not dead, just bent - (naïa)

C'était digne de l'apocalypse. Un peu comme si tout le monde était pris à piège. Tu étais complètement sonné pris à mal et enfoui dans débris. Tu as recalé une jeune adolescente prête à t'aider sans même savoir comment s'y prendre. Tu l'as chassé prétextant que les secours finiraient vite par arriver. Tu n'y croyais pas pleinement mais tu ne pouvais pas risquer qu'il arrive quoique ce soit à cette petite. Tu pensais pouvoir ramper et te sortir des décombres mais ton corps de suivait pas. Ta jambe ne répondait pas et tu as mis du temps avant de te rendre compte que le sol s'était un poil fendu sous tes pieds. Résultat jambe coincée et ensanglantée, voilà pourquoi tu avais tant de mal à te sortir de là.

Au mauvais endroit au mauvais moment? Oui, c’était surement ça. Néanmoins, Naïa ne s’attendait pas, lors de sa balade en ville, à ce que le sol se mette à trembler. Elle s’était crue dans un film de sciences fictions, ceux qui prédisaient la fin du monde. Pourtant, le sol avait véritablement craqué sous ses yeux. Ca avait été la panique. Les gens courraient, certains pleuraient. Naïa n’avait en premier lieu, pas réagi. Son esprit était comme bloqué. C’était un mauvais rêve… Elle allait se réveiller d’une minute à l’autre… Mais ça n’était pas le cas. La blonde se mit alors à marcher prudemment, à la recherche de quoi faire, d’ou aller… Jusqu’à ce qu’elle remarque cet homme, comme coincé par les décombres. Elle ne pouvait pas le laisser là, malgré les risques encourus si elle allait l’aider. « Ne bougez pas ! Je vais vous aider ! » La jeune femme courut jusqu’à lui pour tenter de soulever les décombres qui retenaient sa jambe prisonnière. C’était beaucoup trop lourd pour elle, mais elle ne voulait pas abandonner. Elle pouvait y arriver.

Sortie de nulle part, une jolie blondinette s'approcha de toi. La douleur commençait à se faire sentir, comme si cérébralement tout était plus actif. Ton corps reprenait ses droits après le petit malaise du au choc. Le bruit paradoxalement sourd autour t'était atrocement désagréable au point que la voix de la jeune femme apaisait un peu l’atmosphère. « Non, vous risquez de vous blesser bêtement.. » Tu avais eu à peine le temps d'essayer de la dissuader que déjà elle semblait se lancer, ce qui avait tendance à t'inquiéter plus qu'autre chose. Tu refusais qu'il lui arrive quoique ce soit par ta faute surtout qu'elle avait de bien s'en sortir. Saisissant l'occasion d'attraper la demoiselle par le bras tu as fini par lui dire. « Les secours ne devraient pas tarder, ce... sera jamais qu'une formalité pour eux. » Tes paroles étaient rythmées par la douleur de ta jambe, et ta mâchoire ne pouvait que se contracter au point qu'on pourrait croire que tes molaires s'extirperaient de leurs places.

Naïa avait encore un peu de mal à réaliser ce qui était en train de se passer. Tout semblait si irréel… Et pourtant, les cris, les pleurs, les bruits des bâtiments en train de s’effondrer étaient bel et bien réels. Naïa avait surement eu une chance inouïe de ne pas être touchée. Alors elle se devait d’aider les autres. Elle voulait aider ce jeune homme, dont la jambe semblait coincée sous les décombres. Mais il refusait son aide, de peur qu’elle se blesse à son tour. « Ca m’est égal, je ne peux pas vous laisser là ! » Elle voulait l’aider, et pourtant elle n’y parvenait pas. Sa jambe semblait bel et bien coincée sous les pierres. Naïa sentait la panique la gagner. La jambe du jeune homme saignait beaucoup, et elle se doutait que plus ils attendraient, puis il souffrirait. Le jeune homme mentionnait les secours qui ne devraient pas tarder. Oui certainement, mais ils avaient tant de personnes à secourir avant lui ! « Non, non, ça sera trop tard, vous souffrez trop ! » avoua t’elle alors que les larmes commençaient à la gagner. Naïa pleurait rarement, voire presque jamais. Mais là, s’en était trop. Elle se sentait terriblement impuissante. Elle réussit néanmoins à soulever quelques décombres, pas suffisamment pour qu’il puisse en sortir, mais c’était un début. « Je vais y arriver, je vais y arriver… » Répétait-elle pour s’en convaincre et se calmer un peu.

Tu n'as pas tardé à comprendre que tu avais à faire à un sacré caractère. Elle semblait têtue, et tu n'avais pas la force de batailler avec elle. Pourtant tu ne voulais pas qu'elle s'acharne ou qu'elle se colle une mission hors de sa portée. « Arrêtez c'est complètement naif.. » Tu avais du mal à faire l'effort de parler et d'amorcer une véritable conversation. Tu voulais juste fermer les yeux mais tu ne te rendais pas compte que la présence de la demoiselle te poussait à rester éveillé et sollicité, c'était un bien pour toi. Elle te parlait de ta souffrance, ta mâchoire semblait ne pas vouloir se décontractée, ta veine frontale était bien visible et tu finissais gêné par tout ça, du coup tu as attrapé l'avant bras de la demoiselle sans trop savoir comment tu as pu le faire et tu lui as dit. « C'est quoi votre prénom ? » Oui tu allais la distraire c'était peut-être mieux. Tu avais trop peur qu'elle se fasse mal.

Naïa ne comprenait pas pourquoi il refusait son aide. Certes, elle n’était pas très forte, mais elle pouvait toujours essayer, non ? De son côté, le jeune homme ne semblait rien pouvoir faire, si ce n’est attendre les secours. Et si il restait seul, il perdrait sans doute connaissance à cause de la douleur. Naïa se devait de rester avec lui. « Non… Non, je… » Elle ne poursuivit pas sa phase, se rendant compte qu’il avait sans doute raison. Elle se sentait désemparée, inutile face à cette affreuse situation ou elle avait été l’une des seules chanceuses. Elle tentait de ravaler ses larmes, de se montrer forte. Voilà qu’il lui tenait l’avant bras, lui demandant son prénom. « Naïa… Et le votre? » Peut-être que parler d’autre chose, avoir une conversation normale pourrait l’aider à ne plus penser à la douleur, à le tenir éveillé.  

Tu voyais bien que l'idée d'être impuissante et spectatrice la révoltait. Tu ne pouvais que la comprendre, tu aurais fait exactement pareil dans son sac mais tu craignais qu'elle se fasse mal par ta faute, et surtout tu doutais qu'elle puisse faire grand chose. Elle comme quelqu'un d'autre. Tu n'étais pas là à douter de la charmante demoiselle face à toi. Mais clairement tu doutais que la force des bras d'un seul puisse te sortir ta jambe de là. Tu pensais vraiment que ton tibia avait tout pris. Ta cuisse ne semblait pas blessée. Tu espérais qu'elle te dirait son prénom, et quand ce fut le cas tu as sourit, presque bêtement. Et quand elle te demanda le tien tu as simplement dit. « J-je.. » Non c'était pas le moment de faire des blagues et de prétendre l'amnésie Cliff'. Tu souffrais tout de même un peu, non ? Tu n'avais pas la force de te permettre ce genre de truc pourtant tu le faisais. A croire que c'était ta ruse pour apaiser la panique qui s'installait chez la demoiselle. Tu n'avais retiré ta main de son avant-bras comme pour l'empêcher de s'acharner à nouveau et tu as simplement repris l'air plus détendu. « Non je plaisante, je m'appelle Clifford, Cliff ça fait l'affaire. » Tu étais lucide, mais tu avais envie de dormir, du moins c'est l'impression que tu avais.

C’était difficile, d’assister à tout ça sans pouvoir rien faire. Mais Naïa n’était pas secouriste. Elle n’était qu’une simple monitrice de surf et de plongée, il fallait qu’elle réalise qu’elle ne serait pas d’une grande aide, malgré sa force de conviction. Mais tout ce qu’elle voulait en ce moment même, c’était que cet homme s’en sorte. Afin de penser à autre chose, la conversation avait dérivé sur des banalités. Le genre de chose que l’on se dirait habituellement dans un tout autre endroit, un tout autre contexte, et pas en pleine situation de crise. Mais le stratagème fonctionnait. Naïa commençait à relâcher la pression, enfin… Jusqu’à ce qu’il se mette à bégayer, donnant l’impression qu’il s’affaiblissait au fil des secondes. Naïa ouvrit la bouche, apeurée, choquée, triste, tout ça à la fois. Elle n’osa rien dire… Jusqu’à ce qu’il reprenne la parole, lui faisant comprendre qu’il plaisantait. « J’ai eu la peur de ma vie ! Ne refaite plus ça ! » Elle eut un petit rire nerveux. « Vous faites quoi dans la vie ? » Naïa avait bien compris qu’il fallait poursuivre cette conversation, histoire qu’il tienne le coup jusqu’à l’arrivée des pompiers et sauveteurs.  

Tu étais taquin, piquant, provocateur de nature. Tes proches t'auraient parfaitement reconnu dans cette petite fausse frayeur que tu faisais à ton interlocutrice et ce malgré ton état. Tu l'avais vu paniquer et forcément tu n'avais pas su t'empêcher de tenter de la calmer. Une jolie demoiselle en détresse ce n'était pas beau à voir et surtout tu avais besoin de ne pas batailler à dépenser de l'énergie dans tout ça en doutant fortement que ça puisse marcher. Tu voulais juste rester là et attendre. Un sourire se posa à tes lèvres quand elle t'ordonna de ne plus faire ça. Cela étant dit tu te sentais vraiment faible et ton corps luttait pour te maintenir éveillé. Le malaise vagal n'était peut-être pas si loin, et tu ne le voyais pas tant venir. « Photographe.. » As-tu répondu sans grande joie. Tu adorais ça pourtant mais tu étais un peu à sèche là. Oubliez les phrases complètes tu gagnais du temps. [color:1917=1aa170]« Et vous ? » Presque essouflé, tu avais besoin de savoir et de ne pas laisser ce malaise qui te rodait autour sans avoir de réponses à cette question.

Même si cela permettait de détendre l’atmosphère, le moment pour faire une blague était plutôt mal choisi. Naïa aurait pu réellement s’énerver, mais compte tenu de l’état du jeune homme, elle se retenait. Naïa ne savait même pas ce qu’elle faisait ici, à tenter de l’aider comme elle le pouvait. Pour une fois, elle avait été chanceuse et n’avait pas été touchée par cette horreur de séisme. En temps normal, Naïa aurait couru pour se mettre à l’abris, égoïstement, abandonnant tout ces gens. Et pourtant, elle s’était arrêtée sur le chemin de cet homme. Peut-être qu’elle avait un peu plus d’humanité qu’elle ne le pensait finalement. « C’est génial ça, photographe. Vous photographiez quoi en général ? » Il lui retournait la question. « Je suis monitrice de surf et de plongée » Répondit Naïa, qui commençait à vraiment s’impatienter quant à l’arrivée des secours. « Qu’est ce qu’ils foutent ?! » Maugréa t’elle. C'était une situation de crise, extrêmement urgente même. Pourquoi prenaient-ils tout leur temps?

Tu allais mal véritablement. Tu sentais que tu allais tourner de l'oeil, et lutter était difficile. Elle t'avait demandé ce que tu photographiais. Evidemment tu avais la réponse sur le bout de la langue mais elle ne sortait pas. Tu pourrais écrire un essai sur ce que tu aimais de la photo et ce que tu avais pu faire. Tu ne faisais pas que ce qui te portait vraiment. En attendant tu as entendu la charmante blondie t'énoncer le métier qu'elle exerçait, et dans la foulée tu as perdu connaissance. Bientôt le dernier souvenir que tu garderas c'était la demoiselle qui te confiait être monitrice de surf. Chose que jamais tu n'aurais soupçonnée. Tu as émergé plus tard dans ce qui pouvait être un camion de pompiers, ou une ambulance avec une douleur énorme à ta jambe. Touché au tibia c'est à la morphine qu'on t'a calmé à ce moment-là.