#382 My spirit's sleeping somewhere cold (Juliann)

Tahlia commençait à prendre ses marques dans cette nouvelle maison. Comme elle l'avait imaginé, la vie quotidienne avec Juliann était des plus douces. Ils se connaissaient suffisamment pour savoir quand l'autre avait besoin de silence ou de solitude. Même Thaïs avait désormais ses repères dans sa chambre. Une vraie chambre que Tahlia et Juliann avaient aimé meubler. Ils avaient d'ailleurs pris un bon fou rire avec cette espèce de petite armoire qui avait été difficile à monter. Mais c'était de tels moments qu'elle chérissait pleinement, lui rappelant à quel point elle n'était pas faite pour vivre seule. La proposition de Juliann était donc tombée à pic. Doucement, les fondations de la vie de Tahlia recommençaient à se solidifier. Elle commençait à voir le bout du tunnel, même si les soucis étaient encore bien présents. Des soucis qui résidaient en ce petit être qui grandissait en elle et dont elle gardait l'existence secrète, le temps d'obtenir tous les rendez-vous médicaux. Seul le principal intéressé était au courant et c'était déjà un soutien indéniable. Après avoir passé la soirée avec Juliann, devant un film, les deux colocataires se souhaitèrent bonne nuit, Tahlia faisant un détour par la salle de bain, afin de prendre sa douche, avant de retourner dans sa chambre. Ce soir, Thaïs était chez Carter, les deux ex ayant convenu de la garde alternée. N'ayant pas forcément l'envie de dormir, la jeune femme se mit en tête de vider les quelques cartons restants, dont certains contenaient les vêtements de la saison estivale, qui bientôt s'apprêtera à pointer son nez. Elle s'attela à leur trouver une place dans l'armoire de la chambre, faisant quelques allers-retours jusqu'à ce que son regard soit attiré par quelque chose qui était tombé d'une poche. Instinctivement, elle se pencha pour récupérer l'objet qu'elle prit en main. Mais quand son regard se posa sur le petit sachet, Tahlia le relâcha aussitôt, comme si c'était quelque chose d'excessivement dangereux. Et ça l'était... Ce sachet qui venait de tomber, c'était le pire cauchemar de Tahlia. C'était ce qui la ramenait quelques mois en arrière, quand elle était au plus bas, quand elle ne carburait qu'à la cocaïne. Elle avait difficilement lutté contre cette poudre blanche, à la simple force de son esprit, pour Thaïs, dont elle était enceinte à l'époque. Mais il y avait encore des soirs où l'envie se faisait ressentir. Et c'était cette envie qui faisait qu'elle gardait son regard rivé sur ce petit sachet, alors qu'elle devrait simplement aller aux toilettes et le jeter définitivement. Elle n'en avait pas le courage. Pas la force. Récupérant le sachet dans sa main, elle resta de longues minutes à observer cette poudre blanche, assise sur le lit, tentée par ses vieux démons. Mais soudain, elle se releva et quitta sa chambre. Non, elle ne prit pas la direction des toilettes, mais elle se dirigea vers la chambre de celui qui pourrait l'aider dans une telle situation. Ou pas... Elle tapa un léger coup à la porte de Juliann avant de rentrer dans la pièce, silencieuse. "Juliann ?" souffla-t-elle, ses yeux humides posés sur la silhouette endormie, s'approchant doucement du lit. "Juliann... tu dors ?"

Cette nouvelle colocation avec Tahlia et Thaïs n'a rien avoir avec la précédente. Avec Cassandre, vous vous connaissiez moins, vous partagiez moins de choses et surtout, il n'y avait pas de petit bébé au milieu. Avec Tahlia, vous vous connaissez par coeur, vous savez exactement quand être ensemble ou quand ne pas l'être, pour laisser de l'espace à l'autre. Votre amitié s'est forgée au fil des années mais continue à évoluer, vous rendant plus solides, plus forts, pour affronter les obstacles de la vie ensemble. Quoi qu'il arrive. Et la petite Thaïs apporte avec elle son lot de moments de bonheur, te redonnant à chaque fois le sourire quand tu en as besoin. Bref, tu es vraiment heureux d'avoir proposé à Tahlia de vivre avec toi et persuadé d'avoir fait le bon choix. Ce soir, n'ayant aucun plan de votre côté, vous décidez de passer la soirée ensemble, devant un film à commenter tout ce qu'il se passe et à se moquer des personnages parfois trop caricaturaux. A la fin de celui-ci, tombant de fatigue, tu rejoins rapidement ta chambre pour sombrer dans le sommeil. Et une fois que tu dors, c'est plutôt difficile de t'en extirper. « Tu sais que je dors tout nu ? » Dis-tu, la voix enrouée alors que Tahlia te tire de ton sommeil. Mais en ouvrant un oeil et en voyant l'air affolé de la brune, tu fronces immédiatement les sourcils, comprenant que quelque chose cloche. Tu tires la couverture sur ton corps pour éviter de dévoiler ton anatomie et te retournes vers ta colocataire. « Qu'est-ce qu'il se passe ? » Demandes-tu en posant enfin ton regard sur elle. C'est à ce moment-là que tu découvres ses yeux mouillés et son regard perdu voire même tétanisé. Après avoir tendu le bras pour ouvrir ta lampe de chevet, tu repères du coin de l'oeil un petit sachet qu'elle tient entre ses mains. Tu écarquilles les yeux en comprenant de quoi il s'agit, aussi paniqué que la jeune femme à présent. « Tu as... Où as-tu trouvé ça ? » Tu sens ton coeur battre à tout rompre, culpabilisant déjà en imaginant que c'est toi qui as laissé ce sachet trainer sans t'en rendre compte. Tu pensais pourtant avoir fait toutes les armoires de la maison, vidant les petits sachets de poudre blanche dans les toilettes si nécessaire. Mais visiblement, l'un d'eux est passé inaperçu et menace de briser votre équilibre.

Ce soir, Tahlia était face à ses démons. A peine avait-elle posé ses yeux sur ce sachet et compris ce qu'il contenait, que son esprit commençait à faire des siennes. Elle n'était pas totalement détachée de cette poudre blanche qui avait rythmé son quotidien pendant des mois, et il était là le problème. Elle n'avait pas été suivie correctement. Elle avait simplement compté sur sa maternité et l'amour qu'elle portait à sa fille pour trouver la force de s'en sortir. Si cela avait fonctionné aussi bien, c'était aussi parce qu'elle n'était pas tentée. Elle pensait avoir tout jeté. Seulement, la présence de ce sachet dans la poche de l'un de ses vêtements démontrait à quel point elle s'était embourbée dans cet enfer qu'était la drogue. Elle se souvenait de ces mois durant lesquels elle usait de toutes les astuces possibles pour cacher ces petits sachets. Elle s'en souvenait plus que bien, elle en avait même honte. Et c'était douloureux de ressentir, ce soir, l'envie de consommer, alors qu'elle ne voulait plus être l'ombre d'elle-même, alors qu'elle n'avait plus le droit de faire la même erreur. Elle portait la vie. Si vraiment elle voulait au bout de cette aventure, elle n'avait pas le droit de replonger. Alors, par détresse, elle se dirigea vers la chambre de Juliann. Il n'était pourtant pas la bonne oreille. Elle connaissait ses problèmes d'addiction et l'effort qu'il fournissait pour s'en sortir. Mais c'était instinctivement qu'elle se tournait vers lui, sans se dire qu'elle laissait entrer le démon dans la chambre de son colocataire. Elle eut du mal à réveiller le jeune homme. Mais quand ce dernier daigna ouvrir l'oeil, il évoqua le fait qu'il dormait nu. « Oh ça va, j'en ai vu d'autres ! » dit-elle, de manière un peu trop directe – et sans regarder -, afin de lui faire comprendre qu'elle était dans l'urgence. Il sembla s'en rendre compte quand il posa son regard sur elle, se relevant aussitôt pour allumer la lumière. Mais avant même qu'elle ne puisse expliquer ce qu'il se passait, les yeux de Juliann se posèrent sur la main de la brune, qui serrait fortement le sachet. Il avait compris. C'était à croire que leurs regards se posaient automatiquement sur cette drogue qui leur faisait vivre un calvaire. « Je... je l'ai trouvé dans l'une des poches d'un vêtement qui était resté dans l'un de mes cartons. » avoua-t-elle, afin de lui faire comprendre qu'elle était la fautive. Elle ouvrit la paume de sa main, son regard rivé sur ce sachet, avant de reposer ses yeux verts sur son ami : « Je sais que je devrais le jeter dans les toilettes . Mais Ju, je n'y arrive pas... » Sa voix se brisa sur la fin de phrase. Elle voyait qu'il était aussi paniquée qu'elle, mais à cet instant, elle voyait en lui son seul échappatoire.

Te voir nu semble être le cadet des soucis de Tahlia et tu le comprends bien vite en voyant son expression affolée. Alors tu te contentes de recouvrir ton intimité avec la couverture de ton lit, allumant au passage la lumière pour faire face à ta colocataire et au problème. Seulement tu ne t'attendais pas à être confronté à un problème aussi conséquent. Pas alors qu'en ce moment tu te sens plus vulnérable que jamais concernant la drogue. Et visiblement, l'Australienne a autant de mal que toi à se débarrasser de cette petite poudre blanche qui vous a tant fait rêver par le passé. Tu te sens un peu rassuré en apprenant que la drogue ne vient pas d'une distraction de ta part. Mais en même temps, tu te sens mal pour Tahlia qui doit s'en vouloir de se mettre en danger, de vous mettre en danger. « Euhm... attends, laisse-moi enfiler un truc et on va s'en occuper tous les deux, d'accord ? » Demandes-tu en soutenant son regard. La vérité c'est que tu ne sais pas du tout si tu seras capable de l'aider. Tu te sens tellement faible à cet instant précis que tu n'es pas certain d'être mieux que ta colocataire. Tu n'es pas certain de pouvoir jeter le contenu du sachet dans les toilettes sans réfléchir. Après que Tahlia ait quitté ta chambre, tu te dépêches d'enfiler un boxer et un short, restant torse nu. Maintenant que vous vivez ensemble, tu sais pertinemment que ton torse ne fait ni chaud ni froid à l'Australienne. Tu la retrouves dans le salon, le petit sachet blanc toujours présent au creux de sa paume. Immédiatement, ton regard se dirige vers celui-ci, imitant celui de la jeune femme. « Je vais le prendre, ok ? Je vais aller le jeter dans les toilettes mais j'ai besoin que tu viennes avec moi. » Dans un autre temps tu l'aurais fait sans réfléchir, d'une traite pour ne plus y penser. Mais là, tu te sens bien trop vulnérable pour y aller seul. Il y a quelques jours, Effy s'est pointée avec de la drogue et même si ce n'était pas de la cocaïne, ça a suffi pour te faire flancher au moins un peu. Alors aujourd'hui, en voyant l'objet de tous tes désirs, tu es sur le point de craquer. Evidemment, tu te retiens bien de dire tout cela à Tahlia pour éviter qu'elle culpabilise. Tu essaies de faire bonne figure mais tu sais qu'elle te connait par coeur et qu'elle doit ressentir ta détresse. Après être arrivés tous les deux devant les toilettes, tu prends le petit sachet entre tes mains et te positionnes près du wc. Mais une fois devant, tu es juste incapable de déverser son contenu dans l'eau. « J'peux pas. » Dis-tu sans oser regarder ton amie, honteux.

A force qu'on lui rabâche à quel point elle était une femme forte, Tahlia avait fini par le croire. Raison pour laquelle elle tombait de haut, ce soir, en constatant à quel point elle était faible face à un vulgaire petit sachet. Elle se rendait compte qu'elle n'était pas 'guérie', qu'elle avait toujours une part d'elle qui réclamait cette poudre qui lui avait offert de brèves échappatoires. Là, en tenant ce sachet dans sa main, elle oubliait l'enfer vécu. Elle oubliait qu'elle avait failli perdre Juliann et Thaïs à cause de cette connerie. Elle avait juste envie d'y regoûter. Une dernière fois. Une toute dernière fois, se convainquit-elle. Pourtant, dans un dernier sursaut de conscience - et alors qu'elle avait l'opportunité de s'enfiler un rail de coke – elle prit la direction de la chambre de son colocataire, dans l'espoir de trouver de l'aide. Encore une belle preuve de l'intelligence de Tahlia ! En effet, quoi de mieux que d'aller demander à un homme en plein sevrage de cocaïne de se débarrasser de cette poudre blanche qu'il redoutait tant ?! Elle était décidément bien conne. Mais à cet instant, elle était perdue. Tellement perdue qu'elle ne savait quoi faire. Elle hocha la tête quand il lui confia qu'ils allaient s'en occuper tous les deux. Sans un mot, elle quitta la chambre de Juliann, prenant la direction du salon, où elle l'attendit patiemment, les yeux rivés sur son sachet. C'était dur de résister. Mais au moment où elle était à deux doigts de craquer, Juliann arriva. Il avait le même regard qu'elle : celui d'un drogué face à sa dope. Quand il lui annonça ce qu'il allait faire, Tahlia resserra l'emprise de ses doigts sur ce sachet. Mais quand il lui demanda de venir avec lui, de l'accompagner, elle redressa ses yeux verts sur lui, se rendant compte de l'effort qu'il devait fournir pour cela. « Ok... » murmura-t-elle, se relevant pour le suivre jusqu'aux toilettes. Là, elle lui donna le sachet, ses yeux rivés sur la cuvette des toilettes, attendant le moment où elle verra cette drogue disparaître. Mais ce moment n'arriva pas. Très vite, Juliann abdiqua, lui murmurant qu'il n'était pas capable de le faire. Tahlia redressa la tête et observa son ami, se rendant compte de ce qu'elle était en train de faire. Sa détresse lui paraissait soudainement bien palpable. Elle était égoïste. Egoïste de lui infliger cela. « Laisse... je... je vais le faire. » dit-elle, en lui reprenant le sachet.  Son élan, son sursaut de conscience aurait dû être suffisant pour lui faire jeter cette merde. Mais on sentait qu'elle combattait ses démons, elle aussi. « Tu sais ce qu'on va faire ? On va sortir des toilettes, on va aller dans la rue et on va le jeter dans la première poubelle que l'on croise, ok ? On va prendre l'air et nous remettre les idées en place.» D'un geste de la main, elle poussa Juliann à sortir. Seulement, quand elle fut certaine qu'il était dans le couloir, elle, elle referma la porte des toilettes, à double tour. C'était mesquin de faire ça, mais c'était sûrement un dernier sursaut pour le protéger.  Elle n'aurait jamais dû l'appeler. Elle n'aurait jamais dû venir le réveiller...

Tu étais loin de t'imaginer, en te réveillant en pleine nuit avec l'arrivée imprévue de Tahlia, que tu devrais faire face à des démons que tu pensais enfuis assez profondément et depuis assez longtemps. Tu ne pensais pas être aussi fragile en découvrant un petit sachet de cocaïne. Mais il faut dire que la tentation d'Effy, il y a quelques semaines à peine, n'a rien arrangé. Ce qui fait qu'aujourd'hui, tu te retrouves devant les toilettes, incapable de jeter le contenu du sachet dans la cuvette. Tu ne peux juste pas et cela te terrifie. Qu'est-ce que tu comptes faire, si ce n'est le jeter ? Prendre un rail de coke devant Tahlia ou pire, avec elle, pour vous faire replonger tous les deux dans cette noirceur qui a failli vous faire sombrer ? Bonne idée Juliann. Tu aurais dû jeter le contenu tant qu'il était encore temps. Là, la drogue se retrouve à nouveau dans les mains de la brune et quelque chose te dit que c'est une mauvaise idée. Tu vois bien que son regard n'est pas plus sûr que le tien. Tu vois bien qu'elle est aussi tourmentée que toi, voire plus. Mais qu'est-ce que tu peux faire d'autres ? Si ce n'est l'aider à aller jusqu'au bout, en jetant le contenu du sachet dans l'évier, dans la poubelle ou ailleurs, encore. « Oui, tu as raison, on a besoin d'air mais ça va aller. » Dis-tu en hochant la tête, sans te douter une seule seconde que tu viens de tomber dans le piège de ton amie. Poussé par Tahlia, tu avances vers le couloir pour prendre tes affaires et sortir comme prévu avec la jeune femme mais elle en décide autrement. Sans que tu ne puisses réagir, elle s'enferme dans les toilettes avec la drogue. Bordel. « Tahlia, qu'est-ce que tu fais ? » Demandes-tu en revenant vers les toilettes, frappant quelques coups à la porte. « Bordel Tahl' ne fais pas ça... on peut s'en sortir tous les deux, ouvre-moi. » Tapant un peu plus fort sur la porte, tu essaies d'entendre quelque chose à l'intérieur mais tu n'entends rien. Elle peut tout aussi bien être en train de prendre un rail de cocaïne sur la planche des toilettes que tu ne le sauras pas. Paniqué, tu te prends la tête entre les mains, tentant de rassembler tes idées pour trouver une solution et sortir ton amie de là avant qu'elle fasse une grosse connerie. Il y a bien une petite fenêtre, dans les toilettes, qui donne sur l'extérieur mais elle est probablement fermée et bien trop petite pour que tu puisses t'y glisser. La seule solution, la seule issue, c'est cette porte. « J'te jure que je vais défoncer cette porte Tahlia. J'm'en fous de faire des dégâts, si tu ne m'ouvres pas, je vais la défoncer. » Tu te recules un peu pour prendre de l'élan, déjà prêt à donner un bon coup pour que la porte cède et que tu puisses sauver ton amie, à l'intérieur, piégée avec ses pires démons.

Elle n'avait décidément pas réfléchi sur ce coup-là. La peur de commettre une erreur l'avait directement mené dans la chambre de Juliann, alors qu'il était sûrement celui qui était aussi faible qu'elle face à cette drogue. Sans doute aurait-elle dû appeler Ciàran ou Freja, qui auraient mis les choses au clair avec bien plus de facilité... Là, ils se retrouvaient comme deux cons devant la cuvette des toilettes, sans que l'un et l'autre parviennent à jeter ce vulgaire sachet. Elle sentait toute la détresse de Juliann. Une détresse qui nourrissait la culpabilité de Tahlia. Elle n'avait pas le droit de lui infliger cela. Alors, en voulant le protéger, elle manigança tout un plan. Même dans des situations comme celle-ci, le cerveau de la brune fonctionnait à mille à l'heure afin de la sortir de situations délicates. Elle lui proposa une sortie à l'extérieur, sans que son visage ne trahisse son émotion. Juliann était pourtant l'un de ceux qui lisaient le mieux en elle. Il était rare qu'elle parvienne à lui mentir, mais il était tout aussi paumé qu'elle. Et sans doute jouait-elle de ce moment de faiblesse.  « Oui, ça va aller. » promit-elle, le laissant passer en premier, avant de refermer brusquement la porte derrière lui. Très vite, elle l'entendit appeler son prénom, lui demander ce qu'elle faisait. On peut s'en sortir tous les deux. Non... ils ne pouvaient pas s'en sortir tous les deux. « Je n'aurais jamais dû te réveiller. » put-on entendre de l'autre côté de la porte, contre laquelle Tahlia s'était adossée, la tête appuyée, les larmes de colère roulant sur sa joue. Elle se détestait tant, à cet instant. Elle détestait être faible. Elle détestait cette merde qu'elle avait dans la main, ce sachet qu'elle regarda de nouveau, les yeux vitreux. Elle se détestait d'avoir envie d'ouvrir ce sachet et de s'enfiler un rail, là, dans ces toilettes, de la manière la plus pitoyable. Les mains tremblantes, elle finit par ouvrir le sachet, tentant de faire l'impasse sur les coups donnés à la porte. Elle avança jusqu'à la cuvette, l'esprit ailleurs. Elle était à deux doigts de commettre une erreur monumentale... De l'autre côté de la porte, Juliann s'impatientait, prêt à défoncer la porte, déjà prêt à prendre son élan pour la sortir de là. Il y eut un silence, un silence long de quelques secondes jusqu'à ce qu'un bruit se fasse entendre dans les toilettes : le bruit d'une chasse d'eau que l'on venait de tirer. Puis, la porte se déverrouilla, dévoilant Tahlia, les yeux rougis par les larmes, le visage crispé par la colère. Elle ne regarda même pas Juliann, honteuse. Une seule phrase s'échappa de ses lèvres, alors qu'elle prit la direction de sa chambre. « Il faut que je me casse d'ici, au plus vite... » A peine arrivée dans son cocon, elle prit le premier sac qu'elle trouva, fourrant des affaires sans vraiment regarder ce qu'elle mettait. Elle avait juste honte. Elle avait juste peur, peur de ne jamais retrouver une relation saine et sereine avec Juliann, sans que la drogue vienne tout gâcher à nouveau...  

Complètement paniqué, tu ne sais plus quoi faire ou dire pour faire sortir Tahlia des toilettes et l'empêcher de commettre une grave erreur. Si elle replonge maintenant, tu sais que ce sera encore plus dur pour elle d'arrêter. La deuxième fois est encore pire que la première, tu le sais par expérience. Et tu ne veux pas qu'elle ait à affronter tout cela parce que tu as été trop lâche pour jeter, toi-même, la drogue dans les toilettes. « Bien sûr que si, tu as bien fait de me réveiller Tahl'. A deux on est plus forts, tu te souviens ? » Vous vous êtes toujours promis de vous entraider, d'être là l'un pour l'autre, peu importe les épreuves et les obstacles qui se mettent sur votre route. La vie a déjà essayé de vous séparer plus d'une fois mais elle n'y est jamais parvenue. Ce n'est pas aujourd'hui que ça va commencer, si ? Alors que tu t'apprêtes à défoncer la porte, n'entendant plus rien de l'autre côté, la chasse d'eau s'enclenche et Tahlia apparaît quelques secondes plus tard. Tu ne sais pas si tu dois être soulagé ou non d'avoir entendu la chasse. Est-ce un leurre ? Veut-elle te faire croire qu'elle a jeté la drogue alors qu'en réalité, elle l'a prise ? Tu n'en sais rien. Mais la voir sortir des toilettes, les yeux rougis, le visage terrifié et l'air sombre, ça te brise le coeur. Tout cela ne serait pas arrivé si tu avais eu le courage de jeter la drogue la première fois. Tu restes là, figé, sans savoir quoi dire ou quoi faire. Et alors que tu tentes de reprendre tes esprits pour rassurer ton amie, elle ne t'en laisse pas le temps, marmonnant une phrase qui pousse ton coeur à rater un battement. « Qu'est-ce que tu racontes ? » Demandes-tu en ne comprenant pas pourquoi elle veut partir. Pourquoi elle veut t'abandonner dans un moment où vous avez tous les deux besoin de l'autre. Deux toxicos en manque de leur dose, c'est ce que vous êtes. Et vous devez vous soutenir pour ne pas flancher. Tu la suis jusqu'à sa chambre, la regardant remplir son sac, complètement impuissant. « Arrête Tahlia. » Dis-tu en posant une main sur la sienne et en l'empêchant de continuer à mettre des vêtements dans son sac. « T'es chez toi ici, pourquoi est-ce que tu devrais partir ? J'veux pas que tu t'en ailles. Reste, s'il te plaît. » Tu as besoin d'elle, besoin de son soutien, besoin de sa présence pour ne pas profiter du fait d'être seul afin d'aller acheter de la drogue à ton ancien dealer. Tu as besoin de ton amie, tout simplement.

Elle ne savait pas ce qui était le plus douloureux : avoir envie de consommer, être faible face à cette drogue ou faire l'erreur d'entraîner Juliann dans sa chute. C'était sûrement le dernier point qui était le plus terrible pour elle. Alors, dans un dernier sursaut de conscience, elle s'était enfermée dans ces toilettes afin d'éloigner Juliann de son pire cauchemar. Des deux, c'était sûrement Tahlia la plus solide, parce que la drogue était moins ancrée en elle. Parce qu'elle n'avait pas replongé. Pas encore, du moins. Mais là, avec ce sachet dans la main, il fallait avouer que la tentation était grande. Elle n'avait qu'à l'ouvrir et prendre un tout petit rail. Peut-être cela la soulagerait. Peut-être aura-t-elle sa légère dose qui lui permettrait de tenir le coup, de repartir. Elle sortit de ses pensées en entendant Juliann s'affoler de l'autre côté de la porte, alors qu'il lui demandait de lui ouvrir, alors qu'il lui rappelait qu'à deux, ils étaient plus forts. "Non, nous ne sommes pas plus forts à deux..." répondit-elle, destabilisée, coupable de l'avoir réveillé. Elle avait cru que l'union faisait la force, mais elle s'était trompée. C'était la drogue qui prenait malgré tout le dessus. Ne prêtant plus attention à Juliann, Tahlia resta encore de longues secondes à guetter son sachet. Puis, un silence. Le bruit d'une chasse d'eau. Et voilà que Tahlia sortait des toilettes avant que Juliann ne défonce la porte. Sans un mot, sans un regard, elle se dirigea vers sa chambre, commençant à s'activer pour prendre ses affaires. En comprenant qu'elle s'apprêtait à partir, Juliann tenta de l'arrêter, sans succès. Mais quand il posa sa main sur son sac, la brune releva enfin le regard vers lui puis fondit en larmes en entendant sa dernière phrase, face à son "reste" qui témoignait du besoin qu'il avait qu'elle soit là. " Pourquoi devrais-je rester, Juliann ? Regarde ce que j'ai fait !! Regarde, je t'ai mis ton pire cauchemar sous le nez, égoïstement, parce que je n'étais pas capable de gérer la situation, seule." Elle essuya ses larmes de colère d'un geste frénétique. "Tu en as eu envie. Je le sais. Je l'ai vu dans ton regard. La prochaine fois, ça se passera comment ? On s'enfilera un rail, tous les deux ? Je peux pas, Juliann. Je ne peux pas t'infliger ça..." Elle l'aimait bien trop pour ça. Et savoir qu'elle était toute aussi instable que lui n'arrangeait pas la chose. Pour une fois, Tahlia se rendait compte qu'elle n'était pas apte à porter les maux, les douleurs des autres et c'était sûrement le plus difficile à avaler.

Non, nous ne sommes pas plus forts à deux... Sur ce coup-ci peut-être pas mais au quotidien, en faisant les choses à deux, en discutant, en s'écoutant, vous êtes plus forts. Tu le sais parce que vous y avez déjà été confrontés plus d'une fois. Sur plein de sujets, plein d'événements de la vie. Mais la drogue, il est vraiment que c'est différent. C'est votre faiblesse, votre noirceur, que les autres ne peuvent comprendre mais que vous, justement, vous ne comprenez que trop bien. Ce soir, en voyant ce petit sachet dans sa paume, tu t'es senti plus vulnérable que jamais. Sans doute parce que, quelques jours plus tôt à peine, tu étais déjà tenté par Effy, lors de la clôture de la fête de la mangue. Deux fois en quelques jours, c'est trop. Trop pour que tu sois là pour aider ton amie dans ce combat que vous menez tous les deux. A tel point que ton manque d'agissement a poussé Tahlia à se retrancher dans les toilettes pour éviter de te tenter à nouveau ou que tu replonges. Mais qu'en est-il d'elle ? Si la brune te protège, qui la protège, elle, en retour ? Personne. Pas même toi alors que tu es bloqué de l'autre côté de la porte, impuissant. Après quelques secondes qui te semblent extrêmement longues, la chasse d'eau se fait entendre et Tahlia passe devant toi sans même te regarder pour prendre la direction de sa chambre. Là-bas, l'ex-policière commence à mettre ses affaires dans un sac, bien décidée à quitter cet endroit. Et par le même coup à te quitter. « Parce que tu es mon amie, que je t'aime et que je veux que tu restes. J'aime vivre avec toi. » C'est facile de vivre avec Tahlia parce que vous vous connaissez par coeur. Vous savez quand vous éclipsez pour laisser de l'air à l'autre ou quand être ensemble quand vous avez besoin de réconfort, d'une présence. Vous n'avez pas besoin de mots pour vous comprendre. « Je suis content que tu m'aies réveillé et que tu n'aies pas agi toute seule. » Les conséquences auraient pu être catastrophiques. Là, en te réveillant, cela a sûrement empêché Tahlia de replonger. Ou alors, tu te trompes sur toute la ligne et elle a pris ce rail de cocaïne dans les toilettes. Non, tu ne veux pas y croire. « Oui j'en ai eu envie. Terriblement envie. Mais c'est parce que c'est une semaine plus compliquée pour moi. L'autre jour, quelqu'un m'a proposé de prendre de la drogue et m'a foutu un sachet de marijuana devant le visage. Alors ce n'est pas ta faute, Tahl', c'est juste moi qui suis faible. » Tu baisses la tête en soupirant, pas certain que tes mots la convaincront de rester. « Tu ne m'infliges rien du tout. On est là pour prendre soin de l'autre. Tu as vu que j'étais vulnérable alors tu m'as empêché de replonger. Et si les rôles étaient inversés, même en étant tenté, je ne t'aurais jamais laissé prendre cette drogue. Alors arrête de dire que tu me fais du mal ce n'est pas vrai. On se sauve mutuellement. » Tu es persuadé de ce que tu dis. Si la première fois c'est à cause de toi que Tahlia a plongé, aujourd'hui, tu sais que tu prendras soin d'elle quoi qu'il arrive.

HJ:

Elle n'avait pas eu le choix, Tahlia. Face à Juliann, face à sa vulnérabilité, elle avait dû user de subterfuges pour l'éloigner. Mais là, dans ses toilettes, c'était elle qui était confrontée, seule, face à ses démons. Des démons oppressants, toujours présents, tapis dans l'ombre. C'était à se demander si, un jour, elle arriverait à s'en détacher. Il n'y avait pas un jour sans qu'elle n'ait pas une pensée pour cette poudre blanche. Parfois, c'était succinct, juste une petite pensée, et puis des fois, il y avait l'envie, forte, qui l'étreignait. C'était ce cas-là, ce soir. Elle avait tant envie de prendre un rail, un tout petit rail. Bien sûr, elle avait sa petite voix qui lui disait de ne pas le faire, ne serait-ce que pour Thaïs. Et elle se sentait coupable, honteuse, de se dire que là, même cette pensée-là ne suffisait pas à l'en dissuader. Malgré tout, au bout de longues secondes, elle finit par sortir de ces toilettes, filant à toute vitesse dans la chambre pour fuir au plus vite. Elle n'avait pas envie de subir le regard de Juliann, elle ne voulait pas voir une quelconque déception. Quand il lui sortit tout un tas d'arguments pour qu'elle reste, elle lâcha, de mauvaise foi : « Ce n'est pas suffisant. » Ou au contraire, c'était pour tout ça qu'elle devait fuir. Parce qu'elle l'aimait elle aussi et elle savait que, maintenant que la drogue était entrée dans cette maison, elle ne pourrait plus lui offrir cette facilité de vie en commun. Et alors qu'il lui soufflait qu'elle avait bien fait de le réveiller, elle secoua négativement la tête. « Non, j'aurais dû agir seule. J'ai été nulle. » ça aurait été surtout nul de rester dans sa chambre et de s'enfiler ce rail, ni vue ni connue. Mais quand il lui avoua avoir été soumis à la tentation, il y a peu, elle releva la tête vers lui et le regarda : « Pourquoi tu ne me l'as pas dit ? » Avait-elle été aveuglée au point de ne pas voir qu'il traversait une période difficile ? Raison de plus pour ne pas lui infliger davantage sa présence. Quand il reprit la parole, elle reposa son regard sur lui, abandonnant de nouveau son sac. Il marquait un point en disant qu'elle l'avait empêché de replonger. Mais la suite des paroles lui donna la sensation qu'on lui plantait un couteau dans le cœur.  Parce qu'elle avait la vérité et elle savait que ça pouvait faire mal. Mais pour lui faire prendre de l'ampleur de la situation, pour lui faire comprendre qu'elle n'était pas digne de vivre sous son toit, elle murmura, du bout des lèvres : « J'en ai pris... un peu. Un tout petit peu. Mais j'en ai pris. » Seule. Dans ces toilettes. Comme une droguée. C'était juste con parce qu'elle avait sombré dans l'acte de reconsommer, mais elle n'en avait même pas pris assez pour oublier tout ça un instant. Pitoyable.

Ce n'est pas suffisant. Aïe, ça fait mal d'entendre ça parce que pour toi, cela suffit. Ce n'est probablement pas ce que Tahlia a voulu dire mais à travers ses mots tu entends tu n'es pas suffisant. Comme si votre amitié qui dure depuis des années n'était pas assez forte, assez solide, pour supporter ce que vous traversez à cet instant. Or, à tes yeux, vous pouvez tout surmonter parce que des obstacles, vous en avez déjà eu énormément. Et tu pensais que le pire était derrière vous mais visiblement, tu te trompais. « Non tu n'es pas nulle Tahl'. Tu es vulnérable. » Comme toutes les personnes victimes d'addiction, as-tu envie d'ajouter. Toi-même, tu as failli céder à la tentation il y a quelques jours à peine, alors qu'Effy roulait un joint juste sous tes yeux dans le but de le fumer avec toi. Pourquoi tu n'en as pas parlé à ta colocataire ? Pour une raison évidente. « J'avais honte. » Honte d'être encore vulnérable après des semaines d'arrêt. Ne pourras-tu jamais être tranquille ? Ne pourras-tu jamais passer une journée sans penser à cette addiction qui t'a fait plonger, plus d'une fois, dans les abysses les plus sombres de ta vie ? Il faut croire que non. « Je voulais être fort pour toi. Pour que tu te sentes forte et qu'on se tire vers le haut, tous les deux. » Expliques-tu en baissant légèrement la tête. Pourtant, tu aurais dû en parler à Tahlia parce que, comme tu le lui dis, elle t'aurait empêché de faire une connerie comme ça a été le cas ce soir. Et réciproquement. Si vos rôles avaient été inversés, tu l'aurais protégée. Parce que c'est ce que vous faites tous les deux, depuis des années maintenant. Enfin, si on met de côté quelques ratés. J'en ai pris. Tu t'arrêtes à ces mots-là, sentant une boule se former dans ta gorge. Ce que tu peux être con et aveugle ! Là, tout de suite, tu t'en veux de l'avoir laissée tomber. En fait, entre vous deux, c'est toi le mauvais ami, celui qui n'est pas attentif à l'autre. Pas elle. « Putain, j'suis vraiment désolé. C'est ma faute, je n'ai pas réussi à te protéger... Toi, tu m'en as empêché mais moi, je t'ai poussé à replonger. » Tu n'oses même plus la regarder alors tu viens t'asseoir sur ton lit pour prendre ta tête entre tes mains et éviter son regard.

Elle avait beau l'aimer de toutes ses forces, n'avoir aucun doute sur la solidité de leur amitié, là, l'obstacle lui paraissait bien trop grand, même à deux. Sur beaucoup de choses, Juliann et Tahlia avaient démontré leur force de caractère, mais là, il fallait se rendre compte qu'ils étaient bien trop diminués face à cette ennemie qu'était la drogue. Ils étaient vulnérables, comme il le rappelait si douloureusement, et rien que cela mettait Tahlia devant le fait accompli. Elle n'avait pas le droit de lui infliger sa vulnérabilité. Il avait besoin de quelqu'un qui le tire vers le haut, pas qui prenne le risque de l'enfoncer davantage lors d'instants fragiles comme celui qu'ils vivaient ce soir. Et qu'il avait vécu dans la semaine. Juliann lui avoua avoir eu honte et qu'il avait préféré lui cacher ses doutes, ses peurs, ses faiblesses. "Comment j'ai pu ne rien remarquer... Je suis désolée." souffla-t-elle, coupable. Elle secoua la tête face à la suite de ses mots : "Tu n'as pas à être fort pour moi. Sois-le pour toi, Ju." C'était une bataille quotidienne qu'il vivait. Et même si, avant, elle avait été devant lui pour le pousser à se surpasser, force était de constater qu'elle était désormais à la traîne. Et elle n'avait pas le droit de lui mettre des bâtons dans les roues, de le retenir. Pourtant, un tel aveu aurait peut-être recadré Tahlia, aurait peut-être amoindri ses envies de drogue, à elle aussi. En parler tous les deux leur aurait rappelé qu'ils n'étaient pas encore sortis d'affaire et les aurait poussé à redoubler d'attention. Ils ne l'avaient pas fait. A vrai dire, ils ne se confiaient même plus sur ça. Ils continuaient à vivre leurs manques, seuls, dans leur coin. Et voilà où ils en arrivaient, ici, ce soir. Du bout des lèvres, elle avoua en avoir pris. Pour lui montrer qu'elle ne lui était d'aucune aide. Mais Juliann le prit d'une autre manière. Il éprouva une culpabilité qu'elle ne comprenait pas. Elle fronça les sourcils, secouant la tête : "Tu ne m'as pas poussé à replonger, Ju. Peu importe tes mots, peu importe tes actes, j'en aurai pris. ça fait des semaines que je ne pense qu'à ça, plus qu'à ça. Tu m'as juste empêcher d'en prendre plus. C'est déjà énorme." Elle essaya de capter son regard, sans succès. Elle vint alors s'asseoir à côté de lui, posant sa tête sur son épaule, son bras entourant le sien. "On s'en sortira, je te le promets..." Ensemble ou séparément, ils finiront par sortir la tête hors de l'eau.

Elle n'aurait rien pu voir, Tahlia. Même si elle l'avait voulu, tu aurais caché de toutes tes forces les douleurs qui t'habitent. Aujourd'hui, tu n'as pas pu lui cacher cette vulnérabilité car tu as été confronté à ton pire cauchemar. Mais sinon, tu t'es toujours assuré qu'elle ne voit pas que tu étais prêt à replonger par peur de l'emmener à nouveau avec toi vers les Enfers. « Tu n'as pas à t'excuser. J'ai bien fait attention que tu ne remarques rien. Que personne ne remarque rien. » Parce qu'aux yeux de tes proches, tu ne veux pas être le Juliann vulnérable accro à la drogue qui manque de replonger une fois tous les deux mois. Tu préfères être fort, courageux et invincible à leurs yeux. Mais ce n'est  pas ça la vraie vie. La vraie vie c'est faire appel à ses proches quand ça ne va pas, demander leur aide pour être plus forts à deux, comme l'a fait Tahlia ce soir. « J'veux l'être pour nous deux. » Précises-tu. Mais force est de constater que ce soir, ce n'est pas toi qui as fait preuve de force, c'est Tahlia. Enfin c'est ce que tu pensais avant d'apprendre qu'elle a pris un tout petit peu de drogue avant de jeter tout le reste dans les toilettes. Tu t'en veux énormément d'avoir été assez con pour la laisser s'enfermer et de ne pas avoir été là pour l'en empêcher. Cette fois, c'est toi qui éprouves des remords. « Tu vois, toi non plus tu ne m'as pas parlé de ce manque constant... Il faut vraiment qu'on apprenne à se parler. » Cela sera bénéfique pour vous deux, c'est sûr. « Mais ce n'est pas moi qui t'ai empêché d'en prendre plus, c'est toi et toi seule, Tahl. » Affirmes-tu. Ce soir, elle a été la plus forte de vous deux et il faut qu'elle le reconnaisse. Tu souris en sentant la brune s'installer à tes côtés, entourant ton bras du sien. Tu poses ta tête sur la sienne, en soupirant. On s'en sortira, je te le promets... Il le faut, en tout cas. Vous restez là pendant quelques temps encore, quelques minutes, un quart d'heure ? Tu n'en sais rien. Mais quand tu retrouves petit à petit tes esprits, que la tempête est passée, tu dis : « Viens on va aller boire de l'eau, ça te fera du bien. » Pour évacuer plus vite la cocaïne présente dans son corps, même à petite dose. Tu lui tends la main pour l'aider à se lever puis prends la direction de la cuisine en espérant que ce nouvel épisode ne foutra pas en l'air votre amitié comme la dernière fois.

Fin du sujet