Conditions pour conditions ft. Chase

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Le succès attire le succès. Plus vous faites d'affaires, plus vous aurez d'opportunités. Δ Seth Godin
Si il y avait bien un milieu où j'étais respecté, c'était celui des affaires. J'aimais l'argent plus que l'alcool, plus que les femmes et plus que mes amis, aussi rares soient-ils. Seul la musique pouvait faire concurrence, et encore. Bref, ma vie se résumait à vendre, acheter, négocier, gagner et dominer. Ce qui ne me déplaisait pas, bien au contraire. Je suis un requin et fier de l'être. Enfin ça c'était avant ma dépendance à la drogue. Maintenant, mes facultés intellectuelles sont mises à rudes épreuves, surtout pendant un bad trip. A l'évidence, il fallait que j'engage un associé capable de me remplacer. Mon choix s'était donc porté sur de nombreuses pointures du métier. Malheureusement aucune d'entre elles n'était assez organisée, précise ou intelligente. Désespéré, j'avais fini par placer mes espoirs sur les épaules d'un pompier du coin. Oui, vous avez bien vu : je parle du petit génie, Chase Fawkes. Mais j'ai bien vite oublier l'idée depuis ce fameux soir où j'ai fini à l'hôpital. En plus de ce petit problème de gestion administrative, les ventes de la semaine avaient été catastrophiques. Le succès attire le succès qu'on dit. Mais qu'en est-il de l'inverse ? Pour ma part, j'enchaine échec sur échec. L'avantage c'est qu'échec rime avec alcool. Et qui dit alcool dit soirée amusante et sans prise de tête. Donc, une bonne soirée s'annonçait. Du moins c'est ce que je pensais avant de voir la tête de ce charmant Fawkes qui m'avait bien énervé la dernière fois. Emmerdeur, qui disait. Le pire c'est que j'avais même changer de bar pour ne pas le croiser. Pas que j'ai peur de lui, loin de là. Je passais juste une étape où j'avais besoin de plus de réflexion et plus d'alcool. De plus l'anniversaire de Lena approchait à grands pas. Vous l'avez compris, je ne peux plus me permettre de rester toute une soirée sobre sous peine de commettre l'irréparable. A peine installé, j'aperçois le ptit génie s'asseoir à côté de moi. Poliment, je romps le silence gênant. « Chase. » fis-je tout en commandant deux scotchs au barman d'en face. Je lui devais bien un verre après tout. Et je pense que ça suffit pour qu'il me laisse tranquille ce soir. « Pour la dernière fois. » dis-je afin d'éviter tout malentendu. Même si je pense qu'il avait déjà compris.
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Direction le bar, ce soir. J’avais demandé à Joshua qu’il m’accompagne, mais avant même qu’il puisse répondre, il dormait comme un bébé. Non sérieusement, c’était quoi ce frangin? Enfin, je comptais pas me ramener une minette ce soir, histoire qu’il râle que j’la fais gémir. Non, non, j’comptais aller dans un bar tranquille. Pas le même que la dernière fois, parce que je voulais pas voir Carter. Évidemment, il y avait celui sur la plage qui me plaisait bien et j’pourrais boire toutes leurs réserves de scotch. J’m’assois près de lui sans lui dire un mot jusqu’à ce qu’il me salue. « Chase. » « Jake. » que je concluais du même ton alors qu’il commandait deux scotch. C’était moi ou lui qui avait la mémoire eidétique? J’me le suis demandé une fraction de seconde. « Pour la dernière fois. » qu’il me disait. J’avais hoché la tête et levé mon verre pour le fracasser légèrement contre le sien. « Santé. » que j’lui dis avant de le boire. Il passe bien et me brûle un peu la gorge. J’tente d’observer son visage discrètement pour voir les traces que j’lui ai laissées. Ça semble s’être résorber, tant mieux pour lui. Et pour moi, il aurait pu me poursuivre aussi bien qu’aucune caméra n’était présente ce soir-là. Faire la conversation n’avait jamais été mon fort, alors je risquais un : « Tu as passé une bonne journée? » J’étais un enfoiré de lui poser cette question, mais je n’en voyais aucune autre. Pas question de lui demander comment il allait, encore moins lui demander des nouveautés. Ça m’intéressait pas vraiment... Et lui non plus sans doute. Mais que dire d’autre, si ce n’est que de garder le silence absolu avec du scotch... Boah et puis au fond, le silence et du scotch, c’est pas plus mal que ça.

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Le succès attire le succès. Plus vous faites d'affaires, plus vous aurez d'opportunités. Δ Seth Godin
Je n'ai pas à me plaindre de ma mémoire visuelle de ce côté là. Le cerveau est un organe qui m'a toujours passionné, surtout sur sa capacité à retenir des choses superficielles et/ou inutiles, et à oublier les choses les plus essentielles. Personnellement, j'ai toujours retenu le nom des verres d'alcool que prenaient mes voisins de bar, mais je serai incapable de me rappeler des souvenirs de mon enfance. Peut-être parce que je pars du principe qu'il faut vivre la vie au jour le jour ? Qui sait ? « Santé. » dit-il tout en fracassant légèrement son verre contre le mien. Je lance un simple regard à Chase. Comme pour moi, ses blessures se sont atténuées avec le temps et sont donc moins visibles. Je suis surpris de l'entendre dire ça. Finalement cette soirée va peut-être se passer sans histoire. Comme quoi c'est en arrêtant de chercher qu'on obtient quelque chose. Chase a peut-être pris conscience qu'il a du potentiel ? Heureusement que je ne crois pas trop aux miracles. Mais sait-on jamais ? Au son des verres s'entrechoquant, je garde un visage impassible à toute émotion. Aucun sourire ni rien. Je ne vais quand même pas faire comme si on était des amis ? Si ? Bordel. Qu'est-ce qu'il m'a pris de le prendre sous mon aile ? Le verre en main, je bois le liquide d'une traite. On dit qu'à force de boire, l'alcool devient de l'eau. C'est mon cas. Le goût est faible voire inexistant et brûle ma gorge. Je qualifie ça comme les dommages collatéraux des alcooliques. Imbécile que je suis à toujours dépasser les limites sur la boisson. Et voilà que je recommence. Je tends mon index pour commander un autre verre. Le goût a beau être horrible, je continue toujours. Toujours et encore. Comme si à chaque fois le temps revenait en arrière. Comme si j'étais à la même place, à la même heure, tous les jours de la semaine. Et croyez moi cette sensation est la pire de toutes pour un alcoolique. Voilà qui dit « Tu as passé une bonne journée? » Je le regarde droit dans les yeux. Le regard dénué de sens. Je restais là, comme un mur de pierre. Il a fallu attendre quelques secondes avant que j'ouvre la bouche. « Et toi ? » Non pas que je voulais connaître sa vie de pompier, si simple et si peu intéressante. J'avais des espoirs en lui et pas en sa profession, après tout. Non je voulais seulement esquiver la question en prenant le risque d'attiser sa curiosité. Au pire des cas, cette fois je lui dirais la vérité. Pas question que ça fasse comme la dernière fois. Je n'ai pas du tout envie de payer un abonnement à vie aux urgences. A la limite les infirmières ne me dérangent pas plus que ça, mais avez-vous déjà essayé de séduire quelqu'un avec un visage défoncé ? Personnellement je n'ai jamais réussi. Bref, je ponctue ma phrase d'un léger sourire. Le premier de la soirée. N'étant pas d'humeur joviale, c'était beaucoup plus dur de jouer la comédie. Je lance un bref regard à Chase. Il a certainement dû voir que c'était un rire forcé. Ce n'était pas très compliqué de s'en apercevoir, en fait. Je finis par poser mon poing en bon état sur le comptoir, attendant patiemment ce deuxième verre.
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Il me regarde, j’dirais même qu’il m’observe. Son coup ne paraissait presque plus dans mon visage et inversement pour le sien et à nous voir ce soir, dans ce bar, ce n’était ni lui, ni moi qui nous nous étions fait ces coups. Enfin, ceci n’était qu’une illusion. Je lui disais ‘santé’ et j’étais de bonne foi, bien évidemment. Je me rendais compte à l’usure que je ne devais pas avoir Jake à dos. Je le regarde commander un deuxième verre et bien que j’pense que ce ne soit pas la solution, j’fronce les sourcils et j’le laisse faire. Je l’emmerderai pas cette fois. Ma blessure se guérit et se résorbe peu à peu. Pas besoin d’en avoir davantage... Pas de deuxième verre pour moi, je le bois lentement et j’ai pas besoin de devenir un alcoolique comme lui. Puis, j’avais daigné lui faire un small talk concernant sa journée auquel il n’avait pas répondu, nous allions être condamnés au silence s’il continuait. « Et toi? » « Ça change quoi? » que j’lui demande avec un fin sourire moqueur au visage. Sérieusement, il voulait connaître les moindres détails de ma journée? J’aurais pu le surprendre en lui racontant mes moindres faits et gestes de ma journée lui prouvant ainsi qu’une mémoire eidétique c’est pas si pratique que ça... J’allais sans doute lui prouver un jour qu’il avait tord de valoriser ce truc à ce point. J’bois un peu de scotch presque trop sagement. Je n’étais pas du genre à me taper la discussion pour le simple plaisir. Si Jake voulait le faire, c’était à lui de voir, pas à moi. « Merci pour le verre. » que j'lui disais simplement. « Tu attends quoi de moi, ce soir? » que j'lui demande avec un rictus mauvais, me demandant s'il attend un nouveau poing ce soir en m'offrant un emploi ou ne serait-ce qu'une soirée sans alcool... J'veux décompresser putain et Jake, il me met les nerfs en pelote et les décoince pas du tout.

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Le succès attire le succès. Plus vous faites d'affaires, plus vous aurez d'opportunités. Δ Seth Godin
« Ça change quoi? » qu'il me rétorque. Une question pour une question. Chouette échange. Néanmoins, il n'a pas compris pourquoi je lui lançais cette question. Bon point Jake : tu es toujours un aussi bon comédien. Je lâche un soupire assez long avant de boire la dernière goutte de mon whisky. « Rien. » Il est clair que je ne suis pas d'humeur à taper la discussion ce soir. Le fait même d'y penser me donne mal au crâne. En fait, tout me donne mal au crâne ce soir. Que ce soit le décor, le scotch, la discussion ou même le barman. Absolument tout. J'achève quand même ma phrase, enfin mon questionnement. Avec grimace bien entendu. « Pourquoi t'es tout seul ici ? Un gars comme toi doit avoir des amis, de la famille non ? » Je voulais qu'il parte, c'est sûr. Je serais si bien tout seul avec mon verre. Sans emmerdes. Mais d'un côté je voulais qu'il reste, j'en avais pas fini avec lui. Bordel, je suis coincé. « Merci pour le verre. » Je hoche ma tête légèrement alcoolisée, comme pour lui dire « De rien » mais aucun mot n'arrive à sortir de ma bouche. Il finit par dire simplement « Tu attends quoi de moi, ce soir? » « Tu m'excuseras mais je veux juste décompresser. Je veux rien. » Si il veut encore se faire cogner, il a qu'à revenir demain. Ou peut-être après-demain. Tout dépend de mon humeur. Mais ce soir, ce n'est certainement pas le moment. Un soupir de soulagement s'échappe de ma bouche quand le barman arrive avec mon deuxième verre. Hallelujah. J'arrache le scotch de sa main sans aucune honte. Pourtant je fais bien pitié à vénérer l'alcool comme une déesse. Enfin c'est ce que l'autre pompier doit penser. A une époque, j'aurais fait pareil. Maudite époque où j'étais encore clean, où j'avais une famille, où j'étais heureux.
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Ça ne change rien? Forcément, c’est pour ça qu’il me pose la question. Il m’énerve à toujours parler au travers de ses questions, Carter. J’continue donc de boire mon scotch, ça pourrait presque être joyeusement, si c’était pas du con à mes côtés qui m’avait balancé une droite. « Pourquoi t’es tout seul ici? Un gars comme toi doit avoir des amis, de la famille, non? » Pourquoi c’était toujours à un gars comme moi qu’il référait? J’pouvais pas juste... vivre normalement? J’soupire et j’sais que si je lui dis rien, j’aurai droit à rien. « Mon frère dort comme un bébé, ma sœur est dans le coma, mes amis sont bien là où ils sont. T’as d’autres questions que j’y réponde toute, histoire de pas m’faire chier pendant trois heures? » que j’lui demande amèrement. Il s’attendait à quoi de ma part là? C’était pas comme s’il était un ami, c’était loin de ça. J’lui ai demandé très directement ce qu’il attendait de moi et il semblerait qu’il voulait juste décompresser. Fin sourire aux lèvres de ma part. Parfait, on sera deux. Mais s’il pouvait décompresser dans le silence, sans question, ce serait merveilleux. J’finis mon scotch cul-sec. J’sais que si j’en bois trop, mon équilibre va m’trahir, mais j’m’en fous. J’en commande un autre au barman presque immédiatement après que Jake lui arrache son verre des mains. « Tu t’es toujours pas fait soigner. » que j’lui dis, constatant davantage, avide d’un liquide âcre. J’le regarde sans ajouter un mot, prêt à bloquer un éventuel deuxième coup. « T’as mangé? » que j’lui demande en retournant mon attention sur mon verre. J’allais l’inviter à manger si ce n’était pas fait. Il pourrait pas m’faire chier avec la bouche pleine, c’était évident. Y'a toujours une finalité.

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