the greatest gift of life is friendship, lily-anaëlle+violet

La vie était drôlement faite. Elle apportait avec elles des parcelles de bonheurs et frappait à d'autres moments avec la tristesse. Elle ne réservait que des surprises. Mais dans ces moments, tantôt heureux tantôt plus dramatiques, je pouvais compter sur mes amis. Lily, en particulier. Aujourd'hui, journée typique de printemps à Bowen, il faisait beau et chaud. Le diction populaire après la pluie vient le beau temps n'avait pas plus de sens qu'en ce jour. Les derniers jours avaient été rocambolesques pour ma part. La tempête avait laissé des fracas non pas dans la boutique, mais dans mon for intérieur. Je prenais donc toutes les occasions possibles pour me changer les idées. J'avais donc fermé la boutique sur l'heure du lunch pour passer du temps de qualité avec ma chère amie que je n'avais pas vu depuis un moment déjà.

Panier à la main afin de transporter les essentiels nécessaires pour notre pique-nique, je la rejoignais donc sous l'ombre d'un grand arbre dans un joli parc. Elle était déjà là, assise sur une grande couverture apposée sur le sol, à m'attendre patiemment. Je pressais le pas pour la rejoindre, espérant voir par la même occasion la petite Lexi qui devait bien avoir grandi. Lily! m'exclamais-je en arrivant à ses côtés. C'était bon d'enfin la revoir. Je pris place à ses côtés dévoilant le contenu de mon panier. Des fromages, des fruits, des craquelins et une bouteille de bulle.

Lexi approchait de ces sept mois, plus elle grandissait, plus tu te sentais emplie d'une grande fierté. Avec Nelligan vous aviez conçu une très belle fille. Pour le moment c'était encore un petit bébé mais elle allait vite changer. Elle commençait à marcher à quatre pattes et à courser le chat. Pauvre Peach, elle aimait mieux lorsqu'elle n'avançait pas. Et ce qu'elle ne sait pas c'est que bientôt elle marcherait et le clavaire du chat serait encore plus grand. Même si Peach venait souvent vers Lexi lorsqu'elle faisait la sieste pour s'endormir près de son lit. Si ça, ce n'était pas de l'amour alors tu ne savais pas ce que c'était. Tu avais eu un message de la part de Violet, tu ne l'avais pas vu depuis plusieurs semaines maintenant. Depuis que tu étais maman tu accordais beaucoup de temps à ta fille et très peu pour le reste. La preuve, tu devais passer moins d'une fois par semaine à la librairie. Le travail de toute une vie pour toi, que tu laissais de côté. Tu avais accepté l'offre de Violet pour le pique-nique, te rendant sur place un peu plus tôt puisque tu en profiterais pour promener Lexi. Il faisait si beau à Bowen, c'était vraiment agréable. Elle avait fini par s'endormir et tu l'avais laissé dans sa poussette, la plaçant bien à l'ombre. De loin, tu voyais ton amie arriver avec un gros panier, pressant un peu le pas. « Violet ! » Tu affichais un grand sourire sur le visage alors qu'elle prenait place à côté de toi. Tu t'approchais d'elle pour l'enlacer. Tu étais vraiment contente de la voir, contente de pouvoir parler avec quelqu'un de ton âge, quelqu'un qui pourra te répondre aussi. « Comment vas-tu ? » demandais-tu en découvrant l'intérieur de son panier. Il n'y avait que de bonnes choses, vous alliez vous régaler. Il y avait même une bouteille, tu espérais qu'il y aurait un peu d'alcool dedans, bien que souvent, tu évitais de boire, Lexi n'allait pas pouvoir s'occuper d'elle toute seule.  

À peine arrivée à l'endroit de rendez-vous, Violet pressa le pas impatiente de retrouver son amie qu'elle n'avait pas vue depuis si longtemps. Un bébé, ça changeait des vies. Violet l'avait compris. Elle n'avait pas cherché à forcer les choses, laissant Lily et Nelligan vivre leur petit bonheur de nouvelle famille entre eux, dans le cocon de leur bonheur. Il était certain que l'adition d'un nouveau membre dans la famille changeait la routine, et les priorités. Entre les couches, les biberons et le manque de sommeil, Lily et Violet n'avaient pas eu beaucoup de temps pour passer un moment de qualité entre bonnes amies. Mais aujourd'hui les choses allaient changer. Lexi avait grandit, sept mois s'étaient écoulés entre leur dernière rencontre. L'Américaine avait fait une visite rapide à l'hôpital le jour de la naissance, apportant par le fait même une peluche lapin à la petite princesse qui venait de naître. Une peluche qui représentait pour la blonde beaucoup puisqu'elle lui rappelait son doudou favori lorsqu'elle était elle-même une petite fille. Il fallait dire que, entre la nouvelle routine des Malinowski et la vie occupée de Violet, il n'y avait pas beaucoup de différence. Elle avait été aussi chargée qu'eux, la faute de leur distance ne résultait pas seulement de la venue au monde de Lexi. Les choses avaient tout simplement changé et elles avaient, malheureusement pour Violet, vieilli.

Super, je suis tellement contente que tu aies accepté mon invitation. Comment tu vas belle Lily ? Répliqua-t-elle après avoir fait la bise à son amie. Elle desservit le panier de piqueniques en écoutant la réponde de la brune. Elle était heureuse de passer un moment entre filles, bien trop prise dans ses histoires de coeurs depuis les derniers jours. Leur escapade lui faisait déjà du bien. Elle aperçut Lexi qui dormait dans sa poussette, semblant trop bien dans son sommeil du grand air frais. Tu as amené Lexi! Mais qu'est-ce qu'elle a grandit, dis-donc. Tu la regardais dormir un instant, fasciné par son côté angélique. Le baby fever se faisait ressentir alors que, dans les faits, elle ne pensait pas être mère un jour : beaucoup trop occupée dans sa vie en général pour avoir le temps de s'occuper d'un petit être. Elle ne cacha tout de même pas son envie soudaine de fonder, elle aussi, sa propre famille un jour. Violet déboucha la bouteille de bulle, légèrement alcoolisée, et tendit un verre à son amie avant de trinquer à leurs retrouvailles.

Une fois sur place tu ne mis pas très longtemps à trouver ton amie. Elle avait tout préparée, tu n'avais qu'à mettre Lexi à l'ombre et t'installer à côté d'elle. De profiter d'un moment entre filles. Tu n'avais pas eu ça depuis le départ d'Ally ainsi que de Sara. Il y avait Eibell aussi mais elle était très occupée en ce moment. Et il y avait aussi Concho mais ce n'était pas la même relation. C'était un homme et tu gardais une certaine pudeur avec lui, alors que tu le connaissais depuis longtemps et qu'il avait partagé ton lit - en toute innocence, c'était plus certains soirs où tu lui partageais un peu de ton monde magique et qu'il finissait par s'endormir. « Je vais très bien, et toi ? » demandais-tu avec un grand sourire. Tu détaillais ton amie, tu ne l'avais pas vu depuis plusieurs semaines et tu la trouvais radieuse. Tu avais bien hâte de savoir ce qu'il se passait dans sa vie. Peut-être qu'elle aurait quelques histoires croustillantes. Et tu parlais d'amour, tu avais besoin de romance. C'était ton carburant, presque une drogue parfois. Tu ne pouvais pas t'en empêcher. « Plus les jours passent et plus elle grandit, j'ai parfois dû mal à revoir le tout petit bébé que j'ai mis au monde. » C'était étrange quand tu te disais qu'à sa naissance tu la trouvais vraiment moche. Tu avais fait rire Nelligan le tout premier jour où tu avais pu la tenir dans tes bras. Surtout après l'accouchement catastrophe que tu avais eu. Et puis elle avait grandi, elle avait changé et maintenant tu la trouvais adorable. Elle utilisait beaucoup son visage et faisait très facilement des mimiques. Bien souvent, ça te faisait rire et le reste du temps, tu la trouvais incroyable. De cette façon tu avais l'impression qu'elle communiquait avec vous. Elle ouvrit une bouteille de bulle, avant de t'en tendre un verre. Tu le prenais avec un grand sourire attendant qu'elle soit servie pour trinquer à vos retrouvailles. « Ça faisait longtemps, ça marche bien pour toi à la boutique ? » Pour toi, ça tournait un peu au ralenti mais c'était tout à fait normal. Il y avait toujours des moments plus ou moins lents. Tu étais en plein dedans mais tu savais que dans quelques semaines, ça serait à nouveau la folie, surtout avec les soirées d'avant-premières. Cela fonctionnait toujours aussi bien. 

Elle ne savait pas si l'approche de la trentaine ou la présence plus marquée d'enfants dans son entourage était en cause, pourtant Violet avait bien le baby fever. Lexi, endormie dans son landau, avait éveillé en elle un instinct qu'elle ne croyait pas avoir. Un sentiment maternel qu'elle ignorait être en mesure de ressentir. Chaque fois qu'elle la voyait, elle se sentait ainsi. Et chaque fois qu'elles se séparaient, elle vivait un chagrin qu'elle ignorait la cause. L'Américaine, ayant toujours été solitaire, commençait, avec l'âge, à rêver elle aussi d'une petite vie passible avec sa famille. Pour ce faire, il fallait mettre de l'ordre dans sa vie et dans sa tête, chose qui était plus simple à dire qu'à faire. Ça va. Répondit-elle en sortant de ses pensées alors qu'elle rêvassait en regardant Lexi dormir paisiblement, reposant le regard sur Lily qui l'observait. Les jours qui venaient de passer avaient été une montagne russe d'émotions pour la commerçante, en commençant par les rapprochements inédits avec celui qui semblait être son ennemi craché jusqu'à présent, mais pourtant elle se sentait bien. Comme toujours. Rien ne pouvait l'atteindre. Elle pourrait tout perdre et Violet n'en verrait pas un problème. Si Obélix était tombé dans une marmite de druide lui donnant une force surhumaine, Violet, elle, était assurément tombée dans une potion de positivisme. Si tu savais à quel point je t'envie, Lily. J'ai peur de ne jamais pouvoir gouter au plaisir d'être une mère. Lui confia-t-elle avant de déboucher une bouteille de bulles. Malgré son positivisme légendaire, Violet était aussi très réaliste. Presque trente ans au compteur, sans relations sérieuses dans la mire, il était alors bien difficile pour elle de fonder une famille quelconque. Elle se résignait donc à profiter des enfants des autres, rêvassant à ce qu'elle n'avait pas. Lexi était adorable, même lorsqu'elle dormait. Violet comprenait tout de même la fatigue qu'elle lisait dans le visage de son amie. Les enfants étaient loin d'être une tâche facile. Elle ne la remercierait jamais assez d'avoir accepté son invitation, malgré sa nouvelle vie chargée. Les deux amies trinquèrent à leurs retrouvailles, les bulles descendirent agréablement dans sa gorge de la blonde qui reposa son verre sur la pelouse avant d'ouvrir les fromages qu'elle avait emportés. La boutique roule à merveille. J'ai dû essuyer les dégâts de la dernière tempête, mais autrement tout fonctionne mieux que ce que je pourrais espérer. Dit-elle en évitant le regard de son amie. Il n'y avait pas que les dégâts causés à la boutique qu'elle se devait d'essuyer, en cause de cette tempête. Il y avait aussi tout ce qui avait été laissé dans son coeur, dans sa tête et sur sa peau. Mais elle ne savait comment aborder le sujet, elle qui était connue pour détester celui qui avait fait autant de ravages.

Tu avais déposé ton bébé à quelques pas de toi, la laissant profiter de la douceur à l'ombre. Il faisait vraiment beau à Bowen et tu ne voulais pas que Lexi se deshydrate ou qu'elle fasse une insolation. Tu te souviens que petite, tu en faisait souvent à force de passer des heures à lire sous le soleil, sans prendre la peine de partir avec une bouteille d'eau. En tant que nouvelle maman, tu allais faire de ton mieux pour être vigilante. Tu regardais ton amie jeter un coup d'oeil à ton bébé avant de te faire une petite révélation. Elle avait peur de ne pas connaître le bonheur que tu pouvais vivre. Tu attrapais alors sa main, sans la moindre hésitation. « Violet, tu as encore longtemps tu sais, tu n'as même pas trente ans !  » Tu savais très bien ce qu'elle ressentait. Pendant longtemps tu avais cru que tu ne connaitrais jamais ce bonheur, pour la simple et bonne raison que tu avais perdu Nelligan. Tu avais été plusieurs fois amoureuses mais il n'y a qu'avec Nelligan que tu avais envisagé d'avoir un jour une famille. Puis la vie vous avait donné une nouvelle chance et vous l'aviez saisi sans plus attendre. Sa peur était donc légitime. « Ça arrivera, et quand ce sera le cas, tu feras une superbe maman. » Si elle doutait, toi non. Tu ne pouvais pas imaginer quiconque dans ton entourage, vieillir sans avoir d'enfants. Après tu n'avais pas beaucoup d'amis non plus, la plupart des tiens avaient pris le large pour d'autres contrées, te laissant sans nouvelles. Mais Violet finirait par rencontrer un homme charmant, elle l'epouserait, tu serais même présente ce jour-là et elle aurait un enfant à son tour. Elle avait encore au minimum une dizaine d'années pour atteindre ce but, c'était suffisant quand on y pense. Seulement si on était une optimiste dans l'âme, et Violet en était une. Parfois même plus optimiste que toi. « Tant mieux, j'ai lu que plusieurs boutiques ne s'étaient pas relevées après la dernière tragédie. » La ville ne cessait de s'agrandir, les catastrophes naturelles permettant de faire de la place. Tu étais moins touchée parce que ta boutique était en centre-ville, mais le risque n'était jamais loin. Tu avais eu une proposition de rachat, que tu avais refusé sans même prendre le temps d'y réfléchir. C'était l'oeuvre de ta vie, tu ne voulais pas la voir disparaître, bien que ton affaire était un peu moins florissante. « Et les amours alors ? » demandais-tu alors avec un grand sourire sur le visage. Tu vivais le parfait amour, fini les rencontres alors si tu voulais en vivre par procuration, il fallait que ton amie te raconte les siennes.

Lexi était sur la couverture que Violet avait posée par terre, sous l'ombre que le grand arbre leur faisait. Elle jouait avec l'un de ces bidules colorés qui faisaient passer le temps aux enfants, rien que la blonde ne connaissait vraiment. Il est vrai que, malgré les enfants qu'il pouvait y avoir dans son entourage, Violet ne connaissait rien en la matière. Elle ne pouvait être certaine d'être en mesure de relever le rôle de mère un jour. Elle ne s'était même jamais vraiment posé la question, l'Américaine, mais alors que les trente ans approchaient dangereusement ces questionnements venaient chatouiller son esprit. Elle jalousait la situation de sa meilleure amie, sans réellement savoir ce qu'elle jalousait au final. C'était tellement différent de ce qu'elle vivait au quotidien, tellement différent de sa réalité, et elle se surprenait à s'y plaire, à s'imaginer entourer d'enfants. Mais pour cela, Violet avait encore un bout de chemin à parcourir. La main de Lily vient toucher la sienne dans un geste qui se voulait réconfortant. La blonde sourit tendrement à son amie qui tentait de lui remonter le moral, moral qu'elle n'avait pas réellement perdu. Le positivisme, c'était une partie intégrale de sa vie, et comme toujours il resurgirait de son naturel. C'est probablement parce que je te vois, si heureuse avec Lexi et Nell... Je sais que ça n'a pas toujours été facile pour toi, je pense que c'est un peu l'envers du décor du mariage et de la maternité, mais je t'avoue que j'aurais envie, moi aussi, de vivre ces choses-là. Un jour, peut-être. La maternité, c'était loin d'être facile. D'abord, il fallait porter cet être vivant, neuf mois durant, dans un corps qui ne cesse de subir des changements. Il fallait supporter les hormones et les rendez-vous médicaux, les gens qui voulaient sans cesse toucher le ventre ou prédire le sexe du bébé. Ceux qui donnent des conseils alors que personne ne leur a demandé. Puis, il fallait trouver l'homme avec qui il était possible de vivre tout cela de façon heureuse, sans prise de tête. Sans compter les complications que cela pouvait comporter, et l'accouchement pénible qui venait à la fin de ces neuf mois de portée. Comment tu t'en sors, toi, avec tout ça ?
Les derniers jours avaient été essoufflants pour la commerçante. Après la grande tempête, elle avait dû essuyer les dégâts sur son bout de plage, sans compter les pertes de vente qu'elle avait faite. Souvent, après de grosses tempêtes comme celles-ci, peu de gens avaient envie de frôler les vagues, trop peureux par leur grosseur causée par les restes des vents tropicaux. J'ai eu beaucoup de chance... Par contre, j'y suis restée coincée toute la nuit. Je peux t'assurer que c'était effrayant par moment. Toute la nuit, oui, et pas seule. Au petit matin, c'est avec Terrence qu'elle était ressortie de sa boutique, celui qui était connu pour être son plus grand compétiteur. De façon totalement ironique, le sujet se transposa vers les amours de la belle qui ne savait quoi répondre à son amie, prise de court. Où en était-elle, elle qui était obsédée par le bleu de ses yeux. Violet pouvait comprendre Lily de s'y intéressée, mariée depuis un moment déjà, un enfant à sa charge, sa vie amoureuse était loin d'être aussi rocambolesque que celle de son amie. Et heureusement. Violet ne pouvait qu'espérer, un jour, être au même endroit qu'elle. Tout en redonnant à Lexi le jouet qu'elle avait lancé, lui accordant au passage un sourire de tendresse, elle prit parole. C'est un peu le néant... Elle gloussa, sans savoir comment aborder le sujet tant il était incroyable. Il y a cet homme qui hante un peu mes pensées depuis quelques jours... J'ai peur de ce qui m'arrive quand je pense à lui.

Être maman et une épouse te donnait parfois l'impression que ta vie d'avant n'existait pas. Comme si tu n'avais jamais vécu avant, tout devenait si obsolète. Tu étais si heureuse, tu n'avais plus besoin de trainer les bagages émotionnels, plus besoin de se languir et de désespérer de ne pas trouver l'amour. Tu pouvais faire une jolie croix rouge sur les soirées de déprime célibataire, coincée sur un canapé, un pot de glace à la main et des comédies romantiques qui bourrent le crâne d'idées préconçues de l'amour. Des idées fausses puisqu'il n'y avait qu'au cinéma que ça se passait ainsi. « Je crois que c'est la quête principale de chaque femme dans le monde ! » Au fond certaines ne voulaient pas être maman et ça tu le concevais sans problème. Mais personne n'a envie de mourir seul. On désire tous trouver une personne qui arrivera à nous supporter et avec qui on partagera de bons moments. On a envie d'une relation qui dure et qui nous offre de la joie. Rien de plus que ça. « Et je suis heureuse d'avoir Lexi mais un enfant ça chamboule toute une vie et je crois que personne n'est jamais préparé à ça ! » Vos nuits les premières, malgré vos mises en situation avec des réveils pour vous préparer à entendre les pleurs du bébé et pour vous faire savoir les dommages sur le corps par la suite. Vos discussions aussi, toi la première tu avais très peu de mal à ne pas parler de Lexi. Comme si tu avais besoin de détailler à qui veut l'entendre le développement de ta petite fille. Au point d'en faire un peu trop parfois. Tu te calmais mais ce n'était pas encore tout à fait ça. « Je vais devoir reprendre mon temps plein, ça tourne au ralenti en ce moment, mais c'est souvent ainsi pendant cette période alors je ne m'inquiète pas trop. »  Ça allait bientôt faire 10 ans que tu avais ta boutique. La première année tu avais paniqué et tu avais réagi l'année d'après mais tu avais constaté aucun changement significatif. Puis le temps était passé et ta boutique tenait bon. Sûrement parce que tu avais su te développer. Mais ce n'était pas toujours évident, tu restais une librairie. « Tu es bien courageuse, à ta place je n'aurais pas pu m'en sortir seule. » Tu te rappelais une tempête des années en arrière qui t'avait obligé à te confiner dans l'arrière boutique qui possèderait une porte en métal. Tu avais été accompagnée d'une jeune femme ce jour là mais tu n'arrivais pas à t'en souvenir plus que ça. Tu te rappelles surtout la peur qui t'avait envahie. Comme pour le braquage dans ta boutique ou le séisme. « Tu es si bien discrète que ça donne envie de te poser des questions à la pelle. Mais je voudrais savoir ce qui te faire peur ! » Après tout tu avais connu pas mal de déboires amoureux au cours de ta dernière décennie. Tu avais connu pas mal de sentiment, pas mal d'hommes différents. Des bons comme des mauvais. Alors peut-être que tu aurais quelque chose de bon à lui conseiller.

Elle pouvait reconnaître que la maternité n'avait rien de facile, et que ce que Lily avait vécu lui avait sans doute arraché un saut de l'armes. En fait, être mère en général, était probablement l'épreuve la plus difficile d'une vie. Alors pourquoi les femmes étaient-elles autant en quête de cet expérience ? En quête de l'amour à donner à cet enfant qui n'attendait que nos soins et nos tendresses ? Violet ne le savait point, mais elle faisait partie de celles qui en rêvaient et qui chérissaient ce rêve. Rêve qu'elle n'aurait peut-être même pas la chance de vivre un jour. Elle avait toujours voulu avoir des enfants avant ses trente ans, mais à l'aube de l'âge fatidique, elle devait se rendre à l'évidence. La vie n'était pas celle qu'on avait prévue. Violet acquiesça silencieusement les paroles de son amie, hochant la tête. Elle pouvait comprendre ce qu'elle lui disait, que les enfants chamboulaient une vie, et qu'on en était jamais réellement prêt, mais qui était vraiment prêt à quoi que ce soit dans la vie ?
Violet était heureuse d'apprendre que Lily allait bien et que sa vie reprenait un rythme dit normal. Que le boulot ne l'a rendait pas anxieuse plus qu'il ne le fallait. Les joies d'être commerçante, hein! Mais tu es excellente dans ce que tu fais tâcha-t-elle de la rassurer. Elle le pensait, Violet, que son amie était excellente dans ce qu'elle faisait. C'était la meilleure libraire de la ville, elle conseillait comme personne ne savait le faire et elle faisait sentir ses clients comme chez eux, dans son havre de paix. Alors que la brune s'enquit à poser des questions à son amie, Violet se voilait le visage dans sa chevelure. J'ai peur de m'attacher en vain.. Elle soupira. Je ne t'ai pas tout dit, Lily... la personne qui me hante, c'est la dernière personne que l'on suppose être fait pour l'amour...

Même si elle ne connaissait pas ce que tu vivais, elle ne pouvait s'empêcher d'être en accord avec toi. On peut penser pendant des années être prête à devenir mère mais il n'y a qu'en le devenant vraiment qu'on se rend compte de la charge de travail que ça peut impliquer, de ce qui change réellement au quotidien. La fatigue se fait plus présente, mais il y a d'autres choses, comme l'émerveillement. Cette sensation que tu avais chaque matin en te réveillant et en découvrant le visage de Lexi, tu tombais à nouveau sous le charme de sa petite tête et tu te sentais prête à affronter la journée comme si c'était la première. Tu espérais que ce sentiment ne s’estomperait jamais. C'est aussi celui-là qui faisait que ton couple perdurait dans le temps. Malgré la routine, il y avait une certaine découverte de ton mari chaque jour, te faisait l'aimer un peu plus. Elle te confirmait que tu excellais dans ton métier et tu étirais un grand sourire sur ton visage. Tu doutais souvent de toi, mais s'il y avait bien un domaine où ça n'arrivait presque jamais c'était pour ta carrière professionnelle. Tu étais inspirée par ce que tu faisais et tu appréciais le contact clientèle, tu appréciais d'aider les gens à trouver des livres, que ce soit pour se détendre ou pour apprendre. « C'est le risque de l'amour, on peut tout y gagner, comme tout y perdre ! Je crois que c'est le jeu le plus compliqué dans la vie. » Parce qu'on ne pouvait jamais avoir de vraies certitudes. Aujourd'hui c'était l'amour fou avec Nelligan mais rien ne t'indiquait que demain ce serait toujours le cas. Ou même dans dix ans. Tu avais plus de chance de gagner au loto que de prévenir ton avenir amoureux. La preuve, tu avais souvent été si déçue par le passé, même si Nelligan t'aimait plus que tout au monde et que vous étiez les parents d'une merveilleuse petite fille, il pouvait disparaître du jour au lendemain. Que tu le veuilles ou non. L'amour était terrible parce qu'on pouvait toujours finir perdant même lorsqu'on a une main gagnante. « Un homme incapable de s'attacher ou un homme à qui on ne peut se fier ? » Tu en avais connu des hommes dans ta vie, tu avais parfois trouvé le bonheur, mais il n'avait jamais duré très longtemps. Des hommes qui ne t'aimaient pas et qui s'était juste servi de toi pour prendre du bon temps, des hommes à qui tu aurais confié ta vie mais qui disparaissais du jour au lendemain, sans te donner la moindre explication, le moindre signe de vie.

Même si son histoire présente semblait rose et calme, Violet savait que son amie avait dû passer par dessus plusieurs embuches avant d'arriver où elle était : maman et mariée. Personne ne l'avait plus facile qu'un autre, toutes les situations interrrelationnelles étaient uniques en son genre. Certaines évoluaient plus rapidement que d'autres, certaines étaient plus simples que d'autres, mais elles n'étaient pas comparables. En amour comme en amitié. Et c'était parfaitement imparfait ainsi. C'était la beauté de la chose. Les miracles de la vie qui faisaient que, parfois, une personne inattendue se pose sur notre chemin, sans crier garder, sans avertir, pour ébranler tout ce que nous pensions connaitre de la vie jusqu'à présent. Pour changer nos opinons, nos visions et pour nous aider à grandir et à s'épanouir. Et pour se rendre où Lily était présentement, certes épuisée par les changements de sa vie, mais d'autant plus épanouie, il fallait passer par toutes les périodes de questionnements et d'insécurités qu'il y avait sur la route. Lily était belle à voir, rayonnante malgré le manque de sommeil. Elle inspirait Violet à faire de même dans sa vie, à se laisser bercer dans ce qui l'attendait sans vraiment se poser de questions pour se permettre d'être heureuse, véritablement heureuse.
Lily avait raison, l'amour c'était le jeu le plus complexe auquel on pouvait se laisser prendre. Et Violet, elle n'avait rien d'une gambleuse. Elle ne savait pas vraiment jouer. La maturité de son amie rassura la blonde, la ramenant plus sur terre qu'elle ne l'était déjà. Rien n'était sur, rien n'était coulé dans le béton. C'est de savoir qu'on peut tout perdre qui fait le plus peur, je crois.. Avoua-t-elle en regardant dans la direction de Lexi qui dormait encore paisiblement. Elle était le fruit d'un amour véritable, la preuve qu'on pouvait tout y gagner en se laissant aller. Un peu des deux ? admit-elle en replaçant une mèche rebelle qui s'était ébouriffée au vent. Il fallait réfléchir pour répondre à cette question. Terrence le disait lui-même : il était incapable d'aimer. Incapable de s'investir dans une relation. Incapable de ressentir de la chaleur pour quelqu'un. Il se laisser aller, sans se poser de question, se guider où son corps voulait l'amener. Ils avaient certes eu une relation intime, l'histoire d'une nuit, mais il était impossible, inconcevable même, pour lui de se laisser charmer par la faiblesse du corps de son amante et de s'avouer amoureux. Du moins, c'était ce qu'il laissait paraitre. Violet ne savait pas, non plus, à cet instant précis, s'il était digne de confiance. Ils étaient, à ce jour, les pires ennemis de toute la ville et ils ne se connaissaient pas autrement. Était-ce une tactique pour la faire tomber de haut ? Était-ce réellement ce dont il avait envie ? Non seulement ils ne s'appréciaient pas spécialement, à la base, mais l'homme était au centre de rumeurs concernant son commerce. Du trafic d'armes et des histoires peu légales aux yeux des corps policiers. Rien que l'on voulait avoir comme allié. J'ai fait l'amour avec Terrence... Voilà, c'était dit. Haut et fort. Pas seulement dans sa tête. On est resté pris ensemble le soir de la tempête... et c'est arrivé, sans vraiment crier gare.. Et je suis totalement perdue.