Bah quoi ? T'es pas content de me voir ?

Woody leva les yeux au ciel quand Jake lui dit que Lily-Anaëlle et lui avaient été bien culottés de passer en cuisine alors que la réception se déroulait dans l'espace public. Certes, pour la jeune brunette, cela relevait du miracle. Elle qui semblait être la fille bien sérieuse, stricte, trop timide pour enfreindre quelque loi que ce soit, il était surprenant qu'elle ait accepté d'aller à l'arrière-boutique pour y trouver des croissants. En ce qui concerne Woody, maintenant, cela n'avait rien de bien étonnant. Les gens devaient désormais être habitués à son côté je-m'en-foutiste, "je n'en fais qu'à ma tête". My way or the highway. Il se laissait guider par ses propres instincts, ce qui avait parfois le don de le mettre dans le pétrin, un peu comme à l'anniversaire de Jake, au fond. Sauf que ça lui en prenait tellement beaucoup pour être gêné ou se sentir coupable, que même ça, ça n'avait pas su le faire rebrousser chemin. Contre toute attente, il s'était même tapé la discute avec le couple alors que Jake et Callie étaient encore dans une position des plus gênantes ... pour eux. Pour Woody, cette image demeurerait très drôle jusqu'à la fin. « T'avais genre cinquante personnes là-dedans, fallait pas s'attendre à avoir le contrôle. » Woody haussa les épaules en souriant, n'endossant aucunement ces représailles. Ils parlèrent finalement de cette idée de repas à quatre, et des sorties dans les bars qui les attendaient. Jake souligna que si Woody le trouvait lourd présentement, alors le sentiment n'en serait que décuplé après quelques verres dans le nez. « Ah ouais ? Bon, tant qu'à avoir perdu ma belle compagne par ta faute, aussi bien pousser le truc jusqu'au bout et voir jusqu'où tu peux te mettre les pieds dans les plats ! » Lança Woody en faisant signe au barman et en lui commandant ensuite quelques shooters pour Jake et lui. En attendant leur plateau, le physiothérapeute écouta son ami lui parler de sa déception face au mythe qu'il représentait, et qui tombait s'il avait réellement besoin de Jake comme wingman. « J'ai pas dis que j'avais BESOIN de toi. T'inquiète j'sais très bien m'ramener du pussy chez moi par mes propres talents. Sauf que j'aimerais bien t'voir à l'œuvre aussi. » Dit-il avant de remercier le barman qui déposa les nombreux shooters devant eux. Woody en prit deux du plateau, en tendit un vers Jake et garda le sien vers lui. « Cheers ! » Et il l'avala cul-sec. C'était les vacances ou ça l'était pas, hein.

Jake se défendait comme il le pouvait, même si Woody ne l’attaquait pas sérieusement. Après tout, il s’en foutait bien, lui, que Jake se soit fait prendre la main dans le sac, ou plutôt la bouche dans l’entre-jambes. Ça avait été un moment des plus cocasses, encore plus avec la tête de Lily-Anaëlle en prime. C’était sans doute le plus gros highlight de la soirée d’anniversaire de Jake, d’autant plus qu’il s’était montré grognon dès le départ. Après cette scène, toutefois, Woody avait eu le rire un peu plus facile. Après tout, il avait maintenant une histoire à raconter à qui voulait bien l’entendre, juste pour foutre la honte à Jake un peu plus et se moquer – gentiment, bien sûr. Enfin, du point de vue de Woody, ça l’était. C’était sans doute discutable. « Bien sûr que ça m’est déjà arrivé ! Chez mes parents, à des fêtes, dans des bars, name it!. Au moins j’me suis arrangé pour ne jamais me faire prendre, en choisissant l’endroit et le moment. T’en fais pas Jacky-boy, avec d’la pratique, ça te viendra aussi ! » Et alors il pourrait s’éclipser avec Callie quand bon lui semblerait pour profiter du moment présent. C’était d’ailleurs les instants d’intimité les plus prometteurs, ceux-là, parce qu’ils étaient accompagnés de cette excitation d’être vus ou entendus. Ils enchainèrent plusieurs sujets, passant du concours de massage au repas à quatre, puis à une éventuelle sortie dans un bar tous les deux. Non, Woody ne se laissait pas démonter, pas même par Jake lui-même qui ne semblait pas emballé par l’idée. Si Woody avait une qualité – qui pouvait quand même rapidement devenu un défaut -, c’était sa persévérance. Il ne lâchait pas le morceau facilement, ce qui pouvait bien vite énerver les autres. « Pas vraiment, non … » Répondit Woody avec un rire. Certes, Jake avait le droit de dire non, il avait le droit de dire ce qu’il voulait même, mais cela ne signifiait pas que Woody allait l’écouter ! Disons que lui et le consentement, ça faisait deux, même trois. L’élégance des paroles aussi, d’ailleurs. Jake sembla justement un peu choqué de ses choix de mots et des tournures de phrase. « Elle se dirait que tu profites bien de ta croisière et que tu t’amuses ? J’t’ai pas dit d’la ramener à ta chambre et de l’envoyer au septième ciel, j’t’ai juste dit qu’on pourrait draguer un peu ! » Il secoua la tête. Ah, les chaînes d’une relation. Les shooters arrivèrent, au plus grand bonheur du physiothérapeute qui en donna un à son ami. Ils burent cul-sec le premier tour. Jake lui fit alors part d’une idée qui, franchement, était plutôt géniale. « Alors là, tu me prends par les sentiments. » Deux femmes pour lui ? Il ne se plaindrait jamais de ça, même s’il en avait déjà vécu l’expérience, ce n’était pas une once in a lifetime opportunity. « J’suis assez surpris que cette idée vienne de toi, et pas d’moi ! J’savais qu’on était pas potes pour rien. » Il rigola. Woody faisait son gros lourd, lui aussi, c’était sans doute le soleil qui lui tapait sur la tête ou l’alcool qu’il buvait depuis midi, mais il n’était pas toujours aussi intense.

Se moquer de Jake était trop facile, c'est ce qui faisait en sorte que Woody n'arrêtait pas ! C'était ses relations préférées, ça, quand il pouvait envoyer des piques et aussi en recevoir, un échange de conneries et d'insultes amicales, pas de susceptibilité, pas de froids. Ces personnes-là, qui arrivaient à le prendre comme il était et qui endurait son attitude, se faisaient une place de choix dans la vie et le cœur de Woody. Ça n'en avait peut-être pas l'air, vite comme ça, mais le physiothérapeute appréciait énormément la présence de Jake. Il ne savait pas encore s'il pouvait ouvertement le qualifier d'ami, il ne savait pas non plus si c'était partagé, mais dans tous les cas le jeune homme espérait que ça puisse un jour évoluer vers ça. Il n'avait pas beaucoup d'amis, Woody, surtout pas des hommes. Puisqu'il agissait constamment comme un coq ou comme un mâle alpha, il avait tendance à se les mettre à dos, les autres mecs. Jake, lui, n'avait aucun problème à se laisser aller à ses âneries. « Mais justement profites-en, t'as le maître devant toi ! C'est le moment ou jamais. » Plaisanta Woody. Évidemment, il avait peut-être pris la grosse tête avec le temps, mais pas au point de se vanter sans retenue devant les autres. Il aimait exagérer, en mettre plusieurs couches, rien que pour s'amuser. C'était sa manière à lui d'être drôle, même si ça pouvait parfois être perçu comme de l'égocentrisme. Autre façon de percevoir Woody : comme un tombeur. Et ça, ce n'était pas tout à fait faux. Il adorait la séduction, et d'ailleurs il ne tarda pas à tenter de convaincre Jake de draguer avec lui. Pour s'amuser. Visiblement, Jake n'avait pas la même définition d'amusement. Peut-être parce que ce n'était pas celle de Callie non plus. Il haussa les épaules. « Y'a bien fallu que tu dragues un peu Callie pour que vous en arriviez là, non ? Tu dois pas être si mal. » Releva le jeune homme, tout en attrapant les shooters qui venaient d'être déposés devant eux et en buvant le sien cul-sec, en même temps que Jake. Ce dernier proposa alors l'idée du siècle, qui permettrait à Woody d'avoir deux femmes rien que pour lui. « Ouais ben c'est une chose d'avoir l'idée, maintenant faut que tu m'aides à la réaliser. » Oui parce que bon, pour se rattraper du coup bas de tout à l'heure, ça prendrait davantage qu'une idée de génie. Sa réalisation comptait, aussi. Face à cette idée, ils burent un autre shooter chacun, avant que Jake ne parle de la veille, où la soirée était devenue bien arrosée. Woody secoua la tête. « J'ai bien essayé d'convaincre Annushka d'participer, avec moi. Ils avaient l'air de bien s'amuser ! Mais elle a refusé et elle est partie avec Xavier, tu l'connais ? J'crois bien qu'il y a un truc entre eux. Bref comme ils m'ont planté là, j'suis allé voir d'autres gens mais je me suis finalement pas laissé tenter par le bain de minuit. De toute façon, y'avait 4 gars pour 2 filles environ, et c'est pas un ratio qui m'intéressait. » Conclut-il en haussant les épaules.

Woody leva les yeux au ciel en riant. Parfois, il arrivait facilement à dire quand Jake ne pensait pas un seul mot de ce qu’il disait sur lui, et d’autres fois il avait du mal à savoir s’il le prenait vraiment pour l’homme qu’il donnait l’impression d’être. Après tout, Woody projetait cette image à n’importe qui, et il revenait à ces personnes-là de se faire leur propre idée par la suite en apprenant à le connaître. Ce n’était pas tout le monde qui lui donnait sa chance, et certains continuaient leur chemin avec cette idée-là de Woody en tête. Ce dernier n’allait pas le leur reprocher, après tout, c’était un peu le but recherché. Sauf que dans des cas bien particuliers, comme avec Jake, Woody espérait qu’il puisse faire la part des choses mais, aussi, qu’il puisse s’attarder à la personne derrière le rôle, derrière le masque. « Bien sûr que j’sais ce que c’est ! Après, j’suis pas obligé d’en faire preuve … » Il continua à rire légèrement. S’il voulait à ce point que Jake le voit comme un réel ami, comme un homme qui avait une tête sur les épaules, alors pourquoi continuait-il à agir de la sorte ? Allez savoir. Le physiothérapeute s’intéressa alors à la façon par laquelle Jake s’y était pris pour conquérir le cœur de sa belle Callie, si ce n’était pas en la draguant. Son ami lui raconta leur rencontre, et conclut que c’était plutôt son charme naturel qui avait fait ses effets sur la jeune femme. « J’suis quand même étonné d’toi, j’aurais cru que tu te serais dégonflé dès le moment où elle a refusé d’aller manger un bout. Le message était assez clair quand même, mais t’as persévéré ! » Bien sûr, Woody disait n’importe quoi, encore. Si Callie avait refusé le repas, c’était sans doute vraiment juste parce qu’elle voulait rentrer chez elle ce soir-là, pas parce qu’elle trouvait Jake lourd. Autrement, elle n’aurait pas accepté de flâner dans le parc sur le chemin du retour. Malgré la situation amoureuse de Jake, les deux amis convinrent d’un plan de match de pseudo-drague qui permettrait à Woody de ramener deux femmes à sa chambre – en espérant qu’Annushka soit avec Xavier. D’ailleurs, ils en parlèrent, de ces deux-là, et de la soirée de la veille sur la croisière, qui semblait avoir dérapée pour certains. « Nah, y’en avait une en couple. L’autre par contre … » Elle était bien mignonne, l’autre, oui. Mais tant pis. Il la recroiserait peut-être. « En tout cas elle a l’air de lui plaire aussi. Il m’a bien fait comprendre que j’étais de trop. » Woody, troisième roue d’un carrosse ? Ça lui arrivait tellement rarement qu’il y avait de quoi être irrité par la situation, et cela paraissait dans son ton de voix.

Quand même, oui, Woody avait le sens de la répartie. Jake aussi faisait preuve d’un certain tac au tac, toutefois il le faisait avec une sorte de timidité que Woody n’avait pas. D’ailleurs, cela pouvait sans doute s’expliquer par les paroles que venait tout juste de prononcer Jake, à propos fait qu’il n’était pas assez sûr de lui. « Sans devenir imbu de toi-même, ça se travaille, tu sais. Surtout que t’es pas un petit moche sans but, sans ambition. » Woody n’avait jamais été très fort dans les compliments, leur tournure n’étant jamais celle désirée, mais il faisait des efforts. Et puis, comment dire à Jake qu’il était un chic type qui méritait un peu plus de confiance sans avoir l’air d’être en train de le draguer ou de devenir un peu trop intime ? Woody ne jouait que d’un côté, hein, et il ne ferait pas semblant du contraire sauf en situation d’urgence ! De toute façon, Jake non plus ne jouait pas de ce côté, pas à première vue en tout cas. Il avait Callie, en plus. D’ailleurs, le pâtissier lui parla de leur toute première rencontre, et sans scrupule Woody s’attaqua même à ce moment magique. « Booon, d’accord. J’te la laisse, celle-là. Faut croire que t’avais vraiment trouvé le moyen d’égayer sa soirée merdique. T’as su ce qui n’allait pas avec elle, au final ? C’était un autre avant toi qui lui avait brisé le cœur ? » Demanda-t-il, avec sa naturelle curiosité mal placée. Il ne connaissait pas tant que ça Callie, en plus, alors ses états d’âme n’auraient pas dû l’intéresser. Mais comme c’était la copine d’un de ses amis, pourquoi pas. Même s’il se doutait bien que Jake ne révélerait pas la vie personnelle de Callie, surtout si c’était du sérieux. Ils parlèrent ensuite des femmes de Woody, même si celles de la veille n’avait même pas pu être siennes le temps de quelques heures. Il se reprendrait pendant les prochains jours – puisqu’aujourd’hui, c’était un autre flop, merci à Jake. « Nan c’est vrai, je peux pas lui en vouloir. Annushka est super, comme fille. Belle, gentille, toute gênée. Elle est cute. » Trop angélique, même, pour que Woody ose risquer de la briser. Il tenait à Annushka plus qu’il ne voulait se l’avouer, et lui faire du mal, il ne le voulait pas. « Et j’persévère, t’inquiète. Si hier et aujourd’hui sont un échec, demain est un autre jour … »

Woody leva les yeux au ciel en riant en l’entendant dire qu’avec un mètre quatre-vingt, il n’était pas petit. Facile, elle était facile. « Ouais, accepte-le. Ils se font rares venant de moi. » Il esquissa un sourire. Sans doute que Jake l’avait deviné, ça, depuis un moment. Et puis même là, ce n’était pas le compliment le plus énorme du monde, il avait juste sous-entendu qu’il avait de l’ambition et qu’il n’était pas moche. Après, ça ne voulait pas dire qu’il était beau. « J’espère bien, ouais ! Sinon, ça deviendrait vite monotone au lit. » Les gens disaient que le physique ce n’était pas ce qu’il y avait d’important dans un couple, et blabla, mais au fond, si l’attirance physique n’y est pas, il manquera toujours quelque chose à la relation, pas vrai ? En tout cas, pour Woody, c’était logique. La sexualité avait beau ne pas être la seule sphère à vivre d’une relation, c’en était une quand même, qui permettait à un couple de se retrouver dans une intimité et une proximité bien spéciales, et ça avait son importance. Quelle tristesse de se dire qu’on n’allume pas physiquement son partenaire. Heureusement, ça ne semblait pas être le cas pour Jake et Callie. Ils parlèrent ensuite de leur rencontre, à ces deux-là, et par curiosité Woody voulut rapidement savoir ce qui avait pu mettre la brunette dans un tel état. Évidemment, son copain resta bien vague, et Woody n’insista pas davantage. « Bon, au moins t’avais pas à être en compétition avec un autre dès le début. » Pas que Jake n’aurait pas eu de chance de gagner, non ce n’était pas ce qu’il voulait dire, mais ça ne débutait jamais facilement une relation quand il y en avait encore un autre dans le portrait. Dans le cas d’Annushka, dont ils parlèrent alors, il semblait véritablement y avoir quelqu’un dans son cœur, en l’occurrence Xavier. Ça ne faisait pas grand-chose à Woody, au fond il n’aurait pas voulu tenter quoi que ce soit avec elle, pas depuis qu’ils s’étaient rapprochés amicalement. Au tout début, il n’aurait jamais dit non, mais maintenant leur relation avait évolué. Il s’était juste senti laissé de côté, la veille, et c’était ce ressenti-là qui parlait présentement. Peu importe, il ne baissait pas les bras et il aurait bien d’autres belles soirées sur cette croisière. Ils burent ensemble un autre verre et Jake ne semblait pas réaliser à quel point ça entrait dans leur système vicieusement. D'abord lentement, puis tout d'un coup. « Attends d’être debout sous le soleil ! J’te parie qu’tu marcheras pas droit jusqu’à ta chambre ! » Il rigola. Là, ils étaient bien, assis au bar et protégés du soleil par les parasols en paille ou truc du genre.

Ah, pour ça, oui : Woody faisait énormément de compliments à la gente féminine. Mais quand ce sont des compliments lancés à la va-vite dans le seul but d’attirer quelqu’un dans ses filets, est-ce vraiment un éloge, ou pas plutôt une manipulation ? Après tout, même s’il pensait ce qu’il disait à une femme – qu’elle était belle, qu’elle avait un beau sourire, un beau regard, tout ça -, s’il se retournait et le disait à la prochaine belle femme qu’il voyait, le compliment ne perdait-il pas un peu de son essence ? Sans aucun doute. C’est pourquoi, dans cette situation, Jake pouvait bien prendre le compliment. Woody ne l’avait pas sorti pour séduire Jake, je peux vous l’assurer ! Ils parlèrent ensuite du fait que l’homme plaisait physiquement à Callie, ce qui était une bien bonne chance. Ils s’entendaient au moins là-dessus : l’attirance physique avait une place non négligeable dans un couple. « Amen ! Ceux qui disent que y’a que la beauté intérieure qui compte, c’est pour se donner bonne conscience, un truc du genre, ou alors parce qu’eux-mêmes n’ont franchement pas été gâtés par la vie ! » Il rit. Bon, il avait encore exagéré, mis une couche en trop. Il aurait pu se satisfaire de la réponse de Jake, qui rejoignait sa propre pensée, mais il avait poussé un peu plus loin. Ils parlèrent alors de Callie, à nouveau, mais cette fois concernant leur première rencontre et les motifs de la mine basse de la jeune femme. Il ne s’agissait apparemment pas d’un autre homme, ce qui facilitait la tâche à Jake. « Quel homme respectable tu es ! Un vrai gentleman. Alors t’aurais laissé filer Callie ? » Si c’était parce qu’elle était en couple, alors d’accord, Woody comprenait la vision. Sauf que s’il passait son tour parce qu’elle en pleurait un autre, un autre qui n’avait peut-être même plus de rôle à jouer dans sa vie, alors Woody ne se serait pas écarté, lui. Pas pour une fille qui en valait autant la peine, et Callie semblait être de celles-là. Les deux hommes continuèrent à s’enfiler des verres, parlant tantôt d’Annushka, tantôt des plans drague de Woody, jusqu’à ce qu’ils réalisent à quel point ils buvaient sans trop compter. Les joies du open bar. « Pfff, bonne question ! Ben déjà, les pires, je dois pas trop m’en souvenir. Y’a pas mal de soirées arrosées dont je n’ai que de brefs souvenirs. » Commença-t-il avec un rire. Des black out, il en avait eu, oui, surtout dans ses jeunes années. « Mais y’a quelques soirées qui m’ont coûté pas mal plus chères que juste mes consommations. Y’a une fois j’suis monté sur le toit d’l’appartement d’mon ami, j’ai mis mon nouvel IPhone en mode avion, et je l’ai lancé de toutes mes forces en me disant qu’il se mettrait à voler. Ou une réflexion du genre. » Des secrets de soirées d’ivresse, Woody en avait, mais il préférait rester dans les histoires légères, drôles, plutôt que de repenser à tout ce qu’il avait pu faire de mal en mettant ça sur le compte de l’alcool. « Et toi ? » Demanda-t-il, trouvant la question assez drôle.

Woody éclata de rire au surnom trouvé par Jake. Après Sa Suprême Majesté Woody, voilà qu’il était le Dieu Woodypollon. Ça donnait une belle idée de l’image que montrait le jeune homme, et de ce qu’il pensait de lui-même. Sans doute que son ami se moquait de lui, derrière ces surnoms-là, mais il reste que si ces termes étaient employés à son égard, ce n’était pas non plus aléatoire, ce n’était pas pour aucune raison. « C’est vrai, c’est vrai, j’oublie parfois comment le commun des mortels doit gérer tout ça … » Il continua à rire tout légèrement, ne voulant pas casser la blague, le mythe, en se montrant trop humble. Évidemment que Woody n’avait pas la tête aussi grosse, autrement il n’aurait pas pu passer dans le cadre de porte de sa chambre du bateau de croisière. Les deux hommes parlèrent finalement de Callie et de Jake, des circonstances de leur rencontre et de ce que Jake aurait fait dans l’hypothèse où elle aurait déjà eu quelqu’un dans sa vie, quelqu’un qui l’aurait mise dans un état de profonde tristesse ce soir-là. Quelqu’un qui n’en valait donc clairement pas la peine, ou alors pas autant que Jake, qui ne ferait jamais volontairement de mal à qui que ce soit. Jake n’était pas Woody, Jake était un type bien. Sans doute que le physiothérapeute aurait dû prendre plus souvent exemple sur son ami, plutôt que d’essayer de le corrompre et de le faire glisser vers son monde bien peu fréquentable. « J’aime bien connaître les réactions que tu penserais avoir dans ces situations hypothétiques, moi. Ça me permet d’apprendre toutes les facettes de Jacquot. » Bon, pas toutes, et certaines facettes Woody préférait ne jamais les voir, si vous voyez de quoi je parle. Sauf qu’à force de mener sa vie toute rangée, Jake mettait de côté certaines décision impulsives ou instinctives qu’il aurait pu vivre dans une vie plus mouvementée, alors quitte à ne pas les vivre, aussi bien les imaginer. Même si ça revenait à se faire des films, comme il le disait. Suite à un énième shooter, Jake adopta un sujet un peu plus léger que les précédents et demanda à son comparse de lui raconter sa plus drôle histoire de beuverie, même si en toute honnêteté, les meilleures étaient sans doute totalement oubliées. Il raconta la première qui lui vint en tête. Jake éclata de rire en ne manquant pas de traiter Woody de con, ce qui fit rire ce dernier. « J’crois que ce soir-là, on avait tous plus ou moins fait des trucs complètement idiots. Y’avait personne d’assez présent d’esprit pour empêcher ces situations. » C’aurait été bien, de temps en temps, qu’ils désignent des gens pour rester sobre et surveiller la fête. Mais personne n’aurait voulu de ce rôle, lui le premier. Ce fut alors au tour de Woody de demander à Jake sa pire ou plus drôle expérience. Il éclata de rire à l’histoire de son ami. « Il a pas porté plainte tout de même ? » Demanda-t-il, pensant qu’un voisin bien chiant aurait pu l’accuser d’entrée par effraction. « Ce sont tes amis qui sont cons pour le coup, là, même pas capable de te dropper à la bonne adresse ! » En espérant que ce n’était pas ces tarés qui avaient conduits jusque-là …