les démons du passé -r.

Marcher dans les rues de la ville, tu avais l'impression de ne pas l'avoir fait depuis tellement longtemps. A tel point que tu avais oublié a quoi pouvait ressembler le centre-ville. Et encore, tu te souvenais qu'il y a quelques années en arrière, c'était différent, bien avant que le tremblement de terre ne fasse des ravages. Vous aviez perdus de beaux bâtiments cette année là. Et pourtant, tu n'arrivais pas à te souvenir de comment ça pouvait être avant. un. deux. trois. quatre. cinq. Au loin tu l'apercevais. Nevaeh, tu ne pourrais jamais oublier sa silhouette, encore moins sa personne. six. sept. huit. Trois rapides afin de sortir de son possible champ de vision, trois pas pour te mettre derrière un arbre. Tu ne pouvais pas t'empêcher de ressentir de la tristesse et de la culpabilité. La façon dont avaient tourné les choses entre vous, ce n'était pas joli, ce n'était pas quelque chose dont tu étais fier. Tu avais cru être capable d'assumer une relation avec elle et comme à ton habitude, tu avais flanché, entraînant la fin d'une belle histoire. Et causant un trouble dans une amitié. Tu l'observais de loin, essayant de te cacher tant bien que mal. Tu n'avais pas pensé qu'elle pourrait toujours être en ville, si tu avais bien suivi, elle s'était envolée pour New-York, mais tu n'avais pas eu vent de son retour. Il te faudra en toucher deux mots à Freja lorsque tu aurais l'occasion de la croiser. Tu avais l'air ridicule, à te cacher, comme si tu avais peur de lui parler, peur de croiser son regard. Et tu ne le dirais sûrement pas tout haut mais c'était le cas. Tu n'avais jamais été doué pour dire les choses, pour exprimer ce que tu pouvais ressentir alors forcément si tu pouvais l'éviter, tu ferais tout pour t'y tenir. Tu glissais à nouveau ton regard mais tu ne la voyais plus. Était-elle partie ? La voie était-elle libre ?

Elle avait laissé Pippa chez Imogen, le coeur battant, la tête plus légère. Cette discussion lui avait fait du bien, avait laissé place au nouveau départ, mais aussi au pardon. Entre elle et Nevaeh, c'était une grande histoire d'amitié, bien trop grande pour s'effondrer pour cause d'un homme. Encore une fois, la vie leur avait prouvé que rien n'était à leur épreuve, à toutes les deux. Nevaeh avait laissé sa copine devant la boutique, deux bises sur ses joues, une longue étreinte qui invitait à se revoir, et elle avait repris le chemin vers la maison, à pieds, pourquoi pas, la journée était belle. Elle venait à peine d'atterri, n'avait eu le temps que de déposer ses bagages avant de s'aventurer en ville, les heures du décalage horaire entre Los Angeles et Bowen pesaient dans son corps, affaissait son visage d'ordinaire lumineux. Elle était épuisée, complètement fatiguée et son lit ne cessait d'appeler son nom tel le chant d'une sirène. Marcher lui ferait du bien, c'était ce qu'elle s'était dit, et pourtant, du coin de l'oeil, ce qui était supposé être une balade joyeuse de transforma en un nuage tempétueux. Du moins, c'était ce qu'elle croyait, quand elle aperçut rapidement du regard celui dont elle n'osait plus prononcer le nom. CJ. Non, ce n'était pas possible. On lui avait dit qu'il avait quitté la ville, qu'il n'y habitait plus, que tout ça, c'était du passé. Elle hallucinait, c'était la fatigue qui prenait le dessus et qui lui faisait voir des mirages de son passé. Mais pourquoi maintenant ? Pourquoi ne l'avait-elle pas halluciné avant ? Nevaeh avait secoué la tête, chassant ces idées ridicules de ses pensées, reprenant sa marche. Mais c'était bien plus fort qu'elle, elle avait la sensation de ne pas être allée au fond de son idée. Un regard rapide dans la vitrine devant elle, réflexion qui lui confirma qu'elle ne rêvait pas, caché derrière un arbre, comme un gamin qui ne veut pas se faire prendre par sa mère. Ridicule, franchement ridicule. Elle tourna à gauche, sur l'allée suivante, lui permettant d'accéder à la cachette de CJ par-derrière et seulement quand elle fut assez près de lui, elle osa s'y adresser. « Tu m'espionnes, CJ ? », souffla la brune en croisant les bras sur sa poitrine. « Tu ne trouves pas que tu as déjà fait assez de mal comme ça ? Qu'est-ce que tu cherches ? » Son ton était froid, mais calme, sûrement trop fatiguée pour se battre. Il lui avait brisé le coeur, alors qu'il n'était pas encore assez solide pour subir une seconde déception, et malgré tout elle ne hurlait pas.

Ne plus la voir dans ton champ de vision te soulageait et pour autant tu ne savais pas si c'était une bonne chose. Peut-être que la croiser aurait pu te permettre de percer l'abcès, surtout si vous étiez amené à vivre dans la même ville. Après, rien ne la forçait à venir te parler, ni même à toi d'aller la voir, vous pouviez aussi vous ignorez, comme tu savais si bien le faire avec ses frères. Tu avais plutôt l'habitude d'avoir la famille Rutkowski à dos alors une de plus, une de moins, ça n'aurait pas changé grand chose à ta vie. Tu t’apprêtais à sortir de ta cachette pour reprendre ta promenade quand une voix s'élevait dans ton dos. Pas n'importe laquelle, la sienne. « Osti de marde ! » lâchais-tu surpris. Elle t'avait donc  vu aussi, pourtant, tu étais persuadé  d'avoir été discret. Il fallait croire que non et elle avait même été plus maligne que toi. Tu fis volte-face, reculant de deux pas. Malgré sa voix sèche, elle n'avait pas haussé la voix, elle ne semblait pas être si en colère mais ce n'était pas une raison.  « Je ne t'espionne pas vraiment, je voulais plutôt t'éviter. » Tu n'avais aucune raison de lui mentir et si elle voulait te traiter de lâche, elle le pouvait mais l'idée était plutôt d'éviter une situation comme celle là. Tu ne savais pas où te mettre, tu avais très peu vécu ce genre de situation dans ta vie et tu ne savais pas comment le gérer. « Je ne savais pas que tu étais en ville, je ne voulais pas vraiment remuer le passé.. » ajoutais-tu doucement alors que ton regard osait enfin se poser sur elle. Les bras croisés contre sa poitrine, elle te regardait également, pour autant, tu ne la sentais pas hostile.

Le revoir lui donnait des décharges électriques dans tout le corps. Pas celles que l'on considérait comme de bons ressentiments. Plutôt comme un goût amer, une douleur persistante, pas très forte, mais toujours présente, assez pour agacer. Le revoir était une chose, mais le revoir dans cette situation, ça en était une autre. Après tout le mal qu'il lui avait fait, CJ ne pouvait clairement pas mettre son malaise de côté et affronter, pour une fois, une seule fois, la fille qu'il avait laissé tomber, non, ça c'était trop demandé. Alors, il l'espionnait de loin, épiait ses faits et ses gestes, sans bouger. Et ça en était pathétique. Quand Nevaeh arriva près de lui, elle put l'observer faire ses simagrées quelques secondes de plus, tâter le terrain pour chercher sa présence alors qu'il ne la voyait plus, logique puisqu'elle était derrière lui, avant de lui faire savoir sa présence. Lorsqu'il jura dans son jargon québécois, Nevaeh haussa un sourcil, perplexe. « M'éviter ? », demanda-t-elle, toujours aussi sèche. « C'est carrément mieux », fit-elle remarquer en secouant la tête. « C'est vrai qu'entre affronter tes problèmes et les fuir, tu choisis souvent la fuite... », souffla-t-elle dans un tremblement de déception. C'était exactement comme ça qu'elle s'était sentie quand il l'avait trompée, quand il lui avait volé la confiance qu'elle avait su redonner. « Fallait bien que tu t'attendes à me revoir à Bowen », fit-elle remarqué quand CJ lui avoua qu'il ne s'attendait pas à la croiser en ville. En même temps, Bowen, c'était chez elle, c'était là où sa famille était installée. Et c'était surtout trop petit pour éviter de se croiser pour toute leur vie, ça allait finir par arriver. Elle prit une pause pour le détailler, regarder les traits de son visage, tenter de deviner où il en était dans sa vie, mais il semblait plutôt pétrifié, impossible de lire autre chose en lui. Nevaeh soupira. « C'est bon, on n’a rien à se dire tous les deux... », lâcha-t-elle avant de laisser ses bras retomber le long de son corps. « Continuer de m'éviter... »

S'il y avait bien une chose à laquelle tu ne t'étais pas préparé c'est qu'elle apparaisse derrière toi. Tu devais avoir l'air smatte. Alors que tu lui avouais la vérité, elle ne paraissait pas satisfaite de ta réponse, ne manquant pas de te faire remarquer ton comportement. Oui, la fuite était un mécanisme de défense, un de ceux dont tu n'avais pas grand contrôle. « Les confrontations ça n'a jamais été mon truc, tu le sais bien. » Tu haussais une nouvelle fois les épaules, un peu abattu, ne sachant pas ce qu'elle attendait de toi, ce qu'elle espérait obtenir de toi. Tu ne voulais pas l'achaler mais pourtant tu avais l'impression d'aller dans la mauvaise direction. Pouvais-tu seulement t'en sortir sans la blesser d'avantage ? Pas sûr. « Je te croyais toujours en Amérique, j'pensais que le fait d'avoir quitté Bowen t'aurait permis d'avoir un poste dans un plus grand journal. » Pas que le métier qu'elle avait été nul mais tu avais toujours pensé qu'elle méritait d'avoir un meilleur poste, qu'elle méritait de faire bien plus que couvrir l'actualité de la ville. Fallait pas se mentir, Bowen était une belle ville mais elle n'était pas la plus mouvementée et l'actualité n'était pas des plus importantes. « Qu'est-ce que tu voudrais que je te dise ? Que je suis désolé ? Je te l'ai dit à l'époque et le redire aujourd'hui ne changerait rien à ce que j'ai fait. Je voulais simplement t'épargner, pas t'espionner ou empirer la situation. » finissais-tu par ajouté alors qu'elle semblait tannée par ton comportement. Partir aurait été une bonne option, malgré ça, tu ne t'en sentais pas capable. Tes jambes refusaient de faire le premier pas, tu te contentais de la regarder, l'air bête.

« Je le sais bien, oui », souffla-t-elle alors qu'elle se souvenait de leur rupture quand elle avait finalement appris qu'il n'avait pas été mieux que Felix, qu'il lui avait à son tour déchirer le coeur qu'elle tentait de recoller depuis des mois. Il n'avait pas été mieux que les autres, CJ. Et, à force, elle finirait par croire que tous les hommes n'étaient bon qu'à briser des coeurs et à s'amuser avec des sentiments plutôt qu'à faire du bon autour d'eux. Nevaeh qui croyait vivement à l'amour, après ces trois ruptures douloureuses, tendait vers une désillusion du romantisme possible dans leur société. Mais fuir, allait-il le faire indéfiniment, CJ ? Allait-il le faire tous les jours de leur vie ? Parce que Bowen, c'était assez petit pour se croiser souvent et pas assez grand pour se cacher tout le temps. Ils finiraient inévitablement par se retrouver, que ce soit dans les rues de la ville ou ailleurs, par des amies en commun, par exemple. Nevaeh souffla quand il parle de l'Amérique. En effet, ça lui donnait l'opportunité de voir plus grand que le journal local, mais tout ça, c'était du passé. « J'ai renoncé au job », lâcha-t-elle sans réfléchir, sans même savoir pourquoi elle se confiait. « Alors, ouais, j'suis de retour au journal de Bowen. Et ouais, tu risques de me croiser à Bowen... » Il faudrait s'y faire, parce que se planquer derrière des arbres n'était pas la solution idéale pour ces prochaines fois. Parce que les douleurs du passé finiraient sans doute par revenir à force de se recroiser. Et s'éviter, bien que c'était la meilleure façon pour éviter de tourner le fer dans la plaie, étaient-ils en mesure de le faire ? Nevaeh secoua la tête alors que CJ lui demandait ce qu'elle attendait de lui. « Non, ça sert à rien d'être désolé. Ça n'a pas arrangé les choses dans le passé et ça ne le fera pas dans le présent... » Parce qu'être désolé, ça ne réparait pas le mal qu'il avait fait en la trompant. « Je n'ai pas besoin d'être une princesse que l'on épargne, que l'on ménage... », souffla-t-elle, laissant ses bras pendre le long de son corps. « Un jour, il faudrait que tu te décides à être honnête avec moi... Il me semble que je le mérite, non ? »

Nevaeh ne tardait pas à t'apprendre qu'elle avait renoncé au job et qu'à présent elle était à Bowen pour un bon moment. Tu ne posais pas plus de questions, tu doutais qu'elle te réponde et tu n'avais pas besoin de connaître sa vie. Tu n'étais que son ex, tu n'étais pas son ami alors ce serait bien étrange. Pourtant tu ne pouvais t'empêcher d'être curieux et te demander si tout cela ne cachait pas autre chose. Tu ne ferais pas de recherche et tu t'abstiendrais de demander si son copain est aussi présent en ville. « Je m'y ferais alors. » Tu haussais doucement les épaules. Tu étais déjà revenu en sachant que Woody pourrait te croiser à tout moment et tu avais quand même décidé de le faire alors tu pouvais aussi vivre avec le fait de risquer de la croiser. Tu lui ferais un sourire cordial la prochaine fois que tu la verras et chacun continuera le cours de sa vie. Avant de pouvoir reprendre le cours de la tienne, il semblait que tu aies des comptes à rendre mais sans savoir de quoi elle parlait exactement. Elle ne voulait pas des excuses mais que tu sois honnête, tu t'étais déjà plutôt bien exprimé sur la situation alors tu ne voyais pas ce que tu pourrais ajouter. « Quelle vérité veux-tu connaître ? » Elle semblait avoir une idée précise de l'information qu'elle voulait te soutirer, sans que toi même tu en sois conscient. Cette histoire ne représentait pas grand chose que le passé maintenant, tu avais tourné la page sur ce que tu avais fait et sur ta relation avec la cadette de la famille Rutkowski. Il fallait savoir oublier certaines choses, avancer dans la vie. C'est ce que tu essayais de faire en revenant à Bowen mais tu sentais bien que ça n'allait pas être de tout repos.

Il y a la douleur qui prime sur tout. Et bien qu'elle n'a plus de sentiments pour lui, son coeur saigne encore. Il lui a fait du mal, à un point que toutes les excuses du monde ne seraient pas suffisantes pour lui recoller le coeur. Mais, peut-être, aussi, que c'était de la faute de Nevaeh, si elle souffrait. Si elle ne s'était pas laissé tomber amoureuse, si elle avait pris plus ses distances, gardé ses gardes, peut-être qu'elle n'aurait pas eu à subir à nouveau les conséquences d'un homme infidèle. Et comme si ce n'était pas suffisant, elle s'était jetée à nouveau dans les bras de Felix, après CJ, comme si elle l'avait cherché, comme si elle avait besoin de souffrir encore un peu pour comprendre qu'elle méritait mieux. Nevaeh lui confia qu'elle avait renoncé au job, sans pour autant lui parler de Felix, de sa secrétaire avec qui il avait trop de plaisir et son coeur qui s'était à nouveau brisé en morceaux. Et si jusqu'à maintenant, Nevaeh semblait bien vivre sa séparation, jouant la forte devant tout le monde pour mieux les berner, de voir CJ refoulait des souvenirs, des émotions, des ressentiments. Peut-être que même lui arrivait à le comprendre, sans qu'elle ait à lui dire. Il n'ajouta simplement qu'il s'y ferait. Elle, elle osa lui faire un souhait. « J'espère pour toi que tu ne croiseras pas Woody, je ne sais pas s'il sera plus clément avec toi que moi. » Elle afficha sur ses lèvres un fin sourire las avant de laisser la conversation changer de vent. Nevaeh demandait la vérité, mais CJ semblait surpris. Elle ne voulait pas savoir dans quelle position ils avaient fait l'amour ou quelle couleur était les sous-vêtements de sa maîtresse. Elle, elle cherchait des réponses à ses questions, pourquoi tous les mecs qui comptaient pour elle finissaient par avoir envie de trouver réconfort dans d'autres bras. « J'étais une si mauvaise petite amie ? », finit-elle par demander, maintenant plus sérieuse.

Si tu devais choisir entre croiser Woody et croiser Nevaeh - et tant bien que tu ne voulais pas avoir à croiser la route de Woody - c'est celle de Nev que tu aurais choisi de ne pas croiser. Elle avait le droit d'être en colère et tu ne pouvais pas l'empêcher de l'exprimer. Si elle avait besoin de ça pour avancer, alors qu'elle le fasse. Mais si tu avais une chance de t'épargner quelques instants de plus, tu n'étais pas contre. « Je crois qu'avec Woody on est arrivés au stade où si on reste assez éloigné l'un de l'autre, ça ira. » Tu ne savais pas si tu devais en être fier ou non mais tu savais que tu n'avais pas grand chose à craindre. Du moins, tu l'espérais, ou sinon faudrait prier le bon Dieu pour qu'Aisling traine pas loin dans le coin. Tu te sentais honteux d'avoir besoin d'elle si jamais on cherchait à te refaire le portrait. Il faudrait que tu apprennes à te défendre un jour. Et à avoir moins peur. Mais pour le moment tu étais focalisé sur la demande de ton ex-copine. « Pourquoi penser que le problème vient de toi ? » demandais-tu presque du tac au tac. Tu n'avais pas réalisé que par ton geste, tu avais ébranlé sa confiance, qu'elle en était venue à se demander si elle avait fait quelque chose qui t'avait poussé à la faute. Pourtant elle n'avait rien fait. Ce n'était pas qu'elle le problème, le problème c'était votre couple qui s'inscrivait dans le temps. Et à nouveau la peur. C'est fou comme t'attacher vraiment à quelqu'un, c'était une épreuve pour toi. Tu avais tellement peur de la perdre par la suite que tu préférais vivre une vie de solitaire. Pourtant tu avais réellement aimé ce que vous aviez.  « Le problème c'est ma peur qui me paralyse, qui m'empêche d'avancer. Et mon manque de communication, comme je ne sais pas comment dire les choses, comme je suis maladroit quand je veux exprimer une idée, je n'y arrive pas. Je ne voulais pas te faire douter de toi, c'était ma faute, mon erreur. » Tu n'avais pas voulu la blesser non plus, les choses étaient arrivées sans prévenir, tu ne l'avais pas planifié à l'avance, l'idée ne t'étais même pas venue à l'esprit. Tu as simplement fui ta vie, comme si vous viviez cet instant, dans une bulle en dehors de la dimension. Comme si ça n'aurait aucun impact sur votre vie. Tu avais eu tort.

Comment avaient-ils pu se laisser se rendre jusque là, jusqu'à la colère, alors qu'il y avait eu tellement d'amour entre eux. Ça avait été fort, leur relation. Et elle savait que s'il ne l'avait pas lâchement trompé, ils seraient sans doute encore ensemble à ce jour. Elle l'aurait suivi jusqu'au bout du monde, CJ. C'était à ce point, qu'elle l'aimait. Il savait qu'elle était brisée par les infidélités de Felix et, comme s'il avait voulu la faire souffrir davantage, il avait commis les mêmes erreurs que lui, celles qu'elle n'arrivait pas à pardonner. Au fond, la journaliste espérait qu'un jour la haine et la colère se dissiperaient, qu'ils arrivent à communiquer, à retrouver une certaine complicité. Mais une part d'elle serait toujours brisée. « Je te le souhaite », dit-elle avec sincérité. Elle ne lui voulait pas de mal et sans doute qu'elle engueulerait Woody de lui casser la gueule s'il le faisait, même si ça lui ferait un peu un baume au coeur de voir son frère la protéger ainsi. Et comme si leurs blessures n'étaient pas encore assez closes, Nevaeh osa demander des explications. Pas celles qu'il lui avait livrées quand il lui avait avoué ses torts. Des vraies, des honnêtes. Peut-être que naïvement, elle se disait que ça leur permettrait de partir sur de nouvelles bases, des bases solides et axées sur l'honnêteté. C'était sans doute bien trop naïf de sa part, parce qu'elle n'avait pas oublié la capacité de fuite de son ex quand tout devenait trop sérieux. Elle s'était elle-même visée dans le problème. Et sans chercher à lui dire avec des mots que c'était arrivé à nouveau, alors qu'elle s'était exilée pour New York, elle osa élaborer. « À force, on finit par se remettre en question.. », souffla-t-elle avec déception. Qu'est-ce qu'elle avait fait de mal ? Elle se le demandait encore, jour après jour. Pas pour reprendre là où ils avaient laissé leur relation, mais pour devenir une meilleure personne. « C'est pas toi qui me fais douter de moi... C'est tout ça, toutes ces fois », avoua-t-elle, marquant une pause avant de reprendre. « Si seulement t'avais su me parler comme tu me parles là, avec des mots, clairs, on se serait sans doute pas fait autant de mal... » Elle avait eu vent qu'il avait aussi mal vécu qu'elle leur séparation...

Rien que de parler de Woody, tu sentais des frissons le long de tes bras. Elle te le souhaitais et tu n'ajoutais rien de plus. Plutôt que de se concentrer sur son frère, tu préfèrais te concentrer sur elle, sur ce qu'elle avait à te dire. Sur ce qu'elle voulait savoir. Tu te sentais mal à l'idée qu'elle ait pu perdre confiance en elle à cause de tes actes. Comme quoi, tu n'avais vraiment pas réfléchi à tous les impactes que pourraient avoir ton geste. Tu pouvais même dire que tu n'avais pas réfléchi du tout. Ou plutôt si, mais une fois que le mal était fait. Et tu ne pouvais pas la regarder dans les yeux et lui mentir, tu n'étais pas horrible à ce point.  « Tu ne devrais pas, tu es une personne incroyable Nevaeh et c'est notre faute si on a pas su le voir avant. » Tu le pensais réellement et par moment tu te laissais révasser à ce que pourrait être ta vie si tu étais encore avec Nevaeh. Tu avais imaginé des enfants, un chien, vous deux vivants dans la maison de ta famille. Puis tu finissais par balayer tout ça d'un clignement d'oeil parce que ça n'arrivertait jamais. Et tu étais le seul à qui tu pouvais en vouloir. Tu avais fini par l'accepter et vivre avec. Pour autant, tu n'avais pas réussi à rencontrer quelqu'un comme elle. « Si j'avais réussi à te parler comme ça, je n'aurais pas déconné mais le problème c'est que les mots me manquent souvent. » Tu étais bien plus doué pour être un bon ami plutôt qu'un petit ami. Ta plus longue relation était sans doute celle avec Nev et elle értait aussi celle qui avait le plus mal fini. Autrefois, tu avais plus souvent l'habitude de prendre la poudre d'escampette, c'est ce que tu avais fait vivre à Tahlia des années de ça. Aujourd'hui, tu avais bien compris que ce n'était plus une chose à faire, rien que pour le mal que tu pouvais causer aux autres en partant sans rien dire. Aujourd'hui, tu ne t'engageais plus dans ce genre de relation, tu profitais d'un peu de bon temps mais sans rien de plus.