running away from my problems (woody)

Elle inspire et expire à mesure que ses baskets frappent la piste, sa queue de cheval se balançant de gauche à droite et ses poings serrés, rapprochés de sa poitrine. Cela fait longtemps que Théia ne pouvait plus s'offrir le luxe d'être sportive mais que son traitement l'empêchait de prendre du poids, et cela ne fait maintenant que quelques semaines qu'elle s'est mise à courir histoire d'avoir une condition physique qui lui permettrait de monter des escaliers sans être à bout de souffle. Et puis, elle doit bien avouer qu'avec la situation actuelle entre elle et Oliver, courir lui fait du bien. Ça lui vide la tête, lui permet de se défouler, chose qu'elle ne pouvait pas faire avant. Maintenant, elle se sent prête à repousse ses limites et à mettre à l'épreuve ce tout nouveau cœur qui bat en elle, qui la maintient en vie contrairement à l'autre qui ne faisait que la rapprocher un peu plus de sa mort. Alors qu'elle entame son troisième tour de piste, les joues déjà rougies par l'effort, Théia vient à se retrouver à coté d'un homme aussi en plein exercice, mais qui semble cependant bien plus habitué qu'elle ne l'est à l'exercice physique. Il vient de derrière elle, et voilà déjà qu'il se met à la rattraper en lui donnant l'impression d'être comme ces petites vieilles qui font leur footing matinal en ne faisant que marcher d'un pas rapide. Déterminée à se montrer à elle-même de quoi elle est capable, Théia accélère un peu la cadence et essaie d'arriver à son niveau. Elle lui lance un regard de défi avant d'à nouveau se concentrer sur la piste, le dos droit et la respiration plus rapide. Elle ne sait pas pourquoi elle le fait, pourquoi elle ressent le besoin de se dépasser et d'au passage essayer de dépasser ce parfait inconnu, mais ce genre d’initiative prise sur le moment-même l'a toujours beaucoup amusée. Évidemment, il ne faut pas longtemps avant que l'homme se retrouve bien plus loin qu'elle, laissant derrière lui une Théia à bout de souffle qui se penche en avant, mains sur ses genoux, essayant de récupérer une respiration normale. Lorsqu'il termine son tour de piste, elle se relève et croise son regard. « Bien joué, » lance-t-elle entre deux trop longues expirations. « Ça fait longtemps que j'ai plus fait de sport alors interdiction de juger. » Théia pose ses mains sur ses hanches et s'étire le dos, imaginant déjà trop bien toutes les courbatures du lendemain.

Pas foutus de lui donner une approximation du nombre d’années, pire du nombre de mois qu’il restait à Woody avant que sa vie ne soit réduite qu’à un fauteuil et une aide à domicile, les médecins qui le suivaient ainsi que le neurologue attitré à son dossier se contentaient de lui répéter sans cesse que cette maladie était différente pour toutes ses victimes, que Woody devait se concentrer sur son traitement et son humeur. Rester positif, qu’ils disaient. Continuer à mener sa vie normalement et s’ajuster à ses symptômes comme ils venaient. Pas facile lorsque lesdits symptômes surgissaient du jour au lendemain, pour mieux disparaître des heures ou des jours plus tard. Pas facile lorsque les manifestations physiques se situaient sur un éventail de possibilités et qu’il était impossible pour Woody de prédire quelle serait la nouvelle forme prise par sa maladie. Une putain de shapeshifter, la sclérose en plaques. Malgré tout, il s’entêtait à lui mener la vie dure, à la mettre constamment au défi de le mettre à terre. Quotidiennement ou presque, Woody se rendait à n’importe quelle heure de la journée sur cette piste de course. Chaque tour de piste terminé était un cercle de plus pour la corde qu’il passait mentalement autour du cou de sa maladie. Si seulement c’était aussi facile de l’étouffer, de la faire taire à tout jamais. Woody en était à une quinzaine de tours quand il dépassa une jeune coureuse qui se trouvait dans le couloir à côté du sien. Il continua son chemin sans trop s’en soucier. Il partageait constamment cette piste avec d’autres coureurs, la course à pieds étant un sport à la mode. Toutefois, il ne s’attendait pas à ce que la coureuse, elle, lui porte davantage d’attention. Du moins, elle lui en porta tout juste assez pour la pousser à le rattraper, lui envoyant un regard de défi au passage. Woody tourna la tête vers elle, esquissa un sourire amusé, la même lueur de défi brûlant dans son regard. Il accéléra le pas, son métronome mental augmentant la cadence pour guider chacune de ses foulées. Une fois la brunette mise derrière lui, il se donna comme objectif de terminer le tour de piste. Une fois passé la ligne blanche de départ, Woody leva sa main en l’air pour signifier son arrêt, au cas où des coureurs se trouvaient derrière lui. La brunette, par exemple. Il s’arrêta graduellement et tourna la tête vers la jeune femme, qui arriva à sa hauteur après une courte attente. Il avait entre-temps marché jusqu’au banc où il avait laissé sa serviette et son sac de sport. Il s’essuyait la nuque quand elle l’aborda. « Ouais, toi aussi ! » Lui lança Woody avec un sourire. Elle justifia alors sa pseudo-défaite – ils n’avaient jamais réellement établi une quelconque compétition. « Je ne juge pas du tout. You got your ass out there, c’est tout ce qui compte. » On ne pouvait pas en dire autant de tout le monde. C’était de trouver la motivation pour sortir courir qui prenait du courage et de la force, pas la course en elle-même. « Pas trop difficile à reprendre ? Le sport, j'veux dire. » Demanda-t-il avec un sourire avant de s'asperger le visage d'eau avec sa bouteille, et d'en boire une gorgée.

Au fond, c'est probablement plus pour elle qu'elle se justifie que pour lui. Pour se dire qu'il y aura un moment où elle en sera capable, qu'elle ne sera pas essoufflée aussi vite toute sa vie. Les joues rouges, le front perlant de sueur, Théia s'avance vers son sac afin de s'essuyer le visage à l'aide de sa serviette. Elle sourit à son tour, presque touchée de l'entendre la féliciter alors que pour elle, son endurance laisse encore clairement à désirer. Pour ne pas avoir trop mal le lendemain, elle tire sur la point de ses baskets l'une après l'autre pour étirer ses muscles avant de lever à nouveau les yeux vers l'inconnu.  « Heureusement que je suis déjà assez rouge pour camoufler l'effet de tes compliments. » Elle rit avant de sortir sa bouteille d'eau de son sac et d'en boire une longue gorgée. Depuis qu'elle s'est remise au sport, Théia a l'impression de commencer une nouvelle vie. Une vie où elle n'est plus obligée de se priver d'un tas de choses, une vie où elle peut courir sur la plage si elle en a envie sans risquer l'infarctus, et sans le stress causé par toutes ses visites à l'hôpital où les médecins lui annonceraient avec cet air trop sérieux que son coeur pourrait se stopper à tout instant. Il reste malgré tout les désavantages, comme le fait que son espérance de vie ne risque pas de dépasser la barre des vingts ans, mais ce seront vingt années supplémentaires où elle pourra vivre comme elle le désir. Il est vrai que Théia aurait aimé pouvoir avoir des enfants plus tard, les voir grandir, mais elle n'est pas certaine que ce choix de vie soit à présent très judicieux pour elle. Elle ne voudrait pas priver un enfant de sa mère, où le faire vivre dans la tristesse de savoir qu'un jour, elle pourrait clamser comme ça, pour un simple dysfonctionnement. La demande de l'athlète la sort de ses pensées.  « Un peu, j'ai l'impression d'être obèse et que le sol essaie d'aspirer mon corps après cinq minutes sur la piste. » Alors que quand on la regarde, Théia est tout le contraire d'une personne obèse. Elle a une jolie silhouette, peut-être même un peu trop frêle, due au fait que son traitement lui prenait énormément d'énergie. Maintenant qu'elle en a un nouveau, elle pourrait très bien reprendre tout le poids qu'elle perdait rien qu'en se levant le matin. Elle le voit s'asperger le visage de sa bouteille, haussant un sourcil, pensant aux pubs pour boissons énergisantes où le mec sexy se mouille le t-shirt pour attirer l'attention de potentielles acheteuses.

Le jeune homme s’assit sur le banc qui longeait une courte partie de la piste, au départ de celle-ci, là où ils s’étaient arrêtés. Il laissa sa serviette autour de son cou, les deux bouts retombant de chaque côté de ses épaules. Il sourit à la remarque de la jeune femme quant à ses joues rougies par l’effort … et les compliments. « Il ne fallait pas le dire, alors, tu viens de te trahir. » Souligna-t-il avec un sourire moqueur mais aussi plutôt ravi de l’effet que ses compliments lui faisaient. Il était comme ça, Woody, entretenant ce constant besoin d’être rassuré dans sa confiance en lui. Il devait s’assurer de ne jamais perdre l’attention des autres, quitte à la capter des pires manières possibles. Heureusement, dans le cas de cette fille, il ne semblait pas avoir à jouer de rôle. Quoiqu’à force de le faire, Woody s’était un peu perdu en lui-même, alors qui sait s’il était réellement authentique, présentement. Sans doute se retrouverait-il en lui-même lorsqu’il n’aurait plus rien à prouver, n’ayant plus la force de le faire. Sans doute renouerait-il avec le vrai Woody quand il serait prisonnier de ce corps qui le façonnait. Pour le moment, il avait trop à vivre pour s’attarder sur les détails, pour perdre du temps sur une introspection qui le conduirait droit dans le mur. Il ne courait pas après lui, il courait après le temps. Le physiothérapeute demanda alors à la jeune femme comment elle vivait son retour au sport. « C’est une belle manière de l’imager. » Avoua-t-il avec un léger rire, s’imaginant le sol tel du sable mouvant, submergeant la coureuse. Pourtant, elle était bien loin d’être obèse. Elle avait même un corps de rêve – Woody appréciant les minces silhouettes. « Ça va vite te revenir, contrairement à ce que tu le penses, t’as un corps léger à propulser. Juste un peu plus de pratique pour le cardio et tu me dépasseras sans problème. » Lança Woody, puisque lui avait une masse musculaire et adipeuse supplémentaire à traîner lorsqu’il courait. Enfin, ça c’était surtout parce qu’il ignorait tous des problèmes cardiaques de la coureuse. Il s’aspergea alors d’eau pour se rafraîchir et, quand il rouvrit les yeux, il croisa le regard de la demoiselle. Sa seule réaction face à son sourcil arqué fut de tendre la bouteille d’eau vers elle. « T’en veux ? » Évidemment, ce n’était pas pour ça qu’elle le dévisageait, mais il ne lui donnerait pas le plaisir de culpabiliser pour ce geste cliché.

Contrairement à ce que pourraient laisser croire les mots qu'elle vient de prononcer, Théia n'est pas le genre de fille qui se laisse facilement séduire par quelques compliments. Elle est plus difficile à faire flancher, peut-être à cause du fait que ça l'a toujours amusée de remballer tous ces beaux parleurs qui n'ont rien à faire de mieux que de charmer la première venue. Elle, elle est loin de la petite fleur fragile si facile à cueillir. Elle est plus une sorte de tronc d'arbre, avec cependant le corps d'une branche. « Trop dommage, » lâche-t-elle avant de hausser les épaules sans perdre son sourire. Car même si elle n'est pas facilement séduite par de jolis mots, Théia aime faire semblant que c'est le cas autant qu'elle aime jouer à beaucoup d'autres petits jeux. Jouer un rôle, se prendre pour quelqu'un qu'elle n'est pas, relever des défis. Elle prend parfois la vie un peu trop à la légère, mais c'est ça qui la rend vivante. Heureusement, sa vision des choses sur son rabibochage avec le sport ne semble pas faire fuir l'homme à ses cotés qui vient même à en rire avec elle. « Merci, paraît que j'ai une façon étrange de visualiser le monde. » C'est ça qui la rend si particulière, Théia. Sa façon d'être avec la vie, de la prendre comme si il n'y avait pas de mal à être parfois un peu trop insouciant, ou un peu trop impatient. En l'entendant parler, elle le regarde d'un air étonné. « T'as l'air de t'y connaître dans le domaine. Tu serais pas coach, ou un truc du genre ? Parce que si c'est le cas, je suis intéressée. » Elle sourit un peu plus, d'un sourire qui ne l'a pas encore quittée depuis le début de sa conversation avec l'homme. Et le voir s'asperger d'eau n'est clairement pas ce qui va faire effacer ce rictus, Théia doit d'ailleurs bien avouer qu'elle apprécie pas mal la vue de là où elle se trouve. À sa proposition, elle secoue négativement la tête avant de tendre devant elle la bouteille d'eau à moitié vide qu'elle tenait toujours dans une main. « J'ai ce qu'il me faut, » répond-elle avant d'ouvrir le bouchon et de laisser couler le filet d'eau au-dessus de sa bouche, laissant ainsi glisser quelques gouttes aux coins de ses lèvres qui viennent glisser jusqu'au bord de son top de sport. Elle s'essuie ensuite la bouche du dos de sa main de manière exagérée avant de se mordre la lèvre pour ne pas rire, une attitude qui ne la caractérise que trop bien. « J'suis pas assez hot pour réussir à faire ça sans me mettre à rire, trop peu de crédibilité en moi. »

Son je-m’en-foutisme à propos de son auto-trahison fit rire Woody. Il réalisa alors à quel point elle ne se prenait pas vraiment au sérieux là-dessus, et que l’homme n’avait pas forcément l’emprise qu’il aurait cru avoir sur elle au départ. On aurait pu croire que le physiothérapeute aimait attirer toutes les femmes dans son filet sans avoir à lever le petit doigt, mais en réalité, ces femmes-là qui passaient dans son lit perdaient par après toute importance. Parce qu’elles étaient sans intérêt du moment où elles présentaient une personnalité fade, un besoin trop pressant de s’oublier dans les bras du premier venu. Certes, il ne refusait pas une nuit de plaisir avec ces femmes, mais elles n’étaient pas ce qui lui plaisait, à Woody, au final. Il préférait une fille comme celle qui se tenait devant lui, qui avait de la répartie, qui démontrait une force de caractère. Ces filles-là avaient ce je-ne-sais-quoi qui attirait le sportif. « C’est mieux que d’le voir comme tout le monde le voit. Au moins, ça fait de toi … ça fait de toi quelqu’un. » Il ne savait pas vraiment s’il était clair. Woody n’était ni poète ni politicien, il ne savait pas jouer avec les mots. Au fond, il aurait voulu dire à la jeune femme que sa vision du monde la rendait unique, mais ce mot était trop fort et Woody ne s’aventurait jamais dans de tels discours. Et puis, une petite voix lui disait que la jeune femme l’aurait sans doute elle aussi trouvé too much. Ils s’entendaient donc là-dessus. Quand ils parlèrent de la performance de la demoiselle, le coureur ne tarda pas à la rassurer et à parler de son gabarit qui l’aiderait, avec un peu de pratique. « Physiothérapeute sportif, ça peut se rapprocher, en quelque sorte … J’ai jamais coaché en tant que tel. » Il avait toutefois accompagné pas mal d’athlètes lors de différentes compétitions, surtout de surf. Il n’avait pas voulu donner son nom pour les compétitions de sports qu’il pratiquait lui-même auparavant ; trop de nostalgie, une douloureuse nostalgie. De toute façon, depuis qu’il avait ouvert sa clinique privée de physiothérapie, il recevait des patients de tous types, pas que des sportifs. « Mais si t’es sérieusement intéressée, on peut s’entraîner ensemble et j’te donnerai des conseils quand j’le peux. » Il ne la coacherait pas forcément comme un vrai coach de sport le ferait, mais à titre gratuit et de manière amicale, il pourrait l’aider à s’améliorer. C’était une offre difficile à laisser passer, puisqu’il avait tout de même une assez bonne expertise. Woody attrapa sa bouteille d’eau pour se rafraîchir et en boire, et à sa proposition, la coureuse refusa et sortit sa propre bouteille de son sac. Il hocha la tête. « Alright. » Il porta de nouveau la bouteille à ses lèvres et avala quelques gorgées. En baissant sa tête de nouveau, il eut juste le temps de voir la jeune femme laisser s’échapper quelques gouttes d’eau sur son top de sport et s’essuyer la bouche telle une viking. Woody éclata de rire. « Quelle classe. » Son rire s’éteignit pour ne laisser que ses lèvres légèrement relevées, en un mince sourire, avant de ranger ses choses dans son sac de sport. Il se leva, la bandoulière sur son épaule. « J’m’appelle Woody, by the way. » Il fit quelques pas en direction de la jeune femme.

Justement, Théia a parfois la mauvaise manie de rire de ces filles insipides, assez naïves pour réussir à tomber dans les bras du premier venu. Non pas qu'elle se fichait des hommes, ou qu'elle n'a jamais apprécié quelques compliments pour réchauffer son égo, mais elle ne s'est jamais embêtée avec une relation bateau qui lui prendrait trop d'énergie alors qu'elle savait que ses jours étaient peut-être comptés. C'était ce qui faisait sa force, ce qui lui donnait cet air de fille si confiante, si forte mentalement. Elle a toujours préféré enfouir ses faiblesses, faire comme si rien ne pouvait l'atteindre même lorsque son monde était en train de lentement s'effondrer autour d'elle. Le cinéma, ça doit sûrement être l'élément déclencheur qui l'a aidée à ajouter un peu de douceur à sa vie de vagabonde. Apprendre à aimer la beauté du monde, à être plus patiente, plus indulgente avec les autres et avec la vie. Les mots qu'il prononce l'étonnent positivement et Théia lève les yeux vers lui sans réussir à réprimer son sourire. « J'avais jamais vu ça sous cet angle mais ouais, c'est vrai. Je pense bien être quelqu'un, sans prétention. » Elle se retient de dire qu'elle apprécie la phrase, et qu'elle la gardera dans un coin de sa tête au cas où ça pourrait lui servir. On a souvent dit à Théia qu'elle était particulière, un peu dérangée, mais jamais qu'elle était quelqu'un. Elle garde son attention sur lui quelques secondes, temps de réflexion où elle met ses gestes en suspend pour faire fonctionner ses méninges. Puis elle passe à autre chose, s'intéresse à lui, et recommence à bouger. Il lui annonce qu'il est physiothérapeute sportif et pour ça, Théia ne peut que le respecter. Elle se contente de hocher la tête d'un air impressionné puis hausse les sourcils lorsqu'il lui annonce n'avoir jamais coaché personne. Sérieusement, elle pensait que c'était ça leur job à ces gens-là. Courir sur la piste à coté d'un asthmatique, lui tapoter dans le dos quand il menaçait de s'effondrer. Elle qui pensait qu'il ne prendrait pas au sérieux la proposition qu'elle a lâchée sans même y réfléchir, le voilà qui déjà lui propose des entraînements en duo avec, en suppléments, des conseils de la part d'un pro sur lesquels elle ne cracherait pas. « Je dois bien avouer que faire du sport seule, c'est pas toujours génial alors oui, je suis sérieusement intéressée. » Elle lui sourit, essuie sur l'épaule, avant de laisser ce filet d'eau couler sur sa peau déjà brillante à cause de la chaleur mélangée à l'exercice physique. Les deux mots qu'il prononce la font presque recracher son eau, et Théia hausse simplement les épaules en balayant sa queue de cheval d'un geste de la main. Elle range sa bouteille dans son sac, et l'homme se présente sous le prénom de Woody. Sans le regarder, occupée à tirer sur la fermeture éclair, un sourire vient étirer ses lèvres. « Woody, » répète-t-elle. « J'aime bien. » Comme si elle avait quelque chose à dire, comme si son avis pouvait bien l'intéresser. Enfin, Théia lève à nouveau les yeux vers lui et plante son regard dans celui de Woody. « Moi c'est Théia. » Elle a toujours le même sourire en coin, un sourire mi-joueur mi-amical qui la quitte rarement. « Je compte sur toi pour ne pas me laisser tomber, sinon je te filerai un commentaire négatif sur le site des coachs sportifs de Bowen. » Non, ce site n'existe certainement pas, mais Théia trouve l'idée amusante et n'est clairement pas du genre à réfléchir avant de lâcher la première idée qui lui passe par la tête.

Les deux adultes avaient un point en commun, que peu de gens partageaient de cette manière : ils cachaient leurs faiblesses au reste du monde même quand tout basculait autour d’eux. Même en complète perte de contrôle, ils restaient debout, droits, fiers. À force de se croire inatteignables, un bouclier invisible s’était érigé tout autour d’eux. C’était cette force indescriptible qui faisait d’eux ce qu’ils étaient. Des quelqu’un, pour reprendre les paroles de Woody. Il sourit quand la jeune femme acquiesça. Ses mots avaient été maladroitement choisis, lui qui n’avait jamais prétendu être poète, mais ils eurent l’effet escompté. Leur conversation étant lancée et ni l’un ni l’autre ne semblant pressé de repartir vaquer à leurs occupations respectives, la jeune femme demanda à Woody s’il n’était pas coach sportif, par hasard, pour qu’il la prenne sous son aile. Il lui apprit alors son véritable métier qui, au fond, se rapprochait pas mal de sa demande. Il était tout autant qualifié qu’un coach – sinon plus. Certes, il n’avait aucune expérience pour coacher directement quelqu’un, mais lors de compétitions, il donnait des conseils, pratiquait la visualisation avec ses athlètes, et bien sûr s’occupait d’eux lors de blessures puisqu’il s’agissait de sa tâche principale. La jeune femme aurait donc tous les outils dont elle avait besoin, avec lui. « Par contre par entraînement j’veux pas dire de la zumba ou des trucs de filles de ce genre, hein. » Il esquissa un sourire. On ne pouvait quand même pas effacer tout d’un coup ce côté machiste chez Woody. Il allait toujours avoir une ou deux de ces répliques dans sa poche. « Mais il faudra aussi diversifier, y’a pas que la course pour bien travailler le corps. » Ils feraient des entraînements croisés, en suivant un programme. Enfin, ça, c’était si la jeune femme était prête à se donner à fond. Avec un objectif précis, elle trouverait sans doute la motivation pour basculer vers ce nouveau mode de vie. Ce même mode de vie qui permettait à Woody de repousser l’échéance fatale depuis des années. Après un commentaire sur la jeune femme qui sembla lui passer six pieds par-dessus la tête, le coureur se rattrapa en se présentant. « Content de te rencontrer, Théia. » Dit-il à son tour. Il n’allait quand même pas la remercier d’apprécier son premier, il n’avait rien à voir dans ce choix. Le physiothérapeute rigola quand elle le menaça de mal le coter sur le site des coachs sportifs de Bowen, si jamais il la lâchait. « Is this really a thing ? » Demanda-t-il, dubitatif, avant d’ajouter : « D’entre nous deux, c’est toi qui risque de laisser tomber. J’ai bien hâte que tu me prouves le contraire. » Il arqua un sourcil. Elle semblait être une femme prête à accepter tous les challenges. Et Woody serait tout un défi.

Elle a toujours pris l'habitude de cacher ses faiblesses derrière des sourires confiants. Ne pas pleurer, ne pas plier, toujours montrer que tout va bien et garder la tête haute. Quand elle a appris pour Wal', pour elle, elle a toujours attendu d'être seule afin de pouvoir lâcher son chagrin dans un coin de rue, et de le laisser là-bas en espérant qu'il ne la suive pas. Théia n'a jamais pu supporter qu'on aie pitié d'elle. Elle se remémore les mots qu'on lui a souvent dits à cause de sa malformation, la lueur de tristesse dans leurs yeux à chaque fois qu'ils la regardaient. Pauvre petite chose fragile, pauvre enfant incapable de se protéger d'elle-même. Et face à ça, face à ces mots plus rabaissants que réconfortants, elle n'a jamais cessé de leur prouver le contraire. Théia et sa force intérieure, Théia et cet éternel sourire qui étire ses lèvres et qui illumine son visage. D'ailleurs, les paroles de Woody font à nouveau apparaître ce rictus qui avait ne l'avait quittée que pendant un très court laps de temps. « Pour qui te me prend ? J'en veux pas de ta zumba, » dit-elle en plissant les paupières avant de hausser les épaules. « De toute façon, je suis clairement la pire danseuse de la planète, alors ce ne sera sûrement pas avec moi que tu pourras développer ton coté féminin. » À part quand elle est ivre, Théia ne danse jamais. Sauf si bouger ses épaules sur un rythme imaginaire quand elle prend une douche compte comme un pas de danse. « Je te fais confiance pour ça, t'as l'air d'être quinze mille fois plus calé que moi dans le domaine. » Puis elle rit. « Sérieux, tu vas croire que je sais rien faire en fait. Nulle en danse, nulle en sport, la fille idéale. » Nulle en cuisine aussi, et en tout ce qui touche le domaine sentimental. Mais ça, elle préfère le garder pour elle. Après s'être présentés l'un à l'autre, elle n'a pu s'empêcher de lâcher une réflexion irréfléchie sur ce pseudo site internet qui notait le coachs sportifs. À sa question, Théia se met à rire. Elle ne répond pas et préfère lui laisser le bénéfice du doute mais, face à ce défi qu'il lui lance, elle ne peut garder le silence plus longtemps. « Je le ferai, coach. » Elle hausse un sourcil à son tour, éternel sourire venant étirer le coin de ses lèvres. Mains sur les hanches, elle fait face à Woody qui doit facilement mesurer quinze centimètres de plus qu'elle, forcée de lever les yeux afin de pouvoir croiser son regard.

Théia n’en voulait pas, de sa zumba. Sa façon de le lui dire le fit rire, d’un rire franc et court, avant qu’il ne reprenne son air un peu plus sérieux. Malgré cela, un sourire au coin de ses lèvres était toujours présent, parce que cette rencontre plus qu’inopinée ne cessait de le rendre davantage de bonne humeur. « Tant mieux. Parce que j’t’aurais pas suivie là-dedans. » Il serait prêt à l’accompagner à travers bien des épreuves, sportives ou morales – parce que le moral était toujours en cause dans un entraînement -, si ça pouvait permettre à Théia de soulever des montagnes. Toutefois, il avait ses limites, et des sports comme la zumba en était une. Il ne se voyait pas, mais alors pas du tout, se dandiner devant un professeur un peu trop efféminé dans ses mouvements, entouré d’un tas de femmes pas de son âge qui pensaient que la zumba était leur rédemption. Ouais, ouais, préjugés, et alors ? La jeune femme ajouta que de toute façon, elle était la pire danseuse de la planète. Il rigola. « J’tiens pas à le développer avec qui que ce soit, mais ravi de savoir que tu ne me pousseras pas vers ça. » Releva-t-il. Après tout, Woody cherchait à tout prix à affirmer et à réaffirmer sa masculinité, surtout parce qu’il savait que ce n’était qu’une question de temps avant qu’il ne la perde complètement. Qu’il devienne incapable de tout, même d’être un homme, un vrai. Le physiothérapeute compléta toutefois sa pensée, en disant qu’il faudrait quand même qu’ils fassent d’autres entraînements que de la course, question de solliciter d’autres muscles, d’autres fonctions. C’est là que Théia lui dit qu’elle ne savait rien faire. Woody secoua la tête, après avoir bu une gorgée d’eau. « Dis pas ça, le sport, ça s’apprend, c’est comme n’importe quoi. Suffit d’avoir la volonté de s’y mettre, et tu l’as. Et c’est ça qui fait de toi la fille idéale, en fait. T’as le guts de t’y mettre même si t’y connais rien. » Ça prenait du culot, et Woody adorait les filles qui en avaient. Qui n’avaient pas froid aux yeux. Qui n’avaient pas peur de repousser ses propres limites. Quand l’homme releva sa hâte qu’elle lui prouve qu’elle ne le laisserait pas tomber, Théia lui promit de le faire. Il sourit. « Quand est-ce qu’on commence ? » Demanda-t-il alors qu’ils étaient face à face, les épaules redressées, cet air de défi dans leurs regards.

Déjà petite, elle n'a jamais aimé pratiquer les activités clichés qu'avaient la plupart des filles de son âge. Elle n'a pas eu de poupée, ne jouait pas à la marelle, ne promenait pas de bébés en plastiques dans des poussettes. Et encore maintenant, elle ne prévoit pas de faire de la zumba tout comme elle n'entamera jamais une conversation sur les talons hauts ou sur sa collection de vernis. L'entendre rire lui tire un sourire ravi et à la réponse de Woody, Théia hoche une fois la tête pour dire qu'elle approuvait ses dires. De toute façon, une personne qu'elle verrait encore moins faire ce genre de sport qu'elle, c'est bien lui. Là en le regardant, elle l'imaginerait plus faire de la boxe ou un autre sport de combat dans le même style. Elle rit brièvement lorsqu'il lui annonce ne pas vouloir développer son coté féminin. « Ce serait du gâchis de vouloir faire une chose pareille. » Sourire en coin, innocent, phrase lâchée à la volée sans en donner la moindre explication. Et si il lui en demande une, elle évitera le sujet ou fera comme si elle ne l'avait pas entendu, parce qu'elle trouvera ça amusant. Retour à la réalité, et au fait que Théia n'est pas une fille bien douée même si les mots ont été prononcés avec humour. Elle prend ses paroles pour des encouragements, resserrant sa queue de cheval en même temps qu'elle l'écoute, puis stoppe le mouvement de ses mains lorsqu'il prononce la dernière phrase. Deux mots surtout, fille idéale, deux mots qui lui tirent un petit rire amusé. « Tu sais comment motiver quelqu'un, » dit-elle avant de faire retomber ses bras le long de son corps. Plus les minutes passent et plus Théia apprécie Woody. Il est un mélange entre le type sympa et celui qui amuse, un mélange qui lui plaît et qui l'a empêchée de lever les yeux au ciel après avoir entendu ces deux mots. Il lui demande ensuite quand ils commencent, et elle consulte sa montre minuscule qui entourse son poignet. « Il me reste une heure devant moi, ou alors ce sera pour un autre jour. » Elle lève vers lui un regard de défi. « Est-ce qu'une heure serait assez pour me montrer le top de tes capacités ? » demande-t-elle en posant ses mains sur ses hanches.

Pas besoin d’explication quant à la réponse de Théia. Woody avait bien assez d’imagination mais surtout de confiance en lui pour l’interpréter de mille et une façons qui le mettaient en valeur. Il était bien trop masculin et viril pour s’efféminer, il était bien trop le modèle parfait du fantasme de l’homme musclé pour vouloir gâcher l’image avec des déhanchés trop ronds. Un simple sourire en coin se dessina sur le bord de ses lèvres alors qu’il se disait que le regard innocent de Théia cachait une femme pas aussi sage que ça. Et c’était exactement pourquoi Woody était attiré par elle, et pas que physiquement parlant, même s’il fallait avouer qu’il avait rarement vu une femme avec un visage aussi captivant. Elle dégageait aussi une attitude assurée, forte, et c’était surtout cela qui avait retenu l’attention de l’homme. Comme quoi il ne recherchait pas que de beaux culs. Il recherchait aussi du caractère. « C’est ce que je devrai faire en tant que coach, non ? » Releva Woody avec un rire. Il était peut-être allé trop loin dans sa tirade de compliments, mais il n’en pensait pas moins tous les mots prononcés. Fille idéale ne voulait pas dire qu’il voulait la marier, rassurez-vous. Woody aimait bien se donner du fil à retordre, alors la fille en apparence idéale pour lui, ne l’était donc pas du tout. Pas pour rien qu’il était amoureux de Sara, l’opposé de ce qu’il était. L’ange versus le démon. Là, face à Théia, ils étaient plutôt deux du même genre, à se tenir tête, à jouer au même jeu. Et quand il la testa encore, elle le surprit de nouveau. Elle était prête à commencer dès maintenant. « On ne remet jamais au lendemain ce qu’on peut faire le jour même. » Répondit-il. « Ce ne sera jamais assez. Tant qu’on n’aura pas repoussé toutes nos limites, ni toi ni moi ne serons au top de nos capacités. » Woody avait bien des limites, mais il comptait bien se surpasser. C’était la promesse qu’il s’était faite à lui-même il y avait de cela presque dix ans maintenant. « Tu me dis quand c’est trop pour toi ? » Demanda-t-il alors, avant de pouvoir réellement commencer.

Elle a toujours aimé jouer. Être le chat puis la souris, l'ange puis le démon. Jamais rien de trop poussé, seulement quelques phrases lâchées pour se faire entendre et quelques regards échangés pour se sentir vivre. Sauf que depuis quelques temps, Théia ne veut plus se limiter à être la gentille fille comme on l'a toujours connue. Elle se fiche des limites, de son image, de ce qu'on peut bien penser d'elle. Elle ressent le besoin de se sentir remarquée, désirée pour ne pas sombrer, pour retirer une fois pour toute cette pensée qui envenime son esprit comme un poison se répandant lentement. Il ne veut pas d'une fille cassée comme elle, car personne ne voudrait d'un boulet accroché à sa cheville. « C'est vrai, et je sens que je ne vais pas être déçue quant-à mon choix. » Chaque rire qu'il a la faire sourire un peu plus, effaçant toute trace de tristesse sur son visage. Peut-être qu'elle n'aurait pas été autant dans son sens si elle ne venait pas de se faire mettre sur le coté par ce crétin de psychopathe, peut-être même qu'elle ne serait plus sur cette piste à discuter avec Woody si son coeur n'avait pas été piétiné alors qu'il venait à peine de rejoindre sa poitrine. C'est une étrange façon de deal avec la déception et la colère qui la rongent, mais c'est une façon qui lui plaît. Retour à la réalité et à ses citations digne de Bouddha. « Je me sens prête à y arriver. Enfin peut-être pas aujourd'hui, je voudrais éviter de m'écrouler sur la piste et de finir aux urgences. Mais un jour, ça arrivera. » Cette fois, son regard se met à briller d'une lueur de détermination. Théia en est venue à s'accrocher au sport pour oublier, pour ne plus ressentir ces douleurs mentales d'un trop plein de questions sans réponse. À l'interrogation de Woody, elle tourne à nouveau la tête dans sa direction et fait virevolter sa queue de cheval sur le coté. « T'en fais pas, tu le sauras bien vite. » Quand elle s’essoufflera, deviendra plus rouge qu'un homard, ou encore qu'elle se mettra à ramper sur le sol en le suppliant de la ramener jusqu'à son sac qui ne se trouverait pourtant qu'à quelques mètres. Il est sérieusement temps que Théia améliore sa condition physique.

Un sourire amusé se dessina sur les lèvres de Woody quand Théia lui dit qu’elle ne regrettait pas son choix. « C’est ce qu’elles disent toutes. » Il lui fit un rapide clin d’œil avant d’agrandir son sourire et de se relever du banc sur lequel il s’était assis pour venir tenir tête à la jeune femme alors qu’ils parlaient de repousser les limites et de donner le meilleur de soi-même. Aujourd’hui, pas demain. Leurs épaules bien redressées, leurs mentons relevés, leurs regards rivés l’un sur l’autre : les deux étaient bien prêts à se montrer de quel bois ils se chauffaient. « Et tu verras, avec d’la volonté, ce jour-là arrivera bien plus vite que tu ne le crois. » Woody ne baisserait pas les bras, pas sur elle. Elle partait de loin mais semblait bien décidée à se rendre jusqu’à la ligne d’arrivée, coûte que coûte. C’était le genre de détermination qu’il aimait retrouver chez les gens, qu’il aimait entretenir et entraîner. Elle décida d’ailleurs qu’ils commenceraient dès aujourd’hui, ce qui sembla bien plaire à son tout nouveau coach. Voulant tout de même ne pas aller trop loin, trop vite, il demanda à Théia de l’avertir quand ce serait trop. Il ne connaissait pas encore les forces et les faiblesses de la jeune femme, il ne savait pas jusqu’où elle était présentement capable de se rendre. Ils iraient d’abord doucement, lentement, et puis quand il saurait jusqu’où il avait le droit de la pousser, ils exploseraient. « Suis-moi. » Il fit un signe de tête vers la direction dans laquelle il s’engagea sans plus tarder. Quittant le sol plus dur de la piste de course, Woody prit toutes ses affaires et s’éloigna jusqu’à rejoindre un grand espace vert. « Puisque ton corps est déjà réchauffé par la course, on va se concentrer sur la musculation. » Lança-t-il en laissant tomber son sac de sport à côté de lui et de s’en écarter un peu, question de se donner de la place pour les mouvements qu’il exécuterait avec Théia – pas question d’être ce genre de coach à la regarder de haut sans participer. Même s’il prendrait le temps d’analyser ses techniques et ses positions, pour qu’elle travaille correctement et sans se blesser, il l’accompagnerait également dans les efforts. « J’te montre chacun des mouvements de la série, et après on les fera l’un après l’autre, en plusieurs répétitions. » Expliqua-t-il. Il montra donc les trois mouvements qu’ils exécuteraient pour cette première routine, soit la planche frontale, les burpees, puis la planche latérale de chaque côté. « Prête ? » Woody donna le signal de départ, et tous les deux au sol, ils se levèrent sur leurs bras, le corps bien tendu à l’horizontal, droit comme une barre et les abdominaux serrés. Woody releva la tête vers Théia qui se trouvait devant elle, leurs visages tout près l’un de l’autre. « Lower you ass. » Commande-t-il en regardant sa position. « Bien. Maintiens ça. »

Même si la remarque était prévisible et qu'elle n'étonne pas vraiment Théia, elle lève les yeux au ciel sans pour autant se défaire de son sourire en coin. Curieuse, elle en vient à se demander si il parle encore de lui en tant que coach, ou autre. Sans trop savoir pourquoi, elle commence à se questionner sur qui est cet homme face à elle dans la vie de tous les jours, dans ses relations, dans son quotidien. À présent droite comme un i devant Woody qui la surpasse facilement d'une tête, elle plante son regard dans le sien sans défaillir. D'autres divagations passent furtivement dans son esprit, et elle en vient à se demander si il est ce genre d'homme à leur faire baisser maladroitement le regard. Pas avec elle en tout cas. « J'espère bien, » répond-elle simplement, préférant que sa condition physique ait le temps de s'améliorer avant que son espérance de vie, elle, n'ait trop diminué. Lorsque Woody lui demande de le suivre, Théia marche d'un pas déterminé derrière lui sans broncher. Elle traverse la piste pour ensuite rejoindre un terrain plus mou, recouvert d'herbe. Elle se contente d'hocher la tête quand il parle de musculation, n'ayant plus envie de répliquer sur chaque phrase qu'il prononce maintenant que son esprit est totalement focalisé sur leur séance de sport. « Deal, » finit-elle par lâché après ses explications, se balançant d'un pied à l'autre en attendant qu'il lui fasse sa démonstration de coach. En voyant Woody remuer dans tous les sens, Théia le regarde d'un air critique. Tête penchée sur le coté, bras croisés contre sa poitrine, elle mémorise chaque mouvement qu'il fait et espère ne pas se ridiculiser devant lui lorsqu'elle fera la même chose. Elle n'a jamais eu peur du ridicule, s'est toujours royalement foutu de ce que pouvaient penser les autres d'elle et pourtant, face à Woody, elle ressent le besoin de lui montrer de quoi elle est capable. Il lance le signal et, sans attendre, Théia prend position comme il le lui a montré quelques secondes plus tôt. Elle sent ses bras trembler mais tient la pause en essayant de ne rien laisser transparaître au niveau des traits de son visage. À sa remarque, elle rabaisse son derrière. « Let's get down to business, to defeat, the Huns, » se met-elle à chantonner pour faire passer le moment éprouvant plus facilement, s'imaginant être Mulan pendant que Woody serait... et bien, le mec qui éclate des pots avec son bâton tout en chantant. Un sourire amusé vient étirer ses lèvres mais, ne tenant plus, elle se laisse tomber sur le ventre. « Même si on dirait pas, j'vais faire tes burpees avec la volonté d'un titan. » Elle se relève dans un bond si rapide qu'elle en a la tête qui tourne.