blank space + woody

Il m’avait envoyé un texto comme convenu. Je me présentais devant sa clinique avec un jean et un débardeur simple. J’avais inspiré puis expiré longuement de nombreuses fois alors que j’étais devant. Je me promenais beaucoup à Bowen et j’avais trouvé la clinique sans même le savoir lors d’une précédente balade. Je poussais la porte où je trouvais la secrétaire qui me demandait si j’avais un rendez-vous tardif ou une urgence. « Je suis ici pour voir Woody. » lui dis-je simplement en prenant place sur un des sièges de la salle d’attente. J’étais nerveuse. Nerveuse de le voir, nerveuse de lui raconter la vérité. Je n’étais pas du genre à me vanter de mes contrats de mannequinat et c’était d’autant plus complexe d’avoir l’air normale. Je faisais un sourire à sa secrétaire qui semblait partir sous peu et je jetais un coup d’œil à ma montre alors qu’il apparaissait devant le cadre de la porte. « Tu ne m’en veux pas trop pour cette petite urgence? » lui demandais-je avec un sourire angélique, faussement timide. C’était presque possible de croire que je me prenais pour un ange alors que c’était tout le contraire. Puis, l’image de mon copain à Portland se mettait dans ma tête et je la secouais pour chasser tout ça. J'allais y arriver, pas vrai? « Comment procèdes-tu? » lui demandais-je, curieuse avec un petit sourire.

Le lendemain de sa rencontre avec Thiago, Woody avait tenté de la trouver sur les réseaux sociaux, question d’en apprendre un peu plus sur elle, mais comme il ignorait son nom de famille et pas mal n’importe quelle indication à son sujet, il n’arriva pas à ses fins. Il avait fini par simplement lui envoyer un texto, comme il avait promis de le faire, pour lui indiquer qu’il pourrait la recevoir à 21h le soir-même. Son dernier patient aurait quitté la clinique à ce moment-là, et ses collègues physiothérapeute terminaient pour la plupart leur journée aux alentours de 17h. Woody aurait ainsi le champ libre avec la belle blonde rencontrée après son cours de yoga. Il avait passé au travers de sa journée avec une certaine hâte pour ce rendez-vous qui n’en était pas qu’un de rééducation, il le sentait bien. La conversation eue la veille avec Thiago laissait bien peu place aux doutes. À l’heure du rendez-vous, sa secrétaire téléphona à son bureau et lui indiqua qu’une jeune femme l’attendait dans le hall. C’était elle, assurément. Woody s’empressa de la rejoindre et, une fois arrivé dans la salle d’attente, je m’accotai au cadre de la porte et la regarda avec un sourire, l’écoutant lui parler de sa petite urgence. « Pas du tout. Suis-moi, on va regarder ça. » Il lui fit un clin d’œil et, avant de s’éclipser dans la salle d’auscultation, il regarda sa secrétaire : « Bonne soirée Adele, à demain ! » Elle lui en souhaita de même. « Oh et, pourras-tu verrouiller derrière toi ? » Lui demanda-t-il et, quand elle eut acquiescé, Woody entraîna Thiago avec lui jusque dans la grande salle où s’alignaient les lits pour les exercices. La blonde lui demanda alors comment il procédait. Woody tira une chaise pour lui, et tapota le lit recouvert d’un papier, pour faire signe à la demoiselle de s’y installer. « D’abord, même si t’es pas officiellement une patiente de la clinique, j’dois quand même t’ouvrir un dossier. » Il sortit un formulaire sur lequel il inscrivit son prénom. « Ton nom de famille ? » Demanda-t-il avec curiosité, même si c’était bel et bien pour l’inscrire ensuite. Finalement, il leva les yeux vers elle et croisa les bras sur son torse. « Alors, comment c’est arrivé, ta blessure à la cheville ? As-tu subi une opération ? » Il avait besoin de ces informations pour s’enligner dans le traitement et les exercices à faire.

21h, c’était l’heure du rendez-vous auquel je m’étais présentée. « Pas du tout, suis-moi on va regarder ça. » Je hochais la tête positivement et je le suivais docilement suite à son clin d’œil. En me demandant d’une certaine part, comment c’était possible de ne pas réaliser ce qui arrivait sous mes yeux. Un peu coupable intérieurement, je regardais la secrétaire avec un sourire avec un gentil hochement de tête en signe de remerciement. Elle verrouillerait derrière elle... Un frisson me parcourait et je déglutissais difficilement. Il tapotait par la suite un lit où je sautais pour m’y installer. Il m’expliquait qu’il devrait m’ouvrir un dossier et je hochais la tête tout simplement. « Ton nom de famille? » « Wakefield. Et le tiens? » lui demandais-je avec un sourire charmeur dissipant ainsi tous mes précédents doutes. Je le regardais croiser ses bras sur son torse et me questionner davantage. « Je marchais avec des talons hauts. J’ai marché sur le vêtement et je suis tombée. C’était une sorte de pratique, d’exercices... » dis-je simplement en ne mentionnant pas que c’était une répétition pour un défilé de mode. « Je n’ai pas eu d’opération, ce n’était pas assez dramatique pour ça, selon moi. » complétais-je en haussant les épaules de plus belle. « Il reste encore une douleur malgré les entraînements. » lui dis-je en étant sérieuse oubliant presque le petit jeu malsain entre nous.

Assis devant elle, Woody débuta son travail en ouvrant son dossier et en complétant les informations demandées. À première vue, le jeune homme était tout ce qu’il y avait de plus professionnel et agissait réellement comme si sa seule idée était de traiter Thiago pour sa cheville. Pourtant, dans son regard, on pouvait facilement lire que ses intentions étaient tout autres. Et puis, après leur conversation de la veille, la blonde pouvait-elle réellement être surprise ? « Rutkowski. » Avait répondu Woody quand Thiago Wakefield lui avait à son tour posé la question. « Mais ne pense pas que je vais partager mes réponses à toutes les questions qui suivent … C’est toi la patiente. » Il lui sourit malicieusement, avant de continuer sur les questions à savoir par exemple si elle avait des risques d’être enceinte, si elle prenait des médicaments quelconques, le genre d’emploi qu’elle occupait, et, enfin, si elle avait été opérée suite à l’incident dont il demandait les circonstances. Il hocha la tête à sa réponse. « Un exercice pour quoi ? » Demanda-t-il, non pas tant par curiosité que par nécessité, car si c’était une activité qu’elle pratiquait justement souvent, il devait savoir de quoi il s’agissait afin d’évaluer le traitement à donner. Thiago lui parla finalement des douleurs. Woody se leva alors et alla s’installer au bout du lit sur lequel elle se trouvait. « Tu peux te coucher sur le dos. » Il la regarda faire, y prenant un malin plaisir. Sa silhouette ainsi soumise devant ses yeux lui plaisait. Il prit la cheville de la jeune femme entre ses mains. « Dis-moi quand ça te fait mal. » Il la tourna légèrement vers la droite, puis vers la gauche, et de haut en bas, jusqu’au point de tolérance de Thiago à chaque fois.

« À toutes les questions qui suivent? » répétais-je innocemment devant Woody Rutkowski. J’avais répondu sagement à toutes ses questions, risque d’être enceinte, je me protégeais, médication aucune si ce n’est que des suppléments vitaminés, j’avais été vague quand à mon emploi ne répondant pas vraiment à sa question. Il me questionnait davantage concernant cet exercice et je haussais les épaules suite à un soupir un peu hésitant. « Considère le tout comme une marche rapide avec des talons hauts. Une démarche particulière. » lui dis-je gentiment à la recherche de quoi lui dire de plus pour esquiver ses questions. « J’ai... Enfin... Je suis mannequin. » lui dis-je en le regardant droit dans les yeux puis je baissais le regard. Pas de la honte, plutôt de la modestie, limite de la gêne. C’était pas mon truc de draguer en disant que j’étais mannequin. Je m’allongeais suite à sa demande et il me demandait de lui signaler ma douleur. Au départ, je ne disais rien et je répondais lorsqu’il allait à ma limite. « Tu as toujours été physiothérapeute, Woody? » lui demandais-je gentiment comme pour détourner l’attention de sur moi. Je grimaçais lorsqu’il tâtait un point. « Ça fait mal, comme ça. » lui dis-je en relevant le regard vers lui.  

« À toutes, toutes, les questions. » Renchérit Woody avec le même air innocent mais assuré que Thiago. Elle s’exécuta sans broncher, répondant tantôt évasivement, tantôt de façon détaillée à chacune de ses questions. Cela suffirait pour son dossier. Quand il lui demanda comment elle s’était blessée, la blonde lui révéla avec une certaine gêne qu’elle était mannequin, et que sa démarche de défilé avait causé cette blessure. « Paraît que c’est le pire cauchemar d’un mannequin, de tomber sur la catwalk. J’espère que tu tombes avec élégance. » Il manquait sans doute affreusement de tact, mais ça, c’était digne de qui il était. Il arborait son petit sourire moqueur, comme si tout sujet pouvait être amusant. Bref, ce fut au tour de Thiago de le questionner un peu, et il se prêta au jeu. « Non, avant ça j’ai été un gamin, un écolier, un universitaire, et puis après ça j’ai été physiothérapeute. » Répondit-il avec un petit sourire moqueur. Façon humoristique de répondre à une question qui aurait pu soulever trop de douleur dans ses yeux. Non, Woody n’avait pas toujours été physiothérapeute. Non, ce n’était pas ça son plan de vie, son plan A. Il avait été bien plus que ça, à un moment, bien plus grand, bien plus fier, avant de tomber lourdement sur la terre ferme ; la réalité. Le jeune homme continua d’évaluer l’état de la cheville de Thiago et, quand elle lui releva sa douleur, il en conclut que sa flexibilité était plutôt bien regagnée, ce qui expliquait qu’elle puisse déjà refaire du yoga, mais qu’il lui manquait une certaine amplitude de flexion, d’où la douleur lors du mouvement qu’il venait d’effectuer. « Ok, j’ai quelques exercices à te faire. » Woody prenait la séance au sérieux, même s’il se doutait qu’elle ne finirait pas par un simple au revoir comme avec ses autres patientes. Il se leva debout et posa le pied de Thiago à plat contre le bas de son ventre, un peu vers la gauche. « Tu peux t’allonger. Garde ta jambe bien droite. » Lorsque la tête de la blonde fut posée sur l’oreiller, Woody commença à avancer son ventre vers elle, poussant par le fait même son pied vers elle, ce qui faisait plier son pied contre sa jambe. Il faisait ce mouvement de va-et-vient, permettant à son pied de se reposer légèrement entre chaque répétition.

Il suivait cette même partie très amusante alors que mon sourire s’agrandissait. « Paraît que c’est le pire cauchemar d’un mannequin, de tomber sur la catwalk. J’espère que tu tombes avec élégance. » J’avais ris doucement. « Je suis heureuse d’être tombée durant la répétition, quelques heures avant l’événement. » lui confiais-je avec un clin d’œil. YouTube n’avait donc pas accueilli mes frasques, mais ça, Woody n’avait pas besoin de le savoir. À ma question, il se moquait de moi, encore. J’étais légèrement exaspérée, mais je lui faisais quand même un sourire en levant les yeux au ciel. Après quelques mouvements, le physiothérapeute me proposait de nouveaux exercices et je hochais la tête positivement, attentive à ce qu’il me conseillerait. Après tout, c’était lui l’expert dans ce domaine. Je m’allongeais à sa demande et il me demandait de rester droite, ce que je fis simplement. J’étais même relativement docile à tous les exercices qu’il me faisait faire, les autres tests et j’étais même patiente. « Et rappelle-moi Woody, tu n’as pas de copine? » lui demandais-je avec un fin sourire, le regard félin, oubliant presque l’existence de mon propre copain en Amérique. Je comptais bien l’inviter à mon hôtel sous peu ou au moins pour célébrer cette charmante réparation, si j’étais toujours capable de marcher, évidemment.

« Aaaaaah. » Répondit Woody avec amusement et enthousiasme quand Thiago lui apprit qu’elle était tombée lors de la répétition. « C’est vrai que ça t’a sauvé d’une certaine humiliation. » Plaisanta-t-il, même s’il était peut-être déplacé ou du moins trop tôt depuis l’incident pour se permettre une telle remarque, aussi légère pouvait-elle être en sortant de sa bouche. « C’est dommage que tu aies manqué l’événement, par contre. J’parie que t’étais très attendue sur le stage. » Renchérit le physiothérapeute, question de flatter encore un peu plus l’égo de la blonde. Après tout, s’il se permettait quelques blagues, il devait aussi compenser en la complimentant à sa manière. Après tout, il n’allait tout de même pas la repousser alors qu’il était si près du but. Alors que le jeune homme exécutait quelques mouvements afin de favoriser ceux de la cheville de Thiago, cette dernière lui demanda de lui rappeler s’il avait une copine. Il secoua la tête, le visage de Sara lui revenant momentanément en tête avant de se dissiper rapidement. Il ne fallait pas qu’il pense à elle. Il ne fallait pas qu’elle le freine. « Non. Pas de copine. T’en fais pas. » Woody esquissa un sourire à l’adresse de la blonde, se penchant de plus en plus vers elle puisque sa cheville était capable d’autant de souplesse mais aussi parce qu’il désirait que son corps se rapproche du sien. Qu’elle sente tous les va-et-vient qu’il exécutait et qu’elle les confonde à ceux qu’elle pourrait vivre plus tard. Après avoir fait assez de répétitions de ce moment en particulier, Woody s’assit au bout du lit, tirant légèrement sur Thiago pour qu’elle glisse le long du lit et qu’il puisse attraper sa cheville à l’extérieur. Habituellement, il demandait à ses patients de se repositionner par eux-mêmes, mais là, il était plus amusant et plaisant de contrôler le poids plume qui se trouvait devant lui. Assis sur son tabouret de travail, le jeune homme prit la cheville de Thiago entre ses mains dans lesquelles se trouvait une crème chauffante, et il commença à masser la peau et les muscles. « T’as quelqu’un chez toi pour te masser la cheville, de temps en temps ? Ça aide les muscles à se détendre. » Façon détournée de savoir si elle, elle fréquentait d’autres hommes. Même si au final, il s’en fichait, Woody aimait tout de même connaître les autres pions qui jouaient sur la maquette.

« C’est vrai que ça t’a sauvé d’une certaine humiliation. » « Oui, ça m’a sauvé de YouTube, effectivement. » détaillais-je en le regardant droit dans les yeux. Je m’efforçais de garder cette dignité. Il poursuivait néanmoins en me disant que c’était dommage que je rate l’événement. J’émets un petit rire. « C’est mal me connaître, si tu crois que j’ai raté le défilé. » Effectivement, l’adrénaline avait repris le dessus et j’étais allée à l’hôpital par la suite point à la ligne. « Et c’est à la fin de ce défilé qu’on m’a parlé d’un remplacement pour le catalogue de Victoria’s Secret. » Que j’avais décliné parce que ça tombait en pleine période d’examens. L’invitation avait néanmoins été très flatteuse. Ça se mettait bien dans une conversation avec un homme comme Woody. « Non. Pas de copine. T’en fais pas. » « Même si ça avait été le cas, Woody, ce n’est pas elle que je veux, c’est toi. » lui dis-je en le regardant droit dans les yeux, un sourire en coin alors qu’il se rapprochait toujours un peu plus. Ça tirait. Beaucoup. Mais je ravalais la douleur chaque fois en me disant que les résultats viendraient tôt ou tard. Woody ne tardait pas à s’asseoir au pied du lit me tirant alors que je glissais. « Hey! » répliquais-je en fronçant les sourcils. J’étais capable de me déplacer moi-même. Il me questionnait concernant mes besoins et bien que je cernais rapidement le sens de sa question, je gardais un fin sourire aux lèvres. « Ma sœur et son copain peuvent me donner un coup de main, si c’est réellement nécessaire. Je préfère le faire moi-même, habituellement. » commentais-je. J’évitais de le mentionner. Celui qui m’attendait de l’autre côté de l’océan. Je refusais de laisser son image s’interposer dans ma tête. « Et tu habites près d’ici? » Une question comme une autre alors que mon regard perçant allait chercher le sien pour le soutenir de longues minutes. Également pour lui mettre une certaine pression.

Exaspéré par l’entêtement de certaines personnes malgré les blessures, Woody secoua la tête quand Thiago lui apprit qu’elle avait tout de même choisi de faire le défilé. « Ça n’a pas dû aider ta cause. » C’était peut-être pour cela qu’il y avait autant de raideur dans sa cheville. En marchant pour le défilé et en forçant sa cheville à rester droite et forte malgré sa blessure, Thiago avait peut-être aggravé la situation. Bref, tant pis, Woody pouvait comprendre, lui aussi pouvait se montrer téméraire pour ses passions. De toute façon, dès que Thiago parla de Victoria’s Secret, tout ce jugement se dissipa dans les airs. C’était avec sa queue qu’il réfléchissait, désormais, imaginant la blonde dans les déshabillés de cette boutique de lingerie. « Oh ? Du coup on peut te voir dans le dernier catalogue ? » Sa blessure était récente, le nouveau catalogue aussi, donc. Si la réponse était positive, Woody savait ce qu’il googlerait ce soir. Maintenant qu’ils étaient de retour avec les remarques pleines de sous-entendues, Thiago demanda à son physiothérapeute s’il avait une copine, et quand il lui répondit par la négative, elle le rassura en disant que de toute façon, c’était lui qu’elle voulait. Il sourit. « J’espère bien, c’aurait été mal de jouer ainsi avec mes sentiments. » Rétorqua-t-il avec une fausse innocence. Une fausse sensibilité. Afin de lui offrir un traitement adéquat sans pour autant perdre de vue son objectif, Woody s’activa sur les exercices, la tirant vers lui pour continuer sur un nouvel étirement. Il tenta à son tour de savoir son état civil, sans pour autant le faire aussi directement qu’elle. Il semblait qu’elle soit seule aussi, puisqu’elle ne parla que de sa sœur et du copain de sa sœur. Pas de son copain à elle. « Bien. La plupart des exercices se font par soi-même, mais au cas où, un peu d’aide pour faire ceux comme je te fais présentement peut mener vers rétablissement plus rapide. » Lui affirma-t-il, pour ne pas se tirer dans le pied en avouant que cette question n’avait pour but que de savoir si elle était en couple. Le regard de Thiago se posa finalement sur celui de Woody, le perçant de leur éclat, de leur beauté, et la jeune femme lui demanda s’il habitait près d’ici. « Est-ce que cela change réellement quelque chose ? On a tout ce dont on a besoin, ici … » Dit-il d’une voix suave, constatant du regard tous les lits qui s’étalaient devant eux. Un sourire amusé se dessina sur son visage.

« Ça n’a pas dû aider ta cause. » Je haussais les épaules, si ça n’avait pas aidé ma cause, ça avait aidé un bon nombre de personnes lors du défilé, ça les avait rassuré même. Et ça avait aussi aidé mes finances personnelles, mais ce n’était pas le temps d’en parler. « Oh? Du coup, on peut te voir dans le dernier catalogue? » J’esquissais un sourire et je ne tardais pas à hocher la tête positivement. Voilà ce qu’ils pensaient tous, je n’avais plus de honte. Je ne portais pas non plus le soutien-gorge le plus cher du monde. Je n’étais pas un ange, je n’avais pas ces ailes. Je n’étais qu’une mannequin comme une autre. « J’espère bien, c’aurait été mal de jouer ainsi avec mes sentiments. » « Tes sentiments? » lui demandais-je, un brin surprise. Il n’était pas question pour moi d’impliquer les sentiments dans toute cette histoire. « N’en implique aucun avec moi. » lui dis-je en lui adressant un clin d’œil. Il serait un coup d’un soir et ce serait tout. Peut-être un genre de truc à répéter, j’en savais trop rien pour le moment et ça ne me chatouillait qu’à peine l’esprit. À son questionnement, il me confiait par la suite que je pouvais tout réaliser toute seule, me faisant sourire. Je hochais la tête, attentive à toutes ses explications. Je ne saurais pas à quel endroit il habitait puisqu’on a tout ce dont nous avions besoin. J’arquais un sourcil. « Ah oui? » risquais-je, un peu taquine. Je me mordillais la lèvre en m’étirant davantage. « Et pour ces exercices plus poussés, je devrai passer te voir à l’occasion? » demandais-je en recherchant la fréquence pour réaliser le tout. Lentement, mes mains allaient joindre mes orteils et je me relevais doucement, mes yeux croisant ceux de Woody, un regard un peu provocateur. Je m’approchais de lui pour poser mes lèvres sur les siennes doucement. Comme pour tâter le terrain, guetter sa réaction.

Après tout, ce n’était pas déplacé de se renseigner sur sa présence dans le catalogue, s’il s’agissait de son boulot et qu’elle en avait elle-même parlé. Thiago devait être fière de ce qu’elle faisait, et il y avait de quoi l’être. Woody ne voulait que l’encourager et apprécier son travail à sa juste valeur ! Évidemment, il y trouverait son compte par le fait-même, on s’en doute bien. Il esquissa donc à son tour un sourire. « Faudra que je vois ça. » Dit-il, loin de vouloir cacher ses intentions. Direct et franc, peu importe le domaine. Ensuite, continuant dans son attitude séductrice, Woody avait dit à Thiago qu’il aurait été cruel de jouer avec ses sentiments, mots qu’elle ne tarda pas à relever avec surprise. Le physiothérapeute oubliait, parfois, qu’elle n’était pas comme ces filles au cœur d’artichaut qu’il devait attirer dans ses filets. Thiago et lui jouaient au même jeu, selon les mêmes règles. Il n’avait pas besoin de se réinventer pour ses beaux yeux. La blonde lui ordonna donc de ne pas en impliquer avec elle, ce qui lui allait totalement. « C’était une façon de parler. » Lui assura-t-il avec un mince sourire, même s’il détestait se faire reprendre de la sorte. Le jeu était tellement différent avec elle. Ils se relançaient tour à tour le contrôle, alors que Woody préférait largement l’avoir en tout temps. Il décida de le reprendre cette fois en prétextant qu’ils avaient tout ce dont ils pourraient avoir besoin ici, nul besoin d’aller chez lui. Thiago mordit à l’hameçon. « Si tu as de la difficulté à les faire seule, oui … je serai là pour t’aider, évidemment … » Répondit-il, jouant toujours avec les sous-entendus. Thiago se releva finalement, d’abord en lui montrant toute sa souplesse, et ensuite plus directement afin de s’approcher de lui. Leurs lèvres vinrent se poser les unes contre les autres. Doucement. Geste que Woody rendit tout de suite un peu plus intense. Il n’y avait pas eu de douceur entre Thiago et lui, jusqu’à maintenant, et ça ne commencerait certainement pas par un baiser. Le physiothérapeute posa ses mains sur les fesses de la blonde et, d’un coup sec, l’attira contre lui pour plaquer son entre-jambe contre le sien. Il pressa son torse sur la poitrine de la jeune femme tout en continuant à l’embrasser avec ardeur. Prions pour que la secrétaire ait bel et bien verrouillé derrière elle.

« Faudra que je vois ça. » « Quand tu veux. » répliquais-je avec assurance, un sourire au coin des lèvres. Il était célibataire, moi aussi – enfin... tout était une question de perspective. Je gardais ce même sourire enjôleur alors qu’il me disait que les sentiments non-impliqués était une façon de parler. Bien. Je n’avais pas besoin d’hommes à problèmes à Bowen. Et c’était ce que je souhaitais soigneusement éviter. Mais d’ici là, le physiothérapeute ne tardait pas à m’offrir son aide éventuelle, ce que j’acceptais avec un sourire en hochant la tête. « Très bien. » avais-je alors déclaré comme pour avoir un certain contrôle sur toute cette situation. Mon cœur s’emballait au fil des secondes. Je savais que ce que je faisais était mal, je savais que la suite des choses ne m’avantagerait pas. Cet homme qui m’attendait de l’autre côté de l’océan... Il continuerait de m’attendre. Le baiser avait été partagé et intensifié. J’en avais des frissons. L’homme connaissait les femmes, il savait comment faire et n’avait certainement pas besoin d’une carte. L’intensité montait, la bestialité également. Les vêtements se retrouvaient éparpillés un peu partout dans la pièce. L’intensité avait dépassé toutes attentes. Et l’acte en soit avait été fait. Il avait été à la hauteur de ce que j’attendais et même plus haut encore. Puis, ma conscience revenait à la charge suite à ces actes. Je ramassais mes vêtements rapidement que j’enfilais avec autant de vitesse qu’ils avaient été propulsés un peu plus tôt. Rhabillée, je jouais maladroitement avec mes cheveux et je me tournais vers Woody, un peu désemparée. « Euhm... Merci? » risquais-je en pointant le chemin vers la sortie. « C’est bien ça? » redemandais-je en sortant lentement de la pièce. J’aurais voulu lui dire de ne rien dire à ma sœur, ni à personne. Ça pourrait tellement se rendre rapidement aux oreilles de mon copain, oui celui qui est loin, si loin et si impuissant à l’heure actuelle. « Et je te serais reconnaissante de ne pas en parler à qui que ce soit. J'ai pas envie que ça vienne aux oreilles de ma soeur ou de mon copain. » concluais-je avec un sourire faussement assuré.

De toutes les femmes avec qui Woody avait pu avoir une relation sexuelle – c’est-à-dire, beaucoup -, Thiago était certainement l’une de celles qui avaient le plus d’assurance. Elle savait exactement ce qu’elle voulait, ce qu’elle devait faire, et surtout comment le faire. Woody ne voulait même pas la guider un tant soit peu car il préférait lui laisser tout le contrôle, pour une fois. Visiblement, c’était le seul moment où il arrivait à se laisser faire un peu plus. Surtout quand c’était aussi bon. Suite à ces ébats bien calculés à l’avance, Thiago s’empressa de ramasser ses vêtements et de les enfiler plus vite que l’éclair. Certes, ce lien impromptu prêtait mal aux câlins d’après-sexe, mais Woody ne s’attendait pas à ce qu’elle parte en flèche aussi vite. « Euh … ça fait plaisir ? » Répondit le physiothérapeute en haussant les sourcils. Elle pointa la sortie en demandant confirmation, ce à quoi il hocha la tête. Elle commença déjà à fuir, avant de se tourner une dernière fois pour lui demander de n’en parler à personne, de peur que ça vienne aux oreilles de sa sœur ou de son copain. Son copain à elle. À Thiago. « Pas de problème … » Dit-il avec certitude, la regardant partir avant de fermer les yeux et de soupirer, secouant la tête. Cela pouvait peut-être être difficile à croire, mais c’était la première fois qu’il couchait avec une femme déjà en couple et, honnêtement, le sentiment n’était pas génial. Surtout sachant qu’elle le lui avait volontairement caché pour finalement lui larguer cette bombe avant de s’éclipser. Le jeune homme se remit bien vite de cette affaire, toutefois, et remit de l’ordre dans ce coin de la salle avant de fermer et de quitter les lieux à son tour.

FIN