#06 - i hope you'd see my face & that you'd be reminded (max)

Maxence vouvoyait tout le monde, il était comme ça. Même devant un enfant de dix ans, sa politesse prenait le dessus sur son amicalité. Il avait tellement l’habitude d’être en relations professionnelles, il en oubliait que toutes relations n’avaient pas à être aussi courtoises et formelles. Il semblait tellement distant avec Eleanor pour cette raison. Pourtant, dans son cœur, il se sentait très près d’elle. Pas aussi près que lorsqu’ils avaient échangé leurs secrets les mieux cachés par messages textes, mais près quand même. Parce qu’elle était enfin devant lui, en chair et en os. Après tant de mois d’attente, ils se retrouvaient enfin dans la même pièce. Maxence avait toutefois quand même trouvé le moyen de sembler froid. Fallait croire qu’il ne savait pas comment agir autrement qu’en mettant une distance entre lui et les autres. Surtout quand il se sentait vulnérable. Et Eleanor le mettait à nu, toujours. D’ailleurs, encore une fois, il s’ouvrait à elle. Il ouvrait son cœur et laissait toutes les émotions y pendre, à la vue de tous. À la vue d’Eleanor. Mais elle, elle ne semblait plus aussi à l’aise, maintenant que ni l’écran ni la distance ne les séparaient. Il aurait tant voulu qu’elle puisse se confier à lui en toute liberté, même si c’était à propos de lui, à propos d’eux.

Afin de laisser le temps à Eleanor de bien saisir les mots qu’il venait de lui dire, et de formuler les siens, il l’espérait, Maxence se leva et alla chercher leurs deux tasses de thé. Quand il revint, il offrit sa tasse à la jeune femme, et celle-ci le porta tout de suite à ses lèvres. « Attention, c’est encore très chaud. » S’alarma-t-il. Mais elle ne sembla pas s’en faire, et reposa sa tasse sur le sous-verre devant elle après sa gorgée. Il s’assit donc de nouveau à la place qu’il occupait quelques instants plus tôt. Maxence souffla d’abord sur le liquide, avant d’en prendre une gorgée à son tour. Il garda la tasse dans ses mains. Eleanor prit finalement la parole, et il savait, cette fois, qu’elle tentait la carte de l’honnêteté. Tout comme lui, elle s’ouvrait. Il rigola à la mention des injures qu’il lui avait souvent envoyées. Elle avait le don, parfois, de l’énerver, de l’exaspérer. Et elle lui avoua qu’elle ressentait plus que de l’amitié pour lui, elle aussi. Cela décrocha un sourire au trentenaire. Un sourire qu’il tentait de dissimuler, en vain. « C’était une évidence pour tous les deux, je pense. » Et c’est à ce moment-là que Maxence ressentit le besoin de signifier à Eleanor que la situation de celle-ci compliquait beaucoup la relation qu’ils auraient pu entretenir, maintenant. Elle acquiesça, compréhensive. « Je comprends aussi que vous n’y pouvez rien. » Et il tenta de sourire lorsqu’Eleanor lui dit qu’elle était douée pour éviter les scandales. Mais son sourire sembla forcé. Parce qu’il l’était. Maxence avait peur, oui, vraiment peur. Et même ces paroles pseudo-rassurantes ne l’aidaient pas. « Et je ne doute pas de votre parole. C’est juste que … c’était plus facile d’éprouver ces sentiments quand la distance nous protégeait. Je dois m’ajuster à ce que tout ça implique, maintenant. Me faire à l’idée. » Maxence se connaissait, il savait donc que ça lui prendrait un certain temps. Il ne se jetterait pas dans le vide sans avoir préalablement analysé l’intensité de la chute.

i hope you'd see my face

& that you'd be reminded - feat maxence & eleanor

« Attention, c'est encore très chaud. » Tu souris en déposant ta tasse de thé sur la table. Tu es presque insensible à la chaleur, allez savoir pourquoi. Mais tu adores boire et manger, très chaud. Lorsque tu manges quelque chose, tu adores l'entamer alors qu'il sort du four. C'est pareil pour le thé. A force, ta bouche s'est habituée à cette chaleur. Et toi aussi. Mais que Maxence s'inquiète pour toi te fait sourire. Tu aimes ces petites attentions qu'il a envers toi, même si ce n'est que des petites choses simples, ça compte pour toi. « Je suis coriace. » Réponds-tu, amusée. Tu essaies, en quelque sorte, de détendre l'atmosphère qui se fait de plus en plus tendue et pesante. Vos mots sont forts et les conséquences qui en découlent aussi. C'est beaucoup pour vos retrouvailles, beaucoup pour toi. Et malgré tes essais pour rendre la situation moins compliquée, ça ne fonctionne pas vraiment et ne dure pas bien longtemps. « Je comprends aussi que vous n'y pouvez rien. Et je ne doute pas de votre parole. C'est juste que ... c'était plus facile d'éprouver ces sentiments quand la distance nous protégeait. Je dois m'ajuster à ce que tout ça implique, maintenant. Me faire à l'idée. » Tu hoches la tête, tendue. Les paroles de Maxence font écho en toi. Tu ne sais pas réellement ce que ça veut dire et ce que ça implique. Tu peux comprendre qu'il ait peur de s'engager parce que tu ressens la même peur, toi aussi. Mais une petite voix en toi te signifie d'essayer pour n'avoir aucuns regrets. Et elle devient de plus en plus forte, cette petite voix. Elle prend quasiment le dessus sur tout le reste. Le jeune juge, lui, ne semble pas si sûr de lui. Vous l'étiez bien plus par message privé, ça, ça ne fait pas de doute. C'était plus facile de se dire qu'il y avait la distance pour vous protéger et que les conséquences de vos échanges étaient moindres. Vous ne risquiez pas grand chose à l'époque. Aujourd'hui, alors que vous vous retrouvez, ici à Bowen, c'est bien plus risqué. Pour Maxence et pour toi aussi. Maxence ne peut pas se retrouver au centre d'un scandale à cause de son métier et toi, tu es censée être une princesse qui plus est mariée. Si tes parents apprenaient que tu étais ici en tant que "célibataire" tu devrais rentrer immédiatement en Italie. Et ça, tu refuses d'y penser. Avouer vos sentiments devient, dés lors, bien trop compliqué. Mais tu le fais quand même parce que tu veux être honnête et transparente avec Maxence. Tout comme lui désire l'être avec toi. C'est sans doute une des choses que tu aimes le plus chez lui : son honnêteté et son aisance à l'égard de ses sentiments. Toutes ces interrogations et ces doutes tournent en boucle dans ta tête. Tu as besoin de prendre du recul et le jeune homme a sans doute, lui aussi, besoin de réfléchir. « C'est pas une décision qui doit être prise à la légère, c'est certain. Vous avez besoin d'y réfléchir, je comprends. Et moi aussi, sans doute un peu. » Dis-tu en haussant les épaules. Tu termines ton thé assez rapidement et te lèves, décidée à t'en aller. Tu as de plus en plus de mal à supporter cette atmosphère si tendue. Tu ressens le besoin de prendre l'air et de réfléchir. « Je vais vous laisser. Je ne voudrais pas m'imposer ou vous déranger davantage. Et puis, j'ai cours dans peu de temps. A plus tard ? » Demandes-tu sans certitude. Tu n'es pas certaine que Maxence voudra te revoir. Tu ne sais pas où vous allez tous les deux. Tu ne sais pas de quoi sera fait demain ni même s'il existe un "demain" pour vous deux. Tu jettes un coup d'oeil au jeune homme qui hoche la tête et lui adresse un dernier sourire avant de quitter sa maison, d'un pas décidé. Tu ne peux t'empêcher de ressentir un léger pincement au cœur à l'idée de le quitter. Pour combien de temps? Seul l'avenir te le dira, Eleanor.

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