entendu, un sourire reprend possession de son visage jusqu'à ce qu'elle l'interroge sur sa réelle préoccupation. Il reprend une gorgée de sa bière, hésite un peu à lui dire. Il ne lui a jamais menti ou caché quoi que ce soit jusqu'ici, alors pourquoi commencer maintenant. « Tu sais que je viens d'une grande famille... ». Plus difficile à sortir que ce qu'il ne pensait finalement. Il liquide la fin du verre d'un trait pour se donner du courage. « Flippe pas d'accord. ». Rester immobile sur un tabouret c'est pas son truc en général, mais là encore moins. Il saute debout et se met à parler avec ses mains tout en marchant. « Je veux des enfants, enfin pas dans la seconde là, mais dans le futur. Je sais que je fais n'importe quoi, que je suis pas fiable et tout ça, mais j'en veux, c'est un truc que j'ai toujours su. La maison avec les animaux partout, ma caravane au fond du jardin, moi en père trop coulant... ». Il arrête sa tirade pour se rapprocher un peu de Poppy, presque timidement. Il s'en foutait que tout le monde le prenne pour un irresponsable et c'était probablement vrai de toute façon, mais la laisser penser qu'il fuirait toutes les responsabilités toute sa vie, ça c'était impossible. « Je pensais que tu devais le savoir. ». Elle a peut-être besoin de temps pour digérer l'information, alors il fait le tour du bar comme s'il était chez sa mère pour aller se resservir un verre. Une fois en face d'elle, il a le soudain besoin de détendre un peu l'atmosphère. « J'aime bien Captain Koala ! ». Oui, juste après avoir délivré ce genre d'information, le cerveau de Thad cherche des noms de super héros.

Tu aurais bien voulu lui tapoter l'épaule pour t'excuser d'avoir réagi aussi froidement et de ne rien lui avoir dit, mais contrairement à Thad, tu ne bouges pas et te cantonnes à une observation du spécimen pas spécialement à l’aise. Pour une surprise… T’es plutôt gâtée. Il avait bien fait de te demander de ne pas flipper. C’était un tableau idéal que tu avais quelque peu oublié à force de vivre au jour le jour, et de t’en contenter et de t’en satisfaire, jusqu’à ce que ton horloge biologique ainsi que tes hormones reviennent à la charge avec un caprice. Tu finis par acquiescer le temps d’ingurgiter et de digérer cette quantité d’informations. Tu termines également ta bière, persuadée que ça aiderait sur le coup (et non forcément sur le long terme quand il sera temps que tu regagnes ton chez toi). « Je préfère Captain Kangaroo. » Tu rebondis aussi tôt sur la fin. C’est la seule chose que tu parviens à faire sortir de ta bouche, limite plus détendue. Parce que c’est vraiment son truc à lui ces bestioles là et que toi, tu as littéralement craqué pour les koalas depuis que tu en as croisé dans les bois. « C’est sûr que tu ne peux pas avoir meilleur rôle que celui là si tu étais père. » Tu reviens, une nouvelle fois, au cœur du sujet. Thad jouant le bad cop dans l’éducation… Il faut avoir pas mal d’imagination, par contre tu lui laisses une chance pour faire face aux responsabilités engendrées. « Je pensais pas avoir ce genre de conversation avec toi. Pas forcément parce que t’es pas souvent sérieux, mais plus parce que tu penserais à te poser. Merci pour la confession. » Et tu te mets soudainement à rire de façon incontrôlable. Non l’idée de la famille ne te paraît pas encore impossible et folle, mais dans l’hypothèse où tu aurais des enfants avec lui, tu ne serais pas capable de le cacher à tes parents. Bref, tu imagines tes parents rencontrant enfin Thad. C’est presque tout vu : tu les connais trop bien et ce serait assez hilarant. Pour le moment, tu n’es pas capable de t’expliquer, larmes aux yeux, toujours à rire de vive voix. Il va te prendre pour une folle sortie tout droit d’un asile. Tu tentes de faire distraction en aller te resservir un verre à ton tour.

Captain Kangaroo. C'est peut-être plus adapté pour lui, après tout il a tendance à avoir la bougeotte et à sauter un peu partout. Puis si elle arrive encore à blaguer avec lui, c'est qu'il ne l'a pas trop traumatisé avec sa confession. Il s'attend presque à ce qu'elle change complètement de conversation, mais non. Même si son verre est désormais rempli, il demeure de l'autre côté du bar juste en face d'elle. « Je t'ai vu avec Perry, un gamin a pas besoin de deux parents hyper-protecteurs sur les bords. ». Il s'attend à ce que ça s'arrête là, ils ont ris de la conversation, ils peuvent passer à autre chose, mais Poppy a encore des choses à dire sur le sujet. « Comme quoi tout peut arriver. ». Il ne sait pas bien si c'est lui ou autre chose qui a provoqué ça, mais elle se met soudainement à rigoler sans aucune raison apparente. Un peu perplexe, il se contente de siroter sa bière, avant de finalement se faire emporter également par le rire de Poppy. Bien que lui n'est aucune idée de la raison de ce fou-rire. Qu'est-ce qu'il aime son rire. Elle arrive finalement à sa hauteur probablement pour se resservir, toujours en train de rigoler. « Tu m'expliques ? ». Elle a pas l'air très coopérative, mais pour le moment il est un peu distrait par sa proximité. Depuis qu'il est arrivé, ils n'ont eu aucun contact physique, ce qu'il change bien corrigé très vite. Il l'attire à lui sans lui laisser le temps de se resservir, la bière peut bien attendre. Il l'a prend au piège entre son corps et le comptoir avec son meilleur air séducteur. « Dit le moi ou je vais devoir trouver des moyens créatifs de te faire parler... ». Il ne se prive pas de lui mettre une main aux fesses même si ce n'est que pour une seconde, parce qu'il n'est ni vieux ni relou lui. Il tire un peu la moue quand même en voyant l'accoutrement de la nouvellement serveuse. « N'empêche je croyais qu'il te fournirait la petite tenue sexy qui va avec le job, je suis un peu déçu. ». Il ne s'est jamais préoccupé de ce qu'elle porte, mais si il peut la faire réagir d'une façon ou d'une autre.

D’accord, cette position n’est pas du tout fair-play de la part de Thad. Tu cesses soudainement de rire et déglutis aussitôt. Et pendant que tu cherches tes mots pour lui expliquer la situation sans l’offenser, monsieur change une nouvelle fois de sujet. Pas de petite jupe ou shorty comme dans les séries, ni même de tee shirt blanc quelque peu transparent pour attirer le regard de la clientèle masculine. Tu fais une petite moue compatissante tout en laissant glisser tes doigts sur sa tempe. « J’aurai bien fait une exception de tenue sexy pour toi, mais ta présence me rappelle que je n’ai pas encore fermé le bar. Ça tombe un peu à l’eau, désolée pour toi. » Toi aussi tu peux te montrer créative, mais avec quelques précautions du genre de ne pas se faire attraper par le premier venu, notamment un patron qui aurait oublié quoique ce soit. Tu finis par soupirer, puis attrapes le verre de ton copain, à défaut du tiens qui est toujours vide. C’est bien beau de parler, mais tu commences à avoir la bouche bien sèche. « Je me disais… Que je pourrais pas cacher la famille qu’on compte fonder à mes parents et même s’ils ont toujours été adorables en acceptant nos choix, notre départ, j’ai imaginé la tête qu’ils feraient en te rencontrant, pendant quelques secondes. » Une fois que les mots franchissent tes lèvres, tu as la sensation de concrétiser cette histoire d’enfants. « On ne partage pas vraiment les mêmes idées à propos de certains sujets. » Et c’est peu de le dire. Tu hausses les épaules. De toute façon, tu te moques bien de ce que tes parents pourraient penser de Thad et de cette histoire. T’es heureuse, c’est tout ce qui compte, n’est-ce pas ? « Oh, promets moi une chose. Juste avant que ce “futur“ arrive, je tiens juste à avoir une sorte de gueule de bois pré-maternité. Zéro alcool pendant neuf mois, ça fait un peu long. » D’accord, dans le genre de passer du coq à l’âne, vous faites presque la paire. T’es pas une grande fêtarde, tu peux parfaitement t’en passer, mais il s’agit tout de même de neuf mois sans rien du tout quoi.

Ses yeux s'illuminent quand elle parle de faire une exception, mais son engouement retombe aussi sec. C'est son travail, il ne peut pas vraiment lutter surtout quand c'est lui qui a débarqué à l'improviste. « Tu sauras en quoi te déguiser pour mon prochain anniversaire. ». Petite pause de réflexion. « Quoi que non, le prochain est trop loin, je trouverai une occasion d'ici là. ». Il l'aurait bien embrassé à ce moment-là, mais elle lui a sournoisement dérobé son verre, il se contente de secouer la tête amusée. Enfin jusqu'à ce qu'elle lui explique la raison de son fou-rire. Il lui prend le verre des mains et bois une longue gorgée en souriant un peu bizarrement. Les parents de Poppy, il n'avait même pas pensé à ça. Il doit quand même avoir bien blêmi, parce que dans son esprit, le père de Poppy l'attend avec un fusil à pompe, son chapeau de cowboy et un cigare dans la bouche. Lui qui couche avec sa seule fille. Pour ce qui est de leur différence, sur ça il ne peut pas vraiment le nier. « J'ai réussi à te faire dormir dans une caravane et tu m'as donné une raison de me doucher tous les jours, je pense qu'on s'en sortira. ». Il l'embrasse pour la rassurer un peu. Ils n'ont pas à prendre de décisions sur quoi que ce soit maintenant. Leurs différences n'ont jamais été un problème jusqu'ici, alors pourquoi commencer à s'en préoccuper maintenant. « Ce que tu... ». Il se stoppe pour rigoler avant de lui promettre tout ce qu'elle voudra, c'était un peu surréaliste de voir Poppy lui demander ce genre de choses à lui. Au moins, elle n'avait pas l'air de faire trop la relou, à le forcer lui aussi à s'abstenir de boire. La paternité c'est une chose, mais sans alcool, il risquerait de sérieusement flipper et d'être légèrement insupportable. Impossible en somme. « Je serai là pour te tenir les cheveux, ça nous fera un entrainement pour la grossesse. Pense juste à me le rappeler quand je serai sobre. ». Avec ce qu'il a déjà bu dans la soirée, il est tout à fait possible que certains détails lui échappe. « Tant que tu me forces pas à manger le placenta ou je sais quel truc chelou que les américains font. ». Les américains = Tom Cruise, le raccourci est rapide, mais il n'est pas en possession de toutes ses facultés mentales.

Tu lèves les yeux au ciel, te retenant de rire encore. Ce profiteur. « Oh, abuse pas. Noël, le premier de l’an et les anniversaires, ça ne se passe qu’une fois par an. T’auras rien de plus en dehors. » Tu essayes de prendre un ton et un air des plus sérieux. Et puis, est-ce qu’il faut forcément une raison pour sortir de la norme de temps en temps ? En plus, ce ne serait pas drôle s’il s’attendait à ce que tu portes cette tenue de serveuse exceptionnelle ou toute autre connerie du genre. Tu feins un sourire par la suite alors que Thad est littéralement devenu blanc, si ce n’est transparent. À croire que tu es vraiment cette petite princesse et que dormir dans une caravane était impossible auparavant. À titre personnel, ce n’est pas la seule chose que tu retiens : avoir tenu une demi seconde sur une planche, t’être retrouvée à quelques mètres d’un koala, avoir réussi à ne plus étouffer ton frère. C’est déjà un bon début et il y est pour quelque chose, forcément. Après quoi, ton sourire s’estompe. « Merci de me rappeler certains détails comme les nausées matinales. Heureusement que je peux compter sur toi en toute circonstance alors. » Non mais vraiment, ça ne doit pas être un moment des plus agréables, pourtant tu es capable d’en rire, mais la suite s’annonce encore mieux… « D’où tu sors cette horreur ? Et puis c’est pas très végétarien techniquement… » Les yeux écarquillées, tu ne sais pas si c’est une blague et que tu dois en rire ou s’il est sérieux et que tu dois en être dégoutée. Il se croit dans Hannibal ou une connerie du genre encore plus écœurante ? En tout cas, les gens de ton État, ou de l’entourage de ta famille, n’est pas adepte de ce genre de pratique. Pas très américain pour toi. En attendant, cette phrase, tu mets la sur le compte de l’alcool. « Dis moi, les super héros sont pas censés raccompagner les demoiselles en détresse chez elles, passé une certaine heure ? Sauf si t’es pas en état, bien sur. » Il t’en faut peu pour t’écrouler de fatigue et tu ne t’imagines pas dormir ici.

Avec tout ce qu'il s'enfile comme spliff depuis des années, c'est déjà un miracle qu'il se rappelle un truc aussi étrange, alors se rappeler en plus où il a entendu ça, c'est un peu trop lui demander. Il se contente de hausser les épaules. « J'étais aussi dégoutté que toi par l'idée. ». En plus, elle remet en doute ses pratiques alimentaires, il est végétarien jusqu'au bout des ongles. Il se rend carrément malade quand il réalise qu'il a avalé de la chair animale à son insu. Bref, heureusement que cette histoire de placenta et des américains ne s'est pas révélé vrai. « T'essayes de me flatter pour que je te ramène chez toi ? Je suis pas un homme si facile que ça. ». Il arriverait probablement à faire du vélo tout seul, même si il y a de fortes chances de se pèter la gueule. Avec Poppy en plus, il ne préfère pas prendre le risque, lui n'est plus à quelques égratignures près, mais il doute que Poppy soit prête pour l'étape : petit passage à l'hosto pour se faire recoudre avec trois grammes d'alcool dans le sang. « Puis techniquement, c'est à ce moment-là que le super-héros est appelé en renfort pour battre les méchants et tout. Il plante la Nana en mode, y a rien d'autre que je voudrai faire au monde que de te ramener chez toi, mais le monde a besoin de moi et pouff il se barre sans même embrasser la meuf. Et en général la meuf se retrouve tu sais pas comment dans le bordel et il doit la sauver aussi. ». Ses yeux observent les bouteilles alignées derrière le bar, les nombreuses bouteilles, le patron se rendrait même pas compte qu'il en manque une. Autant tirer le meilleur parti de ce genre de boulot. Il montre du doigt une bouteille de vodka avec un petit sourire conspirateur. « Si je nous évite toutes ses aventures en te ramenant direct, je peux embarquer la bouteille ? ». Même s'il n'est pas apte à les ramener à vélo entiers, il peut toujours la ramener à pied.

Un homme pas si facile que cela ? Tu te demandes si c’est de la provocation de la part de Thad et que tu doives vraiment en faire plus pour qu’il accepte. Et puis, dans tes souvenirs, ce serait la première fois qu’il te refuse quoique ce soit. « Je pourrais t’amadouer, mais j’essaye de garder ma meilleure arme pour des occasions très spéciales ou en cas d’urgence. Sinon ça fonctionnera plus. » Du coup, tu ne sors pas les yeux-tous-mignons pour que monsieur cède à ta demande. Tu te hisses sur le bord pendant qu’il raconte son histoire tout droit sortie d’une super production hollywoodienne. Sauf s’ils prévoient un tournage à Bowen, tu doutes vraiment que cela finisse par arriver. Jusqu’à ce que Thad change radicalement de conversation, comme d’habitude. Tu jettes un coup d’œil du côté de ces fameuses bouteilles. « Je… » Tu as une petite seconde d’hésitation. Premièrement : tu es parvenue à lâcher Perry, ce n’est pas pour autant que tu dois transférer ton côté quelque peu étouffant et protecteur sur Thad. Deuxièmement : tu ne sais pas encore si ton patron est on ne peut plus rigoureux sur les stocks. Il manquerait plus que tu passes pour une voleuse d’alcool, bien que ce ne soit pas pour toi. « Ouais, vas y. » Tu finis par trancher avec un haussement d’épaules. Tant pis, si c’est la seule concession pour ne pas faire le trajet seule. Tu attrapes le verre de Thad pour le terminer, profitant de son état et de ses yeux toujours fixés sur les bouteilles. « On peut y aller ? Tu dois manquer à ta caravane, en plus. » Tu redescends de ton petit perchoir pour nettoyer et ranger vos deux verres, effacer votre passage quoi.