breathe - Léo + Charlie

Il le voyait bien, Léo, que Charlie commençait à avoir l'alcool léger, bavard, ça le faisait sourire il préférait la voir comme ça plutôt que triste, c’était plus simple à gérer. Les circonstances de cette discussion étaient tellement étranges et si quelques verres lui permettaient de se sentir un peu mieux même si ça restait éphémère, c'était déjà ça de pris. Le seul truc étant que même si les langues se déliaient, c'était lui qu'elle faisait parler, pas ce qu'il préférait, il fallait l’avouer. Qu'elle ne connaisse pas Blanche, ce n'était pas important, Bowen était une petite ville mais elle n'y vivait pas depuis si longtemps que ça. Tu lui en parleras à l'occasion, elle m'adore… Humour, il roula des yeux, Charlize détestait Léo, à juste titre peut être, c'était souvent elle qui ramassait les pots cassés être les deux amants et surtout son amie à la petite cuillère, avec le temps elle avait appris à se méfier du bougre. Il rit à la comparaison des belles-mères. Sauf que la belle-mère tu es obligé de te la farcir à Noël, pas l'ex ! Enfin, concernant Alba, avec Jon au milieu, ça pourrait bien arriver qu'elles se retrouvent ensemble durant les fêtes. Ne m'en parles pas. Évidemment qu'elle est belle, sinon ça ne serait pas drôle ! Pauvre vérité qu’il préférait dévoiler avec humour. C'est une torture ! Vivre près d'elle, pour Léo, résister à la tentation, pour Blanche, comprendre que l’ex d’Emerson est totalement le genre de femmes pour lesquelles il craquait. Clairement, la jolie maman n’avait pas facilité la tâche des deux amants et elle n’avait pas non plus fait un cadeau à Léo en revenant dans sa vie, mais c'était pour le bien de leur fils avant tout alors il ne pouvait pas non plus totalement lui en vouloir.

De plus en plus surprise, Charlie comprit au ton de la voix de Léo qu'il était sarcastique. Pourquoi, comment ça? l'interrogea t-elle bien qu'elle avait une idée sur la question. Si Charlize n'appréciait pas Léo, peut-être était-ce parce qu'il avait déjà brisé le cœur de sa meilleure amie Blanche. Elle imaginait bien Billie en faire de même avec Liam. Pendant un court instant elle se remémora de sa sortie au Tabù mais bien vite elle chassa l'image douloureuse du beau Liam. D'un geste machinal elle but son verre. Écouter les tracas de Léo lui permettait d'un peu oublier les siens. Cette ex est la mère de ton fils, elle doit forcément se la farcir. lui fit-elle justement remarquer. Car Alba et lui partageaient la garde de Jonah, elle imaginait difficilement qu'ils s'évitent. Il était donc légitime que Blanche éprouve des difficultés à trouver sa place. Pauvre Léo! Au milieu de toutes ces jolies femmes! Que ce doit être horrible! dit-elle sans parvenir à contenir son sérieux. Charlie en riait mais au fond elle compatissait et comprenait la situation de chacun. Que ce soit Léo, Alba ou même Blanche.

La réponse de Léo intrigua forcément Charlie, il lui sourit, énigmatique. On n'a jamais été très amis elle et moi. Question de tempérament j'imagine. Puis je crois que c'est typiquement le genre de femme qui pense que tous les hommes sont des salaud, mis à part son mari qui était parfait. Répondit-il en roulant presque des yeux, il exagérait, en vérité il connaissait très mal Charlize. Et même s'il compatissait au fait qu'elle n'avait pas eu une vie facile, avec son lot d'épreuves, tout comme lui, le simple fait qu'elle le dépeigne aux yeux de Blanche n'aidait pas à ce qu'il ait envie de la connaître davantage. Et puis tout ça ne concernait pas Charlie, du moment que la pâtissière soit une bonne cheffe pour elle, c'était bien le principal selon Léo. Il vit le regard de la jeune femme se voiler, sans savoir ce qu'il y avait dans sa tête, est-ce que c'était sa mère ou quelque chose d'autre ? Il n'eut pas le loisir de demander, nouvelle gorgée, ils changèrent de sujet, Alba, de mieux en mieux. C'est sûr qu'elle peut pas ignorer sa présence. Mais si on peut éviter les repas de famille tous ensemble ça m'arrangerait, ça arrangerait tout le monde je pense ! Charlie railla la réaction de son ami, à juste titre, il ne fallait pas mentir, mais outre la tragédie grecque, il fallait admettre que ce n'était pas évident pour Léo de jongler avec tout ça, simplement parce qu'il n'était pas au clair avec ses sentiments et qu'il espérait sincèrement ne pas finir par jouer sur les deux tableaux et faire du mal, comme à chaque fois. Si seulement elles étaient laides, ou détestables, ou même les deux ! Il surjouait, autant en rire. Nouvelle gorgée, il fixa Charlie avec un sourire en coin. Tu m'as assez cuisiné, non ? Et toi, t'as un mec, c'en est ou de cet homme avec qui c'était compliqué ? Elle croyait vraiment y échapper ?!

Les propos négatifs concernant Charlize contraria Charlie. Elle qui la considérait bien plus que son mentor, elle acceptait difficilement qu'on puisse dire du mal de sa chef. Non Charlize n'est pas comme ça! protesta t-elle indignée, comme si Léo l'avait insulté. Tu ne la connais pas. Elle est adorable, elle a le cœur sur la main, elle est à l'écoute, j'arrive pas à croire que quelqu'un ne puisse pas l'apprécier. s'étonna finalement Charlie. À moins qu'elle eut des paroles dures à son égard, elle ne comprenait pas pourquoi ils avaient cette mésentente. Cependant on ne peut pas tous avoir des atomes crochus. Et lorsqu'il faut accepter la présence de l'ex de son petit ami, cela ne devait pas non plus être une partie de rigolade. Blanche avait ses raisons de sentir mal au milieu de cette situation. Elle imaginait facilement un Léo patauger et rattraper ses maladresses. Que c'est duuuuur d'être un tombeur! se moqua t-elle, retenant son large sourire. Un large sourire qui s'effaça immédiatement lorsque Léo évoqua sa situation amoureuse. Elle lui avait parlé de Liam mais à l'époque elle ne savait pas qu'il était marié. À cet instant elle aurait très bien put passer du rire aux larmes. Mais comme toujours Charlie chercha à se contenir. J'ai appris qu'il allait se marier... Alors fin du jeu. répondit-elle en haussant les épaules. Elle déglutit, espérant ne pas rentrer dans les détails. Quitter Liam a été d'autant plus douloureux dans ses circonstances. Elle avait perdue sa mère, elle n'allait donc pas bien, elle venait aussi d'apprendre qu'il avait couché avec Alba... Le plus insupportable, c'était qu'il était marié à Pippa. Depuis elle savait au fond d'elle que jamais leur histoire n'aurait aboutie à une happy end.

Ce n'était pas tellement son genre, à Léo, de s'attaquer aussi gratuitement aux autres. Mais c'était presque une habitude entre Charlize et lui, elle le traitait certainement de gigolo ou d'artiste raté tiens, sans parlé de toutes les saloperies qu'elle avait dit à Blanche, alors il se permettait. Mais il ne s'attendait pas à ce que Charlie prenne sa défense, c'était adorable de sa part, elle devait tenir à sa patronne. Je pense que je la connais, un peu. Mais je n'ai jamais eu affaire à la gentille Charlize moi ! Enfin c'est bien si ça se passe bien dans le travail, elle a monté ses affaires de toute pièce, ça je ne peux pas le lui enlever, c'est une bosseuse. Il était un peu piqué dans son orgueil mais il ne pouvait nier que la façon dont elle gérait ses affaires forçait l'admiration. La française se moquait de lui, toujours, il en prenait pour son grade cet après-midi et l'alcool n'aidait pas. Mais il l'avait cherché, il devait l'admettre. Alors il chercha à équilibrer la balance, mais il ne s'attendait pas à une telle révélation de la part de Charlie. Il ouvrit de grands yeux et une bouche qui goba les mouches. Il menait une double vie ? Merde et après on dit que j'ai une vie amoureuse compliquée. Quel connard ! Il grimaça. Pardon. J'suis désolé pour toi. Et dire qu'elle lui avait avoué qu'elle avait peur de faire du mal à ce pauvre garçon... plus aussi pauvre finalement, il aurait mérité qu'elle se barre avec élégance et un énorme doigt d'honneur. Comment tu vas ? A ce stade il ne voyait pas tellement quoi dire, il ne voulait pas enfoncer le clou. Heureusement qu'il ignorait que ce mec avait également couché avec Alba au passage sinon il ne se serait pas contenu !

Égale à elle-même, Charlie supportait difficilement qu'on dise du mal des personnes qu'elle aimait. Elle se radoucit seulement lorsque Léo assura que Charlize était une bosseuse. Oui elle est investie on ne peut pas dire le contraire. Rares sont ces professionnels qui ont la passion du métier, et qui savait la retransmettre. Ses pensées se tournaient vers Charlize jusqu'à ce que Léo évoque Liam, dont il ne connaissait pas le nom mais la situation compliquée. Elle espérait ne pas épiloguer sur le sujet alors elle resta très brève. Voyant la réaction incrédule de Léo, Charlie s'alerta. Malgré tout le mal qu'il lui a avait fait, elle n'acceptait pas que Liam passe pour un c*nnard*. Non, je... Écoute, j'ai ma part de responsabilité. Il a toujours été clair avec moi : il ne voulait pas de relation sérieuse. J'ai couché avec lui dès le premier soir et c'était le meilleur coup de ma vie voulut-elle rajouter, mais cela aurait été inconvenable, surtout devant Léo. Je n'avais pas prévu de tomber amoureuse de lui. J'ai su qu'il allait se marier pourtant j'ai quand même continué de le voir. Jusqu'à ce que je n'y arrive plus. Elle passa une main sur sa bouche, cherchant à contenir toute sa colère et toute sa tristesse. Les yeux injectés de sang, Charlie fuya le regard de Léo. Je l'ai quitté au moment où j'avais le plus besoin de lui. avoua t-elle pour lui faire comprendre à quel point elle souffrait. Liam ne lui avait pas donné de nouvelles depuis plusieurs jours et elle avait l'impression qu'elle ne se remettrait jamais de ce vide énorme au fond de sa poitrine.

Visiblement il ne servait à rien d'insister sur le sujet de Charlize, si Léo voulait la critiquer et passer ses nerfs sur elle, ce ne serait pas auprès de Charlie qui la défendait bec et ongles. C'était tout à son honneur et peut-être que le photographe ne jugeait pas correctement la pâtissière. Peut-être aussi, simplement, qu'on ne pouvait pas aimer tout le monde. Alors effectivement, il ne pouvait pas l'attaquer sur le plan professionnel, donc autant en pas insister. Les affaires de cœur de la française étaient bien plus intéressantes, malheureusement Léo tomba de haut, il ne pensait pas qu'elle était aussi mal concernant cet homme, ni qu'il lui avait fait à l'envers. Evidemment ce fut tout naturellement qu'il l'insulta sans le connaître, c'était facile et puis bon, il défendait sa copine avant tout. Sauf qu'encore une fois, Charlie nuançait, elle était bien trop gentille, sainte Charlie ! C'est pas un mal de coucher avec un mec dès le premier soir, enfin je l'ai fait des dizaines de fois, il a visiblement choisi d'omettre qu'il avait un mariage sur le feu. Cette histoire la mettait au plus mal, Léo pouvait le voir, elle se contenait mais c'était difficile. Il n'insista pas, de toute façon, salopard ou non, l'affaire était faite. Il prit la main de Charlie et la serra. J'suis là, ici, avec toi. C'est sûrement pas c'que tu voudrais, mais y a pire, non ? Regarde, on se met une mine au beau milieu de l'après-midi dans un troquet parisien, on est totalement dans le cliché là ! Il avala une bonne gorgée de son verre. Allez, haut les cœurs Keynes, il y aura des jours meilleurs ! Tu mérites un homme qui te rendra vraiment heureuse. Et à son avis, tant mieux que ce ne soit pas cet homme-là.

Gênée, Charlie baissa honteusement la tête. Bien entendu, elle était encore dans le déni. Elle n'arrivait pas à en vouloir à Liam, malgré qu'il avait ses torts. En effet, il ne lui avait pas dit qu'il allait se marier, et pour cause, jamais elle ne l'aurait imaginé car selon lui il ne voulait pas de relation sérieuse. Mais Liam avait une telle emprise sur elle, sur son cœur, qu'elle n'arrivait pas à se raisonner. Elle l'imaginait encore la sermonner en lui rappelant qu'il ne lui avait jamais promis monts et merveilles et qu'elle savait dans quoi elle s'était engagée. Mais Charlie n'avait pas supporté longtemps d'être la troisième roue du carosse et avait préféré prendre les devants. Elle s'y attendait, à cette douleur immense. Cependant elle ne souhaitait pas la partager. Non, non, excuse-moi Léo, je ne voulais pas plomber l'ambiance, je ne voulais pas parler de lui. essaya t-elle de se rattraper aussitôt tandis qu'il tentait de la réconforter. Et ses douces paroles lui réchauffait le cœur. Mais les larmes montaient déjà et il était trop tard pour les contenir. L'alcool, le deuil, le chagrin, c'était un tout qui faisait craquer la jeune Keynes qui passa ses mains sur ses yeux pour cacher les larmes qui coulaient le long de ses joues. Elle avait honte, Charlie. Honte de pleurer, honte de se montrer faible. On peut s'en aller d'ici? D'une traite, elle vida son verre. Et si on allait au Parc de Monceau? Certes il faisait froid, mais Charlie avait besoin d'air frais. Le vent glacé lui rappellerait qu'elle est belle et bien vivante, et que la vie ne s'est pas arrêté même si son cœur lui semble à jamais brisé.