Let me learn from where I have been + Samella

Saviez vous qu’il y avait un domaine viticole assez réputé à Bowen ? Et bien Samuel non plus. Déjà parce le vin ce n’était pas forcément sa grande passion, mais aussi parce qu’il s’était toujours dit que c’était du domaine des français et des italiens, quitte à avoir du bon pinard. Mais finalement, en faisant quelques recherches il s’était rapproché de ce vignoble australien et même qu’il proposait des stages d’œnologie. Le vin pour les nuls ! Après vous allez vous demander pourquoi un mec qui n’aime pas tellement ça allait se forcer à faire ce genre de choses. La réponse était très simple, il avançait plutôt bien dans son idée de prochain roman et son futur héro était un cuisiner réputer qui s’intéressait beaucoup aux vins, ainsi, il voyait très bien une scène bien sanglante au milieu des barils au fin fond d’une cave enterrée et poussiéreuse, vous la voyez la scène ? Lui il l’imaginait totalement, mais pour ça il fallait qu’il fasse quelques recherches. Il s’était donc inscrit à une journée d’initiation à l’œnologie avec au programme visite de cave, étapes de fabrication, dégustation, … Une journée dense, mais il n’avait pas grand-chose de mieux à faire. Le jour était arrivé, il avait fallu se lever aux aurores parce que le stage commençait tôt, sur les hauteurs de la ville, non loin du phare que l’on voyait de tout Bowen. Jamais Samuel n’aurait pensé qu’il y ait eu des vignes à cet endroit-là, pourtant elles y étaient bien, baignées de soleil quasiment toute l’année, fouettées par les vents marins d’un côté et l’odeur des pins sauvages de l’autre, mélange qui donnait au vin son caractère si spécial et si apprécié des connaisseurs. Même s’il n’était jamais contre une goûte d’alcool, Pohl espérait qu’ils ne commencent pas l’initiation par la dégustation, parce que remplacer son café par du vin à neuf heures du matin ça passerait mal. Il était arrivé pile à l’heure, la plupart du groupe était déjà présent, des personnes d’un peu tous les âges… en fait non, ce serait mentir, il y avait clairement plus de personnes qui avaient passé la soixantaine, des retraités qui espéraient bien se la coller en se payant une journée à boire du bon vin sous la chaleur australienne. Il ne pouvait pas les en blâmer, peut-être qu’il ferait de même à leur âge. Il y avait un couple, visiblement des jeunes mariés en voyage de noce, deux potes qui rigolaient dans le fond en zieutant les fesses de la jeune fille juste devant eux. Il ne voyait pas son visage, elle était retournée, discutant visiblement avec l’intervenant, mais elle avait l’air jeune, bien foutue, avec de longs cheveux bruns attachés en queue de cheval, il pensait comprendre pourquoi les deux hommes s’intéressaient à elle. Et quand elle se retourna il comprit carrément, en plus d’être physiquement agréable, elle était belle, fallait l’avouer, une bombe. Mais… merde, cette fille il la connaissait. Gigi, la ptite serveuse… la fille du bar qui l’avait allumé avant que ce soit lui qui se barre en jouant l’homme mystérieux. Elle ne l’avait jamais rappelé, il avait compris pourquoi, il avait voulu jouer, il avait perdu. C’était trop fort qu’ils se retrouvent ici, coincés pour une journée entière à passer ensemble. Et en se rappelant leur échange fougueux dans la ruelle à côté du Elm, il se dit que ça pourrait être intéressant ! Le vigneron s’approcha de lui et tout le monde se retourna alors sur le nouvel arrivant. Vous devez être Samuel ! Moi c’est David, on m’a parlé de votre requête, je répondrais à toutes vos questions. C’est drôle, j’ai acheté l’un de vos livres il y a quelques mois, j’ai beaucoup aimé. J’espère que cette journée vous inspirera. Il se retourna vers le groupe. Bien, il ne manque plus qu’une personne mais elle m’a prévenu de son retard et elle connait les lieux, on va pouvoir commencer et comme c’est une belle mâtiné on va faire une petite balade dans les vignes. Je vous laisserai prendre des gants et une pince, par soucis pratique, comme on est un grand groupe, vous serez par deux, je n’ai pas assez de pince pour chacun ! Naturellement les duos se formèrent et à la fin il ne restait plus que Sam… et Gigi. Le blond s’approcha d’elle avec un sourire. Salut partenaire !

Elle ne regrettait en rien sa décision, fuir l'Italie avait été nécessaire pour sa survie. Mais Dieu que Gisella avait en manque les vignobles, les bons vins autour d'un repas entre amis, de parcourir des kilomètres pour retrouver les petites cuves de sa natalité. Elle aimait l'odeur de sel de sa région et la couleur dorée que sa peau prenait quand le soleil venait la frapper, mais rien ne valait ses bouteilles vieillies d'une trentaine d'années, voire plus, avec le goût authentique de son Italie. Bien évidemment, elle pouvait aller à la société des alcools de Bowen se procurer une bouteille importée d'Italie, un rouge fort et assez corsé pour lui faire oublier qu'elle ne le dégustait pas près de citronnier. Mais ce n'était en rien la même chose. Et ses plaisirs coupables commençaient à lui manquer. Un soir de nostalgie, elle avait fait des recherches, trouvant non seulement un producteur de vin local, mais aussi un domaine viticole bien établi sur les collines de la ville, éloigné du centre, un vignoble qui, selon les photos en ligne, lui rappelait sa patrie. C'était sans grande surprise, vin à la main, qu'elle avait réservé une place dans cette immersion au domaine viticole, promettant balade dans les vignes, dégustation, et bien d'autres choses encore. À l'aube, une semaine plus tard, la belle brune s'était donc rendue au sommet des falaises, enthousiaste à l'idée de s'initier à l'oenologie. Vêtue d'une longue jupe verte aux imprimés floraux dont une fente sur le côté droit laissait la dorure de sa jambe s'exposer et d'un haut noué sous sa poitrine, cheveux remontés dans une queue de cheval, la chaleur de Bowen qui lui imposait de dégager son visage pour mieux respirer. Elle avait fait ami-ami avec l'instructeur, David, un bel homme d'un certain âge qui connaissait les vins bien plus qu'elle et qui avait tout de suite reconnu son accent chaud du sud de l'Italie. Elle finit par se mêler à nouveau au groupe quand l'instructeur lui indiqua qu'ils s'apprêteraient à commencer. D'ailleurs, David se présenta au comité, surtout à un participant en particulier et que fut la surprise de l'ex-avocate quand elle reconnut son interlocuteur, Samy, cet homme qui l'avait lâchement laissé en plan un soir précédent au Elm Street après l'avoir allumée. Elle ne le regarda pas plus longtemps, rancunière, préférant se concentrer sur les instructions du moniteur qui leur indiqua leur première activité de la journée, récolte dans les champs en dyade. Et, évidemment, qui étaient les seuls participants sans partenaire ? « Bonjour », lâcha-t-elle sur un ton froid, resserrant sa queue de cheval en évitant son regard. Il souriait, mais elle n'avait pas envie qu'il tente à nouveau de la charmer. « Tu es ici dans le but de trouver une autre femme à chauffer avant de prendre la fuite ? Il me semblait que tu n'aimais pas le vin, que tu étais plutôt vodka et bière. » Et, évidemment, il fallait qu'il vienne gâcher son moment. Quel hasard !

Honnêtement, Samuel pensait s'ennuyer à cette journée, n'était pas vraiment amateur de vin, il la voyait vraiment comme un truc à faire pour le travail, quelque chose de pas vraiment passionnant mais qu'il devait accomplir pour être le plus raccord possible avec l'histoire de son personnage. Comme un acteur qui se mettrait dans les conditions pour le rôle qu'il avait obtenu. Son héro aimait le vin ? Il voulait que son livre soit crédible ? Alors il faisait ce qu'il fallait. Mais franchement, entre vous et moi, il aurait largement préféré se lever à pas d'heure, prendre un petit déjeuner correct et faire sa journée comme il en avait l'habitude plutôt que de mettre son réveil aux aurores et risquer de devoir prendre un verre de vin avant neuf heure du matin. Pourtant il avait reconnu la brune, rien que cette vision avait illuminé sa journée et augurait finalement une découverte des plus croustillantes. Il avait été con avec elle, il l'avait planté là l'autre soir, il avait joué avec elle comme la pire des aguicheuses, chose qui ne lui ressemblait pourtant pas, il pourrait donc faire profil bas, essayer de ne pas trop se faire remarquer et espérer que ça coule tout seul jusqu'à la fin de la journée. Sauf que ça non plus ça ne lui ressemblait pas, mais genre pas du tout. Il aimait provoquer, jouer avec le feu, se frotter quitte à s'y piquer. Et il savait qu'elle ne manquait pas d'épines ni de répartie, il aimait ça, c'était ce qui l'avait attiré dans le bar. Alors qu'il se prenne une gifle ou tout autre chose, il n'allait pas ignorer la belle italienne. En plus, pour bien faire les choses, ils étaient réunis tous les deux pour la première activité, quelle aubaine ! Il s'approchait alors, tout sourire, pour mieux la provoquer, elle détourna le regard avec un bonjour des moins francs. Ouais, j'comptais faire dans la couguar aujourd'hui, vu la moyenne d'âge j'avais visé juste mais j'avais sous estimé le fait qu'elles seraient toutes prises. Dommage que la seule qui reste soit une italienne revêche... Où comment tendre la joue pour s'en prendre une et la mériter !! C'est tout à fait exact. Mais il n'est jamais trop tard pour apprendre, j'voulais pas mourir idiot. Il reluqua sa nuque, sa chute de reins, sans trop s'en cacher, alors que les autres partaient déjà d'un pas décidé vers les champs. Et toi, t'es là pour quoi ? Tu risques d'être déçue par le vin australien. Il lui adressa une moue dubitative. A moins que tu comptais te faire le vigneron derrière les barils...

La soirée où Samuel l'avait planté dans la ruelle derrière de Elm Street, après avoir fait monter la chaleur et la tension avait laissé un goût amer au travers de la gorge de l'Italienne. Il s'était joué d'elle, peut-être s'était même moqué qu'elle avait succombé à ses avances. Son numéro, il pouvait l'avaler, jamais elle ne l'aurait composé. Gisella, ce n'était pas de ces femmes à se faire jeter de la sorte et qui accordait son pardon aussi facilement. Alors, revoir Samuel ici, dans un endroit qui ne lui ressemblait pas, du peu qu'elle connaissait de lui, n'était pas, selon elle, le moment idéal pour mettre sa rancoeur de côté et de lui pardonner son attitude de macho. Bien au contraire, elle était de marbre devant lui, alors que le destin les fit se retrouver, bien malgré eux, compagnons pour la première activité de la journée. « Dommage pour toi », lança Gisella sur un ton qui lui donnait raison de l'avoir qualifié de revêche. « Tu aurais peut-être plus de chance avec les cougars déjà prises qu'avec l'Italienne revêche, si tu veux mon avis. » Parce qu'à présent qu'elle l'avait vu à l'oeuvre, Gisella ne le trouvait plus du tout attirant. S'ils avaient été seuls, l'attitude de Samuel lui aurait très certainement mérité une gifle bien ferme. Mais il avait la chance d'être dans un endroit serein, où bien des gens ne comprendraient pas d'où sortirait ce genre de comportement animal de la part d'une femme comme Gisella. Elle se retenait de paraître déplacée, pourtant, lui, faisait dans l'insupportable. Après avoir justifié sa présence, ce è quoi Gigi sourit par signe de politesse, sans émotion, il s'interrogea de celle de la brune, parlant de sa soif d'amour charnel qu'elle n'avait pas comblé avec lui et supposant qu'elle était du genre à se taper n'importe qui, n'importe où. « Tu m'as embrassé dans une ruelle et soudainement tu penses comprendre comment je fonctionne ? », rétorqua-t-elle en sourcillant. « Oh, Samy, faudrait pas que tu penses qu'être un connard avec les femmes te rende aussi expert dans l'analyse du cerveau féminin. J'espère que cette soirée-là ne t'ait pas trop monté à la tête, faudrait pas trop t'accorder d'importance tout de même. »

Il ne savait pas bien de qui il tenait son côté sale gosse, sûrement pas de sa mère, plutôt douce et sage, qui lui avait appris les bonnes manières et tenté de lui donner une éducation digne de ce nom. En vérité il était très bien élevé, sauf qu'on ne changeait pas un trait de caractère et la provocation il l'avait dans le sang, depuis toujours. Peut-être que ça lui venait de son père, il ne l'avait pas connu, il ne pouvait pas savoir et jamais il ne se serait permis de poser des questions à sa mère pour en savoir plus sur cet homme, ça l'aurait rendu terriblement triste. Alors on dira qu'il était comme ça, l'écrivain, un peu effronté, un peu provocateur et ça lui allait très bien. S'avançant aux côtés de Gisella vers les allées de vignes, il n'hésitait pas à mettre les deux pieds dans le plat, elle allait le rembarrer et c'était comme s'il n'attendait que ça. C'est vrai, tu a sûrement raison. Mais pour être honnête, aucune n'a autant de charme que toi. Et pour le coup, bien qu'elle ne relèverait probablement pas le compliment, c'en était bien un, parce que du charme, l'italienne en avait à revendre, c'était d'ailleurs ce qui l'avait séduit le soir de leur rencontre. Est-ce qu'il regrettait son geste d'ailleurs ? D'être parti comme ça en la laissant en plan, espérant presque naïvement qu'elle le rejoindrait plus tard après son service ? Probablement un peu, parce qu'il aurait clairement aimé s'amuser un peu plus avec elle, parce qu'il y avait une une sorte d'alchimie, une attirance palpable entre eux. Parce qu'il avait aimé ses baisers et ses caresses et qu'il en aurait bien voulu plus. Mais il était un peu trop joueur, un peu trop sûr de lui, quitte à se planter parfois. Elle ne l'avait pas rejoint, évidemment, sûrement qu'elle avait brûlé le morceau de papier qu'il avait laissé sur le comptoir et lui, il était resté sur sa faim, tout comme elle, certainement, raison de son attitude froide et désagréable aujourd'hui. Il savait néanmoins qu'il recommencerait la même connerie s'il devait rejouer la scène, parce qu'il restait éternellement ce petit con arrogant même à l'aube de la quarantaine. Je ne pense rien, je suppose. Il sourit, sans rien ajouter. Une fois que tout le monde fut arrivé sur le lieu de l'activité David leur donna les instructions, ils devaient tailler quelques branches mortes et ramasser une ou deux grappes de raisin pour pouvoir le déguster par la suite, rien de bien sorcier. Tu veux couper en premier ? Moi j'veux bien déguster. Il lui tendit la pince, pas forcément à l'aise avec ce genre d'activité manuelle là, il fallait bien l'admettre.