alone in the dark ~ wooja

Woody ne se prenait pas trop au sérieux non plus, car il était impossible de croire qu’ils puissent un jour être comme les autres. En même temps, s’ils commençaient à nier tout ce qui les rendait uniques, ça arriverait tôt ou tard. Alors valait mieux accepter cette relation bien spéciale qu’ils entretenaient avec ardeur. Cette relation où ils avaient toujours un pied de l’autre côté du mur, la moitié du cœur décalée de l’autre, un air hésitant sifflant dans leurs têtes. Comme en ce moment. Woody avait demandé à Freja si elle s’abandonnerait à lui s’il se décidait enfin à cesser de remettre les barrières en place. La réponse positive fusa, et le jeune homme eut comme un éclair dans son regard, qui n’avait duré que quelques secondes avant qu’il ne reprenne le cours normal de leur conversation. Pourtant, cette révélation n’était pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Woody avait toujours eu ce désir pour Freja. Sa meilleure amie avait souvent alimenté ses fantasmes. Pourtant, malgré leur complicité hors du commun, tous les deux avaient toujours résisté à l’envie de tomber dans les bras l’un de l’autre. Probablement parce qu’ils ignoraient tous les deux si leur amitié y survivrait. Désormais, toutefois, Woody commençait à croire que Freja ne quitterait jamais cette zone ambigüe s’ils n’essayaient rien. En même temps, il mettait autant de temps à se décider parce qu’il ignorait s’il désirait réellement qu’elle quitte cette zone grise. Face à Freja, Woody ne savait plus rien. . « Je n'en doute pas. » Dit-elle quant à son appréciation future de la maison de son ami. « Qu'est-ce que tu vas faire avec tant d'espace ? » Woody haussa les épaules, avec un léger rire. Il était vrai que le fait d’avoir l’argent pour se payer une aussi grande maison ne justifiait pas qu’il l’ait achetée alors qu’il était seul, complètement seul. « J’sais pas. Peut-être une salle de massothérapie pour recevoir les clients à domicile. Et le reste, ben … au pire ce seront des pièces vides, en attendant … » Mais en attendant quoi, exactement ? Qu’il se pose pour de bon et qu’il ait des gosses ? Sans doute était-ce l’intention derrière et, pourtant, c’était bien difficile à croire. Woody n’avait jamais caché son désir de fonder, un jour, une famille. Cependant, son attitude et ses actions des dernières années portaient à croire que ce jour n’arriverait pas bientôt. Et puisque sa maladie rongeait ses chances année après année de pouvoir procréer et de pouvoir élever ces enfants, Woody s’éloignait de plus en plus de cette réalité souhaitée. « Je peux faire ta déco si tu veux. Gratos, évidemment. » Il était vrai que Freja avait toute sa confiance à ce niveau-là. Il avait vu les résultats de son travail et il savait que ce serait à son goût. « En échange d’un an de massages gratuits. » Woody lui sourit. Il ne voulait tout de même pas abuser de ses services, alors de cette façon ça viendrait des deux côtés. « À commencer dès ce soir, si tu veux. » Et là, la même lumière électrique traversa le regard de Woody, comme dix minutes plus tôt.

Freja et Woody pouvaient se projeter dans le temps et s’imaginer n’importe quoi, au fond d’eux-mêmes, ils savaient pertinemment qu’ils couraient sur place. Comme un chien autour de sa propre queue. Ils avaient beau se souhaiter le meilleur, à soi et à l’autre, rien ne bougerait s’ils n’avançaient pas par eux-mêmes. Et comme tous les deux se plaisaient inconsciemment à tirer l’autre vers l’arrière, se retenant d’aller plus loin de peur de se perdre, il était facile de croire que tous les deux termineraient leurs jours sur la case départ.  « C'est une bonne idée. Et puis, je pourrai faire ma chambre. » Woody arqua un sourcil en la regardant, un petit sourire amusé en coin. « Ta chambre, hein ? Même pas une chambre d’invité, non, faut tout de suite que tu t’appropries la place. » La taquina-t-il. En réalité, il aimait que Freja se sente autant incluse dans sa vie au point d’agir comme si elle était une partie indissociable de lui. C’était le cas. « Ça veut dire que ce soir je dois dormir dans la chambre d’invité aussi ? » Demanda-t-il, innocemment. Parce que si Freja demandait déjà à avoir sa propre chambre dans la nouvelle maison de l’homme, cela était peut-être parce qu’elle ne prévoyait pas avoir à le rejoindre au beau milieu de la nuit. Il espérait que cette idée trotterait toujours dans sa tête malgré tout, parce que dans l’esprit de Woody, c’était une évidence. Encore et toujours. Bref, une fois les services de décoratrice d’intérieur de Freja obtenus, Woody proposa tout de même un an de massages, en échange. Il fallait bien que sa formation en massothérapie lui serve à quelque chose de plus que de faire un petit revenu supplémentaire. Ses mains touchaient trop d’inconnus à son goût, il préférait largement user de son talent sur la silhouette bandante de Freja. « Comment refuser ? » La même lueur qui s’était allumée dans ses propres yeux s’alluma dans ceux de Freja, et Woody n’hésita pas à proposer que cette offre débute dès ce soir. Rien que de l’imaginer, allongée devant lui, le ramenait à son état le plus sauvage. Il se contrôlait depuis tellement longtemps, à ce niveau, en compagnie de sa meilleure amie. Trop longtemps. Alors malgré tout ce qu’ils s’étaient dit aujourd’hui, malgré toutes ses pensées contradictoires, la seule phrase qui importait vraiment et qui résonnait dans la tête de Woody était celle où Freja lui disait qu’elle serait incapable de le repousser. Ils étaient incapables de se repousser, de se refuser. Woody l’avait fait une fois, une fois de trop. Il ne reproduirait plus cette erreur. La blonde se leva et attrapa la main de l’homme pour le guider jusqu’au canapé, où elle s’étendit après avoir enlevé son haut, dégrafant son soutien-gorge avec toute la sensualité que ce geste permettait. « Il ne fallait pas me le dire deux fois, chaton. » Woody esquissa un sourire, ne se gênant pas pour la détailler du regard. Tous ses sens étaient aux aguets, mais la vue à elle seule entraînait une réaction physiologique chez le physiothérapeute, qui sentait de plus en plus le terrain devenir glissant. « Laisse-moi essayer de trouver une huile à massage ou de quoi qui pourrait faire le travail dans tes boîtes. » Il s’éloigna un moment, ouvrant une boîte dans laquelle se trouvaient des produits de beauté et d’hygiène corporelle provenant sans doute de sa salle de bains. Il attrapa une crème chauffante qu’il trouva en lançant un air coquin à Freja, et, quand elle eut la tête tournée, il glissa également un préservatif qu’il vola à sa trousse. Il revint finalement vers elle et déposa une noisette de crème dans la paume de sa main, avant de les frotter ensemble pour réchauffer le produit. Pour plus de confort, mais surtout pour un meilleur contact, Woody passa ses jambes de chaque côté de sa meilleure amie afin de la surmonter, sans toutefois y déposer son poids. Il posa doucement ses mains sur le dos nu de la blonde et débuta les mouvements de haut en bas, couvrant son dos de la crème, osant même glisser jusqu’à la limite de ses fesses. « Ne pense plus à rien, détends-toi ... Laisse-toi aller ... » Complètement. À moi.

Les mots qu’avait choisis Woody n’étaient certainement aucunement représentatifs de la réalité. Freja n’était pas, et ne serait jamais, qu’une simple invitée. Elle s’était peut-être invitée dans sa vie et dans son cœur sans prévenir, sans crier gare, mais rapidement elle avait pris la place qui lui revenait et n’en démordait pas, peu importe ce qui se passait entre eux. Heureusement, d’ailleurs, puisque Woody n’était pas prêt à la laisser aller. À la laisser disparaître. Il avait besoin d’elle. Un besoin indispensable. Un besoin indéniable.  « Je ne veux pas être simplement considérée comme une simple invitée. Je suis plus que ça, non ? » Il hocha donc la tête avec un sourire, amusé par l’air faussement vexé de sa meilleure amie. « Je ne répondrai même pas à cette question. » Parce que c’était une évidence. Parce que la question ne se posait plus depuis tellement d’années. C’était peut-être rassurant de se l’entendre dire, à quel point ils tenaient l’un à l’autre, mais Woody aimait bien trop narguer Freja pour la rassurer aussi facilement. À son tour, l’homme fit référence à la chambre d’invité, dans laquelle il allait devoir dormir ce soir, si on se fiait au raisonnement de Freja. Parce que si elle avait besoin d’avoir une chambre chez lui, son lit à elle, ce devait être pareil ici. Pourtant, ça ne semblait pas être une option. « Hors de question. Et puis, la chambre d'invité est vide de toute façon. Il ne reste que mon lit. » Intéressant. Woody pensa bien évidemment, lui aussi, au canapé. Il aurait très bien pu s’en contenter, mais il n’en aurait pas été autant satisfait que s’il dormait aux côtés de la blonde. Aussi bien ne pas lui donner d’idées en relevant son existence, à ce canapé. Valait mieux le laisser là où il était : aux oubliettes. Sinon, ce serait Woody qui irait. Et il ne voulait jamais quitter les pensées de Freja. Encore moins ses rêves et ses fantasmes. « Oh tiens, comme ça tombe mal. » Dit-il, un ton sarcastique dans la voix, parce qu’évidemment, ça tombait plus que bien. « Faudra faire avec, on n’a pas trop le choix. » Continua-t-il, comme si cette option unique et inévitable pouvait les déculpabiliser. Les déculpabiliser de ce qu’ils allaient inéluctablement s’offrir sous ces draps. Eux. Après toute cette attente. Et ils commençaient déjà à se faire languir, à se faire souffrir. L’homme posa ses mains enduites d’huile sur le dos dénudé de Freja, et la massa avec toute la tendresse qu’il pouvait avoir. Que pour elle. « T'as les mains si... douces. » Woody lui chuchota de garder le silence, de ne penser à rien, de se détendre. Et de se laisser aller. La blonde soupira en fermant ses yeux, et d’un coup, tous ses muscles se détendirent complètement. Woody le sentit sous ses mains. Il sentait chaque mouvement de Freja, chaque sursaut nerveux ou gêné, chaque frémissement, chaque soupir de plaisir qu’il lui arrachait. « C'est pas difficile. C'est tellement... naturel entre nous deux. » Renchérit-elle. Si naturel que Woody n’avait même pas l’impression que les barrières qu’ils érigeaient constamment entre eux étaient réelles. Il suffisait d’oser les traverser pour prendre conscience qu’elles n’étaient que le fruit de leur imagination. De leurs illusions. Woody arrêta la course de ses mains au bas du dos de Freja et pencha tout son corps vers ce même endroit, pour poser ses lèvres sur la peau glissante de la blonde. Et de un. Il remonta légèrement le visage, quelques centimètres plus hauts. Et de deux. Et ainsi de suite, remontant ses lèvres, baiser après baiser, jusqu’à ce qu’il les dépose contre la nuque de Freja et qu’il se recule, guettant sa réaction.

Une fois la ligne de baisers traversés de bas en haut du dos de Freja complétée, Woody se recula légèrement, de quelques centimètres, fixant la nuque dénudée de la jeune femme, guettant un quelconque mouvement. Un quelconque feu vert. Woody ne respectait peut-être pas les limites de tout le monde, mais il avait si souvent joué avec celles de Freja, à les rendre malléables et abstraites, qu’il savait aussi pertinemment qu’un seul faux mouvement pourrait en rompre l’élastique. Clash. Plus rien qui ne les retiendrait l’un à l’autre. C’est pourquoi il était allé à pas de loup rejoindre son visage, et se figeait maintenant comme s’il attendait le bon moment pour sauter sur sa proie. Sauf que Freja n’était pas sa proie, à moins de lui dire clairement qu’elle l’était. À moins de lui donner toute autorisation sur elle. À moins de lui ouvrir la voie, de s’abandonner à lui. Ce qu’elle fit. Les quelques secondes parurent longues pour Woody mais pourtant, la réaction de Freja fut quasi-immédiate. Elle se retourna, se montrant dans toute sa splendeur au jeune homme, qui l’avait vue si souvent dans toute cette vulnérabilité, sans jamais y prêter le regard qu’il posait sur elle aujourd’hui. Pourtant, il l’avait toujours trouvée attirante, sa Freja. Elle avait toujours déclenché en lui les pulsions les plus bestiales, les plus insensées. Assez pour lui faire perdre la raison. Assez pour lui faire perdre Sara. Encore et encore. Mais ce soir, quelque chose avait changé. Ce n’était pas de l’amour, c’était un abandon de soi. Woody s’oubliait. Il se reniait. Renoncer à la vie qu’il aurait pu avoir avec Sara, c’était se laisser tomber en chute libre vers l’interdit.

Leurs lèvres se touchèrent enfin, et cette fois pas lors d’un cap ou pas cap, pas en raison d’un heureux hasard qu’une bouteille bien tournée avait créé, pas à cause de quelques verres de trop. Woody et Freja décidaient, enfin, de s’écouter. Elle rompit un moment leur échange dont le désir était déjà mal contenu. « Je te veux. Maintenant. » Lui ordonna-t-elle, presque le suppliant, mais conservant tout le contrôle et l’autorité qu’elle pouvait avoir sur lui. Il esquissa un mince sourire, sans que son regard ne perde toutefois de son intensité. « Il ne fallait pas me le demander deux fois, chaton. » Dit-il pour reprendre ses paroles lancées un peu plus tôt, dans un contexte similaire et pourtant à des kilomètres l’un de l’autre. Parce qu’ils ne s’étaient jamais rendu jusqu’ici. Ils étaient perdus en terrain inconnu. Pourvu qu’ils sachent se retrouver après que le brouillard se soit dissipé. Woody enleva alors son propre chandail, se pressant ensuite contre la silhouette de Freja, l’embrassant avec encore plus d’ardeur si cela était encore possible. Woody avait toujours agit sans prendre de gants avec Freja, et ce contexte n’échapperait pas à la règle entre eux. Il détacha donc les boutons de leurs deux pantalons, aida Freja à se débarrasser du sien d’abord, puis ils s’attaquèrent à celui de l’homme. Toujours sur le canapé, Woody prit Freja dans ses bras et la souleva dans les airs alors que lui-même changeait de position. À genoux, le dos légèrement penché vers l’arrière, il vint asseoir sa meilleure amie sur son sexe. Et il se laissa emporter par les vagues.