my shadow comes with me as we leave it all behind (lily-anaëlle)

« Et si c'est un jeu online, j'serais genre.. La championne du monde ? » demandais-tu doucement. Tu n'étais pas certaine que ça s'passait vraiment ainsi, mais si c'était le cas, tu devais admettre que ça serait la grande classe d'être la championne. The best of the best. Toi qui pourtant n'étais pas très douée avec une console, si tu avais Nelligan comme coach, tu allais rush tous les objectifs, les principaux, comme les secondaires, voire même ceux qui pouvaient être cachés. Autant dire que ce n'était pas rien, surtout pour toi. Mais tu n'en étais pas encore là. « Un père qui s'en fiche un peu de faire la connaissance de son premier enfant.. » Tu ne savais pas pourquoi ça te mettait autant hors de toi. Tu étais sûrement une erreur de jeunesse, un enfant arrivé trop tôt, un parent pas prêt à assumer ses responsabilités. Par chance, tu avais eu ta mère. Elle avait été si forte, si parfaite, jouant à la fois ta mère et ton père. C'était sûrement mieux ainsi. Tu étais peut-être une enfant étrange à l'école, mais tu avais grandi dans un très bon équilibre. Tu n'étais pas parfaite, très maladroite et trop naïve, mais ça ne serait pas la faute de ta mère. Tu t'étais toujours bercée d'illusions trop grandes pour toi, tout simplement. Comme un bonheur sans faille avec un homme. « Zara ? Je ne sais pas, c'est la première que je rencontre, mais je suppose que oui. » Tu étais un peu surprise par sa question, sans vraiment chercher à comprendre plus loin. Peut-être que lui en connaissait beaucoup, mais toi non. Même à l'école tu n'en avais pas rencontré une seule. « Je ne l'ai vu qu'à mon anniversaire, c'est difficile à dire. Je crois qu'elle a peur de moi, que je prenne sa place.. » Comme si c'était possible songeais-tu. Tu ne voyais pas trop comment tu pouvais prendre la place d'une fille que tu ne connaissais pas auprès d'un père qui ne voulait pas prendre deux minutes pour chercher à vraiment te connaître. Elle voulait que tu sauves ton père - son père ( et basta. Pour elle tu n'étais rien d'autre qu'un éventuel donneur. Tu ne serais jamais considéré comme un vrai membre de cette famille. De ta famille. Tu avais beau le vouloir, ça n'arriverait pas. « Zach.. Avec les jeux de la fête de la Mangue et le boulot que tu lui as décroché, j'ai à peine pu lui en parler. Je lui parlé de Zara à mon anniversaire, mais tout ce que j'ai retenu c'est que j'ai bien trop gentille. Que je me laissais un peu trop marcher sur les pieds. Mais c'est mon père, tu sais. J'ai toujours rêvé d'avoir un père et même si c'est pas vraiment l'meilleur pour le moment, je crois que j'ai besoin de lui venir en aide. S'il meurt à cause de moi j'pourrais jamais me le pardonner tu sais.. » Jamais. Il avait beau mal agir pour le moment, tu coulais y croire. Tu étais peut-être trop naïve. Trop gentille, mais que pouvais-tu y faire au fond ? Tu avais toujours été comme ça. Tu ne pouvais pas changer du jour au lendemain. Ton père ne te connaissait peut-être pas, mais il devait savoir qu'avec toi, il avait toute ces chances. Qu'il avait beau agir ainsi, tu trouverais toujours de quoi le pardonner, parce qu'il était de ton sang. Parce qu'il était ton père et que tu avais tellement rêvé d'être une fille normale, d'en avoir un toi aussi un jour que tu serais prête à n'importe quoi pour qu'il t'accepte dans sa vie.

Nelligan se retint de rire quand Lily-Anaëlle lui demanda si elle serait la championne du monde. Même en traversant chaque étape du jeu en compagnie du créateur de celui-ci, Nelligan doutait fort bien qu’elle puisse dépasser ces gamers qui passaient leurs journées à jouer à des jeux vidéo, souvent en vivant uniquement de cela grâce aux dons des fans de leurs streams. Lily-Anaëlle était bien loin de cette addiction aux jeux vidéo. Même Nelligan n’en était pas là, car même s’il streamait de temps en temps, il n’avait pas la popularité des grands joueurs connus de tout le monde du milieu. « Euh, ce serait à voir. » Répondit-il, gêné et amusé à la fois. Il ne voulait pas briser les rêves de Lily, parce qu’au fond de lui il avait toujours cru en elle, en ses capacités à réaliser tout ce qu’elle désirait. Toutefois, il se doutait bien que ce n’était pas un réel projet ambitieux, plutôt un petit rêve inoffensif. Elle-même n’y croyait peut-être pas tant que ça non plus, au fond. Bref, une fois dehors, ils parlèrent du retour du père de Lily-Anaëlle dans sa vie, ce qui déboussolait Nelligan car depuis qu’il connaissait Lily, il n’avait jamais vraiment entendu parler de lui. Tout ce qu’il savait, c’était que Lily-Anaëlle était un bébé éprouvette, et que sa mère l’avait élevée seule. Il se demanda même s’il n’y avait pas quelques détails légaux qui clochaient dans cette histoire. Son père avait-il le droit d’entrer en contact avec elle pour lui demander un don d’organe alors qu’il n’était qu’un donneur ? « Mais … je veux pas avoir l’air de tout remettre en question, mais … avait-il seulement le droit d’engager quelqu’un pour te retrouver ? J’veux dire … quand il est question de donneurs, y’a pas des clauses légales au contrat ? » Après tout, il ne devait pas être sur l’acte de naissance de Lily-Anaëlle. Biologiquement, il était peut-être son père, mais légalement, c’était une toute autre histoire. Nelligan n’avait malheureusement aucune connaissance de droit, et ce n’était que des questions qui fusaient de toutes parts devant la complexité de la situation de la jeune femme. Ils parlèrent ensuite de la demi-sœur de Lily, Zara, prénom qui resta dans la tête de Nelligan même s’il s’imaginait sans doute des choses. Après tout, si elle ne savait pas que sa demi-sœur était à Bowen avant que son père ne l’envoie, elle n’avait aucune raison d’y être venue auparavant. La Zara rencontrée il y avait de cela quelques étés ne devait pas être la même que celle de la famille de la brunette. « Elle t’a donné un moyen de la rejoindre ? » Parce que si elle était sortie de nulle part à son anniversaire sans jamais redonner de nouvelles, c’était encore plus louche, toute cette histoire. Nelligan s’inquiétait énormément pour Lily, mais au fond, ce n’était plus vraiment à lui de s’inquiéter à ce point-là. Zach devait surveiller cette situation, lui aussi, et prendre soin de l’état émotif de sa copine. Le geek demanda d’ailleurs à la jeune femme ce que Zach en pensait. Pas grand-chose, visiblement. Nelligan nota qu’ils ne s’étaient que peu croisés, mais balaya rapidement les émotions que cela lui faisait vivre. C’était con de s’en réjouir, et totalement puéril. « Je comprends … En même temps, un rein, c’est pas rien, Lily. T’es jeune, là, mais plus tard, on ignore ce qu’il se passera … » Il déglutit, ne voulant pas s’imaginer qu’une maladie puisse frapper Lily-Anaëlle. Comme si rien que d’y penser pouvait changer le cours des choses. « Et puis … faudrait déjà que tu le rencontres, lui. » Au moins pour connaître ses intentions. Pour éviter que Lily ne soit déçue, encore et encore, par un père absent.

Vous aviez fait le tour des jeux vidéos et des projets de Nelligan. Tu avais un sourire emballé sur le visage, qui se dissipait à mesure de ses questions. Il est vrai que tu ne t'étais pas attendue à ça. Avait-il le droit ? Aucune idée, ce n'était pas toi qui allait le poursuivre en justice pour ça et puis s'il avait vraiment la blinde d'argent comme te l'avais fait entendre Levi, tu n'aurais sûrement aucune chance de gagner contre lui. Au fond, toutes ses questions légales te passaient un peu au dessus de la tête. La preuve était que tu n'y avais pas songé une seule seconde. Tu n'avais pas été en colère d'apprendre que Levi bossait pour ton père. Tu étais soulagée au contraire. « C'est plus complexe que ça. Il est mon père, mon vrai père j'veux dire par là que m'a mère l'a connu, il était déjà marié à l'époque et quand elle est tombée enceinte il est parti. » expliquais-tu doucement. Tu avais eu du mal à l'encaisser lorsque tu l'avais appris sur le lit de mort de ta pauvre mère. C'était injuste de sa part de t'annoncer une telle chose alors qu'elle poussait son dernier soupir, mais tu avais eu une piste sur tes origines. Tu n'avais juste jamais pris le temps de le chercher. Tu n'avais pas voulu te lancer dans une telle aventure puisqu'il n'avait pas voulu de toi il y a 27 ans, alors pourquoi aujourd'hui il le voudrait ? Pourtant, puisque c'était lui qui venait à toi, les choses étaient différentes, même si c'était intéressé. « Peut-être, je dois t'avouer que je ne m'en souviens pas trop.. » Cette soirée avait été sacrément arrosée et après l'annonce choc de Zara, tu avais bu sans limite, tu avais pu compter sur Zach pour te ramener en un morceau à la maison et te mettre au lit, mais tu avais eu un bon mal de crâne le lendemain, d'autant plus en découvrant le chat qui traînait chez toi. Cadeau de Kol, tu souriais encore à cette pensée. Tu l'aimais beaucoup ce chat, tu devais bien admettre que tu t'y étais attachée plus que de raison. Peut-être parce qu'il était câlin et tout doux, ainsi que trognon. Tu n'arrivais même pas à râler sur lui lorsqu'il faisait ses besoins en dehors de la caisse. Craquant toujours devant sa petite tête de chat, qui te regardait comme s'il ne comprenait pas. Tu n'avais pas le cœur de faire ce qu'il fallait et tu laissais passer. « Toi aussi tu penses que je ne devrais pas lui venir en aide ? » demandais-tu curieuse d'avoir son avis sur la question. Il avait toujours compté pour toi, il était évident que son avis serait à prendre à compte. Pourtant tu te sentais décidée à ne pas les écouter, à faire ce que tu voulais. Ne comprenaient-ils pas l'importance que tout ça avait pour toi ? C'était ton père après tout. Le reste ne pouvait pas vraiment compter. « C'est en route, j'ai demandé à Levi de le rencontrer. » Tu attendais encore ses nouvelles, tu te demandais chaque jour qui passait, ce qui pouvait prendre autant de temps mais tu vivais avec. Tu serais patiente autant de temps qu'il le faudrait.

À la plus grande surprise de Nelligan, qui avait toujours cru que Lily-Anaëlle provenait de l’amour de sa mère et d’un donneur confidentiel, ce dernier apprit qu’au contraire sa mère l’avait connu et qu’elle était tombée enceinte de lui de façon naturelle. Il était parti, tout simplement, parce qu’il était marié et que ça avait sans doute été trop compliqué pour lui. Aux yeux de Nelligan, cela apparaissait tout d’un coup encore pire que s’il n’avait été qu’un donneur. Il était le réel père de Lily-Anaëlle et il revenait dans sa vie comme un voleur, lui demandant seulement ses organes mais pas son amour, et surtout, pas son pardon. Nelligan trouvait cela indigne de sa part. « Oh. Je l’ignorais … enfin, j’veux dire, c’est pas ce que ta mère disait … Quand l’as-tu appris ? » Demanda-t-il. Si ça se trouvait, elle l’avait appris de son père de façon indirecte, et peut-être n’était-ce même pas vrai. Peut-être était-ce un mensonge monté de toute pièce afin de convaincre Lily-Anaëlle de lui venir en aide. Nelligan était sans doute bien paranoïaque dans cette histoire, mais il voulait tellement protéger Lily-Anaëlle. Il savait qu’elle avait trop souffert déjà à cause de la confiance aveugle qu’elle vouait aux autres. Lui y compris. Il ne voulait plus qu’elle pleure pour des gens qui n’en valaient pas la peine. Lui y compris. La brunette demanda alors à Nelligan s’il pensait, lui aussi, qu’elle ne devrait pas lui venir en aide. Il haussa les épaules, cherchant ses mots. « Je pense que tu devrais prendre le temps de bien y réfléchir. Je sais que pour lui le temps doit être compté, mais … je sais pas, je me méfierais, à ta place, Lily. Il a beau dire être ton père, ton vrai père … je sais pas, son approche me laisse perplexe … » Loin de lui l’envie de blesser Lily-Anaëlle mais, en même temps, elle avait demandé à avoir son avis. Et Nelligan voulait se montrer honnête à son égard. Il voulut savoir si une rencontre était prévue entre eux, car tout de même, c’était un pas manquant dans l’histoire, selon lui. Il hocha la tête à la réponse affirmative de Lily-Anaëlle. « Je pense que c’est à ce moment-là que tu pourras voir quelles sont ses intentions … » Lâcha-t-il, sans trop songer à ce que cela pouvait réellement vouloir dire.

Sa réaction était celle que tu attendais. Il était évident qu'il n'était pas au courant de tout ça, tu ne l'avais pas crié sur tous les toits, tu avais tu l'histoire, ça ne concernait personne d'autre que toi au fond. C'était ton père, la vérité sur ta naissance, au moment où tu perdais ta mère. « Je sais.. C'est très confus même pour moi, mais c'était ses derniers mots, elle tenait à ce que je sache la vérité sur mes origines. Elle pensait que peut-être je ferais les démarches pour le chercher. » Mais tu ne l'avais pas fait. Tu n'avais pas eu l'envie ni le courage de trouver un homme qui avait quitté ta mère en toute connaissance de cause. Il n'avait pas voulu de toi à l'époque, tu t'étais dit qu'il ne voudrait pas de toi, mais maintenant c'était lui qui était là, lui qui te cherchait. Peut-être pour de mauvaises raisons, mais au fond, qui s'en souciait réellement ? !ton entourage peut-être, mais pas toi. Et ses mots ne te plaisaient pas, mais pas du tout. Il était pourtant un des seuls à vraiment comprendre pourquoi tout ça te tenait à coeur et il y mettait un frein, comme tous les autres. Tu ne voulais pas entendre ça, tu ne voulais qu'on te dise quoi faire. De toute façon ta décision était prise, quoiqu'il se passe. Rien ne te ferais changer d'avis, personne non plus. « Je te remercie pour ton inquiétude, mais je n'aime pas tes paroles Nelligan. Et en plus je dois filer, j'ai rendez-vous ! » ajoutais-tu en te levant, attrapant ton sac rapidement ainsi que ta veste. Tu ne voulais pas lui laisser une chance de te répondre, une chance de te retenir. Ce n'était pas avec lui que tu devais parler de tout ça, de toute façon. Ce n'était pas exactement ton ami, c'était ton ancien amant, vous aviez tous deux tournés la page, avançant dans des directions opposées, étant chacun dans une nouvelle relation. Il n'avait pas à se soucier de tes problèmes même si son inquiétude te touchait parce qu'elle signifiait qu'il était toujours attaché à toi. « Merci pour le café, prends-soin de toi ! » Sans plus attendre, tu partais. Tu partais loin de lui, loin de ses mots, loin de son inquiétude. Tu marchais à toute vitesse, courant presque pour être certaine qu'il ne te courra pas après. Tu en avais assez entendu, tu ne voulais plus parler de ça. C'est toi qui avait voulu son avis, tu n'allais pas l'accabler pour ça mais tu pensais sincèrement qu'il serait de ceux qui soutiennent ta démarche. Puisqu'il n'était pas de ce coté là, alors autant partir. D'autant plus qu'à chaque fois que tu le regardais, tu sentais ton cœur partir en vrille. Tu l'aimais encore, c'était une évidence, mais tu devais le laisser partir, comme lui le faisait.