I see no difference between your smile and a ray of sunshine on a rainy day (lyzriel)

I see no difference between your smile and a ray of sunshine on a rainy day

Trente-trois ans. Juste un chiffre, qui ne signifiait pas grand-chose dans le fond. Azriel s'était toujours dit que compter les années d'une vie était superflu. Il aimait fêter les anniversaires de ses proches, et en être entouré quand il s'agissait du sien, mais il y avait bien d'autres occasions de célébrer avec son entourage qu'un simple chiffre arbitraire. Trente-trois ans, ce n'était ni bien ni mal. C'était juste comme ça, selon le système de mesure du temps qu'on avait mis en place. Il n'était d'ailleurs pas le même dans toutes les cultures. La preuve que ce n'était pas si utile que ça. Mais bon. Il était quand même content, l'Italien, parce qu'il avait fêté ça la veille avec ses potes, son entourage, ceux qui comptaient tellement pour lui. Et aujourd'hui, il était en route avec celle qui comptait de la façon la plus spéciale qui soit. Le skater avait eu l'idée de partir en périphérie de Bowen, pas trop loin, mais suffisamment pour se sentir dans leur bulle, hors du quotidien. Un temps de pause. Le garçon avait déniché une éco-cabane, bien isolée au sommet d'une prairie, les rares voisins se trouvant à un minimum de 300 mètres sur une route caillouteuse. Toute autre compagnie n'était que celle des animaux environnants. La cabane était située en lisière de forêt, une grande prairie s'étendant devant, les arbres les protégeant derrière et autour d'eux, et une vue sur un petit village en contre-bas, ainsi que les vallées au loin. En bref, le paradis pour ces deux prochains jours. C'était Lys qui conduisait, pendant qu'Az griffonnait quelques dessins dans son carnet, qui le quittait rarement. « Tu crois que si on veut faire l'amour dans les bois, on risque de se faire attaquer par des animaux sauvages ? » glissa-t-il à tout hasard dans la conversation, glissant un coup d’œil amusé et un sourire craquant à sa copine.

Je roulai depuis un peu moins de quarante minutes quand nous aperçûmes notre destination. Azriel et moi avions projeté de passer deux jours loin de tout, dans cette cabane au milieu de nulle part, en bordure de forêt. Un petit rire s’échappa de me lèvres au moment où j’entendis la question de mon amoureux.
— C’est pas impossible…en tout cas, il risque fort d’y avoir des bêtes ! avançai-je. Je suis prête à parier qu’il doit y avoir des araignées pas commode par là. Mais…j’avoue c’est tentant.
Mon rire redoublant, et je mis le clignotant à droite pour amorcer un virage. Une fois la voiture redresser, je lançai un bref regard au carnet de dessin d’Azriel.
— Ca avance ton projet ? questionnai-je.
L’italien avait un talent fou en dessin, je l’avais toujours dis et j’étais heureuse qu’aujourd’hui, il souhaite aller un peu plus en profondeur dans sa pratique. Je l’avais vu gribouiller dans son coin des années durant, et aujourd’hui les choses étaient un peu différentes. Trente-trois ans, peut-être était-ce l’âge de raison. Je me garai très vite devant la cabane et détachai ma ceinture avant de sortir de l’habitacle. J’ouvris le coffre pour y récupérer mon sac pour le week-end et le cadeau que j’avais acheté pour Azriel. J’étais sûre d’avoir tapé dans le mil et j’avais hâte qu’il découvre ma surprise.
La cabane n’était pas grande me son charme me séduisit tout de suite. Je déposai mes affaire dans l’entrait puis me hissai sur l’échelle qui donnait sur une petite mezzanine. Je pivotai vers Azriel et désignait la fenêtre qui donnait sur la forêt.
— On aura même pas à craindre les bestioles, regarde ! plaisantai-je.
Je redescendis près de lui et vins passer tendrement mes bras autour de ses épaules. Ancrant mon regard dans le sien, je vins caresser son nez du bout du mien, puis déposai un doux baiser sur ses lèvres.
— Joyeux anniversaire, murmurai-je à la lisière de ses lèvres.

Le jeune homme rit en imaginant des situations bien moins agréables que prévu, où une gigantesque araignée passait par là pendant qu’ils… s’adonnaient à des activités physiques. Ou encore se retrouver nez-à-nez avec un reptile. Bon, d’accord, c’étaient des scénarios improbables, mais en Australie surtout, ça pouvait toujours arriver. Surtout dans un endroit plus isolé comme celui où ils se rendaient. « Je compte sur toi pour les apprivoiser ! On pourra peut-être en adopter une. » continua le brun sur le ton de l’humour. « Oui, enfin, si le résultat donne quelque chose… Je suis pas encore convaincu. » répondit Az en ajoutant quelques traits avant de refermer son carnet. Il s’était lancé dans une série de dessins, dans le même style de ceux qu’il faisait parfois pour Ivy ou Thaïs. Az était plutôt dans le dessin poétique, l’art surréaliste mais avec des traits minimalistes. Il aimait glisser des significations dans ses croquis, pas trop subtiles, qui offraient pourtant un million de possibilités d’interprétation. Il avait fait des choses plus simples, plus douces et colorées, aussi, pour les deux petites filles. Il aimait plusieurs styles et n’était jamais fermé à la nouveauté, il travaillait d’ailleurs parfois avec Lys, dont la spécialité était la peinture. Ensemble, ils se lançaient parfois dans des projets un peu incertains, qui restaient parfois inaboutis, en se laissant porter par l’inspiration et leur connexion. Parfois, cela donnait des choses grandioses. Ici, l’Italien avait commencé à créer des petites suites d’images et de scénarios, avec des traits très simples, un rendu épuré. Il ne savait pas ce que ça allait donner, il sortait un peu de sa zone de confort, mais c’était intéressant. « Waw. » souffla le garçon alors qu’ils étaient arrivés à destination et commençaient à découvrir les lieux. L’endroit était parfait. Minimaliste, cosy, naturel. Il rit quand Lys désigna la fenêtre de la mezzanine, qui leur offrait une belle vue extérieure. Retrouvant ensuite son étreinte chaude et pétillante, il s’installa dans ce moment suspendu, quelques secondes, leurs lèvres s’effleurant avec une délicatesse et un naturel qui lui donnait des frissons. « Grazie, amore. » souffla-t-il, son regard toujours un peu enfantin brillant de cette lumière authentique. « Tout est parfait. »

Azriel avait beaucoup d’indulgence pour ceux qui l’entourait, il distribuait sa bienveillance à qui voulait bien la recevoir, mais il était plutôt exigeant, au contraire, avec lui et en particulier dans le dessin. Sa réponse ne m’étonna donc pas vraiment. Malgré tout, je savais qu’Azriel s’était lancé dans ce projet avec pour but de l’aboutir, ce qui était une changement. En général, il dessiné surtout pour libérer ses émotions, pour se réfugier, sans projet particulier. J’étais heureuse qu’il souhaite, enfin, créer quelque chose de toute pièce, quoique ce soit. Et j’étais sure qu’il allait produire quelque chose de génial. J’avais confiance en lui et en son art, depuis toujours. Nous entrâmes enfin dans la petite cabane réservée pour les deux jours à venir. L’atmosphère était chaleureuse et nous enveloppa aussitôt. Je grimpai à mi-chemin sur l’echelle qui menait à la mezzanine et désignait la fenêtre côté forêt à Azriel, puis redescendis pour l’embrasser et lui souhaitai un joyeux anniversaire. Il était heureux d’être là et cela suffisait à me rendre heureuse, moi aussi.
— Tu veux qu’on aille faire un tour…avant qu’il fasse nuit ?
Je jetai un oeil autour de nous puis haussai les épaules.
— On peut aussi se poser tranquille, suggérai-je. T’as envie de quoi ?
C’était son anniversaire, il avait le droit de décider du programme, de A à Z.

Comme souvent, des mots n’étaient pas nécessaires pour que l’Italien ressente le soutien bienveillant et inspirant de l’artiste. Ils se comprenaient parfaitement sur beaucoup de choses et l’art faisait partie de ces choses. Chacun avait son rapport à ce domaine, mais ils pouvaient sentir les contours de ce rapport. Lys était plus franche que lui dans sa peinture, et dans son affirmation de son côté artistique. Az quant à lui ne le reniait pas, mais il voyait moins grand, ne le faisait que dans sa bulle confortable. Et puis, peut-être que si, il l’avait un peu renié, finalement. C’était un temps après l’accident qu’il avait décidé d’abandonner ses études, et depuis, il avait toujours dessiné de cette façon. Sans but particulier, mais avec une paix intérieure profonde. Pas de projet, mais une activité pleine de sens tout de même. Peut-être que c’était susceptible de changer. Peut-être que cette nouvelle forme de relation qu’il entretenait avec la belle brune depuis un an maintenant le poussait un peu dans cette direction aussi, sans qu’elle n’ait besoin de rien dire. Peut-être. « T’as peur du noir ? » railla gentiment Az avec cette lumière douce et malicieuse à la fois dans le regard, qui lui était propre. « J’ai envie de célébrer ce moment à nous de toutes les façons dont on a envie. » murmura-t-il ensuite, ses iris chauds visitant ceux de la jeune femme avant de déposer un baiser volatile sur sa joue.

Il y avait toujours eu de la tendresse entre nous, même avant que nous réalisions, l’un et l’autre, qu’elle était l’expression de notre amour. Aujourd’hui, pourtant, les choses me semblaient plus douces encore. Ce qu’il y avait entre nous était un évidence, et nous vivions depuis un an un idylle parfait. Nous nous connaissions par coeur et pourtant, cette année écoulée nous avait énormément apprit l’un sur l’autre, comme si une nouvelle facette s’était dévoilée. Mes bras toujours autour de ses épaules, un sourire se dessina lentement sur mon visage.
— Ahah très drôle, fis-je en riant.
J’avais peur du noir, en effet. Du moins, j’avais du mal à m’endormir si la pièce était entièrement plongé dans la pénombre, une angoisse qui s’apaisait en revanche lorsque quelqu’un partageait le lit avec moi. Azriel avait souvent apaisé cette peur que j’avais, par sa simple présence. Il déposa un baiser sur ma joue, ce qui eut pour effet d’élargir mon sourire.
— Et…de quoi as-tu envie ? demandai-je, un peu espiègle.

Oui, depuis que leur relation avait pris un tournant encore plus fusionnel, ils vivaient autant d'habitudes que de découvertes l'un avec l'autre, mais chaque chose avait un goût d'aventure. Que ce soit une nuit ensemble, bien qu'ils en aient déjà partagé des centaines, ou une virée vers des sentiers boisés et reculés. Az et Lys ne passaient pas toutes leurs journées et toutes leurs nuits ensemble, même si leur relation avait pris une nouvelle dimension. Ils restaient toujours... Eux. Ce qu'ils avaient toujours été. Un lien aussi évident que pétillant, discret parfois dans les mots, parce qu'ils n'étaient pas vraiment nécessaires. Un regard, un sourire en coin, un geste avait souvent suffit entre eux. Et il avait fallu le temps à l'Italien de réaliser que Lys n'était pas une des personnes les plus importantes de sa vie pour rien. Depuis, parfois, les mots sortaient, avec franchise ou chuchotés avec tendresse, comme le soir où il était venu toquer à la porte de l'appartement de la jeune femme. Des mots sincères que leurs mains, leurs corps et leurs âmes avaient au fond toujours connus. Il n'aurait su dire si leur relation était encore plus forte aujourd'hui, depuis qu'ils étaient en couple, car à ses yeux, elle avait toujours été caractérisée par ce lien indestructible, presque vital. Et à la fois, si Lys était comme un élément indispensable de sa vie, ils n'avaient pas besoin d'être collés ensemble pour se le prouver. D'ailleurs, ils n'avaient rien à prouver, à personne, ni à l'un ni à l'autre. Ils étaient, tout simplement. Libres et amoureux, mais ce mot était bien trop réducteur à leur goût. Ils se connaissaient et se vivaient depuis tant d'années que l'amour était loin d'être uniquement ce qui les définissait. « Promis, s'il y a un grand méchant loup dans les bois, ce ne sera que moi. » plaisanta le brun en déposant un baiser délicat sur le front de la belle artiste. Il n'allait certainement pas essayer de lui faire peur, non. Il savait que la jeune femme n'était réellement pas à l'aise dans la pénombre, blague à part. Mais se promener au crépuscule, juste avant les dernières lueurs du jour, lui semblait être une bonne idée. « Explorer les bois, la cabane, t'explorer toi... Ou tout à la fois. » répliqua le garçon, rapprochant son corps de celui de Lys, le ton espiègle et chaudement joueur de cette dernière venant réveiller toutes sortes d'envie.

Il y avait quelque chose de doux dans cette relation que nous avions, Az et moi. Quelque chose qui avait toujours exister, au fond, mais qui s’était amplifier il y a quelques mois. C’était parfois déstabilisant de constater qu’il n’y avait presque aucun changement, par rapport à notre relation d’avant, et en même, c’était comme de réaliser que nous nous étions, trouvé, dès le début. En amour ou en amitié, peu importe. Il y avait une connexion réelle, et elle n’avait pas besoin de mots pour exister. Ni Az ni moi n’aimions les étiquettes et cela nous allait très bien comme cela. Malgré tout, force était de constater que nous nous autorisions davantage de passer du temps ensemble, ou d’avoir un geste de tendresse. C’était comme si un levier avait été actionné, simplement. Je souris à la réponse d’Azriel, dardant sur lui un regard enjôleur.
— Joli programme admis-je. On peut commencer par explorer les environs, en effet…et puis, si c’est toi le loup, je n’ai rien à craindre de bien méchant, non ?
Je le toisai un instant, puis m’écartai doucement de lui, embarquant mon sac au passage et le passant en bandoulière. Je franchis la porte d’entrée puis empruntai, avec Az un petit chemin qui semblait aller vers une petite forêt.
— Je crois qu’il y a un lac pas très loin, tu veux qu’on essaye de le trouver ?

Les idées suggérées par le jeune homme semblèrent plaire à Lys, qui s’enquit de ce qui pouvait bien lui arriver, si c’était lui le loup. « Se solo sapessi… » murmura l’Italien au creux de son oreille d’une voix chaude, alors qu’il passait des mains délicates mais plus fermes qu’avant, le long de sa taille jusqu’à ses hanches. Il lui offrit un sourire espiègle et un brin enfantin, avant de se reculer et de se diriger vers la porte, l’observant prendre son sac et le suivre. Lui avait ce qu’il fallait dans ses poches, dont la clé de la cabane. Ils s’engouffrèrent dans un petit sentier boisé, avec tout juste l’espace pour qu’ils puissent marcher côte à côte. Les arbres les entouraient, mais le chemin restait assez dégagé et lumineux, et le soleil avait encore un peu de temps avant de tomber. « Oui, on peut, ça doit être vachement joli. Tu m’emmènes pour un bain de minuit ? » demanda-t-il avec une touche d’humour, avant de prendre la main de la brune dans la sienne, et qu’ils se laissent guider par les bois. Il n’y avait au départ qu’un sentier, qui se divisa bientôt en deux. Ils n’avaient pas beaucoup d’options, en soi, et Azriel doutaient qu’ils puissent se perdre, surtout si le lac n’était pas loin. « Plutôt par là, non ? » proposa-t-il sans certitude en désignant le sentier qui s’enfonçait plus vers le centre des bois. L’autre chemin semblait prendre la direction du village en contre-bas, il était plus probable que le lac se trouve de l’autre côté, mais après tout, il n’en savait rien.

Azriel savait le faible que j’avais pour sa langue natale, bien que je ne sois pas encore capable de comprendre le sens de ses phrases. J’aimais les sonorité italienne tout simplement, et le ton qu’il employait me disait qu’il n’était pas entrain d’énumérer une banale liste de courses. Je lui souris avec malice puis nous commençâmes à préparer nos affaires pour sortir. Nous nous retrouvâmes dehors, puis marchant un peu, il nous fallu faire un choix de parcours. Notre objectif étant de nous rendre au lac que nous avions aperçus sur la route, Azriel suggéra le sentiers qui nous demandait de passer à travers les bois. Je haussai les épaules.
— On verra bien ?
C’était peut-être inconscient de prendre un chemin au hasard, alors que la nuit s’apprêtait à tomber dans les heures à venir, mais la prise de risque ne m’effrayait pas. Dans le pire des cas, nous avions nos téléphones et nous étions ensemble. Nous marchâmes donc un moment, à travers les bois, avant de déboucher sur le fameux lac.
— On n’était pas très loin finalement ! Toi qui voulais faire l’amour dans les bois, je crois qu’on a un spot idéal, le taquinai-je.

Le calme des bois les entourant était à la fois incroyablement apaisant et nourrissant. C'était agréable de marcher, à deux, dans cette nature qui semblait les protéger et les accompagner. À la croisée des sentiers, Az suggéra de prendre celui qui s'enfonçait un peu plus dans le cadre forestier. Lys acquiesça elle aussi, comme elle le disait, ils verraient bien. C'était aussi le charme de découvrir les environs sans carte ou trajet précis. Ils pourraient toujours faire demi-tour au besoin, et ils avaient encore quelques heures devant eux avant le noir complet. Le garçon hocha donc la tête et ils prirent cette option, qui s'avéra être la bonne, puis les feuillages s'éclaircirent peu à peu pour laisser place au lac, qui était tout de même assez impressionnant de beauté, sa surface lisse reflétant le soleil qui descendait lentement. L'endroit était parfait, il n'y avait personne à cette heure-ci, dans ce coin un peu perdu, et il n'était au final vraiment pas bien loin de leur petit cocon en bois. « C'est clair, j'aurais pas pu imaginer mieux. » sourit-il en se tournant vers son amoureuse. « Je vois que l'idée ne te déplaît pas... » poursuivit-il alors que son sourire en coin prenait une touche de malice. Il prit la main de la brunette dans la sienne, alors qu'ils s'approchaient un peu plus du bord du lac, entourée d'une vaste étendue d'herbe. Az sortit un plaid de son sac qu'il déroula au sol, pour qu'ils puissent s'installer, puis ouvrit une poche latérale de son sac, et en sortit une pochette transparente contenant quelques petites boules de verdure. « Ça te dit aussi ? » demanda-t-il à Lys, les yeux brillants, sans se départir de son sourire joueur.

La randonnée est une activité qu’on a souvent pratiqué, Az et moi, depuis qu’on se connait. On aime tous les deux se ressourcer en pleine nature et nous avons la chance de vivre dans un endroit du monde où les balades sont sublimes et la nature à deux pas de chez nous. Si pour l’anniversaire d’Azriel nous avons choisi de faire un peu de route pour gagner ce petit coin de paradis qui sera le notre durant le week-end, il n’est pas rare qu’on choisisse un sentier proche de chez nous pour nos balades ordinaire. Même si je dois avouer que nous n’avons pas chaussé les rangers ces derniers temps, cela fait du bien ce soir de se retrouver en pleine nature. On arrive rapidement à notre objectif : le lac mentionné sur la carte. L’endroit est désert et sublime dans la lumière descendante. Le moment est idéal pour nous poser un peu.
— Tu me connais quand même ! je plaisante.
Az sort une couverture de son sac, je l’aide à l’installer au sol, pour nous offrir un petit espace cocooning en pleine verdure. En parlant de verdure, mon petit ami propose alors d’en ajouter un peu plus au tableau. Je hoche la tête avec un sourire.
— Je ne vois pas de raison de refuser…

Oui, il la connaissait, ils se connaissaient, depuis tellement longtemps. C'était la beauté et la force de leur lien, cette facilité qu'ils avaient à se comprendre, à toucher du bout des doigts l'âme de l'autre, en prenant soin de la laisser intacte, immaculée. « J'espère. Si tu as encore des révélations sensationnelles à me faire, c'est le moment. » Azriel esquissa son sourire espiègle, celui un peu enfantin que Lys collait souvent sur ses traits. Il gardait cette idée d'activité dans un coin de sa tête, pour plus tard. Ou plus tôt. Ils étaient rarement capables de garder un comportement physique platonique l'un avec l'autre, peu importe où ils se trouvaient. Et le cadre ici, ainsi que l'occasion, étaient une belle invitation à leurs envies les plus charnelles. Mais avant de se perdre dans les courbes de la peintre, le brun proposa de quoi rendre ce moment encore plus détendu qu'il ne l'était déjà. « Moi non plus. » sourit l'Italien d'un air enjoué, avant de se mettre à rouler. Ils étaient loin d'être des consommateurs hors pair d'herbe verte, mais ils avaient toujours aimé partager un peu de verdure et d'inspiration créative. Son travail terminé, il alluma le joint pour le tendre à la belle brune, déposant au passage un bisou sur la peau délicate de sa joue. Profiter de ce moment, de ce petit havre de paix simple, c'était tout ce qu'il demandait. Il avait un an de plus, mais il n'avait rien de plus à demander à la vie. Pas pour le moment en tout cas. Même si certains projets, encore lointains et abstraits dans son esprit, faisaient leur chemin.

Cela avait toujours été notre style, de se laisser porter par l’instant. Avant que nous réalisons que l’amour que nous nous portions l’un à l’autre allait au dela de l’amitié, et encore davantage maintenant. C’était notre manière de fonctionner et elle nous convenait parfaitement. Nous laissions les choses venir naturellement en profitant un maximum l’un de l’autre et de ce que la vie avait à nous offrir. Ce moment au bord du lac pour célébrer l’anniversaire d’Azriel était parfait. Le cadre était idyllique et la nature semblait nous accueillir dans un écrin propice à notre amour. Je me sentais bien, et je n’avais besoin de rien de plus. Je suivis Azriel lorsqu’il décida de rouler un peu d’herbe. Je n’étais pas fumeuse dans ma vie de tous les jours, la dernière cigarette que j’avais fumé remontait au lycée et je ne prenais de l’herbe qu’avec Azriel et de manière très occasionnel. Cela me faisait surtout plaisir de partager ça avec lui. C’était le moment que j’aimais, davantage que la substance en elle-même. Je tirai une première taf, lui rendis le petit cônes puis observai un silence durant lequel je laissais la verdure qui nous entourai et la surface plane du lac m’apaiser doucement. Puis, enfin, je me décidé à dire à voix haute ce qui me traversais tout bas depuis quelques minutes.
— Je crois que j’en ai une, dis-je, de…révélations sensationnelles. Ca me vient comme ça, et je suis la première surprise d’ailleurs.
Je ris doucement, avant de reprendre, le regard tourné vers celui d’Azriel.
— Je crois que j’aimerais que tu me fasses un enfant.

Cette bulle de paix et de connexion les enveloppait, avec des bras chaleureux et bienveillants. C'était partiellement dû au cadre bucolique qui les entourait, mais au-delà de ça, Lys et Azriel avaient toujours su se construire facilement leur petit havre à eux, peu importe où ils se trouvaient. Que ce soit dehors en pleine nature, dans l'intimité d'une chambre ou dans la créativité d'un atelier de peinture improvisé, ils savaient se créer leur jardin mental secret, et s'y retrouver sans problème. Le silence agrémenté de quelques oiseaux chanteur les imprégnait, joyeusement et paisiblement, alors qu'Az reprenait possession du joint sur lequel il tira. Ils n'avaient pas besoin de mots à tout prix, pour se connecter, ça en avait toujours été ainsi en dix ans. Même si quelques parts sur la portée de ce mutisme, le garçon repérait des notes paroles dissimulées. Il ne dit rien cependant, déjà parce que ce n'était qu'une sensation, mais qu'il pouvait se tromper. Ensuite parce que même s'il voyait juste, il laissait le libre choix à Lys d'aborder ou non ce qui lui traversait l'esprit, sans la presser, sans même vraiment attendre qu'elle le fasse. C'était dans la nature de l'Italien, taciturne, que de laisser cet espace serein à ses interlocuteurs, libres de le remplir ou non. Et la peintre se saisit finalement de cet espace. Curieux, Azriel tourna la tête vers elle, inquisiteur, la mine enjouée. Il tira à nouveau sur le spliff, attendant ces fameuses révélations sans avoir aucune idée de ce qui allait se jouer. Il faillit donc s'étouffer avec la fumée d'herbe quand Lys enchaîna. Pour le coup, elle l'avait vraiment prise au dépourvu. Cependant, une fois sa toux passée, un petit rire franchit ses lèvres à lui aussi. Il avait été surpris, mais il n'était pas plus déconcerté que ça. Il n'y avait jamais pensé de façon aussi claire que ce que sa copine venait de formuler, et sans doute qu'elle non plus. Mais ce n'était pas une idée qui ne l'avait jamais effleuré non plus. « Ça me paraît pas insensé, comme envie. » répondit le brun avec un sourire, détendu. Serein. Comme si elle lui proposait la chose la plus naturelle du monde. Comme si ce projet attendait depuis un moment derrière un virage, vers lequel ils avançaient sans se presser, confiants. « C'est même une idée attrayante. » compléta-t-il, son visage empreint de tendresse alors qu'il plongeait ses iris noisette dans ceux de la belle brune.