and I lost myself inside her -r. (pas pour les p'tits jeunes)

Ce soir, je n’avais pas envie de penser au passé, de penser à mes échecs, mon plus grand échec, mon désespoir, mes démons qui finissaient toujours par me rattraper, jusqu’à ce que je m’arrête pour les laisser m’envahir. Je n’avais pas envie de sombrer. Je voulais laisser Lou m’élever. Aussi haut que le septième ciel. Alors je repoussai d’un revers de la main imaginaire la pensée d’Oona et de mon adolescence. Je caressai donc la jeune femme en lui assurant qu’elle ne me mettrait jamais mal à l’aise. Cela sembla la ravir, ou peut-être était-ce mes caresses. Ou les deux. Peu m’importait, au fond, tant qu’elle était heureuse et qu’elle ne reculait pas devant moi. Je n’étais plus ivre, si ce n’était que ivre d’elle. De ses lèvres. De son corps. De ses yeux. De sa peau. De ses formes. De ses mains sur mon corps.

Je l’embrassai comme un amoureux l’aurait fait. Doux. Bref. Romantique. Puis je la regardai de nouveau, et rigolai légèrement, amusé par la remarque de Lou concernant une éventuelle addiction à moi. Personne n’avait jamais été accro à mes baisers, ou à moi. Au contraire, les gens fuyaient dès qu’ils devenaient trop proches de moi. Parce que je drainais toute leur énergie. Parce que j’obscurcissais leur monde. Parce que je n’étais jamais heureux, peu importe ce qu’ils faisaient pour moi. J’étais une cause perdue et je le savais, alors j’avais du mal à comprendre comment cela se faisait que Lou était encore là. Malgré tout ce que j’avais pu lui confier. Elle était restée là. Et ça ne semblait même pas être de la pitié. Alors je me promis de tout faire pour essayer de la garder. De ne pas lui faire peur. Voilà pourquoi j’avais chassé aussi vite les nuages sombres qui avaient obscurcis ma vision. « Alors il faut que je continue. » Avais-je alors confié à la jeune femme. Et je ne blaguais pas. Je recommençai à l’embrasser sur les lèvres, sur les joues, dans le cou, et j’osai même descendre plus bas cette fois. Malheureusement, son chandail trop grand pour elle couvrait toute sa peau à partir de cet endroit et je ne pus qu’apprécier son corps séparé par un tissu. Mes mains, de leur côté, n’arrivèrent pas à se satisfaire de ce contact rompu. Mes lèvres retournant donc aux lèvres de Lou, mes mains se glissèrent sous le chandail de la jeune aveugle et caressèrent d’abord son ventre, avant de timidement remonter vers ses seins libérés de tout sous-vêtement. Je ne pus réprimer un gémissement de plaisir alors que je sentais son sein sous ma main. Et comme les soupirs de Lou n’indiquaient que le feu vert, je ne me privai pas pour laisser mes doigts l’exciter de plus belle. « Tu me rends fou, Lou. » Murmurais-je à son oreille avant de reprendre possession de ses lèvres.

Je ne me ferais pas prier pour respecter le désir de Lou de ne pas m’arrêter. Je ne m’arrêterais pas. Parce que m’arrêter signifierait retourner à un état d’âme bien moins léger que celui-ci. M’arrêter allait rompre cette vague d’apaisement, d’excitation, qui déferlait sur moi et qui me faisait sentir vivant. Vivant. Je me noyais dans ce plaisir et pourtant je n’avais jamais eu l’impression de voir aussi clairement qu’en ce moment. J’avais besoin de Lou. Besoin de Lou dans ma vie, dans mon lit, dans ma tête et dans mon cœur. Depuis que je l’avais rencontrée, à chaque fois que son visage se dessinait dans mon esprit, mes démons se sauvaient et retournaient dans les profondeurs de mon être. Me laissant tranquille. Parce que la lumière de Lou, même en un souvenir mental, suffisait à les chasser.

Alors que mes mains n’étaient plus du tout si chastes, celles de Lou non plus ne restaient pas sages. Elles glissaient dans mon dos, puis vers mes fesses. Mon corps tremblait sous ses caresses. Quand je murmurai à Lou qu’elle me rendait fou, dans le meilleur sens possible, celle-ci renchérit en me disant que pour elle, c’était une redécouverte. J’en compris qu’elle n’avait plus eu de relations aussi intimes avec un homme depuis l’accident qui lui avait coûté la vue. J’avalai difficilement, la regardant dans les yeux pendant une fraction de secondes. J’étais le premier. Pourquoi ? Dans tous les cas, cette confidence avait éveillé en moi une toute nouvelle envie : faire exploser tous les autres sens bien éveillés de Lou. Si elle ne pouvait pas me voir, elle allait me sentir, me toucher, m’entendre, me goûter. Alors quand la jeune femme laissa aller ses baisers vers ma mâchoire et mon cou, m’interdisant presque l’accès à ses lèvres, je ne me retins plus pour laisser s’échapper d’entre mes lèvres tous les gémissements sauvages qui voulaient s’en sortir. Quand elle retourna vers mes lèvres, je ne lui en accordai qu’un avant de me baisser légèrement dans le lit et d’aller embrasser toute la ligne jusqu’à son nombril, et puis plus bas encore. Je tirai finalement sur ses petites shorts qui glissèrent sans mal le long des jambes de la jeune femme. Et je m’empressai de la faire jouir en goûtant à son sexe, persuadé que tous ses sens à elle allaient exploser maintenant qu’elle ne pouvait plus toucher à mon corps excepté ma tête, et que je lui procurais autant de plaisir – du moins, je l’espérais.

Laissant le temps à Lou de reprendre ses esprits après les tremblements de son corps traduisant son explosion de plaisir, je remontai tranquillement vers elle à l’aide de petits baisers à chaque centimètre qui me séparaient de son visage. Lou, à mon arrivée à sa hauteur, me vola un doux baiser et me renversai agilement sur le côté. Je souris, et mes mains vinrent se positionner sur les hanches de la brunette. Me sentant comme un voyeur, je ne pouvais m’empêcher de détailler Lou à son insu. En même temps, elle devait se douter que j’étais en train de l’admirer, avec la vue qu’elle m’offrait. Lou avec un corps exceptionnel. Sensuel. Sexy. Des formes des plus féminines. Il n’y avait aucun doute, Lou aurait pu être mannequin en un claquement de doigts si elle l’avait désiré. Elle était tellement belle. Et le mieux dans tout cela, c’était qu’elle était encore plus belle de l’intérieur. Décidément, j’étais l’homme le plus chanceux du monde. Et pourtant, je n’arrivais même pas à réellement apprécier ce que la vie me donnait. Certes, en ce moment, j’étais aux anges, mais je n’avais aucun doute que demain tout redeviendrait comme avant. Alors il valait mieux que je tire le maximum de cette nuit de répit que Lou m’offrait.

Cette dernière me retira ce caleçon que je venais pourtant tout juste d’enfiler, quelques instants plus tôt. Je m’en fichais bien. Je préférais de loin la tournure actuelle qu’avait prise cette soirée. Elle avait commencé d’une noirceur totale, si noire que j’avais dû me brouiller l’esprit d’un liquide empoisonné. Et voilà que ce poison laissait place aux hormones les plus apaisantes qui soient. Sans plus attendre, Lou me fit l’amour et je fermai les yeux de par le plaisir qu’elle me procurait. Pour ne pas la laisser en reste, je laissai mes mains la caresser également, mais ma concentration se faisait de moins en moins facile. Je ne pouvais retenir mes gémissements de plaisir, et avec surprise le prénom de Lou s’échappa d’entre mes lèvres, moi qui ne prenais jamais une part aussi active dans mes ébats sexuels. Lou me faisait sentir tellement différent. D’une façon si belle et positive. Puis, mon corps trembla de ma tête jusqu’à mes pieds, le courant électrisant paralysant tous mes muscles. Je lâchai un dernier soupir de contentement. Lou se laissa alors tomber sur le côté, trouvant refuge dans mes bras. Dans un silence des plus agréables, la belle s’endormit dans mes bras. Et, par miracle, je ne tardai pas à moi aussi trouver le sommeil, celui qui se faisait pourtant si rare dans mes nuits obscures.

Mes rêves avaient sans doute capté le doux baiser de Lou dans mon cou mais, mon esprit, pas encore lucide, ne s’était pas laissé déranger par ce contact. Pour la première fois de ma vie, je dormais. Profondément. Paisiblement. Même les rayons de soleil que le simple rideau blanc n’arrivait plus à filtrer et qui me chatouillaient la joue ne me perturbèrent guère. Toutefois, après un moment, la chaleur de ce soleil n’arrivait pas à remplacer la chaleur que Lou avait cessé de me donner en se glissant hors du lit. Mon esprit revint donc peu à peu à la surface, délaissant mon doux sommeil que je n’avais plus vécu depuis mes jeunes années d’enfance innocente. Mes paupières s’ouvrirent tranquillement, reprenant l’essai à quelques reprises, tentant d’habituer mes yeux à la lumière qui baignait dans la chambre d’auberge de Lou. Je restai immobile un instant, reprenant mes esprits et me rappelant de chaque seconde de la veille. La soirée de commémoration n’était que très vague, mais je me souvenais exactement de tout ce qui s’était passé ici. Les lèvres de Lou, son corps, ses seins, ses coups de hanche sur mon corps, sa longue chevelure tombant sur mon visage lorsqu’elle se penchait sur moi. Je fermai les yeux quand j’y repensai, tentant de me donner une douche froide imaginaire, parce que la simple vision de son corps nu ravivait la chaleur dans mon corps. Je rouvris les yeux et tournai la tête vers Lou, qui s’agitait debout au bout du lit, faisant du bruit. Elle rangeait le comptoir sur lequel elle avait visiblement cuisiné. Ses cheveux étaient mouillés et son corps encore un peu humide malgré les vêtements portés. Je devinai par les ingrédients présents sur le comptoir qu’elle faisait un petit-déjeuner, muffins ou crêpes je ne pourrais dire.

Je me relevai doucement sur mes coudes, passant ensuite une main sur mes yeux pour les réveiller davantage. J’avais un mal de tête énorme. La pièce entière tournait, rendant ma vision difficile. Je refermai les yeux, puis les rouvris. Lou, m’entendant m’agiter dans les draps, avait tourné la tête vers le lit. « Bon matin. » Avais-je alors lancé, l’aidant à diriger ses beaux yeux vers moi, se laissant guider par ma voix. Étrangement, je n’avais pas peur du tout. Je ne regrettais rien. Je n’avais pas envie de fuir. De la fuir. Au contraire, je voulais que Lou soit là. Pour longtemps encore. Je me relevai du lit, enfilant mes boxers de la veille encore une fois. Je me rendis jusqu’à Lou en de petits pas faibles et fatigués. Je déposai un baiser sur sa tempe, ne sachant pas s’il était convenable de l’embrasser sur les lèvres. Je ne savais pas vraiment ce que nous étions. Ce que j’étais pour elle. Ce que la nuit dernière représentait pour elle. « Ça va être bon, ça … » Dis-je en regardant le mélange qui ressemblait davantage à un mélange à crêpe qu’à muffins. Je regardai le cadran près de la table de chevet du lit et je soupirai, presque inaudible. « J’ai un rendez-vous avec un client dans une heure … » Elle se donnait tant de mal pour me faire à manger, et j’allais partir en voleur tout de suite après.

La main de Lou s’aventura vers le haut, vers une armoire, qu’elle ouvra avec aise une fois la poignée repérée. À tâtons, elle laissa ses doigts apprécier la texture de certaines bouteilles, jusqu’à ce que son choix soit fait et qu’elle s’empare de l’une d’entre elles pour la sortir de l’armoire. J’étais fasciné par le développement de ses autres sens. Je ne me serais sans doute pas aussi bien débrouillé si je m’étais retrouvé, du jour au lendemain, dans ce noir total. Certes, mon âme baignait dans l’obscurité, mais si mes yeux ne se mettaient qu’à voir ça, j’aurais sans doute perdu la tête. Perdu la raison. Parce que la ligne était déjà bien mince. Bref, Lou me sortit deux comprimés d’acétaminophène, qu’elle déposa sur le comptoir devant moi, accompagné d’une tasse de café noir. Je souris. « Merci. » Même sans me voir, elle ressentait que j’avais une gueule de bois bien pénible. Oui. Il ne m’était arrivé que très rarement de me sentir autant démoli à mon réveil. Il faut dire que je n’avais jamais été un grand buveur … jusqu’à tout récemment.

Mon regard s’arrêta sur le cadran de la table de chevet et je partageai à Lou le fait que j’avais rendez-vous avec un client dans une heure. Le tout accompagné d’un soupir de déception, de lassitude. Tout de suite, Lou se tourna vers moi et posa ses mains sur mon torse toujours nu. La brunette posa ses lèvres sur les miennes, en plein dans le mille. Cela me fit bizarre. De recevoir un baiser de la sorte. Tout simple. Tout ce qu’il y a de plus normal. Comme un couple. Comme deux amoureux. Je souris. Cela venait de me rendre anxieux, tout d’un coup, mais aussi heureux. Je voulais à la fois déguerpir le plus vite possible pour essayer de réfléchir à ce qui se passait, à la fois rester avec Lou toute la journée.

Toujours un peu sonné par mon réveil et par le baiser de Lou, c’est cette dernière qui me sortit de mes pensées en me proposant de me faire cuire des crêpes à emporter jusqu’au travail. J’imaginais déjà la tête de ma secrétaire lorsqu’elle me verrait arriver avec mon repas tout fait. Elle n’y comprendrait rien. « C’est gentil. Je ne dis pas non. » Parce que de toute façon, même si j’avais voulu rester pour manger avec Lou, ça n’aurait pas été possible. Je devais absolument passer par chez moi pour m’habiller proprement et récupérer ma valise de travail, alors les minutes étaient comptées. Tandis que Lou se mettait généreusement à la tâche, je retournai sur mes pas pour faire le lit et remettre un peu d’ordre à la chambre, rapidement. Je retournai également à la salle de bain pour enfiler les vêtements que j’avais laissé traîner. J’avais hâte d’être chez moi pour les enlever et en enfiler des propres. Je revins finalement vers Lou, qui avait terminé mes crêpes et qui était en train de refermer le bol en plastique. Je posai ma main sur sa hanche. « Tu es un ange. Mon ange. » Murmurais-je à son oreille avant de déposer un baiser entre sa joue et son oreille. « Merci d’avoir été là, Lou. Je ne sais pas de quoi aurait eu l’air ma nuit, si ça n’avait pas été le cas … »

Suite à mes remerciements quant à la présence de Lou dans ce moment de détresse vécu la veille, celle-ci m’assura que sa porte m’était toujours ouverte. Peu importe dans quel état je me trouvais. Peu importe ce qui m’arrivait. Cela me toucha énormément, car rares étaient les personnes prêtes à m’aider à ce point-là. Souvent, on me tournait le dos sans le montrer directement, parce que j’étais trop difficile à gérer, trop lourd à soutenir. Je les comprenais, ces gens-là. Mais j’avais toujours rêvé de cette personne qui saurait m’aider, qui saurait m’écouter, m’épauler, me tenir par la main et marcher côte à côte avec moi malgré la tempête. Lou était-elle cette personne ? J’osais espérer.

Alors, me tenant là, devant elle, mon petit déjeuner dans un plat, dans mes mains, je la regardais avec un mince sourire mais aussi une pointe de tristesse de devoir partir. Je n’aimais pas l’idée de la laisser seule ici, même si je la savais assez grande pour s’occuper. Après tout, il n’y avait que quelques jours de cela, Lou et moi n’existions pas aux yeux de l’autre. Quelle tristesse. « Bon. Il faut pas que je traîne. Merci encore pour le petit-déjeuner. C’est vraiment gentil. »  Je souris, caressant sa joue avec la paume de ma main. Puis je me penchai vers elle et l’embrassai – si elle le faisait, je pouvais aussi le faire. Je me détachai finalement d’elle. « On se revoit bientôt. » Affirmais-je, pour une fois assez sûr de moi-même. J’avais comme cette impression que Lou ne voulait pas non plus que ça se termine maintenant. Alors je prenais une chance d’y croire. D’y croire de tout mon être. Je tournai finalement les talons et me dirigeai vers la porte que j’ouvris doucement, me retournant une dernière fois pour voir Lou qui fixait encore dans ma direction. Je souris. « Au revoir, Lou. Passe une belle journée. » Moi, je savais que la mienne serait bien meilleure que toutes les autres auparavant. Pour une fois, je ne partais pas la tête pleine de tourments.  

TERMINÉ.