don't do love (cj)

« Si t'es prête à te lancer avec moi, un peu que j'te l'offre ! » Tu avais envie de le faire maintenant. De sauter dans le vide et d'attendre le dernier moment pour ouvrir le parachute, atterrir comme une fleur au sol. Tu te voyais bien le faire avec elle même si à cause de son coeur, elle avait une forte chance d'avoir une attaque. Ce qui te plaisait moins d'un coup dans cette idée. « Mmh ? » Tu redressais la tête pour la regarder, sans avoir la moindre idée de la question qu'elle allait te poser. Autant dire que tu étais surpris. « C'est une ben drôle de question que tu m'poses là.. » Tu passais ta main derrière ta tête pour te la gratter, tu avais encore un air hébété sur le visage. Ce n''était une question comme on avait pas souvent l'habitude de te poser parce qu'on pensait que tu ne prenais pas ça au sérieux pour la simple raison que tu étais un dragueur. Pourtant, tu avais une réponse, une des plus étonnantes, même pour toi. « Je crois que je le suis Théia. Et j'ai peur étrangement. C'est normal, tu crois ? » lui demandais-tu. C'était une fille, ça devait savoir ce genre de chose non ? Et puis elle t'avait aimé toi. Peut-être pas comme un grand amour, mais assez pour vouloir plus avec toi. Tu l'avais su, c'était d'ailleurs pour ça que ça n'avait jamais été plus loin avec elle. Tu n'avais pas voulu jouer avec elle, avec ses sentiments. « Je ne sais pas si tu as déjà ressenti ces petits papillons dans le ventre à chaque fois que tu croises son regard, ce petit sourire bête sur le visage quand tu penses à elle et cette envie de la voir, de passer le plus de temps avec elle comme si vous ne faisiez qu'un.. Eh beh, j'ressens tout ça pour une fille, pour une femme. » Et pas n'importe laquelle. Une femme de caractère, qui n'avait pas peur de dire ce qu'elle pensait, qui n'avait pas peur de prendre des pincettes avec toi. Si tu jouais au con, elle te le dirais cash, elle ne voulait pas d'un joueur, mais d'un amant.

Ce coeur qui bat faiblement dans sa poitrine l'a trop souvent obligée à dire non. Pas de sport, pas de saut en parachute, pas même la possibilité de faire une course avec un enfant. Il y a des jours où ça ne lui plait pas, où elle se sent faible et pas assez courageuse pour surmonter toutes ces barrières qui l'empêchent de vivre comme un être normal. Heureusement pour elle, ces jours sont rares et rapidement, Théia se réfugie dans sa passion et y trouve un réconfort amplement suffisant. « Ce serait carrément génial, CJ ! Je me renseignerai auprès du doc et si il dit oui, je débarque chez toi avec tout le matos nécessaire, promis. » Elle regarde le ciel, s'imagine avec lui en train de survoler les maisons et traverser les nuages. Ce doit être cette vision idéaliste d'une vie qu'elle aimerait avoir qui lui a fait sortir ces mots de sa bouche sans qu'elle ne s'en rende réellement compte. Une question bateau, fleur bleue, le genre auquel il ne doit sûrement pas avoir l'habitude de répondre. Sauf qu'au lieu de se reprendre, elle pose sa joue sur ses genoux et l'écoute parler. À ses mots, elle sourit. Un sourire béat, rêveur, attendrit par la sincérité de cet homme en face d'elle qu'elle a l'impression de connaître un peu plus à chaque minute qui passe. « L'amour fait peur, » souffle-t-elle d'abord. Elle aussi est déjà tombée amoureuse, mais jamais encore elle n'est allée jusqu'à devenir maladroite, ou à vouloir passer ses journées avec la même personne. On pourrait pourtant y croire, Théia aime l'amour et ses couples, l'amour et ses films guimauves. Sauf qu'elle, elle ne s'est jamais sentie réellement concernée par ce si vaste sujet. « Elle en a de la chance cette femme, » dit-elle sans se défaire de son sourire. Non pas parce que c'est CJ, mais parce qu'elle ne croit pas avoir déjà fait ressentir de tels émotions chez quelqu'un. Elle n'a jamais été le bonheur d'une personne, celui qui illumine ses journées ou encore la raison qui ferait sortir quelqu'un de son lit. Un petit soupir s'échappe de ses lèvres. « Donc si je résume bien, tomber amoureux revient à devenir stupide et à ne même plus pouvoir manger parce qu'on a des foutus papillons dans les tripes. » Elle rit, relève ensuite la tête. « C'est poétique. »

Elle semblait excitée à l'idée, emballée même. C'était toujours délicat comme situation pour elle à cause de son coeur, mais tu avait espoir qu'elle pourrait. Ce n'était pas parce qu'elle avait un trop petit coeur qu'elle devait être empêchée de vivre sa vie comme elle l'entendait non ? Il y avait tellement de restrictions autour d'elle, certes pour son "bien-être" mais c'était la priver de tout. Et ce n'était pas juste pour elle. « Je t'attendrais alors ! » Et si cette idée était trop ambitieuse, il faudrait trouver une activité qu'elle puisse pratiquer sans danger, mais qui la fasse vibrer, qui lui donne l'entière sensation d'être vivante. « L'amour est effrayant oui. » ajoutais-tu doucement. Tu n'avais jamais vraiment été amoureux depuis l'âge de 18 ans. Tu avais su apprécier des femmes, mais sans les aimer d'un amour profond et sincère. Cette fois, c'était différent avec Nev. « Tu crois ? » Tu n'étais jamais sûr d'être assez bien un jour pour cette femme. Neveah était quelqu'un de gentil, de doux. Elle avait la joie de vivre, toujours la pêche et prête à tout pour arriver à ses fins. Elle était déterminée et tu l'avais bien vu pour toi. Elle était prête à se battre. Mais parfois c'était de toi que tu doutais. Et si tu n'étais pas assez bien ? Et si tu lui brisais le coeur ? « Je ne suis pas plus stupide qu'avant si ? » Tu t'étais mis à rire. Peut-être que si, peut-être que non. On ne pouvait pas dire que tu voyais la différence, mais elle, elle le pouvait. Elle était assez clairvoyante sur toi. Et si tu devenais une vraie guimauve, tu espérais qu'elle te le dise pour que tu te reprennes à temps. Tu voulais bien être amoureux mais tu ne voulais pas être un bisounours. « Et toi, Théia, es-tu amoureuse ? »

Cette idée de sa part la conforte dans l'idée que CJ est décidément quelqu'un de bien. D'ailleurs, il a même fini par devenir une personne précieuse dans la vie de Théia. Quelqu'un qui la comprend, qui prend soin d'elle sans la traiter comme une malade, chose que beaucoup de personnes ont parfois trop tendance à faire. Car Théia, elle veut vivre. Elle veut faire ce saut en parachute, voir le monde comme s'il ne mesurait pas plus que la taille de son pouce. Elle en rêve, et elle ne voit pas de meilleure compagnie pour vivre une telle aventure que CJ. Ce même homme qui, en ce moment, lui parle d'amour et de toutes autres choses qui la font rêver. Mentalement, elle essaie de s'imaginer cette fille qui semble si précieuse à ses yeux. Si il en est à ce point amoureux, elle ne peut qu'être quelqu'un de bien et Théia est pratiquement certaine de l'apprécier. Elle a confiance en lui et en ses goûts. Sa question la fait sourire. « J'en suis sûre, idiot. Tu es quelqu'un de formidable, elle a intérêt à se montrer à la hauteur ou j'irai personnellement lui botter le derrière. » Théia rit légèrement. Elle ne s'imagine pas vraiment faire ça, mais elle a finit par développer une affection envers CJ qui fait qu'elle ne supporterait pas de le voir malheureux. Peut-être qu'il n'est pas comme ça avec tout le monde mais avec elle, il s'est toujours montré tellement gentil. Adorable, attachant, une personne spéciale qui mérite quelqu'un d'aussi spécial. Sa deuxième question la fait rire et elle regarde ailleurs afin de ne pas avoir à répondre. Pour mettre fin à la plaisanterie, elle finit par secouer négativement la tête. Par contre, ses dernières paroles lui firent l'effet de deux volcans en éruption dans chacune de ses joues. Théia lève les yeux vers l'horizon et, sans le vouloir, se met à sourire. « J'aimerais te dire non, ce serait plus simple pour moi à raconter et pour toi à comprendre. Mais... je crois que c'est en train d'arriver malheureusement. » Un petit soupir s'échappe d'entre ses lèvres sans que pour autant son sourire ne s'efface.

Tu n'avais pas pu t'empêcher de rire en l'entendant te dire que tu était formidable, et que Nevaeh avait intérêt d'être à la hauteur si elle ne voulait pas avoir une Théia à ses fesses, prête à les lui botter. Tu devais avouer que tu imaginais très mal la scène, peut-être parce que tu étais incapable d'imaginer Théia s'énerver. Mais s'il devait y en avoir un des deux incapable d'être à la hauteur, tu pensais que ça serait toi. Tu manquais un peu de confiance quand il s'agissait d'amour. « Il faudra que je te la présente alors ! Mais peut-être que tu la connais, ça fait un moment que tu vis ici, tu l'as peut-être déjà croisée ! » L'idée venait de traverser son esprit, mais quelle était la probabilité ? Sûrement grande, la ville n'était pas immense. Elles ne se connaissaient peut-être pas sur le bout des doigts mais il était possible qu'elles aient pu parler lors d'une soirée organiser par le Maire, avoir des amis en commun ou peut-être même de la famille. Au fond, tout était envisageable et cette idée te plaisait beaucoup. « Oh Théia ! » avais-tu dit avec un grand sourire sur le visage, surpris par cette annonce. Tu ne t'attendais pas à ça, c'était vrai, mais tu étais heureux pour elle. Tu t'étais senti un peu mal au début de savoir qu'elle craquait sur toi, alors que tu ne ressentais pas les même choses. La savoir avoir le béguin pour un autre était un soulagement. Tu n'étais qu'une passade, en espérant que son nouveau prétendant sera plus que ça. « Je suis sûr qu'il a une gueule d'ange et que c'est un mauvais garçon. » Tu t'étais mis à rire comme un idiot. S'il était comme toi, elle ne choisissait pas le bon cheval. Mais tu ne savais rien de tout ça, tu allais vite l'apprendre. Tu espérais juste qu'il ne briserait pas son cœur. Tu n'irais pas lui botter les fesses, mais si jamais tu serais là pour elle, pour lui changer les idées et l'aider à remonter la pente. Après tout, elle avait une importance dans ta vie aujourd'hui, c'était un petit rayon de soleil. Quand vous étiez à deux, elle oubliait sa maladie, parce que toi-même tu l'oubliais, tu mettais tout de côté pour aimer Théia dans sa globalité et pas juste parce qu'elle était malade. Sa maladie n'était qu'une petite partie d'elle-même. « Tu as peur ? » demandais-tu en souriant. L'amour était effrayant, vous l'aviez dit plus tôt. Toi-même tu avais peur de sauter le pas, de passer un cap. Tu aurais aimé avoir à nouveau 17 ans, pour être timide et te laisser guider plus facilement, comme à l'époque. Mais tu en avais 28, tu étais amoureux et tu flippais. Rien de plus normal, il fallait juste penser que tu n'étais pas seul dans cette histoire, que Nevaeh serait là pour te guider dans les moments de doutes, de troubles.

Il est vrai que cela fait déjà plus de dix ans que Théia a emménagé à Bowen, pourtant elle ne se souvient pas avoir déjà rencontré cette fille qui fait battre le coeur de CJ. Peut-être qu'elle l'a croisée une fois dans la rue, elle n'en sait trop rien, mais elle n'a pas l'habitude d'oublier quelqu'un aussi facilement si jamais elle avait un jour eu l'occasion d'être présentée à elle. « Je crois que je m'en souviendrais si je l'avais déjà vue, avec un nom aussi originale je n'aurais pas pu l'oublier ! Mais du coup, je compte sur toi pour me la présenter. » Il aurait tous les droits de refuser sa demande car après tout, Théia n'est qu'une amie pour lui. Pas une petite soeur, pas une personne avec qui il a vécu durant des années, juste une fille qui a momentanément craqué sur lui et qu'il a dû prendre pour une tarée quand elle l'a accosté. Sauf qu'à ses yeux, CJ est et restera une personne à qui elle tient beaucoup. Quelqu'un pour qui elle veut pouvoir être là, qu'elle est prête à soutenir et à aider dans n'importe quelle situation. Son aveu quand à ce nouveau garçon qui envahit bien trop souvent ses pensées semble étonner CJ. Quand il prononce son prénom, Théia ne peut s'empêcher de cacher son visage entre ses mains. Elle rit, glousse même un peu. Jamais elle n'a dit ce mot tout haut, l'avoir prononcé rend les choses bien plus sérieuses que ce qu'elle le voudrait. À la supposition de son ami quand au profil du dit garçon, elle ne peut s'empêcher de sourire en se rendant compte qu'il n'a pas entièrement tort. « Tu me connais trop, ça fait peur ! » s'exclame-t-elle en levant les yeux vers lui avant de pousser un léger soupir. « Ce n'est pas un mauvais garçon. Il est différent, préfère la nuit au jour. Mais c'est un artiste, alors ça se comprend. Il est tellement... » Elle regarde l'horizon à la recherche de ses mots. « Agréable. Gentil, prévenant, et il a ce sourire qu'il ne montre pas souvent mais qui est tellement sincère. » En se rendant compte de sa mièvrerie, Théia se met à rire puis secoue doucement la tête. « J'ai l'air ridicule. » Cela fait déjà longtemps qu'elle n'a plus ressenti ça. Qu'elle n'a plus été guimauve, comme une ado de quatorze ans qui sent son ventre se nouer et ses joues rougir pour un rien. À la question de CJ, elle attend quelques secondes avant de répondre. Elle réfléchit, mais finit par trouver la réponse qui lui semble comme une évidence. « Non, » dit-elle calmement avant de se tourner vers lui. « L'inconnu me fait peur, sauf qu'Oliver n'en fait pas partie. Je ne sais pas si il m'apprécie ou pas du tout, mais dans ce cas, je ne lui en voudrais pas. Je crois que la seule chose qui pourrait me faire peur, ce serait de le perdre. »

Elle ne semblait pas la connaître. Tu ne savais pas si tu devais être heureux ou triste de cette annonce. Si elle l'avait connu, les choses auraient été peut-être plus simple mais l'idée de la lui présenter t'amusait aussi beaucoup. Surtout si tu pouvais en profiter pour rencontrer son Jules en même temps. « Je m'occupe de ça dans les plus brefs délais alors ! » affirmais-tu un grand sourire sur le visage. Le sujet avait dévié alors sur elle, sur ses sentiments, sur le garçon qui la faisait craquer et sur tes propos qui lui faisaient peur. Pourtant il n'y avait rien d'effrayant. C'était juste à force de la côtoyer, tu avais pu remarquer certaines choses, en comprendre d'autres. Comme remarquer qu'elle avait craqué pour toi et agir de manière à ne pas rendre les choses étranges entre vous, pour ne pas lui briser le coeur. « Mais non, c'est vous les femmes, qui craquaient toujours pour des mecs avec une belle gueule et un côté mauvais garçon. Surtout les plus sages d'entre-vous ! » C'était aussi un gros cliché qui était pris et repris dans les films. Rien que dans Grease et Dirty Dancing, qui étaient deux films américains mondialement connu. Chaque femme sur terre l'avait au moins vu une fois dans sa vie, s'identifiant parfois au personnage. Cette idée te faisait rire, mais cliché ou non, elle était quand même souvent vraie. « Tu n'es pas ridicule, tu es amoureuse ! Si être amoureux rend ridicule, alors sur l'échelle de un à dix, je me situe largement en tête devant toi ! » Tu te sentais ridicule parfois, surtout lorsque tu parlais devant ton miroir pour t'entraîner, pour préparer les discours que tu aimerais faire. Quand tu essaies de mettre des mots sur ce que tu ressens et que tu ne trouves pas, que tu bafouilles et que tu as l'impression d'avoir à nouveau quinze ans. « Alors ne le perd pas. Et si tu veux savoir s'il t'apprécie, le moyen le plus simple c'est de lui demander. » S'il y avait bien une chose que tu avais apprise avec le temps c'était qu'il fallait communiquer. Il fallait parler, demander, oser poser les questions qui peuvent blesser parce que rester dans le doute était angoissant. « Oses, de toute façon tu n'as pas grand-chose à perdre ! » Enfin rien, c'était une façon de voir, parce que si les sentiments n'étaient pas réciproque et qu'il décidait de prendre de la distance - comme toi tu avais pu le faire avec d'autres femmes dans le passé - alors elle perdrait son amitié. Parfois il fallait mieux avoir quelqu'un en ami que pas du tout. « Et s'il ne t'apprécie pas, c'est que c'est un con, incapable de voir la femme formidable que tu es. » ajoutais-tu fermement en souriant une nouvelle fois. C'était facile à dire, il y avait peut-être d'autres raisons. Peut-être que lui aussi était du genre à avoir du mal à exprimer ses sentiments et fuir par peur de s'engager.

CJ a l'air heureux, et Théia ne peut qu'être ravie de le voir aussi enthousiaste quand il parle de sa copine. Ça lui réchauffe le cœur, elle aime voir cette joie qui anime le regard de son ami dès le moment où elle lui dit vouloir rencontrer cette fille. Oui, Théia a craqué sur CJ, sauf que jamais elle n'a eu de réels sentiments pour lui. C'était passager, ridicule, une passe d'adolescent qui n'a pas duré bien longtemps. Elle s'est rapidement rendue compte qu'elle n'était pas amoureuse de lui, du moins pas autant qu'elle peut l'être maintenant. À sa remarque, elle ne peut s'empêcher de rire. « C'est totalement faux ! Et puis, qui te dit que je suis une fille sage ? » Elle le regarde avec un sourcil haussé et un immense sourire sur les lèvres. Théia n'a jamais été une grande amoureuse, pas romantique pour un sous et surtout loin de croire au grand amour. Elle n'a eu que de brèves relations qui n'ont duré que quelques mois, et jamais elle n'a un jour imaginé son futur avec un de ces garçons. Avec Oliver, elle se sent différente. Plus naïve, comme une gamine qui découvre ce que c'est que les sentiments. Elle devient accro à lui même si elle n'est clairement pas prête à se l'avouer. Elle sourit. « Non, tu n'es pas ridicule. T'es adorable, comme un petit chiot. » Théia lui offre un sourire innocent, comme si cela allait suffire à rattraper ses paroles. Un petit rire nerveux s'échappe d'entre ses lèvres lorsqu'il lui conseille d'aller ouvrir son coeur auprès de celui qui le fait battre. « Franchement CJ, on est pas dans un de ces films où il suffit de demander à l'autre de sortir avec toi pour que celui-ci accepte. C'est la réalité ici, plus compliquée et moins fleur bleue. » Et pourtant, peut-être qu'il a raison. Théia n'en sait rien, elle ne s'est jamais retrouvée dans cette position. La personne faible, celle qui a la tête remplie de souvenirs, de paroles qui tournent en boucle, d'images qui la hantent même la nuit. Les derniers mots de CJ la surprennent, positivement. Elle tourne la tête vers lui et, lentement, se met à sourire. Théia pose sa tête sur l'épaule de son ami sans perdre ce rictus qui lui fait mal aux joues. « Merci CJ, merci pour tout. » Elle reste ainsi quelques secondes avant de relever la tête vers son visage. « Tu vas me faire pleurer, imbécile, » dit-elle en riant doucement avant de baisser les yeux vers le sol.

Tu avais faussement ouvert la bouche en grand, prenant un grand air surpris voire même choqué lorsqu'elle annonçait qu'elle n'était peut-être pas aussi sage que tu le pensais. Bien sûr, tu ne pouvais t’empêcher de rire parce que tu essayait de l'imaginer avec des cornes rouges sur la tête et un rire démoniaque et étrangement, tu n'y arrivais pas. Mais tu n'allais pas remettre en doute sa parole, au contraire. « Peut-être parce que depuis que je te connais tu t'es toujours comporté comme une fille sage ? Mais si je me trompe, hésites pas à me le prouver, je serais ravi d'en apprendre plus ! » ajoutais-tu en rigolant. Tu serais vraiment surpris d'apprendre que tu avais faux sur toute la ligne, que c'était que des apparences. « Ok alors je suis ridicule. Les petits chiots sont les pires ! » Tu grimaçais, un petit chien, comment pouvait-on dire qu'ils étaient mignons alors que tu voyais des petites bêtes sans poils, avec une queue de rat et qui se faire trimbaler dans un gros sac en fourrure rose. Non, clairement, soit elle était taquine avec toi, soit elle aimait ce genre de chien. Dans les deux cas, l'un te faisait peur et l'autre te faisait rire. Tu ne savais juste pas vers lequel tu devais pencher. « Quand je lui aurais demandé sa main et qu'elle me dira oui, je reviendrais vers toi pour te prouver que la vie est très facile quand on ose se lancer ! » Tu affichais un grand sourire. Elle qui voulait que tu lui parles, que tu lui montres des choses, tu allais lui demander sa main. Ça oui et sans trop attendre. Demain, peut-être après-demain, tu ne savais pas trop encore. Mais tu allais lui faire une surprise, une belle surprise. Prendre le temps d'organiser ça pour faire les choses bien. Même si pour un premier rendez-vous, peut-être que c'était te lancer dans le vide. Et présentement, tu n'avais plus peur de te lancer, cette conversation te remettait du plomb dans la cervelle. « C'est normal Théia. » Tu collais ta tête contre la sienne quelques secondes, admirant la vue, puis la regardant elle, lorsqu'elle remontait sa tête en te disant qu'elle allait pleurer. Instinctivement, tu te mis à faire des grimaces pour la faire rire parce que tu ne voulais pas qu'elle se mette à pleurer.

Elle ne peut que rire de sa réaction, de ses paroles, de l'image que CJ a d'elle. Théia, elle a toujours été différente des filles de son âge à l'époque. Elle troquait les jupes contre des pantalons troués, elle traînait avec des garçons tatoués, elle a même eu une période où elle ne portait que des vestes en cuir et des baskets de skatteur. Elle était une fille des banlieues de Bowen, le genre qui aime rire sans avoir à réfléchir, à ne même pas se maquiller, à se balader en ville en pleine nuit. Jamais elle n'a été une princesse et jamais elle ne le sera. « T'as beaucoup à apprendre, j'espère que tu as du temps devant toi. » Théia le regarde avec toujours ce même sourire rempli de sincérité. On lui a souvent dit qu'elle était une personne surprenante, haute en couleur, parfois même un peu étrange. Peut-être un peu trop extravertie, trop cinglée, impossible à suivre. Sa réflexion sur les chiots la fait rire de bon coeur. « Tu ne peux pas être sérieux ! C'est tellement mignon un chiot, c'est tout petit et tout attachant, c'est un peu comme la huitième merveille du monde ! » Devant sa grimace, elle penche la tête sur le coté et le regarde en fronçant les sourcils, la lèvre inférieure retroussée. Elle aime plaisanter avec lui, pouvoir divaguer sur des sujets sans importance, ne portant pas sur sa maladie ou sur la vie en elle-même. Et pourtant, elle est encore plus ravie lorsqu'elle entend CJ sous-entendre qu'il va demander cette Nevaeh en mariage. Théia se redresse, plaque ses mains contre sa bouche et le regarde avec des yeux ronds. « Tu plaisantes ! C'est pas possible ! » Elle sourit de plus belle. « Non non non non, j'en reviens pas. Toi, CJ, tu vas te marier ! Parce que oui, je suis certaine qu'elle va dire oui et que vous allez faire une fête de dingue où, bien sûr, tu vas m'inviter. Mais bordel... » Elle prend son avant-bras de ses deux mains. « Je suis tellement heureuse pour toi. » Se remettant peu à peu de ses émotions, Théia reprend sa place initiale, face à l'horizon. Elle laisse poser sa tête contre celle de CJ et, sur le moment, elle a l'impression que rien ne pourrait venir entraver leur bonheur à tous les deux. Lui bientôt fiancé, elle simplement vivante. Alors qu'elle sent l'émotion monter en elle, les grimaces de CJ la font éclater de rire. Elle le bouscule d'un geste de l'épaule. « T'es bête, » dit-elle affectueusement.