Se jeter dans la gueule du loup [Manwë]

Grincheux (donc d’humeur ordinaire), Manwë tourne les pages du témoignage qu’on lui a remis. Agacé de devoir réaliser le portrait d’un homme avec pour seules indications physiques les notes écrites (Avec une orthographe à pleurer) par un policier qui n’y connait rien en physionomie (et en accord verbe-sujet). Gros sourcils, brun, peau blanche, cheveux courts et frisés ; plus vague tu meurs....

Lorsqu’il a expliqué au Lieutenant qu’il ne pouvait rien réalisé de miraculeux dans ces conditions, le témoin fut rappelé. Ne restait qu’à attendre dans la pièce faisant office de bureau. Sur l’ordinateur mit à sa disposition, il avait débuté le portrait bien qu’il soit convaincue que de nombreux changements vont transformer ce visage en tout à fait autre chose que ce premier croquis numérique bâclé. C’est parfois rageant d’être cantonné à ce rôle, mais la sensation d’être utile l’aide terriblement à tenir, à se sentir un semblant valorisé dans cette vie qu'il trouve peu stimulante.

“ Man’ le témoin est arrivé, c’est le type avec un t-shirt vert. “ Superbe indication… Une couleur ! Manwë sort du bureau, une pointe d’agacement supplémentaire dardant son cœur. “ Tu ne m’accompagnes pas ? “ Demande le quadragénaire qui compte bien utiliser son collègue pour faire venir le témoin à lui puisqu’il n’a aucune idée de ce qu’est la couleur verte. Il fait très sombre dans le commissariat et les lumières artificielles ne l’aide pas à détecter sans fausseté les nuances de gris. Man’ n’est pas policier, il n’a pas à se retrouver seul avec un témoin mais aujourd’hui, une nouvelle entorse au règlement se produit au grand damne du portraitiste “ Tu te débrouilles bien tout seul, j’vais prendre ma pause. “ Super…

Son regard fouille la salle, il capte une conversation entre un jeune homme et un officier en uniforme… Ses sourcils s’envolent alors que le jeune déclare avoir rendez-vous avec lui. L’officier regarde Manwë tout aussi stupéfait, attendant confirmation, la main posée sur sa matraque. Le regard du gamin lui cri au secours et pourtant Man’ hésite même s'il n'a aucune envie d'être témoin de violences inutiles. C'est qu’il n’est pas certain de pouvoir aider qui que ce soit en faisant autre chose que des dessins, ses trois échecs pour entrer à l’école de police confirme son inaptitude à la profession, pourquoi insister ou se faire des films ?

“ Oui… Oui c’est exact. “ Fini il part répondre après ce murmure trop suppliant du blondinet. Mais si ça se trouve, ce gamin va le planter dans le bureau, c’est peut-être un psychopathe… Franchement, Man’ n’en a pas grand-chose à carrer, il n’est pas craintif. (Et pour une fois qu’il lui arrive quelque chose d’intéressant, il serait bien idiot de passer à côté !)

“ J’étais préoccupé par ce dossier, j’ai oublié que je lui avais demandé de venir. J’pensais avoir annulé… M’enfin bon, puisqu’il est là... Tu viens, p’tit ? “ Ouais parce qu’il a quel âge au juste celui-là ? Vingt ? Vingt-deux ? Manwë galérait franchement dans la vie à son âge, il n’avait rien ni personne (Ça ressemble drôlement à sa vie actuelle en fait...), il cumulait les jobs pathétiques pour payer sa part de loyer et à manger.

D’un signe de tête, il lui indique la direction à prendre pour rejoindre le bureau, tant pis pour le type au t-shirt vert, il attendra… “ Entre. “ Il referme la porte derrière son visiteur, Il ne prit pas la peine de s'asseoir, persuadé que cette entrevue ne durera pas longtemps.  Le brun espère seulement ne pas être en train de couvrir un horrible criminel… Une bêtise de jeunesse passe encore, mais aider un malfaiteur récidiviste ce serait aller à l'encontre de sa morale, de ce qu'il a tant rêvé être un jour et qu’il ne sera jamais : un homme de bien. Il pivote immédiatement en direction du blond, son regard se plonge dans le sien, sans sévérité mais sans sympathie. Il préfère être neutre avant de savoir de quoi il en retourne. “ Alors ? T’as fais quoi comme connerie ? “ Manwë et la délicatesse…

Il n’a pas relevé cette histoire de trentaine (Et du jumeau qui n’a pas le même âge ! Sinon Joe, ça va la drogue ?!), parce qu’il pourrait vexer le blond en lui disant qu’il a l’air à peine sorti de l’adolescence ! Man’ a envie de connaitre la suite des événements, sa vie n’a rien de particulièrement palpitante, ça fera au moins une anecdote intéressante.

Un sourcil se lève alors que le jeune lui dit qu’il est préférable qu’il s’assoit, Manwë a le cœur bien accroché mais il consent à prendre place derrière le petit bureau, si cela peut aider à mener à bien la confession à venir. “ Je t’en prie. “ Répond-il lorsqu’il demande à s’asseoir également, il n’y voit aucun inconvénient, il imagine même que ça rendrait cette entrevue plus crédible si un collègue venait à les surprendre. Il n’a absolument rien à faire seul dans cette pièce avec il ne savait qui, mais qu’est-ce qu’il a à perdre ? Il ne sera jamais un vrai policier, ce fait l’a rendu plus aigri qu’il ne l’était. Aider les autres, ça n’est pas son rôle sur cette terre, il n’aurait pas le regret de ne pas avoir essayé d’être l’un de ces hommes de bien. Parait-in qu’on ne peut pas être artiste et héros à la fois.

Il eut un silence probablement pesant à la fin des “explications” qui laissaient Man’ plus perplexe que jamais. Deux options se présentent à lui : le prendre pour un échappé d’asile ou de service d’addictologie ; ou bien le prendre au sérieux. Dans tous les cas, une seule conduite à tenir : jouer le jeu. S’il met en doute sa parole et qu’il est cinglé, dieu sait ce qu’il serait capable de faire ! S’il doute, mais qu’il dit la vérité, le peu de confiance qu’il peut mettre en la police risque de brutalement s’envoler. Ok, il n’est pas un héros, mais il ne veut pas mettre en danger au type venu à la base chercher de l’aide.

“ C’est très grave ce que tu me dis là, tu vas avoir besoin d’aide c’est évident. J’ignore si on peut t’extrader vers les USA, tu m’as l’air majeur et vacciné, alors j’ai envie de croire que non… À moins que tu ne sois activement recherché par la police pour un crime très grave ou que tu sois sous tutelle. “ Plutôt futé comme moyen d’assembler des éléments pour savoir si effectivement ce gars-là est sous tutelle, ce qui serait un indicateur important sur la situation du blond. Manwë n’est pas enquêteur, il aurait bien aimé, mais ça ne l’empêche pas d’être malin. “ Tu as des preuves de ce que tu m’as expliqué ? Tu sais que c’est essentiel d’en avoir quand on veut attaquer quelqu’un qui a du pouvoir. “ Pouvoir politique, financier ou seulement les pouvoirs sur la vie de quelqu’un. S’il veut s’en prendre à son tuteur, il a intérêt d’avoir du contenu en termes de preuves, sans quoi Man’ ne peut s’empêcher de penser que c’est fichu d’avance.

“ Cependant, si tu dois prouver au monde que tu n’es pas mort, j’imagine que tu as l’avantage d’être en vie et d’être génétiquement qui tu es… Personne ne peut tricher sur ses gènes. Tu m’as parlé d’un frère… “ Jumeau, enfin ça, Man’ n’y croit pas trop, il espère que c’est pas un de ces trucs de meilleurs amis qui se disent jumeaux, parce que là, ça ne fonctionnera pas ! La solution semble presque simple, si le problème est réel. Manwë peine encore à croire en cette histoire, parce que c’est effectivement digne de fictions, mais aussi parce qu’il a une vie très banale le Man’, enfin, ce que lui considère comme étant banal, parce qu’on pourrait mieux faire qu’une mère junkie et un père assassin. C’est sa normalité à lui. “ Juste pour être certain… T’es au courant que j’suis pas vraiment flic ? “ Il ponctue sa question d’un sourire contrit, navré une fois de plus d’avoir échoué, de ne pas être celui qui pourra véritablement aidé ce paumé.

Cela fait une bonne semaine que Manwë ne dort plus suffisamment pour être totalement fonctionnel. Soit il ne parvient pas à trouver le sommeil, torturé par ses pensées, les plans qu'il échafaude dans sa petite tête afin de s'assurer que son père retourne là où il doit être : en prison. Soit, ce sont d'odieux cauchemars qui le tirent de ses songes, qui l'arrache des pauvres rêveries que sa cervelle est capable de générer. Il rêve de meurtre, il rêve qu'il assassine son père. (Rien de très sain je vous l'accorde, ça ne donne pas vraiment envie de lire la suite je vous comprend mais je voulais seulement expliquer pourquoi il a une tête de déterré même s'il fait tout pour essayer de prouver qu'il a assez d'énergie pour travailler !)  Pour tenir le choc, Man' enchaine les cafés et fais ce que l'on appelle des micro siestes (C'est plutôt des moments où il a les yeux grands ouverts, le cerveau mit sur off, ça dure quelques secondes, chose qui reste particulièrement creepy...)

À côté de ça, son cerveau et capable d'emmagasiner des informations parfaitement inutiles, il saurait vous dire que sur son chemin, il a vu beaucoup de touristes, les gens sont trop nombreux, trop bruyants, trop irrespectueux. Il peut donc énuméré avoir  croisé douze cannettes au sol, trois emballages de sandwich, un paquet de bonbons vide, deux bouteilles d'eau et un vomi. La municipalité ne perdra pas de temps pour nettoyer tout ça, Manwë n'est pas un écolo, loin de là, l'état de sa bagnole et les cigarettes qu'il fume témoignent de son désintérêt pour l'impact écologique de son petit quotidien sur la planète, mais il n'aime pas que sa ville ressemble à une poubelle. Sa ville, car il fait partie des murs, du mobilier urbain peut-être bien à ce stade. Quarante années que le brun prospère ici, il est convaincu de finir ses jours dans ce même coin de l'Australie. Et pourtant, jamais il n'a entendu pareille histoire.

Peut-être dans les films, parce que cette histoire est incroyablement bien ficelée. Mais toutes ces histoire s'inspirent forcément de faits réels. C'est probablement l'histoire, la chose la plus fascinante qui soit arrivé dans sa vie, il n'ose imaginer quel trouble ce gars-là doit ressentir vis-à-vis de sa vie. Le portraitiste fini par rappeler au blond qu'il n'est pas vraiment policier, parce que le môme ne le lui a pas posé la question et avait plus semblé vouloir fuir les policiers que réellement en voir un, c'était bien pour ça qu'il avait marché. La méfiance dont fit preuve son interlocuteur lui paru malgré tout légitime au vu de son passif particulier " Je m'appelle Manwë, je suis consultant. " Consultant, il préfère ce nom qu'à portraitiste par intérim... Il sait être un maillon indispensable pour certaines affaires, mais ce ne sera jamais tout à fait ce qu'il aurait réellement voulu être. " Si tu le souhaite, je peux aller chercher un officier de confiance, tu pourras lui expliquer plus en détails ce que tu viens de me raconter. " Il aura au moins pu contribuer à faire la liaison, peut-être à mettre en confiance ce type, ou pas... Man' ne veut pas s'imposer dans une histoire aussi importante, il n'a pas reçu de formation pour cela, il ne voudrait pas être responsable d'un quelconque échec. Il s'évertue à être un homme de bien, pour prouver qu'il a beau être le 'fils de' il n'est pas comme lui.

" Je suis certain que l'on pourra t'aider, et que pour les crimes que tu as commis, tes peines seront allégées par les circonstances exceptionnelles de ta situation, ton profil psychologique sera certainement en ta faveur, quoi que t’aie fait, tu n'étais certainement pas toi-même pendant cette période, un bon expert saura convaincre n'importe quel juge. " Après tout, on a bien fait sortir son père de prison ! Un meurtrier ! Alors pourquoi pas un gamin qui n'a pas eu de chance, qui a été manipulé toute sa vie ? Man' a envie de croire au moins encore un peu en la justice de ce pays, de ce monde. Si pour une fois ce laxisme pouvait servir le bien...

Les rétorques de son interlocuteur sont piquantes. Il n’a pas l’air d’un détective, il ne sait pas de quoi il est censé avoir l’air. La chance a fait que les couleurs de ses vêtements étaient assorties ce jour-là, il a l’air à peu près potable. Cependant, le portraitiste sait qu’il n’a pas l’air d’un policier, il est trop vieux, il y a quelques années quand il avait l’espoir de le devenir un jour, qu’il avait le courage de lutter contre ses faiblesses pour atteindre son but, son rêve, sa voie… Il en avait toute l’allure. Mais tout cela s’est terni, son âme a flétris avec ses espoirs évincés à l’issu d’un troisième et douloureux échec. Il ne peut en vouloir au blondinet de lui faire remarquer qu’il n’a rien en lui qui puisse faire écho en son vieux rêve. Aujourd’hui, il réalise que ce n’est pas plus mal qu’il ait échoué, il a fallu que son père sorte de prison pour qu’il prenne conscience de son rôle, de sa mission… Avoir des obligations légales aurait été une contrainte quasiment insurmontable.

“ Ça tombe bien, je ne souhaite ressembler à personne. “ Il se contente d’être bon dans son propre rôle, il a déjà beaucoup à faire. Man’ ne comprend cependant pas ce garçon, sans doute parce qu’il n’est pas Sherlock Holmes. Mais si ce môme ne veut pas parler à un officier ou à lui, pourquoi est-ce qu’il est là ? Paumé, c’est tout ce qu’il lui vient à l’esprit en observant le plus jeune. “ Retrouver ta vie passée impose de faire des choix. “ Parler à un flic, à un avocat, à quelqu’un qui puisse faire le poids légalement parlant. On ne peut pas résoudre ce genre d’affaires avec un simple coup fourré, c’est beaucoup trop complexe. Manwë n’est pas à la hauteur, il le sait, ce n’est pas con combat, pourtant ça aurait pu l’aider de s’impliquer dans autre chose que son problème de paternel. Man’ est prêt à prendre tous les risques pour faire plonger à nouveau son père, mais pour ce qui est de se mêler de cette histoire improbable, cela aurait été de son ressort si on lui avait laissé accomplir son rêve dix ans plus tôt. Il est désormais résigné, en retrait. Jamais contre le fait d’aider, mais c’est un adulte raisonnable conscient de ses limites.

Cependant, voir ce gars-là se lever, sembler prendre la fuite, ça l’incite à se lever pour faire le tour du bureau, plaquer sa main contre la porte pour empêcher son ouverture. Ses yeux verts dardent le fugitif “ Tu ne peux pas rester ainsi, comme si rien ne c’était produit. Tu abandonnes face à ceux ou celui qui t’as fait ce mal, qui t’as dérobé ta vie… Non. “ On ne peut pas douter de sa sincérité, du fait qu'imaginer que l'on puisse abandonner aussi simplement lui semble inacceptable. Manwë n’abandonnera jamais face à son père qui lui a aussi volé sa vie, d’une toute autre manière certes, mais il ne baissera pas les bras. Jamais. Il n’est pas faible à ce point, mais qu’en est-il de ce gamin ? La peur le paralyse-t-il ?  

“ Tu es venu ici parce que tu voulais de l’aide, je suis navré que tu te sois orienté vers moi, tu ne serais probablement pas un bon Sherlock non plus. “ Retour de bâton bien mérité, non ? “ Tu as le choix entre te battre pour être toi-même, ou fuir pour être… Un fantôme. “ Le choix lui appartient, même si Manwë malgré sa volonté de ne pas se mêler de cette histoire ne pourra malheureusement pas véritablement bannir cette gueule d’ange de son esprit. Il cherchera, retournera la question dans sa petite tête, parce qu’il est comme ça le Manwë, bien plus serviable qu’il en a l’air au premier regard. Plus grognon pour la forme, mais dans le fond, un vrai diamant. Rares sont ceux qui veulent cependant se pencher sur la question. “ En dehors de mon travail ici, je tiens une petite boutique de lutherie à western district. Ma porte te sera ouverte si tu as besoin de parler… Ou d’obtenir des contacts de confiance pour la suite. “ Parce qu’il a la chance de savoir quel flic n’en vaut pas le coup dans cette ville.

Sur ces paroles, Manwë retire sa main pour laisser le jeune homme filer s’il le souhaite, même si le quadragénaire préférait le voir accepter dès à présent de l’aide. " Tu m'as pas dit ton nom. " Reste à savoir lequel son interlocuteur va lui transmettre.

Il s’est détendu quand le plus jeune lui avait affirmé ne pas avoir l’intention d’abandonner, c’est qu’il n’a pas beaucoup de tolérance pour le manque de volonté quand il est question de justice. Elle est suffisamment mal faite pour qu’en plus les vraies victimes baissent les bras ! Pour ce qui est de la suite, Manwë arque un sourcil quelque peu étonné d’avoir donné une telle première impression, comme s’il aurait fait un bon flic dans une autre vie. Néanmoins, il ne l’est pas, alors l’inconnu est un aussi bon Sherlock que lui.

“ Ce n’est pas que je ne veux pas m’occuper de toi, je ne suis pas qualifié pour, je pourrais commettre des erreurs de procédures et foutre en l’air tout un travail d’enquête. Ma fonction est très limitée ici. “ Il n’est qu’un vulgaire portraitiste, il n’a en principe pas même un droit de regard sur les affaires dans lesquelles il intervient. Pourtant, ça lui arrive souvent de devoir en savoir plus pour comprendre certains éléments qui pourraient fausser la description physique de la personne recherchée.

Manwë lui propose cependant de lui rendre visite à sa boutique dans le cas où il changerait d’avis, la réaction du blond ne l’étonne guère. “ Non, je ne suis pas ici en tant que luthier, je suis portraitiste… Pour identifier les personnes recherchées, le numérique n’a pas encore totalement effacé cet emploi. Pour le moment... “ Man’ est donc très physionomiste, il n’est pas près d’oublier le visage de ce mystérieux visiteur. Dans son monde sans couleur, tout pourrait se ressembler, mais il sait s’attarder sur les détails les plus intéressants qui caractérisent chaque individu. Il sait capter une lueur dans le regard, la reproduire et rendre son portrait si vivant qu’il en avait fait pleurer plus d’un de peur face à ses réalisations trop réalistes…

Finalement l’inconnu s’excuse, il comprend la posture dans laquelle se trouve Man’, son incapacité à vraiment pouvoir l’aider. Joe Davis, ce nom ne lui parle pas particulièrement mais il s’avère être particulièrement banal contrairement à celui du luthier. Un nom un peu trop folklorique, mais il a choisi de laisser tomber le nom de son père pour celui de sa mère, ça l’aide à un peu mieux s’apprécier malgré tout. “ J’en ai quelques-uns en tête... En dehors de leurs compétences d’enquêteurs, j’ai toujours vécu ici à Bowen, c’est une petite ville je ne te jetterais pas dans les pattes d’un connard que ce soit sur le plan professionnel ou privé. Mais toi… Tu vas devoir préparer une histoire un peu moins décousue que ce que tu m’as raconté tout à l’heure. “ (Parce que là, ça serait lui qui risquerait de passer pour un dingue !) Manwë n’a pas particulièrement d’amis dans la vie, c’est un fait, mais les bons policiers l’apprécient et c’est réciproque. Il leur a souvent rendu services sans rien demander en échange, il avait prévu de garder ces munitions en cas d’extrême urgence, comme la libération de son père… Malgré tout, il est prêt à sacrifier son but personnel au bénéfice de ce jeune homme. Il ignore pourquoi il ferait ça, il a toutes les bonnes raisons de vouloir nuire à son géniteur, mais Manwë est bien plus altruiste que laissent supposer les apparences… “ J’ai besoin de m’assurer que tu es prêt, que tu ne vas pas t’enfuir quand je vais sortir d’ici voir s’il y en a un présent aujourd’hui, j’suis pas vraiment d’humeur à passer pour un con. ” ( Quoi ? Il n’est pas flic, il a le droit de parler comme il veut, non ? Ceci dit il y en a plein qui sont flic et qui ne se privent pas !)

“ Personne n’est innocent. “ Répond simplement Manwë face aux paroles du blond, pas certain de comprendre où il peut trouver son intérêt à rappeler qu’il n’est pas un ange. La personnalité de ce type semble décousue, mais qui ne le serait pas après un tel vécu ? Manwë avec sa “banale” histoire n’est pas des plus équilibré comme gars, partagé entre son désir urgent d’aider les autres et sa peur de toute relation sérieuse. S’investir émotionnellement auprès de quelqu’un est un challenge pour lui, toute sa vie il s’est entendu dire qu’il n’en valait pas la peine, qu’il ne pouvait être aimé, qu’il n’était qu’un freak. Il s’est fait à cette idée au lieu de prouver le contraire, il s’est enfoncé dans cette affirmation qui a fini par réellement le définir.

Il n’y a qu’à voir sa réaction lorsqu’il eut bloqué la porte, ce gars est traumatisé, il a besoin d’un bon psy, mais ce n’est pas Man’ qui va lui conseiller de ‘voir quelqu’un’ il n’a jamais vraiment compris comment le fait de bavasser sur un divan puisse soigner tous vos maux.

“ Je n’ai pas voulu t’effrayer, jamais je… “ Il allait dire que jamais il n’enfermera quelqu’un contre son gré, pourtant, il souhaite plus que tout faire enfermer son père, ce serait donc mentir d’affirmer qu’il ne fera jamais une telle chose. “ Jamais je ne chercherais à te nuire. “ Là c’est la vérité. Il met curieusement un point d’honneur à être honnête avec Joe.

Il hoche la tête “ Essaie de faire de ton mieux alors. “ La confiance se mérite, il comprend le principe, malheureusement parfois il faut se jeter à l’eau, à l’aveuglette.

“ Euh… Oui entre autre. “ Affirme-t-il sans trop de pudeur quant à son manque de rémunération en tant que luthier, tout simplement parce qu’il est un très mauvais gestionnaire de boutique. Il est loin de s’imaginer que dans les prochaines semaines son affaire va enfin prendre l'ascension qu’elle mérite. “ J’ai toujours aimé dessiner autant que ça soit utile à quelque chose, non ? “ Parce qu’il a longtemps eut besoin que l’on regarde le monde à travers son achromatopsie, il en avait le besoin, du temps où la solitude le gênait encore. À présent, il dessine par plaisir.

Pas vraiment habitué aux remerciements au commissariat, ses yeux roulent sur le coin gauche, à la recherche de ce qu’il est censé dire dans ce cas de figure. Il recentre ses iris verts sur le jeune homme “ De rien... “ Il n’a pas le sentiment d’avoir fait beaucoup, il quitte la pièce, laissant la porte entrouverte, il avait verrouillé l’écran de son ordinateur avant de se lever plus tôt, on ne sait jamais…

Cela lui prit quelques minutes pour tomber sur le collègue qu’il avait en tête, enfin plutôt, sa collègue. Bien que les femmes aient plus à prouver aux yeux de leurs collègues, il apprécie celle-ci qui ne semble justement estimer n’avoir rien de plus à prouver que les autres. Il la sait droite, juste et loyale. Évidemment, elle le questionne au sujet de son père, il promet que tout va bien avant d’enchainer sur une déposition qui semble l’attendre, mais que rien n’est sûr, il explique du mieux qu’il le peut avec les éléments dont il dispose, soulignant le probable contexte psychiatrique même s'il rappelle ne rien y connaitre en la matière.

Ils se dirigèrent vers le petit bureau, Manwë espère sincèrement qu’il n’a pas prit la fuite à l’instant où il ouvre la porte, il est plutôt soulagé que ce ne soit pas le cas et lui évite ainsi de passer pour un crétin. “ Je te présente l’officier Da Silva qui ne démérité pas sa place dans l’élite de ce commissariat. Je… Je vais vous laisser. “ Il sait qu’il n’a pas sa place dans cette pièce, pour cet entretien informel avec un jeune homme à court de solutions.

Oui ? De quoi est-il coupable ? Elle n’est pas bête cette question. “ D’être trop impulsif parfois et les conséquences qui en découlent. “ Et oui malgré les apparences, sa silhouette un peu sèche, Man’ est un sacré bagarreur. Il ne recule devant rien, ce n’est pas la peur de l’adversaire qui le freine. Malgré tout, Man’ est plutôt équilibré mentalement, la vie n’a pas été facile, mais il sait ce qu’il doit faire, il sait se comporter correctement la plupart du temps, il est seulement aigri et ses manques d’efforts sont purement la volontaire dans la majorité des cas où il dépasse les bornes !

Il partit à la recherche de Da Silva, puis l’introduit auprès du blond. Il propose naturellement de soustraire sa présence, mais la réaction de Joe le sidéra. Pourtant, habitué à l’humain et toutes ses variantes, jamais on lui avait fait une telle comédie pour qu’il reste.

Puis finalement le blond se mit à le bouder en s’adressant à Da Silva comme s’il n’était pas là. Scotché, il reste planté là, écoutant chacun des mots prononcés, cette histoire qui dieu merci a un peu plus de sens que précédemment. Une fois cette histoire achevée, il eut un bref silence presque gênant. Man’ ne sait clairement pas ce qu’il fiche dans cette pièce, ni ce qu’il est censé faire ou dire… Joe ou Jonas ne semble plus le calculer, il aurait presque pu s’évaporer sans que personne ne remarquer bien.

- Bien, monsieur Kirke ; nous allons devoir tirer au clair toute cette histoire. Point par point pour reconstituer le déroulé avec un maximum de détail et de preuves, nous ferons cela avant d’ouvrir une enquête officielle et d’engager les procédures judiciaires puis auprès de l’état civil. Je compte sur votre discrétion d’ici que le dossier soit solide ; je vous garantis que je ferais tout pour vous aider. Quant à Monsieur Druid… Manwë…

Da Silva fit une pause pour soupirer et pivoter vers le luthier, décidément ce portraitiste ne manque pas de ressources… Elle craint justement qu’il finisse par avoir de véritables ennuis un de ces jours en ne restant pas… À sa place.

- Manwë n’est pas policier, c’est un civil. Il n’est pas censé prendre part à l’enquête sa présence pourrait interférer et vous couter dans votre procès ; à moins que ces talents de portraitiste soient requis dans cette affaire, sans quoi je suis dans l’obligation de l’écarter de l’enquête. Il le sait et j’espère que vous le comprendrez pour votre bien.

Au moins, elle lui a ôté al responsabilité de s’expliquer auprès du blond, bien que ça soit toujours pénible pour lui qu’on lui rappelle qu’il n’est qu’un civil. Pas même consultant dans les mots de Da Silva, hop, civil, direct ! Il s’en remettra… Man’ se pense définitivement dégager de l’histoire, rideau pour le musicos !

- Cependant, en dehors du commissariat… Vous êtes libre de lui parler de tout ce que vous souhaitez, je pense que vous aurez besoin d’un ami tel que lui.

Elle sourit avec certitude en se tournant à nouveau vers Joe, Manwë pour sa part tire une grimace significative du bug intersidéral neuronal de la communication synaptiques du lobe temporal gauche alias l'aire de Wernicke; la source de la compréhension du langage (oui rien que ça, c’est cadeau ! J’admire si t’as tout lu d’une traite ! ) * Attendez, je… J’ai des amis moi maintenant ? * Cette question semble titiller ses quelques neurones pour lancer un reboot, mais ça demande toujours un peu de temps.

- Ne vous inquiétez pas, il fait souvent cette tête-là quand on met le doigt sur le fait que c’est un mec gentil et sensible.

Voilà de quoi réactiver ce bon vieux cerveau ! “ Non, mais ça va ! On est au boulot quand même…” qu’il grogne en faisant le tour du bureau pour récupérer son ordinateur portable. “ Mais si jamais… Tu sais où m’trouver. J’suis pas du genre à abandonner, j’ai juste pas le choix. Tu découvrira que les procédures… C’est une vraie plaie. Mais apparemment sans ça, le monde s’écroule. “ En tout cas, il est plutôt soulagé de ne pas être celui qui devra lui dire de consulter un psychiatre expert et toutes les autres joyeusetés médicales qui l’attendent… Il déteste tellement le système de santé, bien plus qu’il trouve les procédures emmerdantes, c’est peu dire !