little darlin', the smiles returning to their faces ; here comes the sun (charlie)

Charlie grimaça. Elle avait horreur que Woody se sous-estime, et cela lui arrivait plus d'une fois. Certes, il avait parfois eu des réactions blessantes mais la plupart du temps, il avait pris soin d'elle. Ils avaient tout de même vécus plus de hauts que de bas. Pas si souvent... ne résista pas de lui faire remarquer Charlie, avec un très mince sourire. En tout cas il avait vu les choses en grand et il se rattrapait plutôt bien. Elle était éblouie par cet endroit et voulait profiter un maximum de ce moment en tête à tête avec lui. Le serveur arriva rapidement à eux pour prendre la commande des boissons et après avoir consulté Charlie, il commanda une bouteille de vin à sa convenance. Une fois qu'il tourna les talons, elle saisit l'occasion de lui annoncer cette grande nouvelle dans sa vie ; être à la tête d'une quatrième boutique Imogen. La pâtissière, fut récemment promue Cheffe Pâtissière. Cela lui faisait un bien fou de partager la nouvelle avec Woody qui paraissait sincèrement heureux pour elle. Qu'est-ce qu'elle adorait le voir sourire ainsi, c'était sans doute la plus belle vue, bien plus belle que la mer qui les regardait à travers la vitre du bateau. Merci, je suis tellement reconnaissante que Charlize ait pensé à moi pour le poste. admit-elle, à la fois encore émerveillée et abasourdie par cette décision de sa patronne. Elle l'avait remercié un million de fois de l'avoir choisie et lui avait fait la promesse de se surpasser. En effet, elle qui avait le goût pour les challenges, était servie. Cela ne l'effrayait pas, au contraire, il s'agissait de la bonne adrénaline qui la poussait à vouloir être à la hauteur de ses attentes. Toujours à Bowen. Deux sont déjà dans le centre-ville, une à la périphérie, la quatrième sera de l'autre côté de la ville. répondit-elle à Woody, qui arrivait difficilement à se décrocher à cette euphorie. Tu auras l'obligation d'aller désormais dans celle-ci. plaisanta très spontanément Charlie. Oups, c'était peut-être mettre la charrue avant les bœufs. L'air grave, elle s'en rendit compte ensuite mais c'était trop tard, elle l'avait déjà sous-entendu. Pour elle c'était juste évident qu'ils finiraient par renouer. Plus jamais elle ne voulait revivre ses six sombres mois, à ressentir le manque atroce de Woody.

Au moins, elle ne niait pas totalement qu’il pouvait mal gérer certaines situations. Charlie n’aurait pas été sincère si elle avait dit qu’il savait tout à fait désamorcer une situation ou qu’il savait comment exprimer ses sentiments lors d’un conflit, par exemple. Woody était tout le contraire de ça. Au premier obstacle, c’est comme si le monde entier devenait trop compliqué pour lui alors il refermait la porte dans sa tête, se cachant de tout et de rien à la fois. Le trentenaire ne répondit rien hormis un mince sourire qu’il rendait à Charlie. Après avoir contemplé la vue, ils prirent place à leur table et Woody commanda une bouteille de vin rouge au passage du serveur. C’était une bonne bouteille et ils avaient justement quelque chose à célébrer, la pâtissière lui annonçant sa promotion. « À qui d’autre tu voulais qu’elle pense ? Ça devait être une évidence. T’es la meilleure. » Charlize aurait même dû faire ce move bien plus tôt, selon l’avis du physiothérapeute. Woody était sincèrement fier de Charlie, et très heureux pour elle de cette grande étape qu’elle franchissait dans sa carrière. Il l’imaginait un jour avoir sa propre pâtisserie, comme lui avait sa propre clinique de physiothérapie, deux propriétaires accomplis. Comme quoi, oui, Woody se projetait parfois avec elle dans le futur même s’il avait flippé la dernière fois. Il fut rassuré de savoir que la nouvelle boutique Imogen serait également à Bowen, à l’autre côté de la ville cependant. Ce n’était pas bien grand, Bowen, ça ne lui ferait qu’un détour. « J’comptais pas faire autrement. Même si Jake risque de me faire le même chantage de son côté. » Il esquissa un sourire. Woody avait définitivement quelque chose avec les salariés d’Imogen. Jake, Annushka, Charlie … Comme si tout son entourage était relié à cet endroit-là. Le serveur revint avec la bouteille, l’ouvrit devant eux et fit goûter le trentenaire, qui hocha la tête afin que le serveur les serve tous les deux, le vin étant aussi bon que dans ses souvenirs. Une fois le serveur reparti et la bouteille posée sur la table, Woody leva son verre. « À la nouvelle cheffe pâtissière d’Imogen, alors … Félicitations encore. » Dit-il en souriant.  

La nouvelle répandue semblait réjouir tout autant Woody qu'elle. Charlie en éprouvait une immense fierté, d'autant plus qu'elle revenait de loin, pour en arriver là. Elle avait abandonné ses études de physiques cantiques, quitte à décevoir son père. Après avoir fui Sydney, elle avait déposé son CV dans pas mal d'enseignes. Au vu de sa maigre expérience dans la pâtisserie, aucun patron n'avait rappellér. Aucun, sauf Charlize. Charlize avait pris le risque de l'embaucher, et depuis deux ans, elle l'avait aidé à se performer. Encore aujourd'hui, Charlie était reconnaissante de cette opportunité qu'elle lui avait donné dans sa vie professionnelle. Arrête, tu vas me faire rougir! dit Charlie qui recevait un compliment de Woody. Instinctivement elle posa ses mains sur ses joues. Pour en avoir été parfois le cobaye de ses nouvelles recettes, Woody était l'un des mieux placés pour donner son avis. Charlie prenait énormément de plaisir à satisfaire les papilles de ses proches, c'était la plus belle partie du boulot.

Des quatre boutiques Imogen, elle espérait (évidement) que Woody vienne désormais à la sienne. J’comptais pas faire autrement. avait-il dit dans un premier temps. Le petit cœur de Charlie allait fondre, cela se vit dans doute sur son visage attendri. Jake ne t'en voudra pas. assura ensuite la blonde dont son sourire s'élargit. Le serveur était revenu avec une bouteille de vin rouge pour les servir. Une fois que Woody accorda son approbation au serveur, il les servit tous deux et il leva son verre pour porter un toast à son honneur. Merci... Elle leva à son tour son verre mais précipitamment, elle rajouta :  Et puis... À nos retrouvailles, dans cet endroit magnifique. Il fallait qu'elle le souligne. Woody avait énormément touché Charlie par cette initiative. La vue était tout simplement splendide. Et entre leur chaleureux baiser échangé, le décor sur le bateau, le partage de cette heureuse nouvelle ; tout cela rendait ce moment encore plus spécial à ses yeux.

« T’es belle, quand tu rougis. C’est pas un argument pour me faire arrêter. » Lâcha Woody avec un mince sourire, mais lui n’avait pas besoin de sourire de toutes ses dents pour montrer qu’il était bien, qu’il était sincère. Ça se voyait dans son regard. Son regard, bien trop souvent éteint, brillait aujourd’hui d’un éclat bien particulier. Évidemment, il assura à Charlie qu’il irait désormais à la boutique dont elle serait la cheffe-pâtissière et ce, peu importe ce que Jake en dirait. « Même s’il m’en veut … » Il haussa les épaules, le regard un peu espiègle. Jake était son meilleur ami, même s’ils s’étaient pas mal éloignés dans la dernière année, la faute à Woody. Il comprendrait. Le serveur revint rapidement avec le vin et lorsque leurs deux coupes furent remplies, le trentenaire trinqua à ce nouveau poste qu’occupait la pâtissière. La blonde s’empressa d’ajouter leurs retrouvailles à l’équation. Il sourit, hochant la tête. « À nos retrouvailles, oui, aussi. » Il but une gorgée du vin, l’apprécia un instant, avant de redéposer sa coupe et d’essuyer ses mains nerveusement sur ses pantalons. « Et maintenant qu’on est ici et que j’ai un peu plus les idées en ordre … Je voulais qu’on reparle de ce qui s’est passé. Je voulais revenir sur … sur ma réaction, et sur mon silence des derniers mois, encore. J’ai beaucoup réfléchi, dernièrement. Beaucoup travaillé sur moi-même, aussi. Et je voulais un peu te partager mes conclusions. » Annonça Woody.  

En effet, il paraissait heureux, Woody. Derrière ses deux / trois regards fuyant, Charlie perçut cet éclat dans ses yeux. Elle retrouvait le Woody de leurs bons moments, emplis de lumière.  Il ne servait à rien de fuir son compliment, elle s'arrêta enfin pour planter son regard dans le sien, car avec Woody elle savait qu'il était inutile de le contredire. Rien ne t'arrêtera, pas vrai? lui dit-elle, le sourire aux lèvres. En l'espace de peu temps, elle venait de recevoir une bouffée de sérénité. À croire que ses six mois de silence n'avaient pas existé, comme si leur couple ne s'était jamais mis en pause. Car il affirma même se rendre à la boutique Imogen où elle fut nommée Cheffe Pâtissière, plutôt que celle de Jake. Charlie ne savait pas bien si il était sérieux, tout ce qu'elle voyait, c'était que cela lui faisait un bien fou de le retrouver.  D'ailleurs ils venaient de lever leurs verres pour trinquer à leurs retrouvailles. Le vin qu'il avait choisi était exquis, seulement elle ne le savaoura pas à sa juste valeur lorsqu'elle but la deuxième gorgée de vin. Woody voulait revenir sur ce qu'il s'était passé entre eux et notamment lui partager ses conclusions. Charlie se sentit extrêmement nerveuse, et cela devait se lire sur son visage, elle qui était si expressive. D'accord... Quelles conclusions en as-tu tiré? demanda-t-elle, sans parvenir à cacher l'appréhension dans sa voix. Son cœur battait si fort...

Woody s’était contenté de rire à la question de Charlie, qui n’attendait pas vraiment de réponse finalement. Ils trinquèrent, redéposèrent leurs verres, et c’est là que le trentenaire envisagea enfin de se lancer dans ses propres nouvelles. Dans ses conclusions, comme il les appelait. « J’ai flippé quand t’as parlé de mariage, du futur, tout ça, parce que j’m’étais fait à l’idée qu’il était trop tard, tu vois. J’me le suis tellement rentré dans la tête. Même depuis qu’on est ensemble, j’avais pas voulu rouvrir cette porte-là, c’était … c’était trop tard. J’me fais vieux, avec ma maladie en tout cas … J’me sens vieux. Puis y’a eu la grossesse et j’ai peut-être eu envie d’y croire, et le fait que ça nous soit volé comme ça, ça m’a ramené sur terre. Alors quand t’en a reparlé, j’ai rien voulu entendre, j’ai voulu me protéger. J’ai paniqué. » Il marqua une pause, retourna dans sa tête dans cet espace plus serein, plus doux, cet espace qu’il s’était créé lors de ses méditations, pour s’y réfugier et guérir. « Mais durant ces six derniers mois, j’ai pas juste voulu fuir, cette fois, Charlie. J’ai voulu prendre du recul et j’ai vraiment longuement réfléchi. J’ai recommencé à prendre soin de moi. J’envisage … je sais pas, peut-être des thérapies. Quelque chose, en tout cas, pour essayer d’aller mieux, de changer ma façon de penser. » Parce qu’il avait bien réalisé que ses mécanismes de défense ne convenaient à personne et surtout pas à lui-même, lui qui se détruisait à chaque fois qu’il s’enfermait, qu’il se refermait. « Et rien que ce début de cheminement-là, ça m’a fait réaliser que … qu’il est pas trop tard. Mes années en santé s’écoulent vite, c’est clair, mais elles sont encore un peu là alors, au contraire … c’est maintenant ou jamais. » Nerveusement, Woody fouilla dans sa poche. Il regarda rapidement autour de lui, s’assurant que tout le monde s’affairait à ses propres trucs. Il n’était plus du genre à se donner en spectacle, l’aîné des Rutkowski. C’était du passé, ça. Maintenant, il préférait passer sous le radar. « C’est probablement précipité avec ce qu’on a vécu dans la dernière année. Mais malgré tous mes silences, mes absences, malgré tout ce que je t’ai fait endurer … tu m’as jamais lâché. Tu m’as toujours attendu. Malgré tous mes efforts pour que tu me détestes, pour que tu m’abandonnes … t’es là, Charlie. Et … je pense que … Non, je pense pas. Je sais que … que j’ai pas envie que tu partes de ma vie. » Il ouvrit le petit boîtier qui contenait une bague, toute simple, mais brillante. Il déposa le boîtier, ouvert, sur la table, entre eux deux. Il n’arrivait même plus à articuler le moindre mot tellement il était nerveux. Ça restait coincé à la bordure de ses lèvres.

Si Charlie appréhendait la réponse de Woody, elle était loin, très (très, très) loin de s'imaginer où voulait-il en venir. Silencieuse, elle l'écouta attentivement. Elle ressentit un pincement au cœur quand il admit avoir pris peur lorsqu'elle avait évoqué leur futur. Ces paroles, elle s'en souvenait très bien, elle les avaient dites pour lui faire comprendre à quel point il avait pris une place importante dans sa vie. Il marqua une pause, mais elle ne l'interrompit pas pour autant. Surprise, bouchée bée, Woody lui annonça dans un premier temps avoir réfléchi et être prêt à faire quelque chose, suivre une thérapie pour essayer d'aller mieux. Quiconque connaissait Woody, dirait qu'il faisait un immense effort. Le visage de Charlie s'attendrit : elle était tellement fière de lui. Ses six mois de silence furent atroces, certes, cependant il s'avérait que Woody avait fait un travail énorme sur lui-même. Elle trouvait regrettable qu'une table se retrouve entre eux car elle aurait préféré lui apporter une réponse en le serrant chaudement dans ses bras. Puis tout sembla se passer très vite. Avec un regard autour d'eux, il fouilla nerveusement dans sa poche, elle ne comprit pas tout de suite, Charlie, car son cœur et sa raison se bousculaient. Non seulement Woody s'était lancé dans une déclaration honnête et touchante, elle vit ensuite apparaître dans ses mains un petit boîtier. C'était officiel : son cœur allait exploser. Elle déposa une main sur sa poitrine, comme pour être sûre qu'il n'allait pas lâcher. Son rythme cardiaque était sûrement au plus haut : lui, ouvrit la boîte face à elle et elle aperçut cette magnifique bague. Woody... murmura-t-elle, le souffle coupé. Ce moment semblait surréaliste, elle devait rêver, être dans une autre dimension. Elle leva ses yeux bleus vers lui. Ils brillaient. Non elle ne pleurait pas encore, car elle peinait à réaliser que Woody était en train de faire sa demande.  Tu... Elle aussi éprouvait des difficultés à reprendre la parole. Alors elle se contenta d'hocher la tête et avec des larmes de joie sur ses joues, elle articula clairement mais d'une voix à peine audible Je t'aime. Il disait vrai qu'elle ne l'avait jamais lâché. Malgré tous les obstacles qu'ils ont dû affronter, elle ne désirait que lui encore et toujours.

C’était au beau milieu de la forêt, c’était tout en haut de la falaise, c’était en face de l’océan, c’était à tous ces endroits où Woody avait trouvé refuge dans son cœur, les yeux fermés, le vent contre sa peau, que le trentenaire avait finalement compris que ça ne servait rien de se battre contre ceux qui l’aimaient. Il devait comprendre que ce n’était pas à lui de choisir qui s’accrochait à l’espoir, qui s’accrochait à son être. Il avait décidé de give in, de voir où tout ça le mènerait. Ce n’était pas la première fois qu’il tentait de se résoudre à l’inévitable, à l’incontrôlable. Ce n’était pas la première fois qu’il acceptait d’ouvrir un peu la porte mais cette fois, il l’ouvrait pour laisser la lumière rentrer. Ses yeux s’étaient habitués à la noirceur mais il avait eu envie de voir à nouveau. Et que ce soit Charlie qu’il puisse voir à tous les matins, ça le réconfortait, ça le rassurait. Elle était la définition-même de la lumière. Tout avec elle était simple, doux, bienveillant. S’il voulait réellement tenter de s’en sortir, s’il désirait cheminer enfin, ce serait auprès d’elle qu’il le pourrait. Un mince sourire mais les yeux plein d’émotions, il regarda Charlie porter sa main à sa poitrine, l’écouta murmurer son prénom alors qu’elle avait les yeux rivés vers la bague devant elle. « Je t’aime aussi. » Lâcha-t-il, avant de reprendre un peu ses esprits et de s’empresser d’ajouter : « Mais avant que tu dises quoi que ce soit d’autre, avant que tu me répondes officiellement … Je veux te dire autre chose. Et je veux que tu me promettes de respecter ça. » Il lâcha le boitier de la bague, qui demeura ouvert face à la blonde, la bague brillant entre eux deux. Il ramena sa main vers lui. « Viendra un moment dans ma vie, je n’ai aucune idée de quand ce sera, mais inévitablement … y’aura un jour où je ne serai plus … où je ne pourrai plus vivre comme je l’entends. Et je refuse ça, tu le sais, tu sais à quel point c’est difficile pour moi d’envisager perdre mon autonomie, devoir dépendre des autres. Alors … j’ai décidé qu’à ce moment-là, si j’peux plus vivre comme je le veux, je voudrai au moins pouvoir mourir sur mes propres termes. » Lâcha-t-il, au risque de gâcher complètement la grande demande. Il voulait que Charlie soit au courant de tout ce qui s’était passé dans sa tête durant les six derniers mois. Le beau comme le laid. « Tu peux prendre le temps de penser à tout ça avant de me répondre. On peut en parler, aussi, même si mon idée est faite. Si ça peut t’aider à comprendre. » Ajouta-t-il.

Après avoir bravé tempêtes et obstacles, on ne pouvait qu'affirmer que ces deux-là s'aimaient. Émue, le regard de Charlie naviguait entre cette sublime bague brillante et les yeux d'un magnifique vert de Woody. Prête à lui dire un million de fois oui, il repoussa cet instant pour s'assurer qu'ils iraient dans la même direction. Silencieuse, Charlie se tut. D'un air grave elle l'écouta attentivement. Il voulait lui parler du moment venu où il perdra son autonomie, et sans qu'il n'aille plus loin dans ses propos, elle comprit. Aborder un tel sujet n'avait rien d'agréable et pourtant elle ne pouvait nier que cela était nécessaire. Ce genre de sujet, elle en avait malheureusement, l'habitude ; son frère fleurant une espérance de vie aussi moindre. Il lui était toujours compliqué de contenir ses larmes, ce qu'elle fit pourtant - non pas sans difficulté. D'autre part, elle n'eut besoin de réfléchir pour se positionner. Connaissant le tempérament de Woody, elle savait très bien qu'il ne supporterait très longtemps d'être sans cesse physiquement / moralement accompagné. D'ailleurs ce qu'elle aurait fait, sans doute le devinait-il déjà et ne désirait justement pas infliger cela à Charlie. Cette dernière eut un bref moment d'absence avant de reprendre la parole. D'accord répondit-elle lentement. A son tour elle hésitait comment avoir les mots justes, les mots qui feraient en sorte d'apaiser les craintes de l'aîné des Rutkowski. Elle tenta de remettre de l'ordre dans son esprit. Je savais. finit-elle par lâcher sans le moindre sourire. Et je comprends. se précipita de rajouter la blonde, plus que jamais sûre d'elle-même. C'était sa décision. Lui seul pouvait décider quel fin voulait-il mener de sa vie.  Ça te tient à cœur, j'entends et sache que je te soutiendrais. Tu as ma parole.   promit-elle, le cœur serré à l'idée de vivre sans lui. Le perdre sera une douleur insupportable. Mais la perspective de profiter de ses dernières années à ses côtés et de porter son nom, représentaient un doux privilège qui allait au-delà de ses rêves les plus fous.

Il était soulagé, Woody, soulagé d’entre Charlie donner son accord à ce deal des plus troublants, des plus cruels. Mais ce n’était pas Woody cette fois qui était barbare, c’était la vie. Lui faisait juste se battre comme il le pouvait et après mûre réflexion, il avait décidé que la plus grande victoire qu’il pouvait obtenir, c’était de ne pas se laisser complètement avaler par la maladie, mais de l’emporter avec lui lorsqu’il le choisirait. Woody savait que les jours du frère jumeau de Charlie, Jules, étaient également comptés. Et que lui n’aurait probablement pas son mot à dire sur le moment. La vie était injuste de l’avoir mis sur le chemin de Charlie. Elle aurait déjà le deuil de son frère à faire et maintenant, celui de son mari. Mais comme elle avait décidé de s’accrocher à lui en toute connaissance de cause, Woody avait décidé de leur offrir les prochaines années, peu importe la quantité. Elles seraient belles et il finirait sa vie sur de belles notes mélodieuses. « Merci, Charlie. Ça signifie énormément pour moi. » Souffla-t-il. Ça n’avait pas été une décision facile à admettre. Elle lui traînait dans la tête depuis plusieurs années mais jamais il ne s’était senti capable de la verbaliser à qui que ce soit. C’était maintenant chose faite, et l’ouverture dont Charlie faisait preuve l’encourageait à en parler à d’autres. Ainsi, il pourrait profiter pleinement de sa vie, pendant qu’il était encore à peu près en santé, et profiter de ceux qu’il aimait aussi, sans jamais avoir l’impression d’être un fardeau. Et lorsqu’il le deviendrait, il partirait. « Alors … » Il esquissa un sourire, reportant son attention sur la bague, puis sur les yeux brillants de Charlie. « C’est oui ? » À la vie et à la mort, aussi près d’eux soit-elle.

Déchirée par la perspective de devoir le perdre un jour, Charlie qui connaissait la maladie de Woody depuis un certain temps, ne s'était jamais préparé à devoir répondre à une telle requête de sa part. Cela lui tenait à cœur, elle le comprit et se devait de le rassurer. Elle lui promit alors de respecter cette dernière volonté ; décider d'abréger sa vie lorsque son corps ne lui permettra plus d'être autonome. Aussi longtemps qu'elle le pourra, Charlie désirait vivre cette belle et passionnante histoire avec Woody. Il lui demanda plus officiellement si c'était un oui, elle hocha la tête mais leva une main comme si elle pouvait ralentir cet instant magique. Attends je voudrais aussi te dire quelques mots avant que mon mascara fiche le camp, parce que là, Woody, tu m'as vraiment achevé! Elle se mit à rire nerveusement, s'efforçant de contenir ses larmes, un vrai défi depuis qu'elle avait découvert cette bague dans le boîtier. Woody qui faisait sa demande, c'était tellement surréaliste, dans ce décor magnifique. Elle jeta un bref regard autour d'elle, la mer, la bague, puis lui. Lui, qu'elle aimait à la folie.  Bon sang j'ai rêvé secrètement de ce moment je ne sais combien de fois  et là que ça m'arrive, je ne sais plus quoi dire. admit-elle en le regardant avec un air attendri. Enfin de compte je ne sais pas quoi dire de plus que je ne te laisserais jamais tomber. Je ferais tout mon possible pour te rendre heureux et c'est toi que je veux. Personne d'autre. finit-elle par dire, laissant les larmes couler. Pourtant Charlie souriait, rayonnante. Elle ne pouvait pas prétendre que cette relation cesserait d'être dans des montagnes russes, sûrement connaîtraient-ils encore beaucoup de bas. Peu importe, se disait-elle. Cela en valait tellement la peine, lui qui faisait d'elle une femme épanouie.

Elle hocha de la tête, Charlie, sans pour autant prononcer le mot tant attendu, celui qui scellerait officiellement cette promesse de se marier, de se dire oui à nouveau, devant ceux qu’ils aimaient, ceux qui les aimaient. Il y avait songé, Woody, il avait songé aux personnes proches de Charlie qui verraient sans aucun doute cette union d’un très mauvais œil. Puis, il s’était rappelé qu’il s’était rarement soucié de l’opinion des autres hormis celles de ceux qui le connaissaient par cœur. Il avait toujours suivi son propre feeling, et cette fois son instinct lui disait que laisser Charlie l’inonder de sa lumière, dans le présent et dans l’avenir, c’était la plus belle chose qu’il puisse s’autoriser. Il attendit que la blonde parle, sa main levée entre eux pour mettre une pause à ce moment. Il rit nerveusement aussi, il savait qu’il la prendrait par surprise. Personne ne se serait attendu à ça, et à quelque part, lui-même ne le réalisait pas totalement. « Je ferai tout ce que je peux, moi aussi, pour te rendre heureuse, pendant que je m’en sais encore capable. » Il esquissa un sourire. « Mais j’imagine que tu sais déjà que ce ne sera pas toujours facile … Je reste … moi. » Un second rire nerveux, un peu plus camouflé cette fois. Il n’avait pas envie de gâcher ce moment en affirmant qu’il ne changerait pas du jour au lendemain, que des querelles et des silences les attendaient sans doute encore. Ce n’était pas le moment. Et ce sous-entendu Charlie le comprendrait. « Bon, alors, vas-tu officiellement me dire oui, que je t’enfile cette bague au doigt ? » S’impatienta-t-il, mais pas réellement. Ils avaient du temps devant eux, même si le sablier s’écoulait plus vite que pour d’autres.

Jamais au grand jamais Charlie ne s'était attendue à ce que Woody la demande en mariage, et encore moins aujourd'hui, jour de leurs retrouvailles après six mois de silence. Le retrouver était déjà quelque chose en soit, mais là, cela allait au-delà de ses espérances. Son rêve le plus fou devenait réalité, il fallait qu'elle aussi exprime quelques mots cependant elle éprouva des difficultés à les trouver. L'essentiel était là ; ils voulaient être heureux ensemble, aussi longtemps que la vie leur permettra. Elle aussi, se mit à rire nerveusement. Bien entendu qu'il restera lui-même, ce qui voulait également dire qu'ils n'en étaient pas à leur dernière épreuve. Peu importe puisque cette fois ils étaient tous les deux prêts à les affronter. Avant que je tombe dans les pommes, oui, oui, oui, mille fois oui!  répéta-t-elle joyeusement. Immédiatement elle tendit sa main, légèrement tremblante afin qu'il lui passe la bague au doigt. Admirant le bijou, elle restait impressionnée par sa beauté. Simple, brillante, parfaite. Elle est tellement belle, t'es fou... commenta Charlie, qui commençait à sentir l'émotion la submerger de nouveau. Elle leva ses yeux mouillés vers Woody et afficha son sourire le plus radieux qu'il n'ait pu connaître à ses côtés. Il avait été courageux de lui demander en mariage après tant de mois silence, c'était risqué et pourtant elle avait dit oui comme si aucune autre réponse n'aurait été possible. Épanouie, elle le regardait amoureusement.  Laisse-moi t'embrasser. implora la blonde en se penchant déjà. Avant qu'ils ne profitent de leur déjeuner sur ce merveilleux bateau, elle voulait sceller ainsi ce beau moment. Ils auront bien l'occasion de se retrouver intimement après, ça aussi elle avait hâte ses yeux brillaient d'impatience.

Charlie ne répondit rien, rien de plus, parce que bien sûr elle savait que Woody ne changerait pas du jour au lendemain, que même des mois et des années de thérapie ne changeraient pas tout l’homme qu’il était. Si elle l’aimait c’était aussi pour ses mauvais côtés, même si clairement parfois elle aurait pu s’en passer. Le trentenaire apprécia ce silence, parce qu’au fond il n’avait pas besoin que Charlie acquiesce ou nie quoi que ce soit. Il avait juste eu besoin qu’elle sache. La blonde prononça enfin le mot magique qui autorisa Woody à lui passer la bague au doigt, le sourire aux lèvres. Le physiothérapeute tenta tout de même de garder le geste assez discret, ce moment-là il était à eux et à personne d’autre. On viendrait assez rapidement leur gâcher leur bonheur à coup de doutes et de mises en garde, ils pouvaient bien demeurer dans leur bulle un peu plus. « Elle te va bien … » Constata-t-il avec un sourire. « Je l’ai choisie seul alors je n’étais pas certain … » Il aurait pu demander à Avery ou à Nevaeh, c’est vrai, mais il avait eu peur que ça rende l’idée du mariage trop concrète, et qu’il se dégonfle avant même de faire la grande demande. Là, il était trop tard. Quoi que sa tête en dise, le cœur avait parlé. La pâtissière leva ses yeux mouillés vers son fiancé, lui demandant de la laisser l’embrasser. Il se pencha à son tour et l’embrassa, même si ça faisait scène romantique qu’il n’aimait pas tellement, il fallait bien qu’il se prête un peu au jeu après l’avoir demandée en mariage. Il se rassit. « Je t’aime. » Ces mots-là Woody ne les disait pas si souvent. Il les considérait important et les dire n’était pas nécessairement facile, pour lui. Ou du moins, ça ne l’avait pas toujours été. Il ne voulait jamais perdre ça de vue. Le serveur revint finalement vers eux afin de prendre leur commande. Woody eut un léger rire. « T’as eu le temps de regarder le menu ? » Demanda-t-il à Charlie.

Si Charlie disait oui, elle le disait aussi aux épreuves à traverser ensemble. Les défauts de Woody, bien que certaines soient incompatibles à une vie sereine de couple, elle les acceptait. Pour d'autres, elle les aimait même. Son entêtement / sa ténacité à vouloir toujours avoir le dernier mot, même pour la complimenter. Lui qui avait admis n'être pas certain à avoir les capacités à devenir père, il avait finit par l'accepter et à même se projeter. Une liste non exhaustive de tout ce qu'elle aimait et détestait chez lui, serait dérisoire. Certes Woody l'avait blessé - plus d'une fois - mais rien n'était comparable à tous ces moments de bonheur qu'il lui apportait. Charlie n'avait donc pas eu besoin de tant réfléchir pour accepter sa demande en mariage. Émue et embarrassée, elle laissa le soin à Woody de lui passer la bague au doigt. Elle éprouva la sensation que ce moment était surréaliste. Admirant sa bague de fiançailles, elle afficha ensuite un sourire radieux. Ses joues devinrent écarlates, selon Woody : elle lui allait bien. Vraiment elle était magnifique, il fallait absolument qu'elle le lui dise. Surprise, elle apprit qu'il avait choisi la bague, seul. Personne donc n'avait influencé Woody dans cette décision, songea-t-elle. Cela la rendait encore plus précieuse. Elle est sublime... Merci. lui dit-elle, souriante, heureuse, rayonnante. Pour boucler cette parfaite demande elle lui implora un baiser, ce qu'il fit, un bref mais doux baiser qui concluait cet instant magique. Ils regagnèrent ensuite leurs chaises mais Woody ne lui laissa pas l'occasion de la redescendre de son nuage. Il lui avait dit je t'aime.  Il achevait le coeur de la Cheffe Pâtissière. L'émotion la submergea de nouveau, en proie à de nouvelles larmes. Car ces mots-là, il ne les disait pas à tout va et quand il les lâchait, elle les savait plein de sens. Tu sais que je vais finir par ressembler à rien si tu continues! lui dit-elle en essuyant ses yeux, moitié émue, moitié amusée. Son cœur, comblé, ne faisait que monter dans les montagnes-russes. Ce fut le serveur qui la fit redescendre à la réalité. Charlie eut elle aussi un léger rire. Bien évidement elle n'avait pas pris le temps de choisir sa commande. Eh bien non, oh, euh, pardon, vous nous excusez cinq minutes, s'il-vous-plait? lui demanda Charlie sur un ton d'excuse au serveur. Courtois, ce dernier leur assura revenir plus tard et tourna les talons. Après avoir bu une gorgée de vin, elle jeta un œil sur le menu. Je n'ai plus faim, tu m'as perturbé. lui fit remarquer la blonde, qui se mordit la lèvre inférieure. Je pense je vais prendre une salade... Et le dessert à emporter. rajouta-t-elle d'un air plein de sous-entendus. Réprimant un sourire, elle leva les yeux vers Woody. Son pied toucha le sien sous la table. Depuis tout ce temps, le contact physique de Woody l'avait terriblement manqué. Maintenant qu'ils étaient fiancés, elle comptait bien brûler quelques étapes et commencer la lune de miel.