horror movies are psychic -r.

Ta vie tournait un peu en rond, tu avais l'impression d'avoir perdu le sens de celle-ci, comme si tu ne savais pas quoi faire de tes journées. Il n'y avait que le week-end que tu attendais avec impatience parce qu'Aby pouvait venir parfois. Mais en dehors de ça, tu te refermais sur toi, passant le plus clair de ton temps dans ton bureau où tu dessinais encore et encore. Tu avais besoin de te changer les idées, besoin de faire autre chose. Tu avais opté pour le cinéma, ce n'était pas forcément ce que tu pouvais faire de mieux, mais au moins tu serais pris dans un film pour au moins deux heures. Deux heures sans pensées noires. Deux heures à avoir peur puisque tu avais aussi choisi de retenter l'expérience. Une fois ta place acheté et les popcorns en main, tu entrais dans la salle, cherchant une personne pour t'asseoir non loin. « Je peux.. » Tu n'avais même pas fini ta phrase qu'un sourire se dessinait sur ton visage. Ça pour une surprise, ça en était une. Et pas une petite. La dernière fois que tu avais vu cette blonde c'était dans cette salle il y a à peu près six mois de ça. Et encore, ta mémoire te jouait peut-être des tours puisqu'entre temps tu avais subi une période à blanc. « Oh, c'est vous ! » Tu prenais place à ses côtés sans plus attendre. Tu aurais aimé la saluer d'une autre manière mais tu n'étais pas capable de te souvenir de son prénom. Peut-être pour la simple et bonne raison qu'elle ne te l'avais jamais donné. A vrai dire, même ça tu n'en avais pas un grand souvenir. Tu te souvenais de sa fuite, de la boule de glace et de sa rougeur lorsqu'elle l'avait partagé avec toi, comme si elle était embarrassée qu'on puisse se faire des idées sur ce que vous étiez. « Vous tentez aussi de vaincre votre peur ? » demandais-tu calmement en jetant un coup d'oeil à la salle, qui une fois de plus était vide. Les films d'horreurs n'avait pas du succès ou c'était toi qui choisissais toujours un horaire médiocre ?

Vaincre ses peurs, c’était une belle étape. Elle avançait progressivement dans son but, par le meilleur ou le pire des moyens, elle ne voulait pas se juger, elle prendrait le temps de réflexion sur ses erreurs dans le futur, parce qu’il était grand, parce qu’elle ne voulait pas culpabiliser. Elle savait bien que dealer n’était pas bien, se droguer non plus, succomber non plus. Toujours est-il que dans ses peurs, il y avait les films d’horreur, parce que ce n’était pas toujours conseillé et parce qu’elle s’était toujours dit qu’elle ne supporterait pas d’avoir peur à cause d’un film. Mais après avoir vu le navet avec ses colocataires, elle s’était dit que ce n’était pas si pire, qu’elle pourrait largement s’asseoir dans un cinéma sans avoir une balle anti-stress et regarder un film en entier, sans fuir avant que la séance commence complètement. Elle s’avançait dans la salle, s’installant dans un endroit au hasard où elle pensait ne pas être embêtée, elle ne voudrait pas que quelqu’un la voit sursauter. Quelques instants plus tard, elle relevait les yeux vers un homme qui lui adressait la parole, son sourire innocent prenait une large place sur son visage. « Vous pouvez. » Elle le reconnaissait, cet homme avec qui elle avait failli regarder son tout premier film d’horreur, mais ils avaient préférés fuir à deux. Un peu lâche quand elle y pensait, mais c’était mieux comme ça. Il n’avait pas été qu’un simple homme encombrant qui s’installait à côté d’elle alors qu’il y avait une tonne de place dans la salle, il avait été un homme charmant et plus que sympathique. Même si la Grace de l’époque était toute timide et elle n’avait pas complètement changé sur ça aujourd’hui.  « On peut dire ça. » Elle accompagnait sa phrase d’un doux rire. « J’ai eu raison de ne pas venir accompagné, du coup. » Pas de sous-entendus étranges dans sa phrase, du moins à son sens. Elle avait pensé demander à quelqu’un, mais elle avait honte d’elle.

La jeune femme de la dernière fois. Pour un hasard, c'était un sacré hasard. Elle semblait t'avoir reconnu toi aussi et tu laissais un sourire se dessiner sur ton visage. Tu ne pouvais pas avoir une meilleure personne pour t'accompagner aujourd'hui. La dernière fois elle t'avait demandé comment était le film et ta réponse l'avait fait fuir. Sauf que tu n'avais pas eu plus le courage qu'elle de l'affronter et tu étais parti la rejoindre. Cette fois le film semblait moins sanglant, moins effrayant mais ça n'en restait pas moins un film d'horreur pour autant. Vous étiez que tous les deux dans la salle et tu n'avais pas l'impression qu'il y aurait une autre personne. « Et moi dont ! » Tu avais hésité a demandé à Jordan ou à Adilyn si elle voulait bien t'accompagner pour cette fois. Mais pour la première tu avais une relation assez professionnelle et tu ne voulais pas l'engager un peu plus dans ta vie, alors que pour la seconde tu aurais aimé l'avoir à tes côtés mais elle en avait décidé autrement. Alors tu faisais avec, en prenant la décision d'affronter ça tout seul par exemple. Bien que maintenant, tu ne l'étais plus. « Je sens que cette fois c'est la bonne ! » ajoutais-tu à son attention. Tu avais tout de même une grande appréhension et la chair de poule, que tu essayais de masquer pour ne pas la faire encore partir avant le début du film. « Voulez-vous un peu de pop-corn ? » proposais-tu en lui tendant ton pot.

Après tout, seule dans cette salle, elle aurait pu s'enfuir sans vraiment se soucier d'avoir un regard sur elle. Mais elle voulait rester jusqu'au bout cette fois, elle ne bougerait pas de son siège tant que le générique de fin ne serait pas sur cet écran. Et elle souriait quand il disait qu'il n'était pas déçu d'être venu seul, Grace se sentait flattée et plutôt heureuse de se dire qu'il avait appréciée sa compagnie il y a quelques mois de ça. Tout comme elle avait pu l'apprécier malgré sa timidité qui était revenue assez vite, gâchant la fin de la soirée, si ce n'est qu'elle l'avait déjà gâchée dès le début à son sens. Mais elle manquait terriblement de confiance en soi, peut-être que Xavier pensait le contraire d'elle. Elle essayait toujours de se dire que les gens ne pensaient pas que du mal d'elle, mais c'était bien trop difficile. « Je l'espère aussi ! » Disait-elle avec un air toute enjouée, comme une gamine qui regarderait son premier film non-animé en compagnie de son copain de classe. Sauf qu'ici, Grace était bien plus grand, qu'elle ne connaissait pas plus que ça l'homme à côté d'elle — elle ne connaissait même pas son prénom à lui ou alors elle l'avait oubliée et elle s'en voulait pour ça — et que c'était un film d'horreur qu'elle allait voir. Elle ne s'était pas renseignée plus que ça sur le film, seulement que c'était un film qui faisait peur ; c'était suffisant. Et vu qu'elle n'avait que ça à faire de ses journées, partir au cinéma et vendre de la drogue, elle n'allait pas se priver. « Non merci, je ne veux pas abuser de votre gentillesse. » Elle continuait de sourire innocemment, ses joues un peu rougis à cause de tout mélangé. « Finalement ... juste un. » Elle prenait le plus délicatement possible un pop-corn, ne voulait pas tout faire renverser, parce qu'elle ne voulait pas se montrer maladroite. « Je n'ai jamais été dans une salle où il n'y avait personne. » Elle regardait un peu partout où ses yeux pouvaient atteindre. « Soit le film n'est pas un chef-d'oeuvre, soit il fait trop peur ou soit c'est un parfait horaire pour être tranquille. » Grace essayait de se dire ça, pour ne pas penser qu'elle n'avait jamais non plus été seule plus de deux heures avec un autre homme si on enlevait Léo de la liste. Et même si elle était persuadée que cet homme-ci ne lui voulait pas de mal, ça l'intimidait.

Tu la détaillais un long moment du regard, cherchant à retenir tous les traits de son visage, tu essayais de te souvenir d'elle, de voir si elle avait un peu changé dans ses mimiques, dans sa manière de te parler mais tu étais toujours aussi mauvais pour les détails. Tu te contentais de lui sourire, de lui proposer de manger un petit truc mais elle s'empressait de refuser. « Si je vous le propose c'est que ça me fait plaisir. » Tu essayais de la convaincre, même si tu ne semblais pas convaincu. Finalement, elle changeait d'avis, au moins pour un pop-corn. Ça te faisait penser à la pub pour les Granola, on ne peut pas s'arrêter à un. Ou alors comme pour les graines de tournesol, c'est addictif, on en mange une, puis une autre et on termine le paquet en un rien de temps. « Laissez-vous tenter, ils sont succulents ! » Tu lui mets le paquet sous le nez pour qu'elle se laisse tenter plus d'une fois. Tu en attrapes quelques uns de ta main libre, les portant ensuite à ta bouche, un sourire ravi sur le visage. Tu avais l'impression d'être un enfant au paradis. « La dernière fois, il n'y avait pas foule non plus, si ma mémoire est bonne. » Tu te souviens d'avoir vu un homme trois rangées plus haut que la sienne. Aujourd'hui, il n'y avait que vous, mais ça te semblait bien aussi. Au moins si vous vous mettiez à parler en plein milieu de la séance, il n'y aurait personne pour vous demander de faire moins de bruit, personne pour râler ou vous menacer d'appeler la sécurité. « J'aurais tendance à opter pour la troisième option. » Tu avais pris le temps de lire les critiques sur le film, ce n'était pas un grand classique et certains se demandaient même pourquoi il était catégorisé comme horreur puisqu'il faisait à peine peur. Certes, ce n'était pas digne de Chucky ou de La Colline à des yeux, mais pour toi, c'était déjà un bon début pour te lancer dans les récits qui font peur. Puis c'était aussi un horaire calme, la plupart des gens à cette heure là étaient au boulot.

Elle était toujours fixée sur le fait que les gens se sentiraient toujours forcé en face d'elle, parce que les mois avaient passés, mais la confiance en elle était toujours aussi basse. Ça dépendait de l'instant, elle se sentait plutôt confiante quand elle dealait, quand elle était devant des gens un peu plus “normaux” elle se sentait mal à l'aise. « Oh bah … Merci. » Soufflait-elle avec un sourire timide aux lèvres, elle se sentait comme une enfant à qui on offrait un cadeau, gênée. Elle riait presque quand il vendait ses pop-corn comme si c'était lui qui les avait créee. Enfin, c'était ce qu'elle pensait, pas ce qu'il disait forcément. Mais le fait qu'il mette ça sous son nez lui donnait envie, même si elle n'avait pas vraiment faim, elle n'avait pas besoin de plus qu'un. C'était pour lui faire plaisir et elle pensait bien trop à l'imagine du couple que ça renvoyait, deux personnes qui se partageaient du pop-corn dans un cinéma. Dans les clichés c'était ainsi, donc dans la tête de la blonde, c'était de même. Et cet homme, elle ne le connaissait pas, même pas de prénom. « Non plus ! » C'était toujours aussi vide et ça faisait plaisir à Grace plus qu'autre chose, parce qu'elle n'aimait pas la foule de peur du jugement des autres, puis elle si elle voulait partir, ça n'embêterait pas trop de gens. Mais en l'occurrence ici, il n'y avait que l'homme à embêter, donc elle se sentait un peu mal. Mais cette fois, elle ne voulait pas partir parce qu'il y avait une flaque de sang. « Très bien. » Elle lui souriait de nouveau, tournant ses yeux vers l'écran géant. « Je ne sais même pas de quoi ça parle ... » Elle étouffait un rire en s'installant plus confortablement dans son fauteuil alors que quelques lumières ne brillaient déjà plus.Quelques petites minutes la séparaient d'elle et le film, maintenant. Grace se disait que si elle ne voulait pas voir une scène, elle n'aurait qu'à fermer les yeux discrètement et penser à autre chose, que ce soit plus fort que le son qui pénétrerait ses tympans. Et de toute manière, cet homme aurait mieux à faire que la regarder elle pendant le film, alors elle pouvait s'agiter tant qu'elle voulait que ça ne changerait rien. C'était uniquement ce qu'elle pensait. « Je suppose que maintenant je ne peux plus reculer ! » Elle retournait sa tête vers lui, regard amusé.  

Tu la regardais approcher sa main de ton paquet pour en prendre un, un sourire se dessinait sur ton visage. Une sourire heureux puisque tu avais réussi à la faire craquer. Tu avais l'impression d'être la tentation, de la pousser à pêcher. Tu ne connaissais pas son histoire et c'était un plus pour toi parce que si c'était le cas, tu ne te serais jamais comporté de cette façon. « C'est peut-être un signe. » Après un signe de quoi, là tu ne pourrais le dire. Tu n'étais pas bon pour les interpréter, encore moins pour les voir. Tu avais dis ça parce que ça te faisait rire que sur les deux séances que tu choisis et où tu te retrouves avec elle, la salle est vide. Comme si c'était un signe. Tu n'arriverais pas à te mettre autre chose dans la tête maintenant mais tu ne pourrais pas aller plus loin dans ton explication. « Oh ça je peux vous le dire, j'ai lu plusieurs fois le résumé, cherché toutes les critiques possibles pour essayer de me faire une idée. » Tu n'avais pas vraiment réussi d'ailleurs. Comme pour tout, les avis étaient partagés. Pour certains c'était un grand film, pour d'autres, un véritable navet qui ne mérite pas qu'on paye pour ça. Tu avais pris la décision de te forger ta propre opinion et de tenter le coup. Au mieux tu serais déçu mais pas effrayé, au pire, tu regretterais ta décision. Les lumières venaient de s'éteindre et tu l'entendais une nouvelle s'adresser à toi. Tu tournais ton visage vers elle. « C'est la bonne. » En tout cas, tu voulais y croire. Et puis vous n'étiez que deux, si jamais ça venait à être trop difficile, vous pourrez partir en plein milieu de la séance, personne n'en saura jamais rien. Mais il ne fallait pas penser à ça, il fallait te concentrer sur l'écran, sur le film qui commençait.

Signe que le film était mauvais ou qu'il faisait peur ? Ou qu'ils allaient se retrouver ? Sur l'instant, elle ne savait pas comment interpréter cette phrase, mais elle semblait un peu intimidé par lui. Elle était presque intimidée par toutes les bonnes personnes qui lui passaient à côté, du moins, qu'elle jugeait bonne et même si ses jugements étaient faux la plupart du temps, elle avait assez confiance en cette personne pour rester dans une salle sombre à côté de lui pendant le temps d'un film. Et venant de la blonde timide, c'était déjà beaucoup. Elle était presque certaine que si ça avait été un autre homme à venir se poser à côté d'elle, elle aurait sans doute pris la fuite une deuxième fois pour ce film. Et elle se serait dit que c'était le destin qui ne voulait pas qu'elle le regarde après tout. « Je pense que je regrette de ne pas m'être préparée plus tôt à ça. » Disait-elle doucement dans un rire, tournant son regard vers lui. Elle espérait que ça n'allait pas être trop traumatisant en fait, parce qu'elle n'était pas le genre de personne à faire des cauchemars, mais quand elle en faisant, c'était bien plus violents qu'elle ne le pensait. Maintenant si elle se mettait à regarder des films d'horreur, ça n'allait pas aller en s'arrangeant. Les lumières s'éteignaient bien trop rapidement à son goût, mais c'était sans doute parce qu'elle n'était pas aussi prête qu'elle le laissait croire.« Si je vous accroche le bras pendant le film … je m'excuse d'avance. » Une nouvelle fois, ses pommettes remontaient quand son sourire s'élargissait. Puis elle se concentrait sur les images qui défilaient à l'écran. Elle n'espérait pas être une partenaire de film trop dérangeante, elle savait qu'elle ne parlait pas beaucoup ou justement c'était l'inverse. Une vraie pipelette quand elle était en présence quelques amies et bien trop silencieuse quand elle était avec des inconnus ou simplement des gens moins proches, elle s'effaçait quitte à ce qu'on oublie sa présence. Et c'était exactement ce qu'elle faisait jusqu'à ce que les premières images qui faisaient frisonner apparaissaient à l'écran. La blonde glissait sa main sur l'accoudoir et pour ne pas embêter directement l'homme à ses côtés, elle préférait piocher dans ses pop-corns. Comme si ça allait la détendre, la déstresser. Pas vraiment.  

Tu aurais peut-être du faire comme elle et ne pas chercher à te renseigner sur le film mais ça avait été plus fort que toi. Tu t'étais dit que si tu savais à quoi t'attendre, tu aurais moins peur, tu avais pensé que ça pourrait t'aider à affronter la séance en entier. Au final c'était sûrement que du bullshit. Tu pourrais rester là parce qu'elle était là mais si elle venait à partir au cours de la séance, tu n'étais pas certain d'y rester jusqu'à la fin toi aussi. « Ne le soyez pas, j'suis presque là pour ça ! » ajoutais-tu en rigolant. Tu apportais le popo-corn et ton bras si elle avait besoin de l'accrocher. Tu n'y voyais aucun mal, tu lui aurais bien pris la main pour la serrer au cas où tu aurais eu peur mais tu ne voulais pas la conduire aux urgences parce que tu lui aurais broyé les os de la main. Tu n'aurais qu'à faire comme dans les films, sursauter en jetant tes pop-corn un peu partout et crier avec une voix un peu trop aiguë pour qu'on pense que c'est la tienne. En l’occurrence, ce ne serait pas trop difficile à deviner puisque vous étiez que tous les deux dans la salle. Le film commençait assez doucement, pas de sang, pas d'images trop violentes. Une famille heureuse, du moins en apparence parce que ça n'allait pas durer longtemps d'après ce que tu avais lu. Il y avait Nicholson dans le film et tu t'estimais heureux que ce ne soit pas Shining parce que tu n'aurais vraiment pas supporté le film. Nicholson était vraiment un psychopathe dans le rôle du père. Là il n'a qu'un léger rôle secondaire, mais son visage ne te plait tout de même pas. Tu fermes doucement les yeux en sentant que la scène allait devenir un peu plus violente. Tu avais bien fait, au son, tu n'aimais pas ce que tu entendais. Tu avais gardé les yeux clos. La main de ta voisine était venue piocher quelques pop-corn, ce qui te faisait sourire parce que tu l'imaginais plus courageuse que toi. Tu avais fini par ouvrir les yeux pour regarder ce qu'il se passait, lui jetant un coup d'oeil rapide. Vu l'expression de son visage, elle n'était pas tellement plus sereine que toi.

Grace aller regarder un genre de film qu'elle n'aimait pas, qui l'effrayait, qu'elle s'était interdit de voir pendant des années. C'était presque impossible à imaginer. Pourtant, elle se tenait dans son siège, à côté de son partenaire de film, celui qui par le destin se trouvait toujours là quand elle s'apprêtait à regard un film d'horreur, comme s'ils étaient connectés. Ou peut-être bien que c'était Lui, qui l'envoyait, peut-être qu'il était une sorte de bonne personne et qu'à chaque fois qu'elle serait pas bien, il ne se trouverait pas loin. Elle s'imaginait, trouvant ça amusant, un large sourire apparaissait sur son visage alors que la salle s'obscurcit. Tous les deux dans le noir, face au grand écran qui semblait, vu leurs réactions la dernière fois qu'ils étaient venus, être un démon. Elle sentait comme un sentiment étrange la prendre à la gorge, l'angoisse, c'était bien l'ambiance que voulait le film, mais elle, elle était un peu trop en avance. Rien qu'un écran noir et savoir qu'il n'allait pas se passer que des bonnes choses dans le film la mettait dans cet état. Même si elle essayerait de garder un minimum son calme, parce qu'elle ne voulait pas avoir une mauvaise image suite à ce film. Parce que oui, ce n'était qu'un film, il fallait qu'elle se rentre ça dans la tête, ce n'était que des images jouées, tout le monde est censé aller bien après le tournage. Et rien n'allait sauter de l'écran non plus. Elle soufflait, se sentant un peu stupide d'avoir peur d'un film, du coup. Les minutes passèrent, finalement, elle se détendait à la vue d'un film qui avait l'air moins monstrueux qu'elle ne pensait. Sa main se perdait pour aller piocher quelques pop-corns, alors que la séquence du film s'envenimait, mais qu'elle n'arrivait pas à détourner les yeux, bien que toute son âme n'avait pas envie de voir du sang et tout le reste. Elle en frissonnait, mangeant son pop-corn tout en détournant les yeux vers son camarade, écorchant un sourire qui se voulait confiant. Horrible. Elle détournait aussitôt la tête, continuer de regarder le film, essayant de détourner les yeux à chaque fois qu’il y avait une scène qui s’approchait un peu trop du sinistre. Et même quand il n’y avait rien, elle préférait détourner la tête, presque inconsciemment sa main se glissait contre le bras de son partenaire. « Si … si ça vous dérange, dites le moi. » Bien qu’il avait affirmer que ça ne le dérangeait pas, elle n’en était jamais sûre, entre la parole et l’acte, il y avait une large différence.

Spoiler:

Le film avait commencé, tu avais caché tes yeux dès le début du film. Une fois la musique calmée, tu jetais un coup d’œil à la toile pour essayer de prendre les quelques secondes où il n'y aurait pas la moindre violence. Pas de sang qui gicle, pas de tête qui roule, pas de bras arraché. Dès que la musique augmentait son rythme, tu te cachais les yeux. A côté de toi, la jeune femme plongeait sa main dans tes popcorns, même toi tu n'avais plus d'appétit. Tu étais bien content qu'elle se fasse plaisir et qu'elle mange comme elle en a envie. Au moins, ça serait ça en moins de perdu. Sa main s'approchait de ton bras, l'attrapant doucement. Tu détournais le regard vers elle lorsque tu l'entendais parler. Elle te demandait de lui dire si ça te dérangeait, comme ce n'était pas le cas, tu lui offris un léger sourire en secouant la tête de façon négative. Tu ne savais pas si elle avait pu te voir puisque le film était assez sombre, mais il y avait parfois des scènes en plein jour. Pas longtemps puisque tu fermais les yeux et après on se retrouvait dans une maison flippante ou dans un champ en pleine nuit. Rien de plus flippant que les champs de maïs. Il s'y passait toujours quelque chose d'horrible. Le générique défilait à l'écran, les lumières se rallumaient. Tu tournais une dernière fois ton regard vers elle. « Je ne pensais pas tenir jusqu'au bout. » Tu ne savais pas si tu étais heureux ou non d'avoir fait ça. Tu savais juste pour l'instant que tu n'avais pas compris le film mais en même temps, tu avais les yeux fermés pendant plus de la moitié donc tu n'avais pas pu saisir qui était mort et comment. Ce qui était assez important dans un film. Tu n'étais pas trop surpris au final. Tu te levais, prenant le chemin de la sortie avec la jeune femme. « Alors, qu'en avez-vous pensé ? » demandais-tu doucement. Tu avais une idée qui te traversait l'esprit. Tu réalisais que tu ne connaissais pas son prénom. Tu refaisais le fil de votre conversation, ainsi que celle de l'autre fois et jamais il n'avait été dit. Mais toi non plus, pas une fois tu ne lui avais dit le tien. Un tort que tu voulais réparer. « D'ailleurs, je réalise que je ne me suis pas présenté à vous, je suis Xavier. » Tu étirais un léger sourire sur ton visage.

Ses yeux rivés sur l’écran, les images défilaient pour l’heure qui suivait, elle essayait de ne pas fermer les paupières. Comme si elle se sentait dans un combat contre elle-même, contre ses peurs depuis le début, un regard ailleurs et elle se faisait tuer, ici, c’était plus un regard ailleurs et ça prouvait qu’elle n’était pas si tenace que ça. Elle n’avait pas vu de mort, mais elle avait déjà vu des gens se faire tabasser jusqu’au sang, jusqu’à n’en plus avoir conscience. Rien que cette pensée l’attristait, elle qui rêvait d’un monde sans guerre, un monde sans larme pour des blessés. Au cinéma ce n’était qu’un film, mais les détails ne manquaient pas, à croire que les scénaristes étaient des tueurs dans l’âme, ceux qui étaient cachés mais écrivaient tout ce qu’ils avaient fait ; rien que cette pensée l’effrayait en même tant que de l’amuser. Elle faisait bien de penser positif avec tout ce qu’il se passait à l’écran, le sang qui coulait, les cris, tout ce qui la repoussait. Et enfin, après toutes les émotions qui avaient défilés dans le crâne de Grace, le générique de fin. La sonnette qui annonçait la fin du calvaire. Elle était là et la blonde n’en était que contente. « Moi non plus ! » Disait-elle dans un maigre sourire, pas vraiment rassuré. Une main passait dans sa chevelure, frôlant sa joue chaude suite au stress. « J’pensais pas qu’on pouvait ressentir autant de peur devant un film, mais je dois être la plus grande des peureuses. » Bien sûr, ça n’avait pas été la plus grande peur de l’ancienne sainte, elle pourrait en énumérer plusieurs. Passer en garde-à-vue pour quelque chose qu’elle faisait vraiment, mais qu’elle le niait, c’était déjà plus angoissant pour la blonde. Ils se levèrent, prenant le pas vers la sortie. « Je ne sais pas trop quoi penser de ce film … Ce n’est pas un que j’irais revoir, déjà. » Elle se mise à rire légèrement en tournant son regard vers lui. « Et vous ? Il vous a plu ? » Grace n’avait pas prêté attention à son partenaire pendant le film, parce qu’elle ne voulait pas qu’il se sente jugé ou alors qu’il s’imagine quelque chose. Deux personnes seules dans une salle sombre, de cinéma ou non, ça pouvait donner des idées, enfin, pas à Grace. « Moi c’est Grace, ravie de connaître votre prénom, Xavier. » Elle n’y avait jamais apprêtée attention au fait qu’ils ne s’étaient jamais présentés, pourtant c’était bien une chose qu’elle faisait très souvent. « Ça me fait plaisir de vous avoir revu et surtout dans ce cinéma. » Une nouvelle fois, un rire s’échappait d’entre ses lèvres, c’était comme si le destin voulait qu’ils se retrouvent toujours dans la même pièce.

Sortir de là était une véritable libération, tu n'avais pas du tout aimé ce moment dans le noir, bien trop oppressant pour toi, par chance, tu n'étais pas tout seul. Même si tu n'avais pas eu l'occasion de parler avec ta voisine pendant le film, tu l'avais senti prendre des popcorn, à tenir ton bras. Tu ne savais pas si elle avait tout regardé, mais toi non. « Et moi le plus grand des peureux, vous avez quand même eu plus de courage que moi. » rigolais-tu doucement. Tu voulais savoir si elle avait aimé et ce n'était pas son cas. Tu ne te sentais pas seul au moins. « Honnêtement, je n’ai pas aimé. »  Pas du tout. Tu secouais la tête de façon négative. Tu aurais presque aimé ne pas le regarder, tu allais sûrement avoir des images qui reviendraient te hanter pendant ton sommeil. Ce ne serait jamais aussi pire que la nuit où tu étais devenu veuf. Ce n'était pas un film d'horreur, mais une vraie scène de torture pour toi et ce depuis trois ans. « Je crois que je ne retenterais pas l’aventure avant longtemps ! » Tu ne pensais pas remettre les pieds aussitôt dans un cinéma, même pour regarder un film joyeux. Tu avais un mauvais souvenir associé à cet endroit et tu ne voulais pas le raviver dans les jours à venir. Tu pourrais faire comme à l'époque, louer un dvd, acheter du maïs et faire une séance de ciné chez toi. Elle se présentait à son tour et tu laissais un sourire prendre place sur ton visage, murmurant que tu étais ravi aussi. Autant de connaître son prénom que de l'avoir revu en cette belle matinée. « Je vais devoir vous quitter, passez une bonne journée et peut-être à bientôt pour un nouveau film d’horreur ! » Tu lui faisais un petit clin d'oeil, accompagné d'un sourire, ce ne serait sûrement pas le cas ou alors le destin serait vraiment très amusant. Comme si vous étiez destinés à vous voir uniquement ici.

Ils faisaient un beau duo, avec les descriptions qu'ils donnaient. La peureuse et le peureux allant voir un film d'horreur pour surmonter quelque chose ou simplement s'occuper. Mais elle était fière d'elle, fière d'être restée assise à regarder l'écran même si c'était quelque chose d'anodin pour les autres et que sa fierté serait stupide aux yeux d'autres. Et pourtant, il portait à croire qu'ils se retrouveraient toujours dans une salle de cinéma devant un film d'horreur et à chaque fois qu'elle irait en voir un, elle regarderait dans la pièce voir si ce visage familier s'y trouve. Rien qu'imaginer ça donnait un léger sourire à Grace. « Peut-être que l'on n'a pas aimé parce qu'on n'était pas assez dans l'ambiance. » Elle haussait les épaules, riant simplement de l'avis qu'elle partageait avec lui, ce film, il n'était pas dans ceux qu'elle irait recommander à d'autres, même si elle recommandait ses films à personne, parce qu'elle ne voulait pas se faire juger sur ce qu'elle regardait. La blonde hochait de la tête, elle non plus, elle devait avoir rempli son contrat pour l'année, cette émotion qu'elle avait ressentie tout le long du film n'était pas le plus beau qu'elle pouvait ressentir. Et elle n'était pas le genre de personne à payer pour aller voir quelque chose qu'elle n'appréciait pas, bien qu'elle l'avait déjà fait une fois dans le passé et que c'était un échec. La troisième fois ne pourrait être que révélateur de si elle devait continuer à persister, se dire qu'elle pouvait aimer les films d'horreur ou non. « Nous ne nous reverrons pas avant longtemps dans ce cas. » Disait-elle dans un rire et même si c'était étrange de le dire parce qu'il était un homme vraiment sympathique, si les deux ne comptaient pas retourner dans les salles sombres pour ce genre de film, ils n'allaient pas se voir souvent. « Passez une belle journée, à une prochaine fois. » Elle ne s’éternisait pas plus longtemps, un dernier sourire, un dernier regard et ils se séparaient.