Lilygan ➳ discover the world

Son regard amusé se posa sur le visage de sa femme suite à sa réplique digne d’un film d’amour à l’eau de rose. Et d’ailleurs … « C’est pas à ce moment-là, dans le Titanic, que Rose glisse sur le tissu de sa robe et manque de tomber à l’eau ? » Il rigola, se moquant ouvertement de sa femme, même si ce n’était pas du tout méchamment. « On pourrait terminer de reproduire la scène en sautant en bungee, justement … Enfin, ça changerait un peu la scène originale, puisqu’on tomberait tous les deux … » Releva-t-il, ne sachant toujours pas s’il était sérieux ou pas face à sa propre proposition. Après la douche, les nouveaux mariés filèrent directement au parc en question, sans toutefois trop se presser. Ils s’étaient promis de ne pas faire de ce voyage un itinéraire surchargé et impossible à suivre sans s’arracher les cheveux de la tête. Ils n’auraient pas le temps de tout voir, ça, c’était une évidence. Aussi bien l’accepter dès le départ et profiter des attractions qu’ils visitaient sans se tracasser avec l’horaire. Les jardins étaient justement le meilleur endroit pour se vider l’esprit et ne penser à rien d’autre qu’à leur amour et à la beauté de l’endroit. Suite à une énième réflexion de Nelligan quant à la police ou les règlements du pays, Lily-Anaëlle lui posa une colle quant au système politique du Japon. Nelligan n’avait aucune culture, ce n’était pas nouveau. « Euh, je pense pas ? Enfin, je sais pas du tout, en fait … » Le doute s’installait dans son esprit et, en toute honnêteté, il aurait préféré pouvoir répondre à la négative sans hésiter. Se trouver dans un pays sous une dictature le rendrait assez mal à l’aise. Ils demeurèrent en silence un moment, par la suite, déambulant dans les sentiers, perdus dans leurs pensées. Nelligan avait finalement réussi à passer à une autre réflexion, plus zen. La simple vue du temple bouddhiste qu’ils croiseraient dans quelques minutes l’aidait d’ailleurs à atteindre la paix intérieure. Rien que la douce musique qui s’en dégageait et l’odeur d’encens qui atteignait déjà ses narines arrivaient à l’apaiser. « On rentre ? » Demanda-t-il à Lily-Anaëlle. Nelligan n’était pas le plus croyant des hommes, mais la spiritualité l’intéressait et le fascinait. Et puis, au cas où une divinité entendait ses prières, pourquoi ne pas mettre toutes les chances de leur côté en priant pour qu’un troisième petit bout d’humain se joigne à leur nouvelle famille ?

*sa proposition était tentante, tu devais admettre qu'elle te faisait rire. Même si c'était encore spécial. Tu imaginais très bien la scène du Titanic, un sourire se dessinait sur tes lèvres. Tu aimais tellement ce film qu'en faire un remake pourrait être un crime mais pourtant, tu ne peux t'empêcher d'être amusée par l'idée lancée par ton mari. « C'est une idée pas mal, je pense qu'on pourrait tenir un bon scénario là ! » En fait non, ce serait sûrement un pur navet. Qui voudrait voir un couple fraîchement marié tenter des expériences nouvelles juste pour dire de ne pas avoir de regrets par la suite ? Peut-être que si vous y mettiez les moyens, ça pourrait avoir un rendu plutôt potable, mais tu savais que même toi, tu ne regarderais pas ce genre de films. Mais la question s'arrêtait là. Puisque vous vous étiez habillés, tout beau, tout propre, prêt à partir à l'aventure, prêt à découvrir le monde dans lequel vous étiez plongé. Mais une question subsistait et malgré tout ça, vous ne sembliez pas avoir de réponse, l'un comme l'autre. « Tu crois qu'on pourra regarder sur wikipédia en rentrant à l'hôtel ? » murmurais-tu, comme si d'un coup, tu avais peur de tout ce que tu disais et de ce qui pourrait te porter préjudice. Tu parlais en anglais parce que tu ne parlais pas japonnais, mais tu imaginais bien une personne parlant diverses langues, capable de comprendre la première personne qui dirait du mal de son pays. Mais peut-être que tu étais dans une parano un peu trop poussée et que tu devais te calmer. Des policiers n'allaient pas débarquer dans la seconde pour vous arrêter. Tu laissais ses mauvaises pensées s'en aller avec sa question. « Oui ! » Tu avais très envie de découvrir les intérieurs d'un temple. Le jardin extérieur amenait une certaine paix, un sentiment de bien-être qui enveloppait tout le corps. Si c'était comme ça à l'extérieur, tu avais envie de découvrir ce qui se passerait une fois les portes du temple passées.

L’idée de joindre le Titanic et le saut en bungee semblait abaisser d’un cran le niveau de nervosité du couple. Comme si l’humour lié à cette proposition allait rendre l’expérience moins dangereuse, moins intense. Une fois sur place, tous les deux allaient rapidement changer d’avis, Nelligan en était persuadé. Ce serait à ce moment-là qu’ils allaient devoir faire de grands efforts pour aller contre leur nature, et s’élancer dans leur nouvelle vie. C’était une belle métaphore, quand même. Ils pourraient dormir là-dessus, et décider de s’ils se rendaient au point de l’attraction ou non. Ils avaient bien des journées encore devant eux pour ça. Pour le moment, ils déambulaient dans ces magnifiques jardins et songeaient encore au système politique du pays dans lequel ils se trouvaient. Sans doute auraient-ils dû faire des recherches avant de venir, sans doute auraient-ils dû être informés un minimum, question de ne pas devenir paranoïaques comme ils le faisaient présentement. « Oui, on ira. Je pense que ça pourra nous rassurer. » Dit-il avec un sourire, même si ça pouvait également avoir l’effet totalement contraire. « De toute façon, peu importe, on devra rester ici, hein. Et profiter de notre lune de miel comme on le pourra. » Il passa son bras autour des épaules de son épouse et la serra légèrement contre lui, pour la rassurer, même si toutes ces discussions l’avaient lui aussi plongé dans le doute. Il trouva la visite parfaite pour leur changer les idées : un temple bouddhiste, tout au bout du sentier. Ils se rendirent jusqu’à la pagode et, à l’intérieur, ils furent confrontés à une explosion de couleurs et de grandeurs. Au fond de la salle, droit devant eux, s’élevait une grosse statue de Bouddha. À voix très basse, Nelligan se pencha vers Lily pour lui murmurer : « C’est majestueux. » Sans plus tarder, il s’avança entre les rangées où certains japonais et même des moines étaient assis sur des coussins ronds posés au sol. Ils semblaient prier. Nelligan tourna la tête vers Lily-Anaëlle et lui fit signe de le suivre. Il trouva deux coussins libres, un à côté de l’autre, et il l’invita à s’asseoir avec lui. Il leva les yeux vers l’immense statue, essayant de ressentir son pouvoir sur lui, et ferma finalement les yeux, se laissant submerger par la tranquillité des lieux. Il se surprit même, main dans la main avec sa femme, à prier pour eux, pour leur famille à venir, pour cette vie qui les attendait.

Il t'attirait à lui, serrant tes épaules contre les tiennes. Ce contact était rassurant. Tu avais l'impression de pouvoir laisser s'envoler toutes tes s craintes, tes peurs. Même si c'était un pays totalitaire, il ne fallait pas laisser les mauvaises idées vous gagner. Après tout, il fallait apprendre à connaître la culture avant de se permettre de la juger. Et de ce que tu voyais, tu appréciais beaucoup. « Oui, je crois qu'on ne devrait pas se prendre la tête maintenant. » Tu laisses un sourire se dessiner sur ton visage. Ta main dans la sienne, tu le laisses entamer la marche, juste à côté de lui. Tu perds ton regard de tout les côtés, parce qu'il y avait encore beaucoup trop de choses à voir, à découvrir. Jusqu'à arriver devant une statue de Bouddha géante. Elle était en pierre, mais il y avait tellement de détails. Sans compter le fait que ça avait des années d'existences, au moins des milliers, ce qui était assez impressionnant quand on y pense. « C'est à couper le souffle ! » soufflais-tu à ton mari, presque aussi inaudible que lui. Tu ne voulais pas troubler le silence qui s'était imposé dans ces murs. Mais ce n'était pas un silence pesant, au contraire, c'était presque tentant. D'ailleurs, lorsqu'il t'invitait à venir t'installer avec lui. Tu t'asseyais dans un silence, surprise de ne pas avoir fait le moindre bruit, toi qui est toujours si maladroite. Tu fermais les yeux, pensant à ce que tu voulais prier. Tu priais pour ta mère, espérant qu'où qu'elle se trouve aujourd'hui, elle reposait en paix. Tu priais pour ton père, pour qu'il puisse un jour trouver un donneur compatible, même si vous nouerais jamais de relation. Tu priais pour ton couple, pour que vous finissiez vos jours heureux comme vous vous l'étiez promis le jour de vos noces. Et tu priais aussi pour qu'un enfant en bonne santé voit rapidement le jour dans votre couple. « C'était si zen, si intense. » murmurais-tu une fois que vous étiez sorti. Un silence de plomb régnait partout dans le temple, tu ne voulais toujours pas le briser. « Tu crois qu'on devrait faire ça plus souvent en rentrant à la maison ? » osais-tu demander à voix haute une fois de retour à l'extérieur du temple.

Ayant décidé de laisser de côté leurs craintes à propos du régime politique du pays, Nelligan et Lily-Anaëlle poursuivirent leur route jusqu'à un temple bouddhiste qui déjà de l'extérieur semblait si beau et paisible. De l'intérieur, c'était encore plus impressionnant, et comme le dit justement Lily-Anaëlle, à couper le souffle. Le silence s'installa de nouveau entre eux, et entre tous les moines et visiteurs présents également. Comme si tout le monde s'entendait enfin sur une chose : ce lieu était trop sacré pour être perturbé ne serait-ce que par un rire ou un murmure. Nelligan s'était rarement senti aussi zen, c'était sans doute le seul effet de la spiritualité du lieu et du respect de tous entre ses murs. Le jeune homme aperçut quelques touristes s'asseoir sur les coussins, et il décida de se prêter à ce jeu également, même s'il n'était pas croyant, pratiquant ou quoi que ce soit. Ça lui semblait tout d'un coup être une expérience incontournable à vivre dans un temple comme celui-là. Lily-Anaëlle le suivit dans son mouvement, et ils s'installèrent l'un à côté de l'autre, ne communiquant que par des regards et des sourires. Tout comme son épouse, Nelligan ferma les yeux et se laissa submerger par la vague spirituelle, se surprenant même à penser à Lexi qui se trouvait peut-être à quelque part là-haut, à son père qui avait guéri de son cancer trois ans auparavant mais qui risquait toujours la récidive, à Lily-Anaëlle et sa fausse couche en espérant qu'ils n'aient jamais à vivre une telle perte ensemble. Lorsqu'il rouvrit les yeux, ceux de sa femme étaient aussi ouverts et contemplaient la beauté de l'endroit. Quand leurs regards se croisèrent, ils convinrent de sortir. « Je me sens ... calme. C'est bizarre, ça n'a pas duré longtemps, et tu me connais, la méditation c'est pas mon truc, mais là ... je sais pas, ça m'a fait du bien. » Elle demanda alors s'ils devraient faire ça plus souvent, une fois de retour chez eux en Australie. « On devrait essayer. Ça ne peut qu'être bénéfique ! » Ils ne deviendraient pas du jour au lendemain des gens très spirituels, mais puisque l'expérience avait plu aux deux, pourquoi ne pas ramener la pratique avec eux.

Autant si tu avais peur les quelques minutes avant de te poser dans le temple pour diverses raisons, tu savais maintenant que tu les avais toutes chassées. Comme si à présent, rien ne pouvait t'atteindre. Tu ressentais un calme olympien qui pourrait résister à n'importe quoi. Comme si tu étais transformée, comme si tu étais différente. Et tu l'étais, en quelques sortes. Tu avais laissé les ondes positives te gagner. À peine sortis de là, tu hochais la tête à ce que venais de dire ton mari. « Je crois que c'est en partie grâce au lieu. Ça se prête tellement à la paix intérieur que tu as envie d'y goûter, d'essayer de découvrir cette force tranquille cachée au fond de toi. » Et si on etait assez ouvert d'esprit, ça marchait. Tu étais croyante mais pas assez pratiquante, pourtant tu avais eu l'impression de faire de la religion sans pour autant prier. C'était juste comme si tu débarrassais ton corps des pensées négatives, des toxines qui peuvent le polluer. « Il faudra qu'on voit si on peut recréer une telle ambiance. » Parce que tu doutais qu'une fois de retour chez vous, vous arriverez aussi bien à vous poser sur un coussin dans le salon, les yeux fermés dans un silence impénétrable. Pour ça la magie du lieu faisait beaucoup mais peut-être qu'avec de l'encens et des petites statuettes de Bouddhas ça pourrait le faire. « Je commence à avoir un creux, on va tenter un restaurant ? » proposais-tu avec un grand sourire. Cette petite aventure t'avais ouvert l'appétit et tu avais envie de partir à l'aventure, de rentrer dans le premier restaurant qui passe et de tenter les mets locaux.

Il était vrai que le lieu leur permettait mieux que n’importe où ailleurs de se laisser complètement aller au corps et à l’esprit, à cette réconciliation avec soi-même et à cette paix intérieure inégalable. Certes, Lily-Anaëlle et Nelligan n’étaient pas à la base des êtres bien tourmentés, ils vivaient une vie paisible à deux, mais le stress du quotidien s’était quand même complètement dissipé pendant ces quelques minutes de calme et de méditation. Ils avaient fait le vide de négatif, puis le plein d’énergie positive. « Alors il faudra essayer de ramener un peu du Japon à la maison. Pour retrouver ce sentiment, même chez nous. » Conclut Nelligan en passant son bras autour de la taille de sa femme. Peut-être pourraient-ils ramener quelques coussins japonais, ou alors des couvertures. Des décorations, aussi. Pourquoi pas se recréer ce petit coin de quiétude à quelque part dans leur maison ? Le jeune homme avait encore bien de la place dans sa valise pour quelques souvenirs, et quel meilleur souvenir que des objets qui les replongeraient dans un moment aussi intense et beau ? « On fera du mieux qu’on peut. » Répondit le trentenaire quand Lily-Anaëlle pensa à comment recréer une telle ambiance. Plus tard, quand ils en seraient au moment de parcourir les petits commerces à la recherche de la perle rare à ramener à Bowen, ils pourraient prévoir le tout. Pour le moment, la jeune femme mentionna sa faim grandissante. « Avec joie ! Et j’sens qu’après, avec le ventre plein, j’aurai les paupières lourdes. » À chaque fois qu’il terminait de manger, Nelligan était frappé d’un coup de fatigue qui le rendait complètement paresseux. Avec le décalage horaire, cette fois-ci serait inévitable. Le jeune couple se rendit donc à l’extérieur du parc où des odeurs de nourriture s’échappaient d’entre les portes et les fenêtres ouvertes. Quelques restaurants parsemaient ici et là la rue qui longeait le parc, à l’extérieur de celui-ci. « Qu’est-ce qui te tente ? Soupes ? Sushis ? Dumplings ? Ou alors on s’aventure carrément en terrains inconnus ? » Sur les menus devant lesquels ils s’arrêtaient pour consulter les choix des restaurants, certains plats complètement décrits en japonais faisaient planer le mystère sur leur composition. Ils auraient peut-être de belles surprises. Et de moins belles.

Il était comme toi, pendant que ça pouvait être possible à condition d'apporter un peu du Japon chez eux. C'était sûr que vous ne trouverez jamais la même paix intérieur dans votre salon, que dans un véritable temple japonnais. Rien ne vous empêchez cependant d'essayer de faire au mieux, c'était dans vos cordes. « Ça on peut le faire ! » Tu étais très enthousiaste à l'idée d'apporter des bougies, des cousins, des statuettes de Bouddha, peut-être d'autres figures japonaises, un carillon aussi, le vent avait soufflé légèrement tout à l'heure et la mélodie que tu avais entendu était douce. Comme un chant de colibri, tu affectionnais beaucoup les notes que tu avais entendu, tu ne savais pas si tu trouverais le même. « On aura qu'à rentrer faire une petite sieste et peut-être d'autres choses.. » ajoutais-tu avec un sourire charmeur. Le devoir conjugale, après tout vous étiez marié maintenant, la nuit de noce n'avait pas pu se faire puisque vous aviez pris l'avion pour le Japon. Et vous vous promeniez déjà dans les rues de la ville. La journée n'était pas encore terminée. Pour le moment, tu avais faim. Tu l'écoutais parler, hochant la tête à chacune de ses idées. « S'aventurer en terrain inconnu quand on décide de prendre un peu plus de risque dans notre vie, c'est l'idéal non ? » Votre discussion du matin, à peine arrivé dans la chambre d'hôtel. Il approuvait ton choix, de toute façon, il t'avait demandé ton avis, ce n'était pas pour l'ignorer. Et puis même si le Japon était un pays étrange au niveau alimentaire, tu te disais qu'une fois dans un restaurant, ça serait mieux. D'ailleurs, tu poussais la porte de l'un d'eux, suivi par ton mari. Il y avait un comptoir transparent avec des reproductions fidèles. « Oh regarde, il y a des miniatures des plats, même pas besoin de parler japonais, tu indiques du doigt et tu joues à la roue de la fortune. » Parce que tu ne pourrais jamais comprendre ce qu'il y avait dedans, il te suffisait de regarder la reproduction, elle était minutieuse et bien détaillée mais il y avait des choses que tu ne connaissais pas et c'était là le risque. Mais ton choix était fait, tu étais prête à passer commande.  

Bien sûr qu’ils pourraient le faire, Nelligan croyait assez en eux et en leur complicité pour savoir qu’ils arriveraient à trouver exactement ce dont ils avaient besoin pour se rebâtir un petit havre de paix chez eux. Et puis, à voir à quel point ils s’étaient si facilement laissés aller à la spiritualité de l’endroit, peut-être étaient-ils de bons candidats, au fond, à ce genre d’exercice. Pour le moment toutefois, l’heure n’était pas au magasinage et de toute façon, sans doute était-il préférable d’attendre vers la fin de leur aventure afin de ne pas avoir à traîner tous ces souvenirs dans leurs valises. Ils décidèrent donc d’aller se trouver quelque chose à manger, car la nourriture de l’avion semblait bien loin maintenant. « J’arriverai pas à faire la sieste si tu me proposes aussi d’autres choses. » Releva Nelligan avec un beau sourire et en tirant Lily-Anaëlle vers lui pour déposer un baiser sur ses lèvres. C’était toutefois un gros mensonge. Nelligan était le premier à s’endormir après avoir fait l’amour à Lily-Anaëlle, parce qu’il était vidé de toute énergie, il était comblé, et il était paisible et confortable dans ses bras. Alors son esprit se laissait si facilement glisser vers l’autre côté, dormant comme un bébé contre elle. Avant de pouvoir penser à cela toutefois, et tous les plaisirs qui y seraient reliés, les jeunes mariés devaient penser à la nourriture. Lily-Anaëlle proposa le terrain inconnu, ce qui éliminait directement les sushis, pensa-t-il, puisque ceux-ci faisaient partie de son alimentation quasi-quotidienne. « C’est un très bon point, madame Malinowski ! » Étant mariée, elle n’était plus une mademoiselle, mais il était vrai que ce terme lui faisait prendre un sacré coup de vieux. Nelligan rigola donc doucement, se moquant un peu d’elle par le fait même. Ils pénétrèrent dans l’un des premiers restaurants croisés – parce que de toute façon, ils auraient beau longer la rue au complet, ils ne sauraient quand même pas se décider. « Bon et bien n’attendons plus ! Quoique, attends, faut quand même que je regarde un peu, j’voudrais pas me retrouver avec des tentacules de pieuvres dans mon assiette … » Nelligan voulait être aventureux, oui, mais jusqu’à une certaine limite. Une fois son choix fait, ils firent signe à un serveur et ce dernier prit leur commande, en regardant soigneusement ce que l’un et l’autre pointait du doigt. Nelligan osa même leur commander une petite bouteille de saké.

« On a suffisamment de temps pour faire les deux. » Vous pouviez commencer par les choses intéressantes, histoire de pouvoir bien vous reposer après, plutôt que de vous reposer pour vous épuiser. Vous verrez bien votre état une fois de retour à l'hôtel. Manger à l'aveugle sans connaître pouvait être catastrophique, on pouvait être allergique à quelque chose et ne pas savoir quoi, on pourrait avoir une indigestion, puisque les Japonnais sont connus pour leur cuisine froide. Vous pourriez bien être malade quand vous serez rentrer. « Madame Malinowski, ça sonne si bien ! » Tu avais un immense sourire sur le visage, tu aimais beaucoup l'effet que ça te procurait. Tu passais du rang d'une jeune fille, à celui d'une dame, d'une femme qui pourrait bientôt être maman. Ta vie avait pris un autre tournant. « Je ne crois pas qu'il y en ait ici. » Tu jetais bien une nouvelle fois un regard au comptoir qui présentait les différents choix possible. Peut-être ne savais-tu pas à quoi ça ressemblait vraiment, mais tu ne trouvais rien de semblable. Vous passiez alors commande et on vous indiquait de vous installer par terre. Tu retirais alors tes chaussures pour prendre les chaussons de l'établissement, t'asseyant ensuite sur les genoux. Vos plats étaient déposés sur votre table. « itadakimasu » Tu joignais tes mains et tu baissais la tête. Normalement, la tradition voulait qu'il fallait tenir les baguettes à l'horizontale entre ses pouces et tu étais certaine de faire un faux pas là, tu te contentais juste du geste des mains et de la tête. Vous le faisiez en parfaite symbiose, comme s'il y avait un miroir entre vous deux. Une fois la politesse respectée, tu attrapais tes baguettes pour essayais d'attraper ce qui ressemblait à un morceau de poisson. Tu engloutissais de nombreuses bouchées sans pour autant trop t'exalter sur les sensations que ça te faisait dans la bouche. A la moitié, tu relevais ton regard vers ton mari. « Alors c'est bon ? » demandais-tu, étirant un joli sourire.

Il était vrai que madame Malinowski sonnait très bien aux oreilles de Nelligan. Il avait toujours s'agit de sa mère, jusqu'à maintenant, mais de savoir que désormais son épouse aussi pouvait porter ce titre réjouissait le trentenaire. Il avait rêvé si souvent de son happy ending, et il n'aurait pas pu trouver meilleure personne que Lily-Anaëlle avec qui partager cette vie. Les deux amoureux étaient donc entrés dans l'un des premiers restaurants croisés en chemin, et regardèrent le menu avant de passer aux tables. Un peu effrayé à l'idée de se retrouver avec des tentacules de pieuvre posées sur un lit de riz, Nelligan analysa bien les images en tentant de reconnaître certains aliments. Puis, il abandonna, se disant que ce qui arriverait, arriverait. Ils avaient bien parlé de vivre un peu plus aventureusement, pas vrai ? Jusqu'à maintenant ça n'avait été que des paroles, mais maintenant il fallait passer à l'acte. « Bon et puis même si y'en a, je survivrai. Ce serait juste dommage d'avoir à reporter notre nuit noce encore une fois ... » Dit-il avec un sourire amusé et coquin en regardant son épouse. Après tout, s'il souffrait d'une indigestion, ce ne serait pas très romantique que de s'unir physiquement à Lily-Anaëlle, étape suivant l'union spirituelle et juridique. Le couple commanda finalement deux plats différents, et allèrent prendre place à la table indiquée. Rien à voir avec les tables de leurs restaurants australiens, bien sûr ! Il s'agissait de tables très basses, et les gens s'installaient à genoux face à elles. Nelligan et Lily-Anaëlle imitèrent les autres, ces derniers étant autant des touristes que des locaux. Au moins, la nourriture ne devait pas être trop américanisée si les japonais fréquentaient aussi l'endroit. « Itadakimasu. » Répéta Nelligan, content d'entendre sa femme s'essayer aussi à la langue et aux traditions. Par la suite, ils s'emparèrent de leurs baguettes et attaquèrent leurs plats. « J'sais pas exactement ce que c'est, mais c'est délicieux ! Je peux goûter ton plat ? » Demanda-t-il, et tous les deux partagèrent un peu de leur nourriture pour pouvoir goûter à tout. Après avoir terminé les plats et le saké, et une fois la facture réglée, le couple sortit du restaurant, environ une heure après y être entrés. « Partante pour retourner à l'hôtel, ou t'as envie de te promener encore un peu ? » Il la suivrait, peu importe. Au pire, il dormirait comme un bébé ce soir - même s'il aurait bien aimé se réserver un peu d'énergie pour son épouse.  

Tu secouais la tête en rigolant à ce qu'il disait. Il n'aurait aucune chance de se défiler, même s'il ne voulait pas se défiler. Au contraire, il devait être presque autant impatient que toi à l'idée de passer la nuit de noces. Pour vous, ça pouvait être l'occasion de voir plus loin d'une nuit de noces, ça pouvait être l'occasion parfaite pour commencer à construire la petite famille dont vous rêviez tous les deux. C'était la suite logique de votre relation. Pendant le repas, chacun apportait son commentaire sur ce qu'il avait dans la bouche, la sensation, le goût, les textures, permettant même à l'autre de goûter. « Vas-y. Tu verras, c'est un peu étrange au début mais c'est pas si mal que ça. » Tu le vis grossir la joue, avoir un regard un peu étrange et un léger moue de satisfaction une fois la bouchée avalée, tu n'allais pas tarder à savoir si ça lui avait plu ou non. Le repas touchait à sa fin, une fois l'ardoise payée, vous retourniez vous perdre dans les petites rues de la ville. « Non, je crois que je suis prête pour une bonne sieste. » Et il y avait pleins de sous-entendus et de sourire dans ta voix. Tu aurais presque l'impression de revivre ta première fois après tout ce temps passé avec lui. Tu te souviens d'avoir été très nerveuse, profitant de l'absence de ses parents pour se laisser aller à une relation plus intime, pourtant, tu n'avais pas arrêté de parler du repas que tu pourrais cuisiner avec son aide pour le retour de ses parents dans la soirée. Tu voulais toujours faire bonne impression, être acceptée par la famille de l'homme que tu aimais. Et tout c'était très bien passé, en douceur, tu avais été acceptée. Tout serait différent cette fois-ci.

Effectivement, quand il piqua dans l’assiette de Lily-Anaëlle une bouchée qu’il ne tarda pas à se mettre en bouche, il eut une légère hésitation sur le goût, et la texture. C’était nouveau, il n’avait pas l’habitude de mastiquer des aliments du genre, réunis ensemble, mais au final une fois les saveurs mélangées, il apprécia l’expérience. « C’est pas si mal, c’est vrai. C’est fou comme on ne retrouve pas de tels plats, pas même dans nos restaurants japonais chez nous. » Évidemment, on avait beau vouloir ramener une culture culinaire dans un autre pays, ce serait sans cesse influencé par les aliments de l’endroit. L’accès aux mêmes marques, aux mêmes ingrédients, n’était peut-être pas facile. Autant en profiter maintenant, alors ! Ils terminèrent donc leurs plats avec appétit avant de régler la facture et de retourner se perdre – volontairement – dans les rues. Nelligan offrit à Lily-Anaëlle tous les choix possibles pour le reste de la soirée, prêt à la suivre peu importe ce qu’elle décidait de faire. À son plus grand bonheur, elle décida que l’heure de la sieste était venue. C’était aussi ce que le corps de Nelligan criait. « Retournons à l’hôtel, alors. » Après quelques mauvaises pistes, quelques détours et arrêts pour regarder les cartes, ils retrouvèrent le chemin vers leur hôtel et remontèrent sans plus tarder à la chambre. Ça avait beau être leur voyage de noces, c’était sans doute l’instant le plus normal de leur couple et ce depuis plusieurs années. Ils avaient connu tellement de hauts et de bas, que ce voyage représentait enfin la stabilité dont ils avaient toujours voulu, au fond. Les nouveaux mariés, à peine arrivés dans la chambre, se posèrent sur le lit pour s’enlacer, s’embrasser, s’aimer, jusqu’à ce que l’excitation soit à son comble et qu’ils s’abandonnent à leur toute première nuit en tant qu’époux. Tous les deux complètement exténués suite à cette embrassade mais aussi par le transport, le décalage horaire et leur promenade, ils s’endormirent dans les bras l’un de l’autre, paisibles, heureux.

 

Le ventre plein, vous aviez payé la note, filant à nouveau dans les rues de la ville. Une rue calme, propre et avec des petits japonnais déguisés de différentes façons. Tu riais de bon coeur, en voyant tout ça. « Peut-être parce que ça doit être compliqué de transporter ces aliments. Et puis, on est bien contents de nos sushis, au moins on ne risque pas de manger n’importe quoi sans le savoir ! » C’était peut-être faux. Vous n’étiez pas si loin que ça du Japon, pour les européens, ça doit être valable mais pas pour vous. Ce n’était pas non plus quelque chose de déplaisant, si vous aviez le Japon en  Australie, que serait alors le bonheur de découvrir la bouffe japonaise ? C’était quand même une des raisons du voyage au Japon, avec le côté spirituelle grâce aux temples, sans oublier l’univers jeu vidéo. Vous étiez rentrés à l’hôtel, profitant d’un moment de tendresse pour officialiser votre mariage. Le reste de votre voyage s’est passé avec autant de légéreté, multipliant les visites de temples, goûtant diverses choses qui n’avait pas toujours été au goût de tous les deux, mourant de cuteness devant divers endroits de la ville puisqu’elle réservait de nombreux trésors. Vous aviez même visité un sex-shop japonais, découvrant un sextoy tentacules mais vous étiez vite sorti de là.  Pendant votre voyage, vous aviez même profité de faire ce dont vous aviez parlé le tout premier jour, vous lançant de petits défis pour pimenter votre vie. Tu ne serais pas triste de retrouver ta vie à Bowen, une vie rangée avec une belle brochette d’habitude, une routine qui te manquait un peu lors de ce voyage.