bring me some colors (willow)

D’une certaine façon, August pouvait comprendre les parents de Willow, maintenant qu’il avait reçu de plus amples informations. C’était sans doute l’emploi du mot folle qui avait pris l’homme et dépourvu, mais au final, ce n’était pas vraiment le mot qui décrivait le plus judicieusement l’opinion que ses géniteurs se faisaient de son départ soudain. En même temps, Willow devait être toute aussi chamboulée, alors elle ne faisait que mettre des mots sur ses émotions bousculées. August avait bien fait de la questionner davantage, car il avait maintenant un portrait plus fidèle de sa situation à l’égard de ses parents. « Les appelles-tu depuis, pour les rassurer ? Ils savent que tu as trouvé un endroit où vivre ? » Demanda August, se disant que dans le cas contraire, ses parents devaient être bien soucieux de savoir où leur fille en était. Peut-être n’aimaient-ils pas trop l’idée qu’elle ait emménagée avec un inconnu, un homme qui plus est. Raison de plus pour qu’ils viennent les visiter à Bowen et qu’ils fassent la rencontre du professeur d’histoire. Ils verraient qu’il n’avait que les meilleures intentions envers leur fille. « Et honnêtement, tu t’en sors ? Je veux dire … tu vas aussi bien que tu le laisses paraître, que ce soit à moi ou à tes parents ? » Demanda-t-il avec un sourire réconfortant et soucieux. Il savait que Willow avait beau s’ouvrir de plus en plus à lui, elle ne lui détaillerait sans doute pas non plus tout ce qu’elle avait sur le cœur, mais il voulait savoir où elle se situait sur une sorte d’échelle. Ainsi, il pourrait ajuster le niveau d’aide et d’attention à lui offrir. August étant de nature très altruiste, il ne manquait jamais l’occasion d’être là pour les autres. D’ailleurs, il assura Willow qu’il prendrait soin d’elle, à la hauteur de ce que ses parents auraient pu désirer pour leur fille. « T’es adorable. Et ça marche dans les deux sens bien sûr. Tu peux compter sur moi. » Il sourit face à cette réponse, ravi d’être tombé sur une femme aussi plaisante que Willow. Il s’attendait à quelqu’un de gentil, forcément, parce que les courriels électroniques qu’ils s’étaient échangés laissaient comprendre le charme de Willow, mais de là à se trouver face une personne aussi unique, August était comblé.

August mentionna, suite au récit de ses déboires, le fait qu’il n’attendait pas non plus l’amour devant sa porte d’entrée, ne souhaitant que l’entendre y toquer. Il menait une vie bien remplie, autant socialement que professionnellement. Il était loin d’avoir le temps de s’ennuyer et de songer à l’absence d’une présence féminine. Ça lui manquait surtout le soir, lorsqu’il s’endormait, mais ses rêves ne tardaient jamais à l’emmener bien loin de ses tourments. « De toute façon, toi comme moi, on est encore jeunes. Cela ne sert à rien de ce pressé. Mieux vaut être seuls que mal accompagner comme on dit. » Elle avait bien raison, Willow. August ne désirait pas s’éprendre de la première venue seulement pour avoir l’impression d’être comme les autres, d’avoir trouvé l’amour, de vivre le rêve. Il désirait vivre ce rêve pour de vrai, pas rien qu’en donner l’impression. Il voulait attendre après la femme qui lui donnerait envie de parler jusqu’au bout de la nuit, la femme qui ne le laisserait jamais tomber dans la maussade routine de la vieillesse, une femme qui serait prête à le suivre dans toutes ses aventures rocambolesques, s’il se décidait un jour à les vivre. August était un homme de défis, et l’amour, comme tout le reste, se devait d’en être un, jour après jour. « C'est sûr. » Avait tout simplement répondu le jeune homme, Willow ayant tout dit.

Une fois à la cuisine pour préparer le repas, August s’accorda à l’idée de sa nouvelle colocataire et s’empressa donc de sortir sur le comptoir tous les ingrédients nécessaires à préparer une sauce bolognaise improvisée. Sans trop réfléchir, il lança une sorte de défi à Willow, qui ne tarda pas à le relever, et même à ajouter ses propres règles qui rendrait le tout bien plus drôle. « Ok. J’accepte le challenge très cher ! J’ai une idée, on fait chacun une part de sauce à sa façon et ensuite on goûte chacun celle de l’autre ? » Il rigola, amusé par la proposition. « Prépare-toi à pleurer devant le chef d’œuvre culinaire que tu goûteras ! Au boulot ! » August exagérait, honnêtement les sauces pour les pâtes n’étaient pas forcément ce qu’il savait le mieux faire, mais il aimait bien en mettre afin de pomper Willow et de faire sortir son sens de la compétition. August étant un grand coureur, ayant fait plusieurs triathlons, il avait ce besoin de toujours se pousser pour aller toujours plus vite, toujours plus loin. Ça affectait pas mal toutes les sphères de sa vie. Il s’attela donc à la tâche, et c’est dans un silence de concentration qu’ils préparèrent chacun leur recette, dans des chaudrons différents évidemment. Au bout d’un moment, August s’arrêta pour simplement brasser sa sauce dans la marmite, laissant les goûts se mélanger maintenant que tout y était. « C’est long, chef Rhodes. » Il lui fit un clin d’œil, un sourire en coin.

« Oui. Evidement ! Ils savent qu’un jeune homme à gentiment accepter de m’accueillir et que je vais parfaitement bien. » Visiblement rassuré, August hocha la tête en apprenant que les parents de Willow était au courant de sa localisation, de son nouveau logement et de sa colocation. Il ne voulait pas être le complice d’un complot contre ses parents. Honnêtement, August prenait très à cœur l’honnêteté, et il ne voulait pas avoir l’impression de cacher des choses. Même s’il ne connaissait même pas les parents de Willow, comme il se faisait la promesse de prendre soin de leur petite fille, il avait l’impression qu’un certain lien les unissait. Pas aussi fort que son lien avec Willow, certes, mais quand même assez présent pour qu’il se soit senti coupable si jamais leur fille avait décidé de ne plus donner de nouvelles. Heureusement, ce n’était pas le cas et la jeune femme n’était pas du genre à les laisser dans l’inquiétude. Encore une fois, elle gagnait des points auprès d’August, qui commençait vraiment à tomber sous le charme de sa nouvelle colocataire. « Bien. Ils n’ont pas de problème avec ça ? » Demanda-t-il, comment si l’opinion de ses parents était vraiment capital. Pour lui, c’était le cas. Willow allait sans doute le trouver un peu trop intense, lèche-bottes ou colocataire-poule, mais c’était du August tout craché. C’était peut-être son côté professeur qui ressortait ; il voulait toujours que tout soit bien structuré, que le message soit bien clair, etc. Comme c’était le cas, il prit finalement le temps de s’inquiéter non pas pour ses parents cette fois, mais pour Willow elle-même, qui devait en avoir beaucoup sur le cœur avec cette histoire de rupture. Devant lui, elle n’avait pas besoin de vouloir paraître forte, et il voulait qu’elle le sache dès ce soir. « Honnêtement ? J’en sais rien. Je pense que ça pourrait être pire. Enfin … Je veux dire … Je ne suis pas la première ni la dernière fille à s’être fait avoir pas vrai ? Le temps finira par faire son effet et tout rentrera dans l’ordre. » Les yeux de Willow s’étaient soudainement embrumés, les larmes montant jusqu’à ceux-ci et menaçant de sortir de leur cachette. August aurait voulu la prendre dans ses bras, mais il ne savait pas si c’était approprié pour le moment. Après tout, ils n’étaient pas encore très intimes, même s’ils s’ouvraient aisément l’un à l’autre. « Tu sais, les vacances sont arrivées pour les élèves du lycée, alors dès que j’en aurai terminé avec la correction des examens, je prendrai des journées pour te faire visiter Bowen et les environs. Ça te fera penser à autre chose, le temps passera plus vite et tu auras de nouveaux beaux souvenirs auxquels songer. » En plus, comme August était calé dans l’histoire de l’Australie et surtout du Queensland, il serait un véritable guide pour Willow. Comme elle était journaliste, il se doutait bien que la culture, la politique et l’histoire l’intéressaient au moins un minimum ! Ils passeraient du bon temps.

Pour le moment, ce serait également du bon temps mais passé entre les quatre murs de leur logement, dans la cuisine. Déjà, malgré le silence, ils étaient tellement concentrés à cette même tâche qu’August avait l’impression d’apprendre à la connaître encore et encore malgré l’absence de paroles, rien qu’à la regarder cuisiner du coin de l’œil, de temps en temps. Quand il eut terminé de son côté, il ne manqua pas de souligner sa rapidité à Willow, ou plutôt la lenteur de cette dernière. « C’est peut-être un peu long mais ça en vaut la peine chef Wojnarowski ! Tu verras. » August rigola. En plus, elle avait su dire son nom de famille sans se tromper dans la prononciation. Une perle rare, celle-là. « J’ai hâte de goûter. Ça sent tellement bon, j’ai l’estomac qui gargouille. » La belle blonde proposa finalement de continuer le jeu des questions en attendant que les sauces mijotent un peu, ce à quoi August acquiesça en hochant la tête et en s’asseyant sur le comptoir, se hissant grâce à ses bras. Il attrapa les deux coupes vides qu’il avait ramenées du salon et les remplit de vin à nouveau. « Y a t-il quelques choses que tu aime et dont tu as honte ? Promis, je ne me moquerais pas. » August esquissa un sourire. « Plus qu’une. J’peux te faire la liste si tu veux. J’ai honte mais pas au point de le cacher à ma nouvelle coloc’, parce que de toute façon tu t’en rendrais bien vite compte. » Avoua-t-il avec un rire avant de prendre une gorgée de son vin. « Alors … J’connais les chansons de la comédie musicale The Sound of Music par cœur, j’adore d’ailleurs les chanter debout devant le film. Même chose pour Grease. » Premier aveu. August sourit, puis continua : « Je m’achète parfois des copies de magazine pour femmes genre le Cosmopolitan, question de faire les tests débiles et de lire les articles qui ne valent pas deux sous. Mais j’aime ça. Tu lis ça, toi ? Ça me coûterait moins cher de simplement te les emprunter. » Il rigola de nouveau, les joues légèrement rosées, peut-être plus à cause du vin que de sa gêne. « Puis … je joue parfois aux Sims, parce que j’ai beaucoup joué quand j’étais plus jeune, et que ça se démode pas, ce truc. » August était des plus honnêtes avec Willow, et il lui avait dit tout ce qui lui était passé par la tête. Après, l’historien savait qu’il en avait encore un paquet, mais ce serait à Willow de les découvrir au fil des jours, des semaines et des mois. « Et toi ? » La question était trop marrante pour ne pas la lui renvoyer.

Sans doute amusée par le côté protecteur démesuré d’August, Willow s’était mise à rire quand il demanda si ses parents étaient d’accord avec sa situation actuelle. Sans doute était-ce parce qu’il avait lui-même une si belle relation avec sa famille, mais August tenait à s’assurer que la jeune femme entretenait une relation honnête avec ses géniteurs. Comme s’il ne pouvait que lui souhaiter d’avoir de bons liens avec eux, elle aussi. « Non ! Après je ne dis pas qu’ils ne vont pas s’imaginer des choses derrière mon dos mais non, ça ne leur pose aucun problème. Ils me font confiance pour faire les bons choix et je trouve que je me suis pas trop mal débrouillée ce coup-ci … » Le professeur d’histoire hocha la tête avec un sourire, qui s’agrandit légèrement, laissant voir ses légères fossettes, quand Willow mentionna que ses parents allaient peut-être s’imaginer des choses derrière son dos. « Surtout si on se présente mutuellement nos parents lors d’un dîner … ça fait très officiel, tout ça. Ça porte à confusion, c’est sûr. » Dit-il en riant. À ses yeux, ça ne posait aucunement problème. Après tout, ils étaient colocataires et allaient donc partager des moments plutôt intimes à partir de maintenant. Ils allaient partager une grande partie de leur vie, de leur temps, tous les deux. Ça avait de quoi d’officiel, même si ce n’était pas en tant que couple. Il trouvait important que leurs parents connaissent la personne qui partageait ainsi la vie de leur enfant. « Mais tu t’es bien débrouillée, c’est vrai. T’as choisi la bonne annonce. » Ajouta-t-il avec un sourire. Lui aussi s’était pas mal débrouillé ; son annonce avait eu le don d’attirer les bons candidats. Et la candidate parfaite. August avait reçu d’autres propositions, mais la candidature de Willow lui avait semblé être la meilleure. Pour le moment, il ne regrettait aucunement ce choix.

Finalement, Willow lui parla de ces moments difficiles qui l’avaient poussée à venir s’installer à Bowen, et August lui proposa de lui changer les idées en lui faisant découvrir la ville et les environs dans les prochains jours. Il ne pouvait peut-être pas trouver les mots justes pour le moment, ne la connaissant pas assez pour savoir ce qui lui faisait du bien à entendre ou pas, mais au moins August pourrait lui changer les idées, estomper légèrement la douleur avec de nouvelles aventures. Changer les souvenirs douloureux par des souvenirs doux et bons. Il ne se prenait pas pour un magicien, mais il se savait capable d’embellir le quotidien de certaines personnes de par sa simplicité et sa bonne humeur. « C’est très gentil … J’adorerais ça. » Il sourit. « C’est un rendez-vous, alors. » Et ce qui était le plus génial, c’était qu’ils n’auraient pas besoin de jongler entre leurs horaires respectifs pour se trouver un moment pour partir. Puisqu’ils habitaient ensemble, dès que tous les deux seraient ici à ne rien faire, alors ils partiraient à la découverte de la ville. Chasser loin d’ici les fantômes du passé de Willow.

Bref, ils étaient maintenant en attente à la cuisine, pendant que leurs deux sauces mijotaient doucement sur la cuisinière. Les deux fragrances qui se mêlaient l’une à l’autre créaient une ambiance tomatée et August s’en délectait déjà. Il avait hâte que ses papilles gustatives profitent elle aussi de ce festin improvisé. Rien que l’odeur agitait son estomac qui se tortillait dans tous les sens, offrant un concert interne aux deux colocataires. Heureusement, ils ne tardèrent pas à combler le silence en parlant de leurs petits péchés mignons, de leurs secrets bien gardés mais qui n’avaient pas leur place entre eux deux, puisqu’ils découvriraient de toute façon toutes ces facettes de l’un et de l’autre bien vite. Bien plus vite qu’ils ne le pensaient, même. Ce fut August qui se lança en premier, parlant de tous ces petits plaisirs coupables allant des chansons aux revues, en passant par les films. Willow se retenait parfois de rire mais, somme toute, elle respecta bien leur entente de ne pas se moquer de l’autre. « Bah dis donc ! On pourra totalement regarder des comédies musicales ensemble alors ! Chanter et danser devant la télé. Ca risquera bien d’être épique … » Willow éclata de rire, et ce son contagieux ne tarda pas à arriver aux oreilles d’August, qui rigola à son tour. Il les imaginait déjà en train de chanter et de danser dans le mince espace entre la télévision et le fauteuil du salon. Cette image était amusante, mais le faisait rêver en même temps. C’était ce genre de relation, qu’il voulait, au fond. La complicité, l’humour, la bonne entente, la simplicité. Il avait l'impression d’avoir cherché et attendu Willow depuis si longtemps. Il espérait que ce n’était pas qu’une illusion. Que l’effet de la première soirée. Il espérait que ça durerait. Longtemps. « Excellent ! Tu me feras découvrir celles qui te font le plus bouger, aussi. Ça me changera de mes deux habituelles. » Déclara August, toujours prêt à découvrir plus, à étendre sa culture générale, à apprendre tout ce qu’il ignorait. « Pour les magazines, j’en achète surtout en vacance mais je te les prête sans soucis. » Il prit également une gorgée de vin, souriant. « C’est gentil. » Puis elle continua à commenter chaque parole d’August, comme si sa liste était à présent gravée dans la tête de Willow, inoubliable. « Les Sims c’est tellement génial ! J’adore depuis que je suis ado … Encore de jolis points communs mon cher. » Conclut-elle. August souriait encore, visiblement ébahi par tous ces points communs, justement. C’est avec un intérêt démesuré qu’il écouta Willow lui parla de ses petits secrets à elle, à son tour. « Alors … Bon .. Je me lance. Je peux pas dire que j’en ai vraiment honte, c’est plus que je ne le crie pas sur les toits. Je joue du violon. Quand j’étais petite, alors que les autres filles faisaient de la danse ou de la gym et bien moi je jouais du violon. Je joue toujours d’ailleurs même si je dois avoir perdu le niveau que j’avais à l’époque. Sinon hmm. Je suis une grande fan des Spice girls. Met moi « Wannabe » et je ne répond plus de rien ! Quoi d’autre ? … Oh oui … J’adore les dessins animés. Surtout les Disney, pas les autres. Ce n’est pas rare que je m’en regarde un quand il passe à la télé ou quand je m’ennuie ou encore quand je vais pas bien. » August l’avait écoutée sans l’interrompre, enregistrant chaque mot dans sa mémoire, souriant en regardant Willow lui parler d’elle avec ses yeux pétillants. Il était vraiment bien tombé. Elle était si amusante, pleine de vie, et ce malgré toute la peine qui pouvait l’habiter. « J’aimerais beaucoup t’entendre jouer du violon. Je trouve que c’est un instrument tellement … magnifique. Le son me transporte à chaque fois que je l’entends dans une musique. Il me fait vivre des montagnes russes d’émotions. » Avoua August avec sensibilité. « Alors si c’est toi qui m’en joues en plus … je risque de rêver éveillé. » Ajouta-t-il avec un sourire doux. Puis il laissa son sourire s’agrandir un peu plus. « Pour ce qui est des Disney, j’avoue que j’ai davantage regardé ceux comme le Roi Lion et L’Histoire de jouets plutôt que les films de princesse, mais j’suis ouvert à une soirée thématique Disney avec toi. Après tout, il faut bien que je les voie un jour, les Cendrillon et les Blanche-Neige. C’est un must. » Avoua August. Pendant ce temps, Willow remplit une casserole d’eau et la posa sur un autre rond de la cuisinière, l’allumant au maximum. « On va bientôt pouvoir manger. » August hocha la tête. « J’vais monter la table. » Dit-il en sortant les napperons et la vaisselle. Ils n’allaient quand même pas manger devant la télévision dès leur premier repas. Ils avaient encore tellement à se dire.

À voir Willow sautiller de la sorte en pensant déjà aux comédies musicales qu’elle montrerait à August, ce dernier rigolait de bon cœur. Elle était adorable dans tous les sens, dans toutes les situations. Cette femme allait carrément changer l’ambiance dans cet appartement, amenant bien de la lumière et de la couleur. August gérait bien la solitude, il avait un tas de lectures qui l’attendaient, un tas de connaissances à acquérir, mais il avait toujours préféré avoir une présence auprès de lui malgré tout. C’est pourquoi l’arrivée de Willow dans sa vie était comme un baume sur son cœur, d’autant plus qu’elle était carrément le type de personne qu’il aimait avoir auprès de lui, dont il aimait prendre soin aussi. « J’en suis certain aussi ! On a tellement les mêmes goûts jusqu’à présent, j’me dis que j’pourrai pas faire autrement que de les aimer et de les apprendre par cœur. » Renchérit-il avec un sourire. Ça lui ferait changement, à force de toujours regarder les mêmes comédies musicales faute d’en connaître d’autres à visionner, August se serait un jour lassé. Encore une fois, Willow viendrait le sauver d’une sorte de monotonie. La blonde lui avait ensuite parlé de son talent pour le violon, et tout de suite touché par l’instrument, August lui demanda – la supplia presque – d’en jouer pour lui. Parce que cette musique le faisait rêver, ce son perçait son âme pour en sortir ses émotions les plus profondément cachées. Quand August écoutait une musique comportant du piano ou du violon, il se montrait vulnérable, il s’ouvrait au monde. Si Willow réussissait à le toucher de la sorte en sortant son archet, elle aurait accès à tout ce qui composait l’homme. Ce fut donc avec un sourire ravi et reconnaissant qu’August l’écouta lui dire qu’elle jouerait pour lui, quand il le voulait. Willow semblait troublée par la demande de son colocataire, leurs regards se perdant l’un dans l’autre un moment. Les yeux d’August brillaient, aussi. « J’aurais bien dit tout de suite, maintenant, parce que je peux parfois me montrer impatient, mais … je pense que les voisins n’apprécieraient pas trop. » En réalité, il n’avait aucune idée de l’heure qu’il était actuellement, mais comme il faisait sombre et que le soleil avait disparu depuis un bon moment à l’horizon, il se disait que ses voisins se préparaient sans doute tranquillement à se mettre au lit. Toujours dans le plus grand des respects, August ne dérangeait jamais le quotidien des autres. Après ce petit moment bien unique et étrangement intime entre eux, Willow lui parla des films de Disney, et August reprit la conversation sur un ton normal. « Deal ! » Dit-il en tendant la main pour qu’elle la prenne et qu’ils concluent officiellement cette entente débile. Il rigola. Il ne savait même pas quel film il ferait regarder à Willow. Peut-être un vieux film, un classique, ou alors un film à connotation historique. Pour lui faire découvrir un peu de son monde, de sa passion. Il n’irait quand même pas jusqu’à l’obliger à regarder un documentaire comme il se plaisait souvent à le faire, mais sous forme de film romancé, ça passait toujours mieux. Finalement, le repas était enfin presque prêt et August eut tout juste le temps de dresser la table avant que Willow ne vienne le rejoindre avec les plats. Il sourit en s’asseyant à côté d’elle, Willow était au bout de la table et lui à la place juste à côté. Il n’allait quand même pas mettre une distance, chacun à leur bout, maintenant qu’ils étaient si complices. August ne voulait pas briser ce moment unique de découverte de l’autre qu’ils étaient en train de vivre pour la toute première fois. C’était le début d’une belle histoire, il le sentait bien, et il voulait tout faire pour que ça continue ce soir. « Bon appétit ! » Il planta sa fourchette dans les pâtes et fit rouler celles-ci dans sa cuillère, de sorte à ce que les pâtes s’enroulent bien, et il goûta alors à la sauce de Willow dès sa première bouchée. Il poussa un petit gémissement de satisfaction, bref mais révélateur. Il avala sa bouchée. « Mmm. C’est délicieux, Willow ! J’abandonne, t’as gagné. » Il sourit, la bouche fermée. Sa propre sauce était elle aussi très bonne, mais pas aussi goûteuse que celle de sa colocataire. La sienne débordait de saveurs et d’épices diverses. « Si t’as été capable de faire ça en si peu de temps, j’ai bien hâte de voir ce que tu cuisineras quand on aura plus de temps ! » Lança August. Il avait déjà hâte à ces moments de cuisine ensemble. Même la perspective de faire le ménage ou les courses avec Willow lui semblait une partie de plaisir, tout simplement parce que le courant passait trop bien entre eux. August allait se resservir du vin quand il réalisa que la bouteille était vide. « Oh ! Eh ben, c’est peut-être pour ça que je me sens léger et fatigué. » Il rigola. Il regarda finalement l’heure sur sa montre et constata qu’il était passé dix heures. « Le temps passe vite ! Faudra aller préparer ta chambre, ton lit, après. Si tu veux pouvoir dormir cette nuit … » Avoua-t-il, parce que la base du lit et le matelas étaient eb place, mais les draps et les oreillers n’y étaient pas encore installés.

Après avoir conclu qu’ils feraient des soirées à thématique Disney ou comédies musicales, que Willow lui prêterait parfois ses magazines et que dès demain elle lui jouerait quelques morceaux de violon, ils passèrent à la table, toujours plus complices grâce à ces révélations. Plus il apprenait à la connaître, plus il tombait sous le charme de cette femme qui avait tant à donner. Il ne pouvait s’empêcher de penser à cet homme qui lui avait brisé son cœur et l’avait poussé à partir de Sidney, et surtout il ne pouvait s’empêcher de se dire que c’était un con, qui était en train de passer à côté de la plus belle chose qui pouvait sans doute lui arriver. August se promit que lui, s’il en avait la chance, ne laisserait pas Willow n’être qu’une étoile filante qui passerait au-dessus de son ciel pour l’illuminer pendant quelques secondes. Pour le moment, ils dégustèrent leur repas, goûtant chacun d’abord à la sauce de l’autre. August s’était exclamé de satisfaction devant ce goût si unique, si savoureux. « Je suis contente qu’elle te plaise ! La recette vient de ma grand-mère. Elle m’a donnée quelques bonnes recettes. C’est à elle que revient le mérite. » Il hocha la tête, ayant déjà bien hâte de goûter à tout ce qu’elle lui réservait. « Quelles autres recettes t’a-t-elle données, par exemple ? » Demanda August, qui se montrait déjà très gourmand face à Willow. Elle pourrait donc rajouter cette caractéristique à la longue liste de celles qui constituaient August. Évidemment, il ne s’attendait pas à ce que la belle blonde lui prépare tous ses repas, lui aussi mettrait la main à la pâte, lui aussi lui ferait découvrir ses plats favoris et fétiches. Ils étaient une équipe, à présent. Une équipe qui partait décidément du bon pied. « La tienne est très bonne aussi ! » Il sourit, hocha la tête, la bouche trop pleine pour répondre quoi que ce soit. Il réussit à articuler un : « Merci ! » entre deux bouchées, ce qui l’amusa de lui-même. Pour faire passer le tout, il avait pensé reprendre du vin, mais constata bien vite qu’ils étaient passés au travers de la bouteille. Et comme la soirée se faisait de moins en moins jeune, ça n’aurait pas été raisonnable d’en ouvrir une seconde. Toute bonne chose a une fin. August déclara donc qu’ils devraient s’activer dans la chambre de Willow, par la suite, si elle voulait avoir un lit pour la nuit. « Cela passe trop vite oui ! On mange et on s’en occupe après. Ça a été une longue journée. » August acquiesça à cette inévitable tournure pour la fin de la soirée. Ils terminèrent de manger en parlant encore de tout et de rien, et débarrassèrent la table dès que Willow eut avalé sa dernière bouchée. Sans attendre, ils nettoyèrent leur bordel, August lavant la vaisselle pendant que Willow essuyait. De temps en temps, il lui envoyait quelques gouttes d’eau savonnée au visage, pour la taquiner, pour jouer, encore et toujours. Ils rigolaient comme deux gamins, Willow lui donnait des coups de torchon comme s’il s’agissait d’un fouet, ce qui faisait encore plus rire August. Deux grands enfants au cœur tendre et léger. Une fois la cuisine bien propre, August plongea les mains dans ses poches en regardant le résultat. « Bon, et bien. Ne nous reste plus qu’à aller faire ton lit. » N’importe quel autre colocataire aurait pu la laisser s’arranger par elle-même pour cette étape, mais lui ne ressentait aucune gêne à l’aider à poser ses draps et ses oreillers, même qu’il se serait senti très mal de ne pas l’aider à le faire, surtout vue l’heure. Willow avait l’air fatiguée, et lui aussi, alors aussi bien retrouver leurs lits en même temps. Ils passèrent donc à la nouvelle chambre de Willow, celle qui avait été inoccupée depuis l’arrivée d’August dans cet appartement, et August l’aida à enfiler le drap contour, à poser les draps et la douillette, ainsi que les oreillers dans leurs taies. « Et voilà, princesse ! » Il lui fit un clin d’œil, l’ayant dit d’un ton de voix adorable et non pas péjoratif. Willow n’avait rien d’une femme princesse, de ce qu’il avait pu voir. Elle n’avait pas hésité à l’aider pour tout. Et vice-versa. « Alors … je vais te laisser t’installer pour le reste et … je vais te souhaiter une bonne nuit. » C’était à contrecœur qu’August prononçait ces mots, car il se sentait impatient de continuer à passer du temps avec elle, mais la journée avait été longue et ils avaient tous les deux besoins de se reposer. Et puis, leur histoire ne faisait que commencer. Des soirées comme celle-là, ils en auraient par centaine. Ils auraient tout le temps du monde pour apprendre à se connaître, à s’apprivoiser, à s’apprécier et, éventuellement, à s’aimer.