We have more to learn from animals than animals have to learn from us (Max)

Comme chaque matin, Livio avait pris le chemin du haras. Il s'était dirigé vers son secteur, avait nourri les animaux, les avait sorti dans l'espace qui leur était dédié afin de procéder au nettoyage des box. Qui aurait pu croire que lui, l'homme habitué aux grandes soirées, au bling-bling et aux belles affaires se plaise autant avec ces bottes pleines de crottin et ses vêtements sans cesse tâchées. Bien sûr l'entreprenariat lui manquait. Avoir sa boîte lui manquait. Mais être ici était aussi une bonne bouffée d'air frais. Peut-être devait-il tout simplement allier les deux pour être totalement heureux. Mais soit, là n'était pas la question. Aujourd'hui, Livio devait accueillir deux nouveaux résidents. Thomas l'avait informé qu'un homme devait venir au haras aujourd'hui. Son boss l'avait donc missionné pour l'accueillir comme il se devait. Après avoir terminé le nettoyage de l'avant-dernier box et alors qu'il allait commencer le dernier box, il aperçut une silhouette vers l'accueil. Livio posa ses outils dans le box à nettoyer et s'approcha de l'homme. Quand il fut à sa hauteur, il le salua : « Monsieur Davenport  ? » Il lui tendit la main. « Je suis Livio, l'un des palefreniers du haras. Monsieur Rankin n'est pas là aujourd'hui, mais il m'a demandé de vous accueillir. » Tout sourire, il continua : « J'ai cru comprendre que vous aviez désormais deux chevaux avec vous, n'est-ce pas ? »

Aujourd'hui, Thomas l'avait missionné pour accueillir Monsieur Davenport qui devait amener deux nouveaux pensionnaires pour le haras. En s’attelant au nettoyage des box, il avait remarqué la silhouette près de l'accueil et s'était empressé de rejoindre l'homme afin de se présenter. C'était bien l'homme qu'il attendait. Après l'avoir salué et expliqué qu'il était celui qui l'accueillait aujourd'hui, à la place du patron, ce dernier l'informa que les chevaux étaient également là, sûrement à l'entrée du haras. Quand il lui demanda s'il voulait les voir avant de les faire descendre de la remorque, Livio acquiesça : « Avec grand plaisir ! » Il s'apprêta à emboîter le pas du jeune homme quand ce dernier lui fit une requête. Il souhaitait que Livio soit le seul à s'occuper de ses chevaux. Le jeune homme le regarda, un peu pris au dépourvu, mais préféra dire la vérité. « Pour être honnête avec vous, je ne travaille pas à temps plein ici. » Il aidait aussi sa femme au sein de sa boutique afin que cette dernière puisse avoir du temps à passer avec leur fils. « Mais je peux vous assurer que vos chevaux seront entre de très bonnes mains. Les autres palefreniers ont des années d'expérience et je ne parle même pas de Monsieur Rankin qui est une véritable référence. C'est lui qui m'a tout appris. Vous n'avez donc pas de soucis à vous faire. Ils seront très bien ici. » Quand il sera sur le haras, il était certain que Livio prêterait la même attention aux deux nouveaux pensionnaires. « Comment s'appellent vos deux chevaux ? » finit-il par demander.

Il avait de quoi être rassuré. S'il avait confiance en Livio, il allait avoir confiance en les autres, et pour cause, puisque Livio était le dernier arrivé au haras. Le jeune sembla le comprendre parfaitement et l'accepter. Ils avancèrent jusqu'à la remorque où se trouvaient les chevaux. L'un d'entre eux approcha directement sa tête vers Livio, qui le caressa, large sourire aux lèvres. Le deuxième, en revanche, était plus nerveux. « ça se comprend ! Sans compter que là, il a envie de se dégourdir les pattes. » Donc ils ne firent pas attendre davantage les deux animaux, les sortant de la remorque pour les mener jusqu'aux box. Ils remplirent les premiers papiers, Livio se contentant de répondre aux questions du jeune homme. Il ne semblait pas prêt de partir, ce que Livio comprenait parfaitement. Aussi répondit-il avec bienveillance : « Sur les horaires d'ouverture, vous pouvez venir comme vous le souhaitez. En revanche, si vous comptez passer en fin de journée, n'hésitez pas à nous prévenir pour que l'on puisse vous accueillir. » Il regarda les deux chevaux, avant de reposer son regard vers le jeune homme. « Il y a un sentier pas très loin, au nord du haras, qui promet de belles balades. Ça rejoint le bord de plage, c'est très beau ! »  Rassemblant les papiers signés, Livio demanda alors : « Vous voulez que je vous montre les équipements ? »

Livio était en train de faire la présentation des équipements – que Max pourrait utiliser avec ses chevaux – quand ce dernier lui posa une question étrange. L'italien le regarda avec un sourire aux lèvres, esquissant un sourire : « Oui, je suis déjà allé à Perth et à New York pour des engagements professionnels. » Mais cela l'étonnerait qu'il l'ait déjà rencontré. Pourtant, il tapa dans le mille en parlant de son passé de candidat de télé-réalité. C'était surprenant de voir qu'il l'avait ramené à ce moment de sa vie pas si ancien. « C'est ça, j'ai participé à une émission de télé-réalité pour la télévision italienne. La dernière saison s'est déroulée en Australie, peut-être en avez-vous entendu parler à ce moment-là ? » C'était sûrement cela, parce que Livio n'était pas célèbre en Australie. Enfin, il n'était pas connu pour ses participations à ces émissions. Par contre, il avait commencé à se faire un petit nom grâce à sa marque. Il secoua la tête à ses mots, esquissant un sourire : « Ne vous inquiétez pas, ça ne me gêne pas d'en parler. Devenir palefrenier a plutôt été un hasard. J'avais besoin de trouver un travail et Monsieur Rankin m'a donné l'opportunité de travailler ici. Mais en réalité, j'étais créateur d'une marque de vêtements plutôt connue en Italie et qui commençait à se faire un petit nom ici. Mais... c'est tombé à l'eau. » Il haussa les épaules, pour lui c'était encore un échec de parler du naufrage de sa marque. Il avait perdu confiance en lui, en ses aptitudes de chef d'entreprise. Il avait perdu de l'argent et avait eu peur pour sa famille. Heureusement qu'il était aussi du genre écureuil, à garder des sous de côté. C'était bien ce qui l'avait sauvé. « Et vous, que faites-vous dans la vie ? » Il était tout jeune, il devait à peine commencer dans la vie active ou être encore étudiant.

« Etudiant en architecture ? C'est intéressant de créer des choses par soi-même. » Partir sur de la nouveauté ou au contraire, faire du nouveau avec de l'ancien. C'était un peu ce qu'il faisait avec ses vêtements. D'ailleurs, le jeune homme lui demanda pourquoi sa marque était tombée à l'eau. Le visage de Livio se ferma un peu mais il se contenta de répondre : « J'ai donné ma confiance à la mauvaise personne et elle est partie en embarquant toutes les recettes. » C'était bien ce qui le minait le plus. Sa marque marchait bien. Ce n'était même pas de sa faute. Heureusement il ne s'attarda pas dessus, préférant parler de son passé de candidat de télé-réalité. « J'ai gagné la première émission que j'ai faite. Ensuite, j'ai fait d'autres émissions où on nous envoyait dans un tout un tas de pays. La dernière s'est faite en Australie et je suis tombé amoureux de ce pays. J'ai tout arrêté pour rester ici. » C'était surtout parce qu'il avait retrouvé celle qui allait devenir sa femme. Laissant Max regarder les équipements, Livio hocha la tête quand il l'informa voir son propre équipement. « Non, ce n'est absolument pas un problème. Soit vous venez avec dès que vous passez ici, soit vous nous laissez le tout et on se charge de l'entretien. » C'était à lui de voir. Quand il lui demanda s'il voulait vérifier la conformité de l'équipement, Livio esquissa un sourire : « Non pas la peine. Si c'est l'équipement que vous utilisez toujours et auquel votre cheval est habitué, nous nous adapterons. » Ils marchèrent encore un peu avant d'arriver à l'accueil de l'établissement. « Je crois vous avoir tout montré. Avez-vous d'autres questions ? Sinon, vous savez que je ne serai jamais très loin des box. » Box qui n'attendaient que Livio pour la suite de l'entretien, d'ailleurs.