some relaxation ‹ free.

Tu l'écoutes attentivement tout en barbotant dans l'eau chaude. Elle ne travaille 'que' depuis un an à l'hopital, toi ça doit faire quelques mois, trois ou quatre. Tu ne sais même plus de puis combien de temps tu es arrivée ici. Au début, tu n'étais pas à l'aise dans cette ville, mais finalement, tu t'y plais bien. Tu as de bons amis, tu as une chouette maison, un chouette travail. Tu ne pensais pas que tu te sentirais si bien ici, loin de la grande ville. En réalité, tu prefères même.
Vous embrayez sur la peur, et tu l'écoutes en souriant. Mais non, je suis sûre qu'il te dirait que tu peux le faire... et tu l'as fait ! Alors ils seraient fiers de toi ! Tu es très pédagogique mine de rien, tu es habituée aux enfants, tu es habituée à voir le positif. Dans toutes choses. Et c'est très bien comme ça. Oui un travail gratifiant, génial mais parfois très dur. Tu repenses à des enfants que malgré la chirurgie tu n'as pu sauvé, et ton coeur se serrer. Ils sont peu depuis que tu es officiellement médecin- chirurgien. Mais dans tes années prépa, tu en as vu des cas qui ne pouvaient être sauvés. Ce n'est jamais facile. Hélas.

Tu avançais doucement dans l'eau en souriant, parce que tu te sentais bien maintenant. En plus l'eau était chaude, pas brûlante, mais c'était agréable, tu sentais tes muscles qui relâchaient la pression au fur et à mesure que tu faisais un pas dans l'eau. « Peut-être oui ! » Tu haussais les épaules, de toute façon, il n'y en avait pas un seul ici et cette histoire ne serait pas dévoilée au grand jour, tu n'avais aucune crainte à avoir. Tu reposais ton regard sur elle, étirant un nouveau sourire sur ton visage. « Je n'en doute pas. Et tu tiens la pression ? » demandais-tu doucement. C'était des métiers prenants, parfois un peu trop. Tu devais être impliqué h24 et toujours disponible pour les patients. Il fallait être leur rocs, en tout cas, pour ton métier à toi. Elle ça devait être pire parce qu'elle pouvait plus facilement être confrontée à la mort d'un enfant et toi, en temps que mère, tu ne sais pas comment tu pourrais surmonter ça, surtout quand tu travailles avec l'enfant depuis un moment. C'était un métier difficile parce qu'il fallait savoir être détaché dans les moments les plus durs et c'était toujours plus facile à dire qu'à faire. « Tu es à Bowen depuis longtemps ? » Tu étais curieuse d'en apprendre un peu plus sur ta sauveuse.

Pour la première fois, on te questionne sur toi, sur ton travail. Pour la première fois quelqu'un te comprend et s'interesse à ton ressenti. C'est un beau métier, il a fallu bien travailler. Voilà ce à quoi tu as droit en général. C'est un beau métier MAIS... On ne vous dit pas l'envers du décor, ce n'est pas comme dans Grey's anatomy ou tout le monde couche avec tout le monde dans les salles de repos, ou on sauve toujours les enfants,... Non, c'est un métier H24, ou il faut être présent, savoir gérer les situations de crises, la mort, les parents, les angoisses des enfants ET des parents, la famille, les pleurs, les cris, et tu en passes. « Ca dépend des jours et des cas, on va dire. » La pression est forte comme par moments elle n'est presque pas présente. « Ca fait quelques mois, je viens de Sydney en fait ! Et toi, tu es d'ici ? »

La pression était une chose difficile. Même pour toi, ce n'était pas toujours facile de faire face à la détresse de tes patients. Ils attendaient pour certains, beaucoup venant de toi qu'il était parfois difficile pour eux de faire voir la réalité. Tu avais un grand taux de réussite, tu trouvais toujours le point sensible qui les boosteraient mais parfois, les résultats n'étaient pas les meilleurs. Malheureusement parfois la science ne pouvait pas aller plus loin. Il n'y avait pas de véritable formule magique pour régler tous ces problèmes. Elle t'indiquait alors qu'elle venait de Sydney. Tu avais déjà eu l'occasion d'y passer du temps, pour les vacances, pour profiter de l'opéra, ainsi que pour le travail. « C'est une très belle ville ! Et non, ça fait 10 ans que je suis à Bowen. » Tu avais fui ta vie, ta famille, tes parents surtout. Mais ce n'était pas vraiment un sujet sur lequel tu voulais t'épancher plus que de raisons.

Sydney, y repenser pince ton coeur, légèrement. Ce n'est pas que tu avais des souvenirs de fous là-bas, une famille ou quoique ce soit, mais ça restait ta ville, la ville qui t'a vu grandir non sans peine. Tu as trimé là-bas, tu t'es fait une place contre toute attente. Tu t'es même fait des amis. Eux, eux ils te manquent. Un peu. T'essayes surtout de pas y penser, et de pas trop t'attacher aux gens, après tout, la plus part partent. Ou meurent. Oui t'es légèrement pessimiste concernant la race humaine. Tu préfères les animaux, eux, ils sont là à nos cotés jusqu'à leur fin. Ce sont de vrais amis. Tu t'y perds, ton esprit vagabonde et dans ta tête se rejoue quelques passages de ton enfance dans ce grand orphelinat, tu revois la grille de la cours, cette énorme grille en fer forgé, tu revois ton dortoir, la vue que tu avais depuis la fenêtre. Et sa voix te sort de ta réverie, oups tu t'étais évadée. « Tu viens d'ou? » demandes-tu sans savoir que pour elle, c'était un sujet épineux.

Tu barbotais dans l'eau, on aurait dit un enfant qui découvre pour la première fois une piscine. Ce qui était un peu ton cas, elle, elle semblait perdue dans son fil de penser. Elle devait repenser à sa vie à Sydney, réfléchir à ce qui devait lui manquer, faire une comparaison entre sa ville et Bowen. Toi-même tu avais déjà fait ça plusieurs fois au fil des années mais jamais tu ne prendrais la décision de quitter Bowen. Tu étais trop bien installée pour changer de vie. « Je suis américaine, j'ai vécu à New-York avant de déménager ici. » Tu n'en dirais pas plus. Tu avais déjà fuis à tes dix huit ans et étrangement, ils n'étaient jamais venu te chercher. Dans un sens, ils devaient être soulagé de ne plus t'avoir à leur charge. Dans un autre, ta mère ne pouvait plus te critiquer pour la moindre chose. Et étrangement, ils ne t'avaient jamais manqué, ils n'avaient même pas leur mots à dire pour ta vie avec Tom ou même pour la vie d'Iris et ça, c'était peut-être la plus belle partie de ta vie. « Je vous remercie pour l'aide, ça m'a fait beaucoup de bien de me jeter à l'eau ! » Au propre comme au figuré. Tu sentais que tu pouvais avoir confiance, que tu pouvais remettre les pieds dans la piscine sans paniquer et peut-être même que tu finiras par te jeter à l'eau toute seule. Pour le moment, tu avais assez barboté, tu allais rentrer chez toi, te détendre un peu avant d'aller chercher Iris à l’école.

Tu es perdue dans tes pensées, repensant à tout, autant ton passé que ton présent et le futur qui t'attend. Tu es bien ici, malgré toutes attentes, tu te sens enfin chez toi. Tu la questionnes sur son pays d'origine, l'Amérique, New York, waw. Tu n'as vu cette ville que dans les films et séries télé, y vivre ça doit être quelque chose... Mais tu vois bien que le sujet ne la botte pas et tu ne forces rien, continuant de caresser l'eau du bout de tes doigts. « C'est avec un grand plaisir ! J'espère que ça ira la prochaine fois, en cas de soucis, je suis toujours là ! Je travaille à l'hopital si jamais. Docteur Thompson. » Une manière détournée de lui dire qu'elle peut venir te voir, te joindre si besoin est.

Tu avais assez barboté pour la journée, tu avais passé à peine vingt minutes dans l'eau mais tu avais eu le sentiment que ça faisait dix fois plus. Tu avais réussi à mettre de côté ta crise d'angoisse, en partie grâce à elle, mais tu sentais qu'il était temps pour toi de partir. « Je ne l'oublierais pas ! » Tu notais cette information dans un coin de ta mémoire, elle était pétillante, sympathique et très agréable. Bien sûr que tu voudrais la revoir, peut-être que la prochaine fois vous pourriez faire quelques longueurs ? Tu verrais bien en fonction de ton état émotionnel face à ta peur de l'eau. « Docteur Brown. J'espère qu'on aura l'occasion de se revoir alors ! » ajoutais-tu un fin sourire sur le visage avant de sortir de l'eau pour regagner les vestiaires. Tu avais passé un bon moment et puis c'était aussi l'occasion de connaître des gens de l'hôpital parce que tu étais arrivée que depuis un an, mais tu avais l'impression de ne connaître aucun de tes collègues bien que tu les croisais tous les jours pour une bonne partie d'entre eux.