flying away (fieldstone)

Il y a des choses comme ça qui sont comme un retour de boomerang en pleine tête, le genre qui amoche salement et qui laisse un goût amer dans la bouche. Candy a sans cesse l’impression qu’ils reviennent à l’envoyeur. A chaque fois qu’elle va mieux, que quelque chose d’heureux arrive dans sa vie, autre chose vient la noyer un peu plus qu’avant. Durant quelques jours tout allait bien, aucune ombre au tableau, aucun nuage à l’horizon. Mais il faut se rendre à l’évidence, le bonheur n’est jamais éternel, tout ça ne dure jamais. A force de se prendre dans coups elle devrait savoir qu’il ne faut pas faire confiance à la vie. Retour à la case départ, ou peut-être pas, elle n’en sait rien en réalité. La jeune femme ne peut s’appuyer sur rien, même pas la soirée si parfaite qu’elle a eu avec Oscar. Si c’était juste un moment, qu’en fin de compte malgré ce qu’il lui a dit il ne peut pas aller de l’avant, il ne veut rien avec elle. Après qu’il l’ait ramené chez elle ils ne se sont pas vraiment parlés, même si ça fait quelques jours, Candy triture sans cesse son téléphone en l’attente d’un message, elle hésite à lui en envoyer un mais ne veut pas le faire fuir. Elle n’a aucune idée de comment agir, comme à chaque fois. Alors elle attend. Et puis elle se retrouve là, au théâtre, assise sur un siège comme elle en avait l’habitude autrefois. Venir dormir ici lui fait du bien mais surtout elle n’a plus le choix. Parce que ce foutu boomerang a décidé qu’il était temps pour elle de se faire exclure de son appartement et de se retrouver à la rue, sans aucun endroit où aller. Enfin si, la blonde sait que ses amis seraient là pour l’héberger quelques jours mais elle ne veut être un fardeau pour personne. Elle n’aime pas demander de l’aide, elle veut se débrouiller seule. Bien sûr ses parents pourraient l’héberger mais elle n’a aucune envie de rentrer chez eux. Ils ne feraient que lui dire qu’elle a échouer, lui rappeler sans cesse qu’elle n’est qu’une bonne à rien, une fille qui se plaint, qui exagère tout, une pauvre fille en somme. Et puis le théâtre c’est bien, c’est confortable, c’est apaisant. Parfois la solitude lui fait du bien. Elle est dans son pyjama, avec le t-shirt d’Oscar pas loin, qu’elle garde comme une relique, un souvenir peut-être. Elle sait bien qu’il y a un canapé dans les coulisses mais elle est attachée à son fauteuil en fond de la salle, sa place. Il n’est pas tard mais sûrement l’heure de dormir pour elle.

Sa vie, sa tête, tout n'est plus qu'un immense bordel dans lequel il n'arrive plus à mettre d'ordre. Dès le lendemain de sa nuit passée avec Candy, Oscar n'a fait que penser à elle. À eux. À leurs baisers, étreintes, trop grande proximité pour un professeur et une élève. Il sait qu'elle n'est pas participante à ses cours mais malgré ça, il sait aussi qu'une telle relation n'est pas saine. Elle a encore tant à vivre Candy, des expériences dont il a été privé à cause de ce rôle paternel qui s'est bien trop rapidement imposé dans sa vie. Elle, elle doit pouvoir sortir avec ses amis sans être gênée par lui. Elle doit connaître les joies des bals de promo, ou encore de tous ces trucs que font les vieux ados de vingt-et-un ans. Même si il n'en a que vingt-huit, Oscar se sent déjà désavantagé non seulement parce qu'il a une fille, mais aussi parce qu'il est professeur. Il ne pourrait jamais lui tenir la main dans la rue, l'embrasser devant d'autres personnes. Elle finirait malheureuse, et il n'en serait que plus meurtri. Ses pensées encore trop encombrées que pour pouvoir mettre un mot dessus, Oscar a préféré ne pas appeler Candy tout de suite. Il s'est laissé quelques jours, des jours pour réfléchir où il s'est, à la place, plongé dans la réalisation d'une toute nouvelle pièce. Oxygen in a cup of wine, histoire d'un vieil homme aigri qui croise le chemin d'une femme trop bavarde avec qui il partagera chaque soir un verre de vin. Encore une fois, il n'a pas vu le temps passer. Il a continué d'écrire jusqu'à en oublier le temps qui passe et, pour se tenir éveillé, est parti se chercher un café en laissant toute ses feuilles dans le théâtre. En poussant la porte, il baille jusqu'à s'en décrocher la mâchoire. Probablement qu'il devrait rentrer, rester si tard dans son endroit préféré n'est pas ce qui l'aidera à préparer ses cours pour le lendemain. Mais en tournant la tête en direction des sièges, son regard croise celui d'une autre personne. D'abord surpris, Oscar sursaute. Mais bien vite, il reconnait ce visage aux traits angélique. « Candy ? » Son ventre se noue, incertain de savoir si il est heureux ou non de la voir ici. « Tu m'attendais ? » demande-t-il ensuite avec un léger sourire, s'approchant d'elle avant d'aller s'asseoir sur le siège à coté de celui où elle est.

Elle entend une voix lointaine qui l’appelle alors qu’elle a les yeux fermés, prête à s’endormir. Elle connaît cette voix, c’est celle d’Oscar, est-elle en train de rêver ou l’appelle-t-il bien pour de vrai ? Elle ouvre les yeux et l’aperçoit, prêt de la scène. C’est vrai que la jeune femme aurait pu faire attention, elle aurait pu voir les feuilles et tout le reste mais elle a foncé tête baissée vers son siège sans même faire attention à ce genre de détails. Bien sûr, l’idée de le voir lui a traversé l’esprit, c’est ici qu’il travaille toute la journée et elle sait bien que parfois il y reste le soir. Seulement bien vite elle a préféré effacer cette idée de sa tête, sinon elle s’en serait fait toute une montagne et aurait été bien déçue s’il n’avait pas été là. Elle pourrait courir vers lui et lui sauter dans les bras mais elle s’abstint. La blonde ne savait pas vraiment où ils en étaient tous les deux et elle ne voulait pas qu’il la repousse ou que quelqu’un les voit ainsi, ça serait pire que tout. Ils se feraient virer tous les deux. Déjà qu’elle n’a plus d’appartements mais en plus si elle ne peut plus étudier, ça serait la catastrophe.
Il lui demande si elle l’attendait et un sourire étire les lèvres de la demoiselle. « Je...non, je ne savais pas que tu étais là. » Ce qui n’est que la vérité. Il vint s’asseoir à côté d’elle et d’un coup elle se sentit gênée. Que faire ? Elle aurait bien aimé attraper sa main, l’embrasser, lui dire qu’il lui a manqué et qu’elle avait pensé à lui envoyer un message. Mais non, il ne faut pas, elle ne veut pas l’effrayer, elle ne veut pas qu’il parte comme tous les autres avant lui. « Tu écrivais ? » demanda-t-elle curieuse. Ce n’est pas extraordinaire comme question, elle aurait pu faire mieux. Même si le théâtre n’est pas sa tasse de thé, elle aime bien les pièces que fait Oscar, elle en a lu quelques unes. Et la première fois il l’avait intriguée avec sa version moderne de Roméo et Juliette.

D'un coté, il se sent coupable. Coupable de ne pas l'avoir appelée alors qu'au fond, il en avait envie. Coupable de l'avoir embrassée, d'avoir joué avec ses sentiments même si Oscar n'aurait pas eu ce geste envers elle si il ne ressentait pas un minimum d'attachement pour elle. Mais le matin s'est levé et, avec lui, la réalité est retombée. Ils ne peuvent pas, du moins pas maintenant. Pas tant qu'elle est étudiante, et qu'ils arpentent tous les deux les mêmes couloirs où elle étudie, et où lui travaille. Assis à coté d'elle, il ne sait pas trop quoi faire. Il se sent ridicule, mal à l'aise aussi alors qu'il n'a jamais ressenti ça en présence de Candy. Il aimerait lui assurer que tout va bien et pourtant, il sait que ce n'est pas le cas. Il n'aurait pas dû l'embrasser. Elle mérite d'être heureuse Candy, pas de vivre une pseudo relation cachée avec un homme de sept ans son aîné. Elle mérite d'être choyée, heureuse, comblée par celui qui pourra lui prendre la main en public. La question qu'elle lui pose sort Oscar de ses pensées. « Oui, j'ai commencé un nouveau projet, mais je n'ai aucune idée de si ça aboutira un jour. C'est un peu... particulier. » Il rit doucement, jouant avec le pan de sa chemise. Il pourrait lui parler de ses pièces, ils riraient de l'absurdité de certains de ses personnages, et il l'écouterait donner son avis quant-au dénouement de l'histoire. Sauf que pour le moment, Oscar a d'autres choses en tête. « Écoute Candy, je pense qu'il faudra qu'on parle toi et moi. De ce qu'il s'est passé, et de ce qui va se passer. » Soudainement incapable de croiser son regard, Oscar continue de fixer ce bout de tissu qu'il a entre les doigts tout en attendant sa réponse. Il aimerait pouvoir ne pas avoir cette conversation avec elle, que tout puisse être plus simple, comme dans les films. Sauf que c'est la réalité, et qu'elle n'a rien à voir avec la fiction.

Oscar lui expliqua avoir commencé un nouveau projet, qu’il ne sait pas où ça va mener et que c’est assez particulier. Tout cela intrigue la blonde mais elle n’a pas vraiment le courage de lui en demander davantage même si elle a envie de tout savoir sur cette nouvelle pièce et de lire les premières ébauches. « Particulier comment ? » demanda-t-elle tout de même. Elle sentait qu’entre eux ce n’était pas comme d’habitude. Ils riaient toujours, ne se prenaient pas la tête, profitaient juste du temps mais là ils étaient tous les deux gênés, ce qui n’est jamais arrivé entre eux. Candy s’est déjà sentie gênée mais ce n’était que l’histoire de quelques secondes et la plupart du temps c’est parce qu’il lui faisait un compliment ou bien lui souriait. Elle le voyait entortiller dans ses doigts le bord de sa chemise et ne pas oser la regarder ce qui l’inquiétait encore plus. Il lâcha finalement qu’ils devraient parler d’eux, de ce qu’il s’est passé et d’où ça va mener tout ça. Elle se tourna vers lui et tenta d’attraper son regard. « Tu sais déjà ce que je veux. Je veux être avec toi même si ce n’est pas facile mais ça dépend de toi, de ce que tu veux. Je ne regrette pas ce qu’il s’est passé. » dit-elle finalement, sincère. Oui elle veut encore pouvoir l’embrasser, passer des moments avec lui, pouvoir se blottir dans ses bras. Même si c’est interdit, même si c’est dangereux et que c’est loin d’être simple elle veut être avec lui, il le sait bien. Elle serait bien incapable de faire semblant que rien ne s’est passé avec lui en sa présence, que tout redevienne comme avant elle ne peut pas l’imaginer.

Particulier comment ? Bonne question, même lui se sent incapable de le formuler. Il réfléchit un moment, le regard perdu dans le vide, ayant du mal à se concentrer sur sa pièce maintenant que Candy se trouve à coté de lui. « Disons que ça sort de l'ordinaire, j'avais envie de mentionner des sujets qu'on aborde peu. » C'est tout ce qu'il trouve pour le moment, Candy devra s'en contenter avant qu'il ne se lance dans l'écriture de plus que deux pages. Bien vite, le sujet change pour aller vers quelque chose de plus sérieux. Eux. C'est lui qui l'amène sur le tapis,n'ayant pas envie d'attendre plus longtemps et de continuer à laisser le malaise prendre possession de l'espace. Il ne veut pas de ça avec elle, il veut pouvoir continuer à rire et sourire comme ils l'ont toujours fait. Au son de ses paroles, Oscar hoche la tête car tout ça, il le sait déjà. Elle le lui a dit, et il s'en souvient car ses mots sont restés férocement encrés dans sa mémoire. « Je ne regrette pas non plus, » dit-il en relevant enfin les yeux vers elle, à présent prêt à croiser son regard. « Mais Candy, t'es étudiante et je suis prof. Et puis, il n'y a pas que ça. J'ai un enfant, tu te sens vraiment prête à jouer les belles-mères pour une petite de six ans ? Tu devrais... vivre, t'amuser, faire la fête. On est dans deux univers différents, deux univers qui ne peuvent pas se rencontrer. » Son ventre se noue. Il se sent mal, affreusement mal. Il voudrait ravaler ses paroles, les effacer à tout jamais et l'emmener loin de Bowen. Sur une plage, à la montagne, il s'en fiche tant que c'est loin d'ici. Il ne sait pas si elle arrivera à être aussi rationnelle que lui alors il se contente d'attendre, effrayé par toutes les réactions qu'elle pourrait possiblement avoir. Et pendant cette seconde, interminable seconde où elle ne dit rien, le monde entier semble peser sur ses épaules.

Habituellement ils se lancent dans de grandes conversations, rient, parlent de tout et de rien mais là, c’est différent. Chacun reste évasif sur ses réponses, c’est différent. Elle qui espérait que rien ne change en mal, qu’il ne pourrait jamais y avoir de malaise, voilà que ce qu’elle redoutait est arrivé. Il ne lui en dit pas beaucoup sur sa future pièce et elle ne lui demande pas davantage de détails en retour alors qu’habituellement elle lui aurait posé tout un tas de questions. Non, elle se contente de hocher la tête. Elle a le ventre trop en vrac pour réellement sourire, réellement être contente de le voir. Parce que bien sûr elle l’est mais à voir sa mine, elle imagine que rien de bon ne va arriver. S’il y a au moins une chose de positive c’est qu’il ne regrette pas de l’avoir embrassé ni cette soirée passée tous les deux. La suite lui noue encore un peu plus le ventre, elle sent les larmes lui monter aux yeux. Elle le savait, elle s’en doutait quelque part. Il n’y a qu’elle pour penser que ça puisse marcher, que malgré tout il pourrait y arriver. Elle y croyait, à leur rencontre de ses deux univers, mais lui non, il n’y croit pas. « Pourquoi tu m’y as fait croire alors ? Pourquoi tu m’as donné cet espoir ? » lui demanda-t-elle en se retenant de pleurer pour de bon. Il y a eu un moment où elle a pensé que malgré tout ça irait, qu’ils pourraient se voir en cachette. Elle ferait tout pour ne pas qu’il se fasse virer. Elle ne pourrait pas avoir la perte de son travail sur la conscience. Mais elle veut être avec lui, être dans ses bras, oublier tout le monde. « Ce n’est pas parce que j’ai vingt-et-un ans que je ne pense qu’à faire la fête et que je n’ai pas envie de juste passer la soirée à regarder la télé dans les bras de quelqu’un. » ajouta-t-elle ensuite en le regardant. Il l’imagine sans doute différemment de ce qu’elle est. Elle aime passer des soirées chez elle comme elle aime sortir s’amuser, être avec lui ne l’empêcherait en aucun de sortir le soir avec ses amis comme elle le fait maintenant.

Voir des larmes embuer ses beaux yeux lui sert le coeur si fort que ça en devient presque douloureux. Sans oser la regarder plus de quelques secondes, Oscar baisse les yeux vers ses mains. Il ne remarque que maintenant que ses doigts se sont mis à jouer nerveusement avec le tissu du siège sur lequel il est assis, un signe qu'il n'est pas à l'aise avec la situation dans laquelle il se trouve. En même temps, il faudrait qu'il n'ait pas de coeur pour l'être, et Oscar a toujours été doté d'un surplus de gentillesse et d'émotions contradictoires. Autant il est capable de rire et jouer à l'abruti, autant il sait être sérieux lorsqu'il est nécessaire. La question de Candy le percute comme une claque en plein visage, lui renvoyant toutes ses erreurs en pleine face. « Je voulais pas... » Il ne sait pas quoi répondre. Il n'a que ces trois mots en bouche, les autres sont trop occupés à tourner dans son esprit pour y former une tornade infernale. Assume Oscar, assume tes gestes et tes paroles. Il n'a cependant pas le temps de répondre plus, Candy se lance dans des explications qu'il connait et qui sont en contradictions avec ce qu'il essaie de se faire croire. « Je n'ai pas dit ça. » Il relève enfin la tête vers elle. Il sait qu'elle est différente, plus mature que les autres de son âge. Mais passer du temps ensemble comme ils l'ont fait est dangereux pour elle comme pour lui. Elle ne serait pas heureuse de se cacher, et lui n'a plus le courage de faire semblant de ne pas l'aimer. Il l'a déjà fait pendant des années avec Nevaeh, recommencer tout à zéro lui semble impossible maintenant qu'il a Luce dans sa vie. Il ne veut pas mentir à sa fille en plus du reste du monde. « Je t'apprécie Candy, énormément. Tout ce que je t'ai dit, je ne l'ai pas inventé. Mais... Il faudrait que je change de job pour que ça marche, et ça je peux pas me le permettre. Je sais que ça n'excuse rien, je sais que je suis minable, t'as le droit de me sortir toutes les insultes qui te passent par la tête si t'en as besoin. Je sais aussi que j'ai clairement pas envie que tu disparaisses de ma vie, mais je peux comprendre que toi, tu préfères que je ne fasse plus partie de la tienne. » Cette dernière phrase aura été dure à dire, si dure qu'elle a brisé sa voix sur le dernier mot.

Il est rare que les gens qui la fessent souffrir le fasse volontairement, en général il la blesse pas intentionnellement. C’est ce qu’à fait Oscar. Au fond elle ne peut pas vraiment lui en vouloir car Candy connaissait les risques, que ce n’est pas une relation ordinaire et que même si la soirée qu’ils ont passé ensemble était parfaite, cela n’arriverait pas encore. Bien sûr elle espérait qu’il prenne le risque d’être avec elle, après ce qu’il s’est passé, mais elle comprend aussi qu’il ne veuille pas se faire virer. Malgré tout elle est triste car elle s’est attachée à lui et depuis leurs baisers encore plus. Au final ce qu’il lui propose c’est d’être amis comme avant mais qu’il comprend si elle n’en a pas envie. « Je veux pas t’insulter et je te trouve pas minable non plus. Tu sais j’ai pas envie de te sortir de ma vie, de plus te voir, de toute façon je vais forcément te voir...C’est juste qu’être loin de toi me rend triste mais être avec toi sans pouvoir te prendre dans mes bras me rend encore plus triste. » avoua-t-elle. Si avant elle arrivait à faire avec ses sentiments lorsqu’elle le voyait, à présent c’est bien plus dur. Ce n’est plus comme avant, ils ont passé un point de non retour. Une fois de plus il va falloir qu’elle apprenne à se reconstruire, à aller de l’avant, à l’oublier, comme elle a dû le faire avec tous les autres. Elle espère que Théia voudra bien venir manger de la glace avec elle et écouter ses histoires. « Je...je vais partir. » dit-elle finalement, les larmes coulant à nouveau le long de ses joues. La blonde attrapa ses affaires comme elle put, récupérant son sac et tout son bazar puis se leva. Cette conversation lui faisait tellement de peine, elle voulait s’en éloigner le plus possible, se retrouver seule, elle ne sait où, pour pleurer. Elle n’a plus d’endroit où aller mais elle trouvera bien. Les sièges de la bibliothèque feront bien l’affaire le temps d’une nuit. Elle enjambe Oscar et commence à descendre les escaliers, en pyjama, alors que le reste de l’université est désert.

À force de retourner encore et encore les mêmes questions dans sa tête, Oscar ne sait plus ce qui est bien et ce qui ne l'est pas. Il ne sait plus comment réagir, quoi penser, quoi faire pour empêcher à Candy d'être malheureuse. Il hésite d'abord à prendre sa main, à serrer doucement ses doigts à l'aide des siens pour apaiser son chagrin. Mais bien vite, il réalise que ce geste lui ferait probablement plus de mal que de bien. « Je sais, » soupire-t-il simplement. Il sait parce que lui aussi aurait aimé pouvoir la prendre dans ses bras. Il sait parce qu'au fond, il fait semblant de ne pas tenir assez à elle que pour réussir à se battre. C'est peut-être minable comme manière de penser, sûrement même, mais il sait qu'ainsi au moins, Candy ne souffrira pas sur le long terme. Elle trouvera mieux que lui, elle tombera amoureuse et il la regardera être heureuse en se rappelant que lui n'aurait pas pu lui apporter tout ce dont elle avait besoin. Lorsqu'elle lui annonce qu'elle va partir, Oscar lève rapidement la tête vers elle. Il aimerait la retenir, lui dire que sa présence ne doit pas la faire fuir. Il pourrait même s'en aller et lui laisser la salle pour la nuit. Sauf qu'à la place, il ne fait qu'entre-ouvrir les lèvres sans qu'aucun mot ne sorte. Quel abruti il est. Trop maladroit, trop peu subtil avec les mots qu'il choisi. Elle ramasse ses affaires pour ensuite s'en aller sans se retourner, laissant derrière elle un Oscar perdu et seul sur son fauteuil rouge. Probablement qu'il ferait mieux de la laisser. S'en aller serait plus judicieux et pourtant, il quitte son siège et sort de la pièce, cherchant Candy du regard. Lorsqu'il la retrouve proche de la porte d'entrée, il s'empresse d'accélérer le pas afin de pouvoir la rattraper. « Attends tu... tu peux pas partir comme ça, » articule-t-il maladroitement. Il donne l'impression qu'il parle de sa tenue alors qu'en réalité, Oscar a du mal de la voir quitter une conversation qui n'est pour lui pas terminée. Il ne se sent pas prêt à lui dire déjà au revoir.

Un tourbillon d’émotions contradictoires l’envahit, elle veut rester près de lui mais aussi s’enfuir à l’autre bout de la terre pour le sortir de sa tête. Les choses ne peuvent jamais être simples, d’habitude c’est après qu’elles se compliquent, pas avant que même que ça n’ait commencé. Candy se dit que parfois elle devrait juste arrêter d’y croire, se forcer de ne plus craquer pour le premier homme venu et se rester seule pour que personne ne puisse la faire souffrir. Mais elle n’y arrive pas, non, elle ne peut pas, c’est plus fort qu’elle. De sa vie amoureuse on pourrait probablement faire un film, la fille qui tombe sans cesse amoureuse et dont les relations ne durent jamais. Elle rencontrerait un jeune professeur gentil et attentionné, tomberait immédiatement sous son charme, leur relation serait difficile mais juste avant que le générique ne se lance, ils arrivent à être enfin heureux pour de bons ensemble. Si seulement la vraie vie était aussi simple, si seulement elle était un personnage de love actually. Enfin pas Mark car il n’a vraiment pas de chance pour le coup même s’il finit avec Kate Moss. Finalement Candy décide de partir, préférant fuir que de continuer à pleurer en sachant que tout est voué à l’échec. Elle s’en va sans qu’il ne dise rien, de toute façon elle ne s’attendait pas à ce qu’il la rattrape pour l’embrasser sur un fond de Taylor Swift. Alors qu’elle ne sait pas trop où aller et qu’elle se trouve près de la porte, la jeune femme entend des pas se rapprocher, elle se retourne presque en sursautant, des larmes plein les yeux. Elle avait peur que ce soit le gardien, elle n’a pas le droit d’être là. Il s’agit seulement d’Oscar qui vient, elle ne sait pour quelle raison. « Je...je ne sais pas quoi te dire de plus. » répond-elle seulement en baissant la tête. Elle lui a tout dit et ne pense pas qu’il y ait quelque chose à faire en plus. Elle finit par le regarder, cherchant son regard au travers des larmes qui lui brouillent la vue. « Je...je..je suis juste une fille debout devant un garçon et qui lui demande de l’aimer... » finit-elle par lâcher. C’est toujours plus simple lorsqu’on ne sait pas comment formuler ce que l’on pense de citer quelque chose, en l’occurrence coup de foudre à Notting Hill, film romantique par excellence qui finit bien.  

Les comédies romantiques ne sont rien d'autre que des histoires. Il n'irait pas jusqu'à dire que ce sont des mensonges, plutôt une sorte de réalité embellie qu'on raconte aux plus plus romantiques, à ceux pouvant y croire. Momentanément, Oscar y a cru, lui aussi. Il a eu l'espoir d'avoir une belle vie, une vie où peut-être il pourrait se marier et avoir des enfants avec la fille qu'il aimait. Sauf que jamais la réalité n'égalise la fiction, et jamais le chemin pour mener à cette vie si belle est sans embûche. Avec Candy, il s'est laissé bercer par cette illusion qu'ils pourraient être heureux le temps d'un soir. Il a pris le risque de mettre ses sentiments en jeu, de tenter le tout pour le tout et "on verra". Il ne voulait pas réfléchir, pas encore une fois. Il n'avait plus envie de se prendre la tête, pas après le départ soudain de Percy et encore moins après le passage de Nevaeh dans son chez-lui. Sa tête était en bordel, ravagé par la tempête qu'était sa vie. Et aujourd'hui, ce soir, rien ne s'est arrangé. Il est toujours autant perdu, mais il réalise à présent qu'il n'arriverait qu'à la blesser, cette douce Candy. « Je peux pas te faire des promesses que je ne pourrais certainement pas tenir, » articule-t-il faiblement, la tête baissée. Elle qui l'idéalise, elle qui voit en lui un homme qu'il n'est pas. Trop fort, trop beau, trop bon. Le fantasme du professeur pour une élève. Et plus la réalité lui tombe dessus, plus Oscar réalise que la meilleure des solutions est certainement de la laisser s'en aller. « Où est-ce que tu vas dormir ? » lui demande-t-il en arrivant enfin à croiser son regard. Il ne pourra probablement pas lui proposer de dormir chez lui, mais Oscar a au moins besoin d'être rassuré en sachant qu'elle ne passera pas la nuit dehors.