(Libre) Never too late to learn

Ces derniers mois, ç’avait été les montagnes russes chez Alba. La photographe avait dû mal à retrouver un rythme à sa vie, essayant de réparer son cœur qu’elle avait brisé elle-même en trompant Léo et en avortant de cet enfant. Il lui fallait un autre but Alba, quelque que chose à quoi se raccrocher qui ne lui rappellerais personne. La photographie, c’était bien trop de souvenirs avec Léo pour pouvoir le sortir de sa tête. Sa galerie, il y avait tant de bons et de mauvais souvenirs, comme cette fois, où tout avait recommencé dans son bureau. La jolie blonde avait décidé de reprendre de études, enfin pas forcément pour avoir un diplôme à la fin, mais avoir un but d’instruction. Le savoir c’était le pouvoir, et la sagesse. Il y avait tant de sujets qu’Alba aurait voulu explorer et exploiter. Pendant des années, elle aurait voulu faire de la biologie, pour connaître vraiment ce monde qui l’entoure. Passionnée de voyage, elle voulait savoir et connaître les chaque recoin de ce paradis terrestre. Finalement, elle avait opté pour quelque chose de tout à fait différent. Un cours d’histoire sur la sexualité et le genre. C’était un sujet important pour la jeune femme, depuis plus maintenant qu’elle avait un fils. Elle souhaitait de tout son cœur élever Jon avec un regard bienveillant sur le monde et les gens qui l’entouraient. Puis, même pour elle c’était intéressant, remettre l’histoire sur ces nouveaux mots et avoir des arguments pour rabattre le clapet de ces personnes intolérantes. C’était la première fois qu’elle mettait vraiment ses fesses sur le banc de l’université, elle qui n’avait eu qu’une petite formation en photographie. Alba, elle avait fait l’école de la vie et l’école buissonnière apprenant grâce aux héritages familiales, à ses lectures et à ses rencontres. Elle avait sortit son petit carnet, pour prendre des notes, mais Alba venait avant tout écouter. Il restait une place, assez bien placée. Elle demandait à l’étudiant, qui était un peu plus vieux qu’une moyenne d’étudiant, un peu comme elle si la place était libre. « Merci ! » Répondait-elle en s’asseyant à côté, posant son stylo et son carnet. Tout le monde autour d’elle avec un ordinateur, peut-être que finalement c’était bien plus sérieux que ce dont elle pensait.

Moi qui m’attendais à être entouré de jeunes étudiants d’à peine 20 ans, je réalise que je me suis légèrement fourvoyé. Parmis la trentaine de participants, on retrouve aussi des personnes au profil légérement similaire au mien, comme cette jeune femme qui vient s’installer à côté de moi. D’ailleurs, elle aussi ne semble plus très habituée aux bancs de la fac. Je ne sais pas trop expliquer ce qui me mène à cette réflexion, hormis peut-être son choix de prendre des notes sur un carnet plutôt que de suivre la tendance du numérique et encore, cela reste une piste peu fiable. En effet, même s’ils sont peu nombreux, il y a encore quelques étudiants qui préfèrent la plume au clavier.

J’allume mon pc et ouvre une page de traitement de texte vierge. Nous verrons bien à quel point celle-ci sera noircie à l’issue du cours. Il faut dire que la prise de notre commence à remonter dans le temps. Certes en tant que professeur il m’arrive souvent de prendre des notes pendant un exposé de mes élèves mais cela n’a rien à voir avec le débit d’un cours donné par un professeur à l’université.
D’ailleurs, le notre n’a toujours pas fait son entrée dans l’auditorium du coup, j’en profite pour sonder ma voisine, peut-être en sait-elle plus ?
“Excuse-moi… tu connais le prof de ce soir ?”.
Après tout, peut être que je me trompe sur toute la ligne et que la jeune femme est en plein cursus universitaire.

Alba elle n’avait pas fait de longues études, préférant le terrain. Pour elle, on n’apprenait pas la photographie sur les bancs de l’université. Il y avait une part de talent, une part d’expérience et une grosse part d’échec. Les questions de genre ça l’intéressait Alba, il y avait tant d’inconnu sur ce sujet et tant de choses à faire évoluer. Elle voulait avoir les armes et les réponses si son fils lui posait des questions dans les prochaines années. Elle s’en moquait un peu finalement d’avoir des bonnes notes, tant qu’elle pouvait avoir des références et sa propre réflexion. Il y avait un peu de toutes les générations dans cet amphithéâtre, l’avantage des cours du soir. Elle ne l’avait pas encore à dit Léo et à son entourage qu’elle avait repris un peu les études, parce que parfois Alba elle se sentait à l’écart quand les personnes lui parlaient d’études et de grandes réflexions. Elle se retournait près de son voisin quand celui-ci lui posait une question. « Pas du tout ! C’est mon premier cours ici. » Lui il donnait l’impression de s’y connaître, d’être un universitaire. Le prof il était un peu en retard, ça ne la gênait pas la photographe, ça lui permettait de se rendre compte à quel point les chaises étaient inconfortables. Mais ça la changeait. Elle qui avait l’habitude d’être dans le mouvement. Elle tenait d’une main de fer sa galerie d’art, ses projets et sa famille, ça lui faisait du bien de prendre un peu de temps pour elle et sa culture. « C’est même la première fois que je suis des cours à l’université, il était temps. » Disait-elle en riant. A trente-trois ans, les gens pourraient lui dire que c’était trop tard. Alba, elle préférait faire ce dont elle avait envie. Elle avait toujours été comme ça.

« Pas du tout ! C’est mon premier cours ici. » dit la jeune femme alors qu'un groupe d'étudiants, pas plus âgé que mon ex petit ami, fait irruption dans l'amphi en pouffant de rire. Je me mords les lèvres su le coup, à deux doigts de leur demander de faire un peu moins de bruits... Que voulez-vous, déformation professionnelle ! Il était moins une avant que je ne passe pour un vieux type grincheux en tout cas.
« Ah oui ? Alors ta... pardon votre première impression ? ». C'est vrai que l'Université, on nous vend ça comme un objectif à atteindre alors qu'il ne l'est pas tant que ça ! Déjà parce que beaucoup n'ont pas besoin de passer par là pour vivre d'un travail qui les passionne mais aussi parce c'est un luxe que peut de famille peuvent se payer...
« C’est même la première fois que je suis des cours à l’université, il était temps. »
« Il y a un début à tout ! Personnellement ça fait des lustres que je n'y avait pas mis les pieds... Depuis ma graduation à vrai dire. Bon pour être honnête, les salles de classe, ça reste mon quotidien mais ça n'a quand même rien à voir avec un amphithéâtre ! ». Et voilà que je commence à jouer les pipelettes alors que je réalise en avoir oublié mes bonnes manières.
« Je m'appelle Jake au fait !» dis-je en lui tendant une poignée de main. « Et du coup comme tu as du le comprendre je suis prof ! Et toi... vous... on peut se tutoyer ?». C'est vrai que ce serait franchement plus simple. Après tout, on est désormais camarades de classe !