Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.
Sujet: Wild spirits (Isaiah) Dim 16 Oct 2016 - 17:53
Elle ne souvient même plus de comment elle a terminé dans ce bar. Hazel se revoit sortir du motel, marcher jusqu'au centre ville, sortir un joint de sa petite boîte magique, mais le reste ne lui apparaît que comme un film mis en accéléré. Appuyée contre le bar, son regard se porte sur les différentes personnes se dandinant devant elle. Elle aussi aime danser, elle en a d'ailleurs fait son métier et sa passion. Elle pourrait rejoindre la piste si elle le voulait, montrer à tous ce que c'est réellement que de ne faire qu'un avec la musique. Sauf qu'elle s'en empêche. Elle n'a pas envie, elle n'est pas d'humeur. Elle serre ses doigts autour de son verre, un autre offert par un parfait inconnu puisqu'elle-même est dans l'incapacité de se payer plus de deux boissons, puis termine le cocktail d'une traite. L'alcool fort qui s'est laissé couler dans le fond lui brûle légèrement la gorge, sauf qu'elle n'y prête pas bien longtemps attention. Elle a besoin de fumer. D'un bond, Hazel saute de sa chaise haute et se faufile entre la foule en direction de l'extérieur. Une fois la porte poussée, elle se retrouve en plein dans le monde des fumeurs et peut sentir pour son plus grand plaisir une odeur différente de celle de la nicotine. Pendant quelques secondes, elle lève les yeux vers le ciel noir parsemé d'étoiles formant des constellations. Elle n'en connait aucune, elle aime juste faire semblant de s'y intéresser histoire de se donner l'air intéressante. Alors qu'elle plante un joint entre ses lèvres, Hazel réalise bien rapidement que son briquet n'est pas à sa place habituelle. Elle pousse un juron discret avant de s'approcher d'un type qu'elle n'a jamais vu de toute sa vie. En même temps, elle ne voit pas comment elle aurait pu puisqu'elle vient à peine de débarquer en ville. « Je peux t'emprunter ton feu ? » lui demande-t-elle après avoir retiré le joint de sa bouche, le tenant maintenant à deux doigts. L'odeur de ce qu'il fume lui parvient jusqu'aux narines, soit la même chose qu'elle.
L’intérieur du bar ne l’intéressait même plus. Tous ces gens qui dansaient, chantaient, riaient, habituellement Isaiah se serait senti exactement à sa place mais, ce soir, et depuis quelques soirs déjà, il avait la gorgée nouée en les observant. En constatant à quel point la mémoire oublie vite. À quel point on se remettait vite du désordre. Peut-être que c’était une beauté humaine, à quelque part, de pouvoir se relever aussi vite, d’être aussi fort. Seulement, à un mois près de la survenance d’un séisme ravageur sur la ville, Isaiah n’arrivait pas, lui, à se sentir aussi léger. Tellement de morts, tellement de blessés, tant de bâtiments réduits à poussière. Et lui, impuissant. Isaiah avait passé la plupart de ses jeunes années à voyager, à se rendre d’un pays à l’autre afin de s’inscrire dans des programmes d’aide humanitaire. Il avait eu l’impression de faire une différence, à sa façon. Mais maintenant que cette aide était requise dans sa ville, il avait l’impression que chacun de ses gestes était inutiles. Aucun ne sauverait tous ces gens qui avaient laissé leur vie sous les décombres. Isaiah avait beau faire du bénévolat du soir au matin pour aider à reconstruire Bowen, il n’avait pas la conscience tranquille. Comme s’il aurait pu faire plus. Il soupira donc, à l’extérieur de ce bar, adossé contre le mur de briques qui lui servait d’appui depuis une vingtaine de minutes déjà. C’était sans doute le deuxième joint qu’il s’allumait, et un brouillard artificiel lui voilait les yeux. Mais pas encore assez. La preuve, il entendit très clairement la voix de la jeune femme à ses côtés qui lui demanda d’emprunter son feu. Isaiah hocha la tête, sortit son briquet de sa poche et s’approcha de la demoiselle afin d’allumer son joint. « Dans quinze minutes, plus ou moins, les flics vont faire leur premier passage devant le bar. Just sayin’. » Il lui sourit légèrement, avant de tirer sur son joint. Il avait l’habitude, c’était son lieu nocturne favori, ici, alors il connaissait bien la routine des flics. Et les flics commençaient à bien connaître la routine d’Isaiah, aussi.
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moi je traîne dans ma remorque, tous les excès d'mon époque. la surabondance surgelée, shootée, suremballée. pendant qu'les vœux pieux passent dans l'beurre, que notre insouciance est repue, c'est dans le fond des containers que pourront pourrir les surplus. la question qu'j'me pose tout l'temps : mais que feront nos enfants quand il ne restera rien, que des ruines et la faim ? by anaëlle.
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Sujet: Re: Wild spirits (Isaiah) Sam 29 Oct 2016 - 13:25
Elle, elle n'a pas vécu le séisme. Elle est passé par ses propres problèmes, a été trop occupée par ses propres démons que pour se soucier du fait qu'une fois débarquée, le sol pourrait s'écrouler sous ses pieds. Non pas qu'elle s'en fiche, Hazel a évidemment remarquer les craquelures sur le sol, les affiches de personnes portées disparues. Sauf que pour elle, toute cette situation n'est qu'abstraite. Elle ne connait personne à part Nolan, et sa sécurité est tout ce qui lui importait. Et puis, Hazel, elle plane bien trop. Tout le temps même. Elle n'arrive plus à faire un avec la réalité, elle est trop perchée que pour réaliser ce qu'il s'est réellement passé. Elle enjambe la vérité, cache ce qui pourrait lui faire peur et se contente de vivre avec ce qu'on lui a laissé. Elle a déjà trop fui que pour recommencer. Le réponse de cet homme à qui elle vient de demander du feu la fait doucement sourire. Peut-être la prend-il pour une folle, à se cramer alors qu'autour d'eux la population entière tente péniblement de reprendre un train de vie normal. Sauf qu'après tout, elle n'en a absolument rien à faire. « Quinze minutes, c'est largement assez pour moi. » Elle plante son regard dans celui de l'inconnu, cherchant sans trop s'en rendre compte à le faire accepter. En réalité, elle en a besoin de ce joint. Elle n'est qu'une junkie, une pauvre victime de la drogue poussée à trop haute consommation. Et ça lui plaît, ça la fait se sentir bien, vivante. « Et puis au moins, ça te fera un peu de compagnie. C'est toujours plus amusant de fumer à deux que tout seul, non ? » Hazel hausse un sourcil. Elle n'a que trop souvent fumé seule, accoudée à la fenêtre de sa chambre pourrie, dans un motel tout aussi minable. Elle n'a pas d'argent, rien d'autre que son tabac et ses compléments. Avec toujours ce sourire insistant aux lèvres, elle lève son joint qu'elle tient entre deux doigts et le secoue au nez de l'homme.
En effet, pour des gens comme eux, pour des gens qui ne viennent ici que pour s’envoyer plus haut dans les airs, pour se brouiller la vue mais surtout l’esprit par des fumées étourdissantes, quinze minutes, c’était largement suffisant. Il ne leur en fallait pas plus pour que ce petit bâton blancs aux formes irrégulières mais à l’odeur si particulière se consume entre leurs doigts. Pour qu’ils se consument eux-mêmes à leur tour, se tuant l’âme à petit feu. Isaiah ne l’avait jamais vu de la sorte auparavant, et pourtant, ce soir, c’était l’impression qu’il semblait avoir de son occupation principale. Parce qu’il n’avait, pour une fois, aucun plaisir associé. Aucune joie légère qui en découlait. Plus la fumée emprisonnait ses poumons, plus le noir prenait le dessus. À l’intérieur comme à l’extérieur. « Pour moi aussi. » Il lui sourit, faiblement, les yeux brillants d’une lueur presque imperceptible, lui qui avait habituellement des étoiles dans les yeux, s’émerveillant devant n’importe qui, n’importe quoi. La jeune femme reprit la parole, parlant de compagnie et d’amusement partagé. Il hocha la tête. Probablement était-ce effectivement mieux pour lui que cette jeune femme lui tienne compagnie. Il risquait moins de tomber dans un sentiment de médiocrité et de détresse émotionnelle ingérable. Isaiah n’avait jamais vraiment eu à faire face à ce genre de démons, lui qui n’avait toujours eu qu’à plier bagage et foutre le camp de n’importe où pour s’évader de lui-même. Ici, à Bowen, et il l’avait compris depuis quelques mois maintenant : il avait entamé un chapitre de sa vie qu’il n’était pas prêt à écrire. La routine, le quotidien, les mêmes choses encore et encore, jour après jour. Les mêmes visages. Les mêmes histoires. Les mêmes décors. Il avait l’impression d’être devenu spectateur de sa propre vie. Et le séisme n’avait en rien aidé à son sentiment d’impuissance face à sa propre existence. Il avait réalisé que son attachement à Bowen était bien plus grand que ce qu’il aurait pu imaginer. À ses habitants, aussi. « C’est sûr que n’importe quel bonheur est plus vrai quand il est partagé. » Il désigna alors le joint entre ses doigts, qu’il porta doucement à ses lèvres. « Et ça, c’est tout un petit bout de bonheur. » Il tira sur son joint et laissa la fumée s’emparer de tout son être, embrumant ses pensées, laissant de côté ce qui le tourmentait, ce qui le tétanisait. « Et oui, je l’admets, c’était une réplique de film. Le truc du bonheur partagé. » C’était sans doute les effets secondaires de bosser pour Arthur. Isaiah commençait à baser ses sages paroles sur celles d’un script trop bien peaufiné.
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moi je traîne dans ma remorque, tous les excès d'mon époque. la surabondance surgelée, shootée, suremballée. pendant qu'les vœux pieux passent dans l'beurre, que notre insouciance est repue, c'est dans le fond des containers que pourront pourrir les surplus. la question qu'j'me pose tout l'temps : mais que feront nos enfants quand il ne restera rien, que des ruines et la faim ? by anaëlle.
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Sujet: Re: Wild spirits (Isaiah) Mer 23 Nov 2016 - 14:11
Trop souvent, il lui arrive de ne plus se sentir humaine. Différente de tous ceux qui l'entourent, totalement détachée de la réalité dans laquelle ils sont tous plongées. Hazel, elle ne sait plus qui elle est. Ce qu'elle est censée faire, censée dire, comment agir pour enfin faire quelque chose de bien dans sa vie. Elle s'est trop raccrochée à ces petites choses nocives que sont les différentes drogues, l'alcool, les jeux nocturnes, tout ce qui lui a permi d'oublier sa situation. Une moins que rien. Orpheline, déjà rejetée à peine née. Danseuse dans un foutu cabaret, un endroit qu'elle a autrefois aimé, mais où on l'a bien trop souvent traitée de traînée. Elle n'a jamais eu confiance en elle, ne s'est jamais sentie capable de faire quoi que ce soit. Alors elle fume, encore et encore. Elle fait comme si rien ne l’atteignait, comme si pour elle, la vie n'était qu'un détail. Comme un réflexe, elle sourit à son tour devant le visage chaleureux de l'homme en face d'elle. Elle tire sur son joint, bloque sa respiration quelques secondes pour sentir ses effets se propager dans tout son corps, puis expire. La fumée s'envole vers le ciel étoilé et Hazel la regarde partir avant de reposer son attention sur l'inconnu. À ses paroles, elle ne peut qu'acquiescer. Inconsciemment, il lui remémore Nolan. Ce qu'elle aimerait partager son bonheur, vivre à ses cotés comme si jamais ils n'avaient été séparés. Rien que de penser à lui, elle sent ses lèvres trembler et tire une nouvelle fois sur son joint pour ne plus y penser. Le joint, un bout de bonheur ? Elle n'en sait trop rien. C'est vrai qu'elle s'est toujours sentie bien grâce à ces petits bâtons magiques, sauf que plus elle augmente la dose, plus la redescente aux enfers est douloureuses. Elle méditait sur cette phrase lorsque la suite de ses mots la font pouffer de rire de manière incontrôlable. « Je n'ai même pas reconnu, si tu ne l'avais pas dit j'aurais certainement pu avoir beaucoup d'admiration pour ton talent de poète. » Elle hausse un sourcil, tenant son joint entre deux doigts, alors qu'un sourire étire toujours ses lèvres. Ça fait longtemps qu'elle n'a plus ri. Ces derniers mois ont été douloureux pour elle, difficiles, et surtout très longs. Ça lui fait du bien d'enfin se vider la tête avec quelqu'un d'autre qu'elle-même. « Je m'appelle Hazel, » dit-elle en espérant qu'il se présente lui aussi.
Personne n’est censé dire ou faire quoi que ce soit, ça, c’est la façon de penser d’Isaiah. Lui se laisse vivre comme bon lui semble, sans se poser mille et une questions sur ce que les gens penseraient de lui, sur ce que la société attend de lui, sur son but dans ce monde ou whatever reason de se remettre en question. Être soi, c’était justement d’agir sans réfléchir à travers le regard des autres. Certes, Isaiah ne cautionnait pas forcément les actes comme prendre de la drogue pour s’oublier, parce que justement s’oublier mettait un frein à l’existence du soi. On se rayait de sa propre vie pour mieux respirer. Pourtant, ce soir, c’était ce que l’artiste faisait. D’une façon soft, certes, avec des joints inoffensifs qui l’étaient de moins en moins plus il en fumait. Son objectif n’était pas de s’oublier lui par contre, mais d’oublier tout le reste. Toutes les injustices de ce monde. Du coin de l’œil, Isaiah regarda la jeune femme expirer la fumée et la regarder s’envoler vers le ciel sans rien dire. Elle était belle, baignée de la lumière de la lune. Depuis qu’Isaiah était avec Ezekielle, même s’il vivait des plus beaux moments de sa vie, il s’ennuyait aussi du temps où il restait éveillé toute une nuit à parler à des inconnus, sans se faire attendre par quelqu’un dans son lit. De s’en aller n’importe où, avec n’importe qui, sans se soucier du reste. Ce soir, Isaiah avait besoin de ça. Il avait besoin de cette fille. Cette fille et son rire cristallin quand elle l’entendit justifier sa réplique de film. La voir pouffer de rire le fit tousser de bonheur à son tour, alors qu’il venait de tirer sur son joint et que la fumée l’étouffa dans son rire. « Fuck, j’ai raté ma chance de t’impressionner. » Il sourit en la regardant. Tous les deux se faisaient du bien, c’était évident, ça en crevait les yeux, alors qu’ils ne se parlaient que depuis deux minutes à tout casser. Elle se présenta alors, sous le doux prénom de Hazel. « Je m’appelle Isaiah. » Répondit-il sur le même ton. Il avait terminé son joint, alors après en avoir disposé, il se tourna vers la demoiselle. « Je sais que ça va avoir l’air franchement louche comme invitation mais … j’prévoyais pas rester ici toute la nuit, mais j’avoue que j’ai pas envie de te planter là non plus. Tu m’suivrais, même si je sais pas trop où je vais ? » Et de par ses paroles, de par son regard, on comprenait fort bien qu’il ne parlait pas forcément du chemin dans les rues de Bowen, mais bien du chemin dans sa vie en général.
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