day to night to morning, keep with me in the moment (céleste)

La clochette sonna à l’avant, pendant qu’Elmo était à l’arrière en train de faire cuire les pâtisseries, parce que oui parfois c’est lui qui risquait de faire brûler le café en entier en s’occupant de la cuisson. C’était juste un petit café local, pas une grosse boulangerie, alors le propriétaire faisait ce qu’il pouvait avec les employés qu’il avait, le pauvre, il avait Elmo et ne savait probablement pas sur quelle base le virer. Le con se pointait toujours avec quelques minutes de retard mais il était quand même toujours fidèle au poste, contrairement à d’autres qui n’enduraient pas plus de deux jours l’air bête des clients. Elmo avait une qualité pour ça : il se foutait carrément qu’on se plaigne des cafés qu’il faisait ou qu’on l’envoie chier. Même, ça le fait toujours un peu sourire, ce qui mettait les clients encore plus en colère parce que le barista était juste arrogant, insolent. Bref, pour ce matin, jusqu’à maintenant tout se passait bien. Il était tout seul avec une des serveuses, parce que les lundis matins étaient généralement tranquilles. Il s’en alla à l’avant, derrière le comptoir, pour accueillir la personne qui venait de rentrer dans le café. Il reconnut rapidement Céleste, une habituée de la place et qui avait en quelque sorte été une mentor pour Bella, à l’époque, lorsqu’elle débutait en droit. Elmo n’avait jamais trop pu faire de commentaires sur Céleste parce que c’aurait été la crise de jalousie direct, mais maintenant que Bella et lui c’était terminé, et qu’elle était long gone à Brisbane aux dernières nouvelles, il n’avait plus besoin de réfréner ses pensées. Céleste était tellement fucking canon. Voilà, c’était dit. Il sortit son sourire de séducteur. « Hey, bon matin. T'es lève-tôt dis donc. » Lâcha-t-il avec entrain, oubliant que techniquement il était fiancé à Vega et qu’ils devaient jouer le jeu devant le monde entier s’il voulait qu’une fois le mariage fait, le département d’immigration croit en leur histoire d’amour bidon. Empêcher Elmo de se mettre en mode séduction, c’était un peu comme empêcher un chien de sentir le cul des autres chiens … Mauvaise comparaison.

Entrant dans le café, la jeune femme est tout de suite accueillie sinon par un barista au moins par l'odeur de pâtisserie émanant de l'arrière boutique, lui mettant l'eau à la bouche de bon matin. Probablement parce qu'elle était partie le ventre vide quelques minutes plus tôt. L'endroit ne payait pas vraiment de mine, bien loin des établissements que ses parents l'avaient habitués à fréquenter mais elle finissait toujours par y revenir. Même si le café n'était pas toujours très bon. Même si les pâtisseries étaient parfois trop cuites. Ça dépendait de qui se tenait derrière le comptoir. Un jeu de roulette russe à chaque fois. Ça faisait presque partie du jeu chaque fois qu'elle entrait un orteil dans la boutique alors que prendre un café dans un établissement ou un autre avant de se rendre au bureau ou au tribunal était une de ses habitudes ancrées dans le temps. Elle avait ses petits coins où elle revenait toujours. Des petits coins qui avaient tous leur particularité. Ici, c'était la commande ratée une fois sur trois. Fallait croire qu'elle était un peu maso, parfois !

”- Bonjour Elmo !” salut-elle comme l'homme se manifeste. "Oui, comme tu peux le voir ! Lutter contre le crime n'attend pas !” plaisante la jeune femme. ”J'ai une audience ce matin, j'aimerais pouvoir relire le dossier une dernière fois avant, c'est pour ça…” explique finalement la blonde, lui adressant un sourire. ”Un café caramel s'il te plaît. Avec beaucoup de caramel. Et de crème fouettée !”

Elle était ce genre de cliente à se pointer dans un café pour demander un thé ou un café noyé dans les sirops et la crème, oui. Sans la moindre honte. Autrement elle ne touchait pas à l'or noir, au grand damne des afficionados de celui-ci.

”- Tu vas bien ?” s'enquit-elle pendant qu'il commence à préparer sa commande.

Elle le connaissait depuis un bout de temps Elmo, maintenant. Pas vraiment pour la café. Elle avait d'ailleurs connu l'endroit après avoir connu le jeune homme, lequel sortait alors à l'époque avec sa plus ou moins filleule d'université pour le programme de parrainage de la fac de droit. Bella. Dont elle n'avait plus de nouvelles depuis un bon bout de temps maintenant que la demoiselle avait quitté la ville.

Si les cafés d’Elmo étaient plutôt bons, on ne pouvait en dire autant des pâtisseries qu’il faisait cuire, souvent trop longtemps, au point de menacer les dents des clients. Sa Nonna ne serait pas très fière de lui, elle qui faisait des cannolis à s’en rouler par terre. Elle ne lui avait pas transmis cet art-là, ou surtout, c’est lui qui n’avait pas voulu apprendre lorsqu’il était adolescent. Le jeune homme, oubliant déjà le four pour lequel il n’avait pas mis de minuterie, déconcentré par la sonnette à l’avant, se rendit au comptoir pour accueillir Céleste, l’une des premières clientes du matin. « Si tu continues à parler comme ça j’vais commencer à t’imaginer dans un costume de superhéroïne ! » Au tribunal le jour, arpentant les rues la nuit. Il se retint de faire un commentaire sur la tendance des costumes hyper moulants et sexy. Ils n’étaient pas encore assez proches pour qu’il risque un commentaire du genre. Elle pourrait très bien lui lancer son café chaud dessus, dès réception. Il pouvait au moins attendre la fin de son quart de travail avant de faire une telle erreur. « Une grosse affaire ? » Demanda Elmo, toujours prêt à entendre des potins sur le crime. Il hocha la tête quand elle lui commanda un café caramel, beaucoup de caramel et beaucoup de crème fouettée. Il continua à discuter avec Céleste tout en débutant la préparation. « Ouais, ça va. La routine. Mon band et moi on se prépare à jouer, pas ce week-end ci, l’autre, pour la soirée de clôture de la fête de la mangue. T’y participes ? » S’intéressa-t-il, n’ayant pas le souvenir de l’avoir croisée chez une autre équipe, mais il y avait tellement de monde, il pouvait aussi juste avoir passé à côté. « Et toi, ça va ? » Demanda-t-il par la suite. Il se retenait toujours, avec Céleste, de demander des nouvelles de Bella. Il se disait qu’elles étaient toujours en contact, que si Bella avaient des interrogations, c’était à sa marraine d’université qu’elle le demanderait. Mais il voulait passer à autre chose et pour ça, il ne fallait pas penser à elle. D’autant plus que maintenant, aux yeux de Bowen, il était techniquement fiancé à Vega.

La jeune femme esquisse un sourire comme son interlocuteur remarque qu’il va finir par l’imaginer en costume de super héroïne, si elle continue de parler ainsi. Ce n’était pas la première fois qu’elle l’entendait. Pas de la bouche d’Elmo, bien sûr, mais de celle de ses clients oui, plus d’une fois. Pour certains, elle transformait leur vie. Elle les sauvait, d’une certaine manière, trouvant une solution à leurs problèmes, réussissant à les défendre malgré l’adversité. Pour certains, elle était un rayon de soleil, une lueur d’espoir, dans une existence assombrie par les affaires judiciaires.

”- Je suis peut-être Diane de Themyscira, va savoir !” lance-t-elle amusée.

Loin d’elle l’idée de prétendre sérieusement être comparable à Wonder Woman. Il y avait des femmes qui travaillaient bien d’avantage, qui avaient de bien plus nombreuses casquettes et qui jonglaient aisément dans tout ça, tout en étant des mères de familles exemplaires. Elle n’en était pas là. Loin de là. En revanche, elle avait parfois des dossiers assez lourds à gérer. De grosses affaires sur lesquelles plancher et qui nécessitaient qu’elle fasse des miracles.

”- Oui.” acquiesce-t-elle sans s’épandre sur la question.

Elle n’a pas le droit de parler de ses affaires, secret professionnel. Elle fait toujours bien attention avec ça et préfère donc questionner le jeune homme sur sa propre vie, l’occasion d’apprendre que ce dernier prépare un concert pour la fête de la mangue, laquelle sera malheureusement bientôt terminée. Elle avait l’impression de ne pas avoir vu passer cette édition. Mais c’était toujours un peu comme ça, finalement. La fête de la mangue passait toujours beaucoup trop vite. La preuve que c'était vraiment un événement à ne pas manquer et des plus agréables.

”- Evidemment ! Je ne vais quand-même pas manquer l’évènement de l’année, je participe à la fête depuis des années !” précise la demoiselle. ”T’étais dans une équipe toi ?”

Lorsqu’Elmo entendit le nom de Diane de Themyscira, ce qu’il n’aurait d’ailleurs pas été capable de répéter par lui-même, il fronça les sourcils. « Uh ? Qui ? » Demanda le barista d’un air un peu confus. Bien sûr que non, Elmo ne connaissait pas le véritable nom de Wonder Woman. Il avait vu les films mais il était distrait. Pourtant, l’italien avait une sacrée bibliothèque de bandes dessinées, à la maison de ses parents en Italie, alors sans doute que ce nom-là ne lui était pas inconnu. Il avait une mémoire de merde et ne se souvenait pas d’un livre après l’avoir lu, Elmo, alors sûrement que son cerveau s’était dit que c’était suffisant de se rappeler de Wonder Woman plutôt que du nom derrière. Intéressé par les potins et/ou affaires criminelles qui pouvaient se passer au Queensland, le barista avait innocemment demandé si c’était une grosse affaire sur laquelle Céleste bossait. Elle répondit juste que oui, et les épaules de ‘Mo s’affaissèrent légèrement. Déception. « Bon, bon, j’vois que je n’aurai pas plus d’infos que ça. » Il rit, continuant de préparer la commande de la belle blonde. Extra caramel, qu’elle avait dit, alors il s’en donna à cœur joie tout en racontant que The Monkey Squad allait performer le soir de la clôture de la Fête de la mangue, ce qui s’en venait à grands pas, après près de deux mois de festivités. « Vraiment ? J’admets que c’est la première fois que je me lançais, mais pas la dernière. » Bon, à moins que son plan avec Vega ne fonctionne pas et qu’on le foute dans le premier avion pour l’Italie dans quelques mois, mais bon. « Je suis chez les meilleurs, of course. Les pamplemousses. » Lâcha-t-il de son air arrogant, fendant et fier. « Et toi ? M’dis pas que t’étais une mandarine. » Leurs ennemis jurés ! Il compléta finalement la commande de céleste avec un beau tourbillon de crème fouettée et un coulis de caramel en zigzag pour couronner le tout.

Qui ? La demoiselle lève un sourcil face à la question de son interlocuteur. Est-ce que tous les hommes ne savaient pas parfaitement qui était Diane ? N’était-ce pas la super-héroïne à l’origine de tous leurs fantasmes d’adolescents ? Elle avait pensé que si. Mais peut-être qu’elle se plantait totalement. Que savait-elle des hommes, après tout ? Pas grand chose. Trop peu de choses. A peu près autant de choses qu’Elmo en savait sur l’affaire que la demoiselle avait à défendre et sur laquelle il n’apprendrait rien de plus, comme il le remarque justement. Parce qu’elle ne pouvait pas se le permettre. Parce qu’elle n’en avait pas le droit. Parce que le secret professionnel était essentiel dans son corps de métier.

”- Je ne peux pas en dire plus. Le secret professionnel tout ça tout ça. Je peux juste dire que je travaille sur quelque chose de prenant en ce moment.” affirme la demoiselle en lui adressant un sourire.

Bien sûr, elle comprend que pour ses proches, cela soit parfois un peu frustrant de ne pas pouvoir entendre la jeune femme parler des affaires dont elle s’occupe. Bien sûr, elle comprend que leur curiosité puisse être piquée au vif par ses affaires. Mais évidemment, elle ne prendra pas le risque d’aller à l’encontre de toutes ses valeurs. Pas le risque de briser la confiance de ses clients. De les trahir. Céleste n’est pas ainsi. Loin de là.

”- La première !?” s’étonne la jolie blonde comme son interlocuteur affirme n’avoir jamais participé à la fête de la mangue avant cette année.

Pamplemousse. La demoiselle dessine une petite moue sur son visage. Ils étaient bel et bien rivaux. Mais penser qu’elle était une pamplemousse ? Elle arbore un petit air de dégoût, pour rire. Les mandarines, c’est l’ennemi aussi. Elle, elle était chez les pommes. Le fruit le plus doux, le plus répandu, le plus apprécié par excellence.

”- Tu ne vois pas à mes jolies joues roses que je suis une jolie pomme bien mûre ?”

C’est probablement pour ça, aussi, qu’Elmo n’aurait pas pu faire un job requérant un niveau de professionnalisme. Il avait failli être infirmier, il ne lui en manquait pas tant que ça, mais s’il s’était rendu jusqu'au bout de ses études c’était un tout autre défi qui l’aurait attendu : la confidentialité. Dans une ville comme Bowen où pas mal de gens se connaissaient, Elmo serait tombé sur des patients pour des raisons x ou y, et il aurait été beaucoup trop difficile pour lui de garder le secret professionnel. Telle personne a une maladie rare ! Telle autre personne a contracté une infection transmise sexuellement ! La copine de untel est enceinte ! Elmo n’avait pas réfléchi à ça en se lançant, mais définitivement, il était mieux comme barista, et les potins qu’il entendait par-ci et par-là, il pouvait les répéter à n’importe qui. « J’imagine qu’on en saura davantage si c’est médiatisé. Je le saurai en même temps que tout le monde, pas de scoop, pas de privilège … C’est décevant. » Il esquissa un sourire. Évidemment qu’il comprenait les raisons qui empêchaient Céleste de lui en dire davantage. Si lui aurait eu du mal à être dans ce rôle-là, il n’allait pas insister en lui tirant les vers du nez. À la place, ils discutèrent de la Fête de la mangue, un sujet beaucoup plus léger et qui n’aurait aucune incidence sur la réputation de la belle avocate. « Eh ouais, je sais, ça surprend vu comment j’aime les fêtes, les compétitions, tout ça … J’sais pas pourquoi je m’étais jamais lancé. Je pensais que c’était un peu ringard mais finalement pas du tout. » Elmo s’éclatait et il était prêt à tout pour gagner. Pas pour rien que son équipe était actuellement en première place, lui et quelques autres coéquipiers, dont Vega, jouaient comme si leur vie en dépendait. Céleste afficha une moue de dégoût en apprenant que le barista était un pamplemousse. Elle, elle était une pomme. Elmo haussa les épaules. « Aucun danger, alors, j’peux fraterniser avec toi autant que j’veux, vous êtes l’ennemi mais … pas vraiment non plus. » Façon de dire que jamais son équipe ne pourrait rattraper la sienne. Il lui fit un sourire un peu arrogant, c’était son côté compétitif qui ressortait. « Et  voilà ! » Dit-il ensuite en tendant à Céleste son café pimpé bien comme il faut.

Quand il est question de respecter le secret professionnel auquel ses clients, comme les opposants de ces derniers, ont droit, Céleste est toujours au rendez-vous. Ce n’est pas son genre de balancer les détails croustillants d’une affaire en dehors des murs du tribunal et ce d’autant plus que cela peut jouer en sa défaveur, tant au niveau du procès que de sa réputation auprès des clients potentiels. Elle avait, de toute façon, prononcé un serment semblable à celui d'hippocrate pour les médecins, qui lui interdisait de violer ces règles élémentaires du droit. Et une conscience professionnelle qui aurait joué les garde-fous s’il l’avait fallu. Mais elle n’avait pas ce genre de problèmes, puisqu’elle n’ouvrait pas la bouche. Et comme Esmo suppose qu’ils en entendront peut-être parler, elle acquiesce d’un mouvement de tête.

”- Peut-être, oui. Je ferais un coucou à la caméra juste pour mes fans, t’en fais pas !” annonce la jeune femme en riant, plaisantant clairement.

Elle n’était pas le genre à faire attention à la caméra. Elle se concentrait surtout sur ses affaires, c’était là le principal. Ce pour quoi elle était payée. Le reste n’était que des conneries. Elle n’était jamais dans une salle d’audience pour faire la belle devant des téléspectateurs. Ce n’était pas son délire du tout. Elle avait des valeurs, des choses à défendre. La vie de personnes entre ses mains. Elle ne faisait pas n’importe quoi avec ça.

”- Au moins tu sais chez qui te pointer si tu as besoin d’un avocat un jour ! Même si je ne te le souhaite pas.”

Evidemment, la jeune femme préfère ne pas avoir à défendre ses proches ou des connaissances dans un tribunal. Mieux valait l’éviter, ce n’était jamais bon signe. Davantage celui de quelques ennuis, quels qu’ils soient. Naturellement, elle n’en souhaitait à aucune des personnes qui comptent pour elle. Jamais de la vie. Elle préférait nettement qu’ils s’amusent, comme avec la fête de la mangue, à laquelle Esmo participe lui aussi, non sans se moquer de la jeune femme ou plutôt de son équipe, à demi-mots.

”- Mais !!! Quelle méchanceté !!!” lance la jeune femme en faisant mine de bouder, récupérant sa boisson. ”C’est mon boulot de déceler les sous-entendus, t’es au courant ?” remarque-t-elle.

En vrai, Céleste avait quand même la gueule pour passer à la télévision. Si elle était un jour avocate d’un très grand procès médiatisé, Elmo ne doutait pas qu’elle serait la prochaine Camille Vasquez. Il rit donc en l’imaginant faire un coucou à la caméra, parce que même si elle était probablement très photogénique, cela manquerait sans doute de professionnalisme d’envoyer la main à ses fans, comme elle le disait. Et de ce qu’Elmo pouvait conclure de leur échange, Céleste l’était très, professionnelle. « Pour tes fans, hein ? Et tu me comptes parmi ceux-là ? » Demanda-t-il avec un sourire. Après tout, il s’intéressait toujours à son job avec, peut-être, une petite pointe de charme dans ses regards et dans ses sourires. Depuis que Bella avait quitté Bowen seulement, cela dit. Avant ça, même s’il trouvait la mentor de sa copine franchement canon, jamais il n’aurait osé lui faire les yeux doux devant la costaricaine. Elle savait sortir les griffes. « Je le souhaite pas non plus, mais sait-on jamais … Parfois quand j’bois un peu trop, apparemment que je peux me retrouver dans des situations débiles. Ça sera une bonne défense de dire que je m’en souviens pas ? » Plaisanta-t-il. Il était un peu con, Elmo, mais pas à ce point-là. Heureusement il avait de bons amis pour le surveiller un peu, quand il dépassait les bornes. Il était pas mal le pire de sa bande, alors il pouvait faire confiance aux autres. Généralement. Ils parlèrent ensuite de la Fête de la mangue, Elmo étant dans l’équipe qui clairement remporterait le trophée de la mangue, Céleste étant dans l’équipe qui … meh. S’en sortait pas trop mal. « Oh, je tenais pas tellement à te cacher ce que j’en pense ! » Lâcha-t-il avec un grand sourire. Il était compétitif et arrogant, Elmo, ce n’était pas beau à voir dans ce festival fruité. « Tu restes le boire ici ou tu pars bosser tout de suite ? » Demanda le barista, qui n’aurait pas été contre un peu de compagnie pour quelques minutes encore.

Au cours d’une carrière, elle le sait, il peut arriver qu’un avocat soit soudainement sous les feux de la rampe. Ils en avaient eu un exemple flagrant avec un procès très médiatisé dernièrement, au cours duquel l’avocate, Camille Vasquez, était devenue la coqueluche de tout un pays et peut-être même au-delà, pour avoir fait démonstration de son professionnalisme et de son talent au cours de l’affaire qui l’avait occupée. C’était le genre de talent que tout avocat espérait un jour avoir. Le genre de maîtrise que tous espèrent détenir. Si la demoiselle est encore jeune et novice dans cette profession, elle espère bien avoir dans quelque temps la même capacité devant les tribunaux. Quand elle aurait davantage d’expérience, probablement. A la fin, tout ça devient un jeu, c’est ce que certains maîtres de stage lui avaient laissé entendre.

”- Parfaitement ! Je te signerai un autographe lorsque ce sera le moment, ne t’en fais pas !” plaisante Céleste pour son interlocuteur.

Pour dire le vrai, elle n’espère pas spécialement passer à la télévision, ce n’est pas ce qui l’attire, pas ce qui la fait vibrer. Si elle avait voulu un monde de paillettes et la célébrité, elle aurait choisi une toute autre voix. Elle aurait choisi un métier plus artistique. Être regardée par des centaines de milliers de téléspectateurs, épiée au moindre faits et gestes, ce n’était pas vraiment ce qui lui plaisait. Pas plus que de voir sa vie privée étalée et déformée dans les journaux peoples comme avait pu le voir Camille Vasquez, tandis que la populace lui avait prêté une romance avec son client.

”- Je pourrai toujours essayer de plaider l’irresponsabilité des actes car sous emprise mais…”

Pas besoin d’achever sa phrase, cela ne suffit pas toujours. Tout dépend de la connerie qu’il a faite. Ceci dit, ce n’était probablement pas le genre de choses qu’elle pourrait défendre pour lui. Parce qu’elle s’en prenait, elle, aux états, aux multinationales, à tous des gros poissons qui ne cherchent qu’à dévorer les plus petits pour être toujours plus gros, toujours plus imposants.

”- Je peux envisager de le boire ici, si le petit pamplemousse arrête d’se la raconter avec ses points. Sinon j’en fais du jus !” prévient-elle en riant.

Elmo rigola à son tour à propos de son autographe, avant de secouer la tête en levant l’index. « Mais non, en fait c’est maintenant qu’il faut que tu me le signes, cet autographe ! Je pourrai dire que j’aurai été le premier à savoir jusqu’où t’irait. » Il esquissa un sourire, un peu séducteur admettons-le. Il n’avait jamais vu Céleste à l’œuvre alors comment pouvait-il connaître l’éventail de ses compétences ? Si ça se trouve elle n’était pas top, comme avocate, mais il en doutait quand même fortement. Il se souvenait que Bella avait vantée sa mentor, à l’époque, parce qu’elle connaissait sur le bout de ses doigts des cas ayant fait jurisprudence. Elmo n’en avait pas grand-chose à faire de Mabo v. Queensland mais apparemment ça avait été un game changer pour … un truc dont il ne se souvenait pas – le truc étant les Premières nations australiennes, ce qu’il n’aurait pas dû oublier étant donné que cette décision significative leur avait enfin reconnu leurs droits et leur connexion avec la terre du Queensland, mais bon Elmo n’avait pas vraiment de mémoire, même pas pour ses propres études en soins infirmiers alors il ne fallait pas s’attendre à ce qu’il se souvienne des leçons de Bella. Il préférait blaguer sur d’éventuels crimes qu’il pourrait commettre sous l’effet de l’alcool, et possiblement de la drogue aussi vu qu’il n’était pas trop fréquentable dernièrement, l’italien. « Mais j’ai pas la tête d’un gars à qui on laisse le bénéfice du doute, j’ai compris. » Il hocha la tête avec un rire. Il avait la tête d’un petit con alors s’il y avait un jury ou d’quoi, c’était assurément les barreaux qui l’attendaient. On serait sans pitié pour son immaturité. Elmo, lui, était sans pitié pour l’équipe que représentait Céleste à la Fête de la mangue ! En même temps, c’était Pamplemousse ou rien du tout. Sa réplique le fit toutefois pouffer de rire, elle avait de la répartie, on ne pouvait pas lui enlever ça. « Ok, j’me calme, mais c’est juste pour pouvoir t’avoir avec moi pour un p’tit moment encore ! Qu’est-ce que je ferais pas pour ta compagnie … » Ouais, là, il n’y avait aucun doute : Bella n’était plus du tout dans sa vie, pour qu’il se permette de telles répliques.