Jusqu'à ce que la mort nous sépare !!

Je fronçai les sourcils. « En quoi j’exagère ? C’est pas ça l’idée derrière le jeu ? Tout le monde crève et à la fin il en reste qu’un ? » Demandais-je. C’était pourtant dans mes tops films avec Freja et Tahlia, alors il me semblait bien être le mieux placé pour résumer l’objectif. Et ce dernier homme debout, ce ne serait certainement pas moi, ça j’étais au moins prêt à l’admettre. Mais j’allais mourir dans la gloire, on pouvait au moins m’accorder ça. « Des perruques, ça existe ! Ils en font des vraiment réalistes en plus maintenant … » Étrangement, je trouve que la perruque irait franchement mieux à Jeff qu’à moi, mais tout est une question de perspective, ou de goût. Alors qu’on parlait de ma capacité à me foutre la honte en public sans trop de honte, Jeff releva que ça me faisait un truc de moins à me soucier. « Quoi tu trouves que j’ai beaucoup de trucs dont je devrais me soucier ? » Y’avait que moi qui avais le droit de le dire, que j’étais en train de foutre ma vie en l’air. Plus assez d’argent pour faire tourner Head Ahead comme il faut, plus de petite amie mais un gamin ça oui par contre ! J’en avais tellement dans la tête que je n’avais même plus la place pour faire de bonnes blagues. La preuve, je n’arrivai même pas à terminer celle qui débutait pourtant si bien. Jeff était pendu à mes lèvres mais malheureusement, la déception fut grande alors que je baissai les bras. « Depuis quand mon cerveau me retient de dire de la merde ? Il a eu un upgrade dont j’ai pas eu connaissance ? » Demandais-je dans un rire. Mais ouais, c’était plutôt rassurant de savoir que j’en avais un. Il faisait peut-être la grève, par contre. « Ouais, ces sorcières … » Confirmais-je pour les rousses, hochant la tête, un peu perdu. Mais pas perdu au point de ne pas voir les coupes vides devant nous. Signal d’alarme. Je poussai Jeff au vice en lui demandant s’il en voulait un autre. « Ouais, ouais, le dernier. » Dis-je avec très peu de conviction avant de faire signer au serveur de nous amener deux fois la même chose encore. Comme s’il lisait dans mes pensées, mon meilleur ami me mit en garde pour mon propre état. « Ah non tu veux pas ça ? Pourquoi ? T’as peur qu’en plus du micro, Eilynn ait mis une caméra intégrée, et qu’elle apprécie un peu trop le spectacle ? » Demandais-je avec un sourire malicieux. « J’pourrais pas la blâmer, check-moi ce corps. » Dis-je en me désignant. Les verres arrivèrent finalement devant nous et j’en plaçai un directement dans la main du futur marié. Pas le temps d’niaiser.

Alors que Jeff me mentionna que ça faisait un petit moment déjà que les perruques étaient réalistes, je secouai brièvement la tête, dubitatif. « Alors c’est peut-être ma grand-mère qui savait pas les choisir … » J’avais peu de souvenirs de mes grands-parents peu présents dans ma vie, mais je gardais bien celui-là de ma grand-mère paternelle qui avait plutôt l’air d’avoir une moufette sur la tête. Non, moi, si j’avais à être Miss Bowen, j’aurais une magnifique chevelure rousse, soyeuse et brillante. Aucune raison d’avoir honte. Mais plein de raisons d’avoir d’autres soucis en tête, selon Jeff. « Ouais bah rappelle-moi de t’voler ton Boward du plus marrant, la prochaine fois que je viens chez toi. Tu ne mérites clairement plus un trophée à mon nom. » En réalité je n’étais pas vraiment offusqué, je faisais ça pour le faire culpabiliser un peu mais je voyais que ça ne fonctionnait pas trop, en fait. Il préférait continuer à inventer des histoires sur les rousses et des puces implantées dans mon cerveau pour que je taise mes blagues à tout jamais. « Ça doit être ça. Elles ont tellement pas d’humour qu’elles cherchent à en éradiquer toute trace sur terre. » Parce que soyons honnêtes, quand mon cerveau ne me retenait pas, j’étais en feu ! Un peu comme avec cette histoire de micros et de caméras cachées, moi je me trouvais assez drôle, même si j’avoue ça commençait à avoir fait son temps. Je commandai finalement deux autres verres, même si Jeff me rappelait un peu à l’ordre puisqu’il était de garde ce soir à la caserne. « D’accord, chef. » Répondis-je en sentant qu’il n’y avait pas place à répliquer. Jeff semblait véritablement sérieux par rapport à ça et en même temps, je ne pourrais pas le blâmer, il avait absolument raison. Je me contenterais de ces deux verres, en me promettant toutefois qu’on se rattraperait à son enterrement de vie de garçon. Suite au compliment détourné de Jeff en me disant qu’on avait vu pire que mon corps, je souris à l’entendre dire que j’avais Mister Bowen en chair et en os devant moi. « Plus pour longtemps, j’te rappelle … ! Bientôt y’a un p’tit jeune qui te remplacera dans le cœur de toutes ces dames … » Parce que ouais, Jeff se faisait vieux ! Et moi aussi, inévitablement. « Non mais tu sais maintenant qu’Eilynn et moi on s’voit même quand t’es pas là … j’ai plein d’opportunités pour te faire du tort ! » Mais je ne ferais jamais ça. Et même si j’essayais, ça ne fonctionnerait pas. La blonde n’avait d’yeux que pour Jeff, la preuve elle le marierait bientôt. « Des soirées bunga bunga ? » Demandais-je en riant, devinant ce que c’était malgré l’expression bizarre du pompier. Pour moi, Berlusconi ça sonnait plus comme un nom de peintre.

À croire que je faisais une fixation sur Eilynn, quand Jeff me parla du vol de son Boward et me dit que je saurais pourquoi s’il débarquait un jour chez moi en me criant de le lui rendre, j’haussai rapidement les sourcils. « P’t’être bien que tu gueuleras plutôt « rends-la » moi ! Hein Eilynn ? » Non, non, je n’en revenais pas de mon numéro de micro caché. Je commençais à devenir lourd, avec l’âge. Tout ça c’était évidemment pour me moquer de Jeff, puisque visiblement cette annonce de mariage me rendait un peu fou. Un peu comme l’effet que me faisaient les rousses. Je les aimais tout comme j’aurais voulu les éviter, toutes. Parce que j’étais tellement obsédé par cette couleur de cheveux, que j’en faisais toutes les conneries possibles. C’est pourquoi je m’adonnais avec autant de plaisir à ce petit jeu d’insultes gratuites envers les rousses. « Si, je te jure. » Conclus-je tout simplement quant à cette histoire d’éradiquer l’humour. Et en éradiquant l’humour, on m’éradiquait moi, forcément. Ahem, buvons. Une fois les deux autres verres face à nous, je rappelai à mon meilleur ami que son heure de gloire tirait à sa fin et qu’un p’tit jeune allait bientôt le remplacer. J’ignorais évidemment encore que ce serait pourtant un mec plus vieux que nous deux qui remporterait la couronne cette année. Enfin, plus vieux, d’une ou deux années, rien de plus. À la réflexion de mon ami, je fus mindblown. Ça expliquait peut-être pourquoi j’avais eu tellement de rebondissements sentimentaux dans la dernière année. J’avais atteint la trentaine. « Woh, dude. Truer words were never spoken . Tu viens de changer, genre … toute ma perception face à la vie. » Non, vraiment, l’émoticône avec la tête qui explose en fumée représentait vraiment mon état actuel. Ça ne faisait que renforcer mon envie d’en profiter. Pas un très bon modèle pour Maxwell, ça. Au moins, j’avais mes limites. Genre, Eilynn, sans blague, c’était pas touche. Elle m’aurait jamais touché de toute façon. « En vrai je suis persuadé que ça lui irait super bien. » Et là, je l’imaginai en rousse, songeur. C’est Jeff qui me déconcentra avec ses soirées bunga bunga ou je sais pas quoi. « Tu serais jaloux si j’en avais fait ? » De toute façon j’avais aucune idée de quoi on parlait. « Quoiiiii ? Racoooonte. Tu sais que j’adore tes histoires croustillantes de boulot. » Et je posai ma tête entre mes mains comme une adolescente friande de potins.  

J’haussai les épaules. « Tout lui irait bien à Eilynn de toute façon. » Gosh, on aurait vraiment cru que j’étais amoureux d’elle, à force de la complimenter de la sorte ou de faire une fixation quant à l’idée qu’elle nous écoute. À croire que je ne pensais qu’à elle. Je vous rassure, entre Eilynn et moi, c’était purement amical et platonique. Elle ne s’intéresserait probablement jamais à un homme aussi immature que moi, de toute façon, encore moins après les confidences que je lui avais faites quelques mois auparavant. Ça ne m’avait pas donné fière allure. Et pis en plus, elle venait de dire oui à Jeff alors la question ne se posait même pas. Ils étaient amoureux par-dessus la tête. Il fallait juste que je trouve ma Eilynn à moi, à mon tour. « Toi t’as déjà vécu toutes tes expériences, c’est ça ? » En même temps, quand on est sur le point de se marier, ça veut dire qu’on est prêt à passer à une autre étape et à laisser l’autre derrière, sans regret. Des soirées bunga-bunga (whatever that is), une fois la bague passée au doigt, ça ne se produirait plus pour Jeff. Ce dernier commença à parler d’une histoire croustillante à laquelle il avait pu assister grâce à son boulot. Si j’étais jaloux de son emploi pour une chose, c’était bien pour celle-là : il était parfois appelé à intervenir pour des trucs complètement débiles. Je ne me lassais jamais d’entendre et de réentendre ses histoires rocambolesques. « Aaaah ouais les soirées fétichistes et BDSM ! Un grand classique. » J’hochai la tête en riant. Ça, par contre, ça ne m’avait jamais trop intéressé. Enfin, l’histoire en soi, oui. Mais de participer à ce genre de rassemblement, très peu pour moi. « Dis ça t’es déjà arrivé de débarquer à quelque part et qu’on te prenne pour un strip-teaseur déguisé en pompier ? » Genre un enterrement de vie de jeune fille qui tourne mal ou un truc du genre. Après tout, Jeff avait le physique pour être confondu avec un danseur nu, ne nous le cachons pas. Mon meilleur ami fit alors remarquer que c’était lui qui avait le monopole de la discussion, et il me renvoya la balle. « Non mais moi j’bosse avec des jeunes de milieux familiaux de merde, y’a vraiment aucune histoire croustillante comme les tiennes. Y’a juste du matériel pour plomber l’ambiance bien comme il faut. » Et j’avais plutôt envie d’être d’humeur festive, même si les gorgées que j’étais en train de boire étaient les toutes dernières, puisque Jeff m’avait fait promettre que ce serait la dernière tournée.

J’haussai les épaules. « Ma mère me disait toujours qu’on peut tout faire, quand on le veut vraiment. » Bon, elle me disait ça quand j’étais vraiment très jeune, avant qu’elle ne foute toute sa vie en l’air et me prouve que soit elle avait menti, soit elle, elle ne voulait rien du tout. « Mais cela dit je ne pense pas qu’elle parlait forcément de sexe. » Je ris. Ce n’était pas pour autant que je n’aimais pas en discuter un peu, et en rire. Pour moi, ce n’était un sujet tabou que lorsqu’il était question de mes propres expériences. Mais si c’était pour entendre celles des autres, surtout celles de Jeff, j’étais tout ouïe ! En tant que pompier, il en avait souvent de très drôles à me raconter. Son boulot n’était pas toujours d’intervenir quand le feu était pris, non, il pouvait être appelé pour bien d’autres situations loufoques et souvent, j’étais l’heureux élu pour les entendre. Et les réentendre. Parce que je ne me lassais pas. « Hormis ce que j’ai appris au Salon de l’amour et de la séduction, y’a quelques années, pas trop. Le cuir ça m’avantage pas trop. » Je ris. J’avais toutefois beaucoup appris, au SAS, des trucs que j’aurais peut-être voulu essayer mais l’occasion ne s’était jamais présentée. Je ne m’étais jamais vraiment vu proposer ça à Zelda même si, qui sait, elle aurait peut-être dit oui. Je ne le ferais pas de sitôt, en tout cas, peu importe comment notre histoire évoluerait. Je me voyais mal lui proposer de l’attacher, après des mois et des mois de pause. « Roooh, vous êtes pas drôles. » Me plaignis-je quand j’entendis l’histoire du groupe de nanas. Bon en même temps, je comprenais le chef de ne pas vouloir encourager ce genre de comportement qui faisait perdre du temps et de l’argent au service d’incendie. C’est vrai que c’était un peu irresponsable. Mais drôle. Beaucoup plus drôle que toutes les histoires que j’aurais pu raconter à Jeff concernant mon propre travail. Ou ma propre vie. Quelle triste vie, en ce moment ! « Non, t’as raison, non. Justement le but est qu’ils laissent la merde de l’autre côté de la porte quand ils viennent, alors c’est sûr qu’on se fait du fun bien comme il faut. » Je souris. « Sinon j’t’ai dit que je comptais participer à une compétition australienne de danse, avec Harmonie ? T’as peut-être devant toi Australia’s Best Dancer. » Dis-je en bombant un peu le torse. À défaut d’être Mister Bowen, je gagnerais peut-être un autre prix cette année. Ou pas.

J’hochai la tête pour appuyer les suppositions de Jeff. « Ouaip’ et impossible de bouger correctement, en plus. Oublie les squats. Juste t’asseoir pour chier c’est tout un exercice, et après faut remonter ça … » Je secouai la tête. Mais dans quelles circonstances avais-je eu à porter des pantalons de cuir et le tout, avant d’aller aux toilettes, me demanderez-vous ? C’est une réponse pour un autre jour, peut-être lors des anecdotes au mariage de mon meilleur ami, why not coconut ! Quoique, à voir le manque d’humour de Jeff après son histoire de prank call aux pompiers, je me demandais si c’était une bonne idée. Et ce mec-là avait gagné mon Boward ? « HAHA, mais ouais. Attention à ce que tu dis, j’vais écrire sur Spotted : Bowen que les pompiers de la ville sont prêts à faire des strips for free si c’est demandé poliment. Vous aurez plus de temps pour jouer aux cartes, à la caserne. » Me moquais-je alors que Jeff m’avait bien expliqué qu’ils ne perdaient pas à ce point leur temps quand ils étaient en attente. Il fallait entraîner tous ces beaux muscles ! C’était quand même plus drôle de le traiter comme un paresseux. « Tu sais pas, j’ai peut-être une très forte tolérance à la déprime ! » Tout le contraire en fait. Dès qu’un gamin allait mal, je le ressentais à pleine puissance. J’étais trop empathique. Heureusement, au centre, c’était souvent un lieu de délivrance pour les jeunes alors on s’amusait plus qu’autre chose. Et je m’amusais aussi en dehors des heures d’ouverture, quand je répétais avec Harmonie tard le soir. « Woooow, du calme avec la télé, faut qu’on fasse les auditions, avant ! Et p’t’être que si on se débrouille pas mal ils montreront un p’tit extrait de l’audition pour nous consoler, si on n’est pas pris. Mais j’espère vraiment qu’on le sera. » Et on mettait les efforts pour, d’ailleurs. J’éclatai de rire quand Jeff se proposa pour être mon agent. « Je prends en note ta candidature. » Comme si quelqu’un d’autre allait se proposer pour me gérer. Je terminai enfin mon verre, ce dernier que j’avais dégusté jusqu’à la toute fin.

Évidemment, si je lançais une telle rumeur, je m’attendais moi aussi à ce que les appels reçus à la caserne soient tous plus ridicules les uns que les autres. Les gens aujourd’hui embarquaient un peu trop dans les blagues sans se poser de questions sur les répercussions et sans user de leur gros bon sens. « Moi aussi, je suis certain. Alors je vais m’abstenir. Juste parce que je vais rire un peu jaune si c’est mon appart’ ou mon centre qui passe au feu pendant que vous vous mettez tous nus. » Conclus-je avec un sourire aux lèvres malgré tout. C’était des blagues, tout ça. Ce qui était moins des blagues, c’était les aspects négatifs de nos métiers respectifs. Heureusement que les cours de danse ne se terminaient pas à chaque soir en thérapie de groupe, parce que si c’était le cas je rentrerais toujours chez moi la mine bien basse. Je n’avais pas besoin de ça. « C’est sûr. J’aimerais pouvoir aider tout le monde, en plus. » J’haussai les épaules, avant de passer à un autre numéro. Numéro que j’allais présenter avec Harmonie, qui plus est ! « Non, non, on a à peine commencé à répéter. En plus Harmonie a proposé qu’on fasse une danse de salon, alors t’imagines bien qu’on a encore des heures de pratique devant nous … Mais comme les auditions sont dans quelques semaines on n’a pas trop de temps à perdre non plus. » On allait peut-être se mesurer à des danseurs professionnels de salsa et nous on allait arriver devant eux avec peu d’expérience dans ce style-là. C’était un gros risque à prendre. Mais ça nous motivait à nous dépasser. « Dis pas ça, j’vais avoir peur d’échapper Harmo dans nos levés, maintenant ! T’imagines elle s’écrase de long en large sur la scène et repart en ambulance … » Je ris. J’allais un peu moins rire si ça se produisait vraiment, cela dit. En plus, ce n’était pas impossible. « C’est à la fin janvier. C’est une chorégraphie de trois minutes, et y’aura de tous les styles. On s’lance dans un tango qui s’inspire de quelques autres danses, aussi. Ça va être unique. » Je souris, j’avais plutôt confiance en nous. « Mais j’t’en dis pas plus ! Si jamais Eilynn nous écoute et décide de vendre mes idées à d’autres participants … » Ahaha, c’est que ça faisait longtemps là.

J’aimais bien ce positivisme chez Jeff, là. Parce que clairement ce n’était pas moi qui en avais par rapport à notre choix de danse. Mais comment dire non à Harmonie, hein ? « On part pas de zéro mais j’te rappelle que moi mon truc c’est le hip-hop. J’ai jamais bougé mes hanches comme les latinos, là. » Dis-je en essayant de reproduire des mouvements fluides et sensuels. Assis sur un tabouret de bar, c’était encore moins convaincant. Bon, après, évidemment qu’il n’y avait pas que les latinos qui dansaient la salsa et autres danses de salon. Ce n’était qu’une question de pratique et certains champions mondiaux dans ces styles-là étaient américains ou européens. Peut-être australiens, même. Je ne me tenais pas trop trop au courant. De toute façon, je me rendrais quand même pas jusque-là. Avec les peurs que me faisait Jeff, en plus, à propos d’échapper Harmonie … de quoi me faire stresser jusqu’au jour J. C’était arrivé même aux meilleurs, en plus. Cette pensée-là aurait peut-être dû me consoler en me faisant comprendre que justement, ça pouvait arriver à n’importe quel duo, mais non. Je flippais intérieurement. Non, pas qu’intérieurement. En plus Jeff qui dit qu’il trouverait ça drôle. « Je devrais peut-être songer à changer de meilleur ami. J’pourrais passer des auditions, ici et maintenant, pour te remplacer. » Dis-je en regardant autour de moi, évaluant les potentiels candidats. Nan, personne d’aussi cool que Jeff. J’expliquai finalement à ce dernier vers quoi Harmonie et moi on s’enlignait un peu et il en profita pour me décourager, encore une fois. Non mais j’aurais pu lui dire moi, tout à l’heure, que peut-être qu’Eilynn allait le planter là le jour de leur mariage. Tiens, les encouragements ! « Non mais quand j’dis que y’a tous les styles c’est pas juste dans notre trois minutes à nous, bro. J’parle que c’est pas une compétition sur un style de danse en particulier, alors y’aura de tout. Pour ce qui est de notre tango qui s’inspire de d’autres trucs, t’en fais pas, Harmo et moi on n’a pas prévu passer du coq à l’âne dans un truc genre chaotique que tu comprends pas c’qui se passe. » J’étais peut-être pas doué pour grand-chose dans la vie mais la danse, quand même, je pouvais parfois me lancer des fleurs. Quand Jeff parla d’Eilynn et de ses croche-pieds, je ris. « J’lui paye le transport, la bouffe et l’hébergement, alors. » Conclus-je en riant. Mais non, franchement, on avait pas besoin de ça pour gagner.