My shadow's the only one that walks beside me + Tommy

A l'heure indécente où les derniers clients rentraient chez eux après une soirée animée, le ventre bien rempli et l'esprit peut-être embrumé par les vapeurs d'alcool, le dernier digestif n'étant pas encore très loin, il y avait ceux qui fermaient les portes, mais dont la journée de travail n'était pas encore terminé, le plongeur qui terminait sa vaisselle, le cuisinier qui astiquait ses fourneaux, la serveuse qui remettait sa salle en place, le barman qui essuyait les verres,... Quand les commerces fermaient ça ne voulait pas dire qu'il n'y avait plus personne. Dans les rues de Bowen c'était tout un tas de fourmis qui œuvraient dans l'ombre, pour étirer la nuit. Il y avait de l'autre côté le boulanger qui ouvrait son fournil et commençait sa journée, chacun vivait à son rythme. Marcus avait eu une soirée un peu folle, deux gars avaient improvisé un concert dans son bar, l'ambiance avait battu son plein jusqu'à tard. Il adorait ce genre de nuit où son antre vibrait au rythme des conversations animées et des cordes qu'on pinçait sur des guitares qui ne demandaient que ça. Cette nuit il se coucherait heureux, fier de faire ce métier et reconnaissant d'avoir des clients qui faisaient vivre son vieux pub pour en faire un lieu si chaleureux. Il ne comptait pas s'attarder, à bientôt trois heure du matin il avait envie d'une nuit de sommeil, sans excès pour une fois. Il entendit la porte de derrière s'ouvrir, il pensait que c'était Leo, sa serveuse, qui avait encore oublié les clés de chez elle, il commençait à les chercher du regard sur le comptoir, mais il ne vit rien. Quand il se retourna il constata que ce n'était en rien la jeune blonde, mais un autre visage familier. Tommy ! Il est tard, qu'est ce que tu fais encore debout ? On t'a fait faire des heures sup' au restaurant ? Son jeune cousin était, tout comme lui, un oiseau de nuit, alors sa présence ne le surprenait pas tant que ça. Il le laissa s'avancer vers lui, s'installer de l'autre côté du bar, tandis que lui sortait déjà deux verres qu'il posa devant eux et une bonne bouteille de rhum, pas celui qu'il servait aux clients lambdas. Finalement, il n'allait pas se coucher si tôt que ça, ni si sobre.

@Tommy O'Brian

Une fois n’est pas coutume, un seul shooter longea la gorge de Tommy avant qu’il ne déguerpisse du Wojna. Le brun savait pertinemment qu’un verre de plus et il aurait fini la soirée avec eux. Tous les soirs, c’était la même chanson. Une bouteille de rhum, puis deux, parfois trois… Et les voilà tous couchés à pas d’heure. Ce rythme de vie convenait bien à l’ancien père de famille. Après tout, toutes ces soirées partagées à rire autour d’une ou deux bouteilles signifiaient moins de nuit à cogiter, seul au fond de son lit. Pourtant, cette fois, il avait d'autres plans en tête. À commencer par rentrer chez lui pour récupérer sa petite boule de poil, Socks. Un arrêt à l’appartement expéditif. Juste le temps de faire deux/trois grattouilles et les voilà ressortis. Avec lui, Tommy n’avait pas besoin de dire grand-chose. Le golden était le premier à se faufiler par la porte, connaissant parfaitement le chemin qu’ils allaient prendre. Leurs balades nocturnes se terminaient généralement toutes au même endroit. L’horaire était parfait pour tous les deux. Peu de voitures, peu de bruit, un climat agréable et les quelques passants présents se préoccupaient plus de leur démarche que du chien sans laisse. En voyant l’animal l’attendre devant la porte de service du Elm, impossible pour Tommy de retenir son sourire. Sa main se posa sur la tête du chien juste avant de pousser la porte. Étonnamment, le calme du bar fermé provoquait en lui une sensation réconfortante. Il gratifia son cousin d’un grand sourire et d’une petite tape dans le dos en passant près de lui. “Salut cousin ! Je promenais juste la bête. Il insiste pour qu’on vienne là à chaque fois, j’y peu rien” Dit-il en prenant place face à Marcus. D’un mouvement de menton, il désignait son chien un peu plus loin, déjà en train de renifler tous les coins de bar. Pas de doute qu’il reviendrait aux pieds de son maître une fois l’inspection finie… À moins de croiser le chat. Pour le moment, il portait plus son attention sur son cousin. “Comment ça va toi ? Il s’est passé des trucs intéressants ce soir ? ” En général, les anecdotes de bar ne se font pas rares. Malheureusement pour Tommy, soit il se retrouve impliqué, soit il n’en est pas témoin, toujours caché dans sa cuisine. "Tiens, je t'ai rapporté ça si jamais t'as une petite faim" Il posa sur le comptoir un petit sachet marqué Wojna. Quelques tapas qu'ils avaient préparées en plus pour grignoter en rentrant.

Ils avaient leurs habitudes, on aurait presque dit un vieux couple. Mais c'était mieux que ça, ils étaient cette famille unie si importante aux yeux du barman. Il n'était pas rare que Tommy termine sa soirée accoudé à ce bar, à refaire le monde avec son cousin, à une époque il venait bien moins souvent, chacun avait sa vie, plus ou moins sa famille, surtout pour Tom, mais depuis qu'ils étaient seuls tous les deux, ces conversations de comptoir leur permettaient de ne pas être seuls enfermés entre les murs de leurs logements à broyer du noir. Evidemment ils ne le disaient pas vraiment comme ça, ils ne l'avouaient pas tellement, mais c'était comme un accord tacite, ils se soutenaient de cette façon. Le chien fut le premier à faire son entrée dans l'arrière boutique et il vint rapidement quémander des caresses à Marcus, ce dernier ne se faisait pas prier pour les lui donner, cet animal était d'une gentillesse folle, il était bien impossible de lui refuser quoi que ce soit. Il sait où trouver de l'affection ce gros pépère. Il a de la chance, Newton vient de sortir, la voie est libre. Et, comme s'il avait compris, l'animal alla faire e tour du propriétaire comme s'il était chez lui, sans se soucier de la présence du chat. Entre les deux ce n'était pas vraiment l'amour fou, Newton gardait jalousement son bar, son territoire. La routine ! J'ai dû virer deux gamins qui se prenaient la tête pour une fille. Deux autres gars qui sont arrivés avec leurs guitares et qui ont improvisé un petit bœuf, ils ont mis une sacrée ambiance ! Marc adorait quand l'imprévue s'invitait dans son pub, c'était exactement comme ça qu'il l'avait imaginé quand il en avait repris les rênes. Il n'avait pas mangé, alors il accueillait les tapas avec plaisir, il les disposa face à eux, avec leurs verres de rhum, ils avaient de quoi être les rois du monde. Merci. Tant que c'est toi qui les cuisines et pas Percy ! Je ne sais pas comment tu fais pour travailler avec lui. Tommy connaissait la mésentente entre les deux hommes, ce n'était pas nouveau. C'était même presque risible puisque ça ne découlait pas de quelque chose de sérieux, juste un vieille animosité qu'ils entretenaient au fil du temps. Et toi, donc, quelles sont les nouvelles ?

@Tommy O'Brian

L’ambiance du pub, surtout depuis qu’il appartenait à Marcus, avait quelque chose de réconfortant. Ils s’y sentaient vraiment comme à la maison, que ce soit Tommy ou Socks. Le chien était presque le plus à l’aise de tous. Comme une danse bien rythmée, ils avaient tous deux trouvé leur place dans le bar, prêt pour y passer un certain temps. “C’est bon pour le business ça ! Léo était avec toi ou t’étais tout seul ce soir ?” Tommy s’en serait un peu voulu de lui enlever des heures de sommeil en moins s’il avait été tout seul pour gérer une soirée mouvementée. Au moins, rapporter un peu de nourriture en guise d’offrande aiderait à faire passer tout ça. La remarque de son cousin là-dessus lui décrocha un petit rire. Il avait tendance à oublier le passif entre son cousin et son chef. “Oh, tu sais bien, je suis tranquille dans la cuisine, j'vois pas grand monde". Mis à part les serveurs pour quelques secondes et Oskàr en fin de soirée, la cuisine n’était pas bien remplie. On est loin des cuisines des grands restaurants, remplies de petites mains aux aguets. Alors autant dire que son boss, il ne le voyait pas souvent. “J’ai déjà de la chance d’avoir trouvé un boulot, je ne vais pas être trop regardant sur le personnel” Il laissa s’échapper un petit rire. De base, il aurait préféré ne pas se retrouver dans cette situation, coincé entre son cousin et son chef. Seulement, sans réelle formation en cuisine, il était déjà bien content d’avoir été pris quelque part. Sur ces mots, Tommy leva son verre pour trinquer et apporta son verre de rhum jusqu’à ses lèvres. Un petit soupir de satisfaction s’échappa de ses lèvres. “Ben écoute… La routine… Je m’amuse comme un petit fou” Ses épaules se levaient nonchalamment accompagnées d’un demi-sourire. Incapable de se poser, toujours à droite et à gauche pour s’occuper, ce rythme de vie commençait à le fatiguer. Avec Marcus, il n'essaye même pas de le cacher. De toute façon, les cernes sur son visage devaient parler pour lui. “En vrai, j’pense que je vais prendre des vacances dans pas longtemps. Histoire de changer un peu d’air” Voilà quelques années, maintenant, qu’il ne s’était pas accordé ce genre de petit plaisir. Peut-être qu’il pousserait même jusqu'en Irlande. Faire revivre la nostalgie de ses vacances d’enfant.

Le barman savait que Tommy avait besoin de ces rencontres nocturnes. En vérité ils en avaient besoin tous les deux. Ils menaient des vies à cent à l'heure, des vies qui n'avaient pas toujours été belles. Au moins ils savaient l'un comme l'autre que le Elm c'était un endroit neutre, ici ils pouvaient laisser leurs peurs et leurs problèmes à l'entrée, boire un verre, ou trop de verres, déballer ce qu'ils avaient à raconter, c'était leur moment. Comme si les confidences étaient plus simples une fois la nuit bien installée. Leo n'est pas venue, non. C'était de plus en plus fréquent pour être honnête, les absences de sa serveuse, Marcus avait comme le sentiment qu'elle préparait doucement son départ, il avait toujours su qu'elle ne resterait pas, son avenir n'était pas à servir des bières aux habitués du Elm, mais ça lui foutait la trouille de savoir qu'un jour il ferait sans elle, ils avaient réussi à s'apprivoiser tous les deux. Pour autant il n'y avait pas de raison de s'inquiéter de l'avenir du vieux pub, il tournerait toujours, Marcus ferait plus d'heures, ou bien il recruterait quelqu'un d'autre, la vie devrait continuer de toute façon. C'est sûr que t'es bien au chaud derrière tes fourneaux, personne ne vient t'embêter. Marcus n'avait rien contre le fait que son cousin travaille à la concurrence, même chez Percy, il avait même le droit de l'apprécier. Et il savait que c'était le cas, tout le monde ventait la bonne entente du personnel chez Wojna's. Que le britannique et lui ne s'entendent pas c'était un autre problème, qui ne concernait pas Tommy. Ca va, il y a pire comme ambiance, à ce qu'on entend ! Mais au fond il avait raison, le cuisinier, le plus important c'était qu'il ait du travail, un rythme plutôt stable, c'était ce dont il avait besoin pour avancer. Comme un p'tit fou ? Ou comme un puit sans fond ? T'as une sale tête mon grand. Ils étaient toujours honnêtes l'un envers l'autre, c'était un accord tacite entre eux, pas de secrets. Marcus était au courant du train de vie de son cousin et parfois ça l'inquiétait, pourtant il n'avait pas un meilleur rythme que lui, au contraire. T'as raison. Tu penses à quelle destination ? Au fond il avait sa petite idée d'où le jeune O'Brian irait. Pour Marcus c'était le bout du monde, l'Europe, l'Irlande.

Tommy avait toujours été admiratif du travail et de l’implication de son cousin dans le Elm. Cela dit, il était aussi content de le savoir accompagné dans cette aventure. Tenir un bar tout seul pouvait être éreintant. C’est pourquoi il grimaça en entendant que Léo n’avait pas été là de la soirée. “Tu comptes prendre des extras pour te décharger un peu ?”. Si son profil avait collé au poste, Tommy se serait sûrement proposé, mais ce n’est pas dans la cuisine qu’il devait en avoir le plus besoin. Être derrière le comptoir, c'était un tout autre job que le cuistot imaginait beaucoup plus éreintant, d’où son inquiétude pour son cousin. Ce dernier avait bien raison là-dessus, Tommy était bien au chaud ses fourneaux. Presque comme une cachette. L’esprit tranquille et focalisé sur le travail. Quelques heures de tranquillité avant la fin du service. “Oui, l’équipe s’entend très bien. On est suffisamment dans l’équipe pour pouvoir éviter ceux qu’on peut pas voir” rigola-t-il. Personnellement, il n’avait pas encore de problème avec qui que ce soit, mais il pouvait décerner des tensions entre quelques membres de l’équipe. Rien de grave au point d’impacter l’équipe entière bien heureusement. Un résultat qui arrangeait bien les affaires de Tommy, peu décidé à rentrer chez lui après leurs services. Il rigola à la remarque de son cousin là-dessus. C’était bien le seul à pouvoir lui faire ce genre de remarque sans qu’il ne se braque. “Tu peux parler ouais… Au moins, je suis encore dans la fleur de l'âge". Tommy accompagna sa remarque d’un petit clin d'œil. Leur différence d'âge n’était pas bien grande mais bien assez suffisante pour qu’il en joue. "Surement l’Irlande, peut-être la Nouvelle-Zélande. J’aimerais bien pouvoir embarquer cette terreur avec moi”. En l’évoquant, Tommy se pencha pour caresser son chien, venu s’asseoir à ses pieds. Le lien entre le chien et son maître n’avait jamais été aussi fort. Presque 10 ans de vie commune et ces dernières années, il avait pris une place encore plus importante, toujours là pour réconforter son maître. “Joins-toi à nous si tu veux !” Proposa-t-il en relevant la tête vers son cousin. Avec tout le travail qu’il avait, lui aussi en aurait sûrement besoin.

Il ne voulait pas y penser, à l'après Leo, à ce qu'il ferait sans elle. Il se trouvait bien embêté, les jours où elle lui faisait faux bond, il ne fallait pas mentir, il avait bien pris le rythme de travailler avec elle, de se décharger en sa présence. Quand elle était là il pouvait aisément passer dans son bureau, régler des papiers, mettre sa compta en ordre, prendre rendez-vous avec des fournisseurs, ou autre. Sans elle c'était des heures en plus et l'obligation de fermer son bar quelques heures dans la semaine. Mais il était incapable de lui en vouloir, il préférait s'inquiéter pour elle plutôt que de la culpabiliser. Après tout elle avait débarqué dans son bar un jour de pluie telle un petit chien mouillé et paumé. Elle cherchait du travail, il ne cherchait personne et pourtant il lui avait offert un poste. La jeune femme avait été son évidence et il ne voyait personne pour la remplacer. Alors il verrait, il faisait un peu au jour le jour, comme il avait toujours fait. J'en sais rien, on verra. Il restait évasif, il savait que ça ne plaisait pas à Tommy, mais ça ne servait à rien de lui servir des salades, puisqu'il ne savait réellement pas ce qu'il allait faire. Toi, de toute façon tu t'entends bien avec tout le monde. Tommy et Marcus étaient un peu pareil sur ce point, ils étaient assez faciles, ils s'adaptaient, du moment qu'on ne leur cherchait pas d'emmerdes. La brouille entre Marcus et Percy, c'était presque l'exception qui confirmait la règle. Il pouffa de rire avant de porter son verre à ses lèvres. Ma presque quarantaine ne m'effraie pas ! Et c'était vrai, il avançait vers les quarante ans mais il se foutait de l'âge qu'il avait. Dans sa tête il avait toujours à peu près vingt cinq ans, il était toujours prêt à s'amuser, à boire plus que de raison, à passer des nuits blanches et à refaire le monde. Marcus ne se voyait pas vieillir, peut-être parce que ses journées étaient un peut toujours semblables. La seule chose qui changeait c'est que dix ans en arrière il avait Penelope et qu'ils étaient heureux. Peut-être que si elle était toujours sa femme aujourd'hui ils auraient des gamins, une vie chronométrée, quelques rides et quelques cheveux blancs en plus. Peut-être qu'il serait juste plus heureux surtout. S'il le faut je le garderais, ton poilu, il sera comme un roi avec moi ! Tommy savait qu'il pouvait laisser Socks à son cousin les yeux fermés, Marc se ferait un plaisir de le garder, même si Newton risquait de faire la gueule, mais le chat passait le plus clair de son temps dehors de toute façon. Il sourit en baissant les yeux. Ma réponse est toujours la même. Une prochaine fois peut-être. Marcus ne voyageait jamais, il n'avait quasiment jamais quitté Bowen, seulement pour ses études, mais il revenait tous les week-ends et pour un séjour en Irlande, avec ses cousins, quand il était gamin. Mais il n'aimait pas l'avion, il n'aimait pas quitte sa ville et encore plus depuis qu'il avait le Elm, il avait besoin de ses repères.

La grimace sur le visage de l’ancien pompier était inévitable alors que son cousin restait évasif sur la possibilité d’embaucher de l’aide. C’était dans sa nature de s’inquiéter pour sa famille, impossible d’en faire autrement. Une inquiétude qu’il garderait silencieuse, estimant sa moue suffisante. Après tout, il était assez grand pour faire ses propres choix, Tommy n’irait jamais à l’encontre de ça. “Avec tout le monde, c’est un bien grand mot quand même” lança-t-il en riant légèrement. Le conflit pourrait vite arriver en fonction des valeurs des personnes en face de lui. Plus les années passaient, moins il se prenait la tête avec ce genre de personne bien que ses nouvelles habitudes alcoolisées encouragent plus la tempête que le calme. La phrase de Marcus sur son âge, enclencha un demi-sourire sur le visage de l'ancien pompier. Lui qui n’avait jamais redouté de vieillir avant l’accident. Avant que son chemin ne soit perturbé, avant que cette vie qui lui avait pris des années ne lui soit arrachée. Le brun se forçait toujours à ne pas s’engouffrer dans ce genre de pensée. L’alcool comme porte de sortie et c’est ce qu’il fit en accompagnant son verre jusqu’à ses lèvres, assez vite lancé sur le sujet des vacances. Alors que proposait de garder le chien, Tommy souris. Il le savait entre de bonnes mains avec son cousin. D’ailleurs, il baissait la tête pour regarder le golden. “Tu veux faire une petite semaine de vacances chez tonton ?”Bien évidemment, en bon maître gaga, il avait pris une voix un peu plus aiguë. En guise de réponse, une tête penchée sur le côté, ce qui valut un petit rire à Tommy. Juste après, il se reconcentrait sur son cousin. “C’est gentil de ta part, on verra au moment venu alors”. L’idée d’un petit voyage entre cousins aurait ravi l’ancien pompier. S’il devait partir avec quelqu’un, Marcus serait toujours en haut de la liste. Leurs caractères similaires en feraient certainement un bon duo de vacanciers. Mais pour ça, il faudrait déjà que Marcus accepte un jour les propositions de Tommy. “Promets-moi au moins de prendre des petits jours de congés, même si c’est pour rester dans le coin” dit-il en affichant un petit regard mi-inquisiteur, mi amusé, se doutant déjà de la réponse de son cousin.

Il était évident que le Elm et le rythme de travail de Marcus était un vrai sujet pour Tommy. Marcus était bien conscient que son cousin s'inquiétait beaucoup pour lui et qu'il lui causait quelques frayeurs de temps en temps. Seulement c'était plus ou moins un non sujet pour lui, dans la mesure où il avait toujours pensé qu'en tant qu'ainé de la famille, c'était son devoir de s'inquiéter et de faire attention à ses cousins plutôt que l'inverse. Ainsi, il balayait toujours les inquiétudes de Tommy et des autres du revers de la main et un air détaché. Il avait déjà était un poids pour leur granny, il n'en serait pas un pour les autres. Donc il fit comme s'il n'avait pas vu les sourcils froncés du jeune cuisinier et changea de sujet. On passa rapidement sur le temps qui passait et les années qui s'égrainaient, ça aussi, c'était un non sujet, pour Tommy c'était douloureux de penser au reste de sa vie durant laquelle il ne verrait plus sa petite fille grandir et ça, c'était certainement la pire des douleurs. Marcus sourit quand il l'entendit prendre cette petite voix, ainsi que faire cette petite moue caractéristique des personnes amoureuses des animaux, ou du moins de leur animal. Lui il ne prenait pas souvent de petite voix aigue, simplement parce que Newton était certes attaché à lui, mais plus à son sachet de croquettes, en bon chat ingrat. Il dodelina de la tête en regardant l'animal faire des yeux de chien battu à son maître. Tu dis plus ça quand il n'y a que toi et moi. T'es pire que le chat en fait, aucune reconnaissance. Evidemment il plaisantait, il le prendrait quand Tommy voudrait, c'était toujours un plaisir de recevoir Socks. Il grimaça à l'attention de son cousin. On verra, quand la saison se calmera. Qui sait, si Penny venait à lui proposer une escapade, n'importe où, il serait bien incapable de refuser. Mais son père était malade et puis leur situation était plus que particulière, mariés mais pas ensemble, attirés par l'autre mais n'osant pas, ils se tournaient autour depuis des mois sans être vraiment sûr de ce qu'ils voulaient réellement. Dans de telles circonstances, il n'était pas prêt de quitter son bon vieux bar.

L’interaction entre Marcus et Socks décrocha un petit rire à Tommy. Le brun savait très bien que s’il venait à partir, ce regard minaudeur que lui adressait son chien ne serait pas long à être tourné vers Marcus. Le golden avait beau être attaché à son maître autant que l’inverse, Marcus pourrait le conquérir très vite avec le mot promenade ou le simple bruit des croquettes. C’est bien pour ça qu’il n’aurait jamais peur de confier son chien à son cousin, sachant pertinemment qu’il se sentirait tout à son aise avec lui. Relevant le regard, Tommy soupira en souriant. “Je ne vais pas insister, mais fais gaffe, il y a plus coriace que moi dans cette famille et tu le sais” conclut-il en haussant les épaules. Si de son côté Tommy comprenait son cousin, d’autres membres de leur famille pouvaient se montrer plus verbales dans leurs inquiétudes. Tommy en faisait les frais avec ses parents, à juste titre. Sur ces mots, Tommy apporta une nouvelle fois son verre de rhum jusqu’à ses lèvres, le finissant par la même occasion. “Je vais peut-être te laisser fermer. T’avais encore beaucoup à faire ?”Demanda-t-il en inspectant la salle du regard. Ils pourraient très bien rester la nuit assis au comptoir à discuter s’il ne se raisonnait pas.

La réflexion de Tommy fit rire Marcus, il avait totalement raison et le barman le savait bien. Tommy était clairement le plus cool de la fratrie, ils se ressemblaient beaucoup finalement, ils tentaient de ne pas trop se prendre la tête, seulement O'Brian savait que ses frères et soeurs n'étaient pas aussi flexibles, Ella tout au moins. Il était déjà arrivé à Marcus de sentir un ton de reproche dans sa voix, voir même de l'entendre le verbaliser. Elle n'hésitait pas à lui dire ce qu'elle pensait, comme lorsqu'elle avait été choquée qu'il laisse tomber ses brillantes études pour racheter ce bout de comptoir vieillissant. Elle ne comprenait pas et il ne lui en voulait pas. L'achat de ce bar c'était son exutoire, ça avait été sa bouée de sauvetage surtout, à un moment où, clairement, il se noyait. Il ne lui demandait pas qu'elle le comprenne, mais qu'elle accepte et qu'elle réalise qu'il était bien plus heureux à bosser comme un fou derrière ce bar plutôt que seul dans un laboratoire. Tommy comprenait, il soutenait, il n'insistait pas et Marcus lui en était reconnaissant pour ça. Oui je le sais. Mais je sais aussi comment l'amadouer, ta sœur ! Parce que même s'il leur arrivait d'être en conflit, ça ne durait jamais bien longtemps et c'était là le principal. A cette heure de la soirée, voir même de la nuit, Marcus commençait sérieusement à fatiguer. Lorsque son cousin lui dit qu'il allait le laisser, il lui envoya plutôt un torchon sec dans le visage. Aide-moi plutôt à essuyer la dernière tournée de lave-vaisselle, j'en peux plus d'astiquer mes verres. Et après ça je pourrais rentrer me coucher. Le reste attendra bien demain avant l'ouverture. Pour l'encourager, il lui resservit un verre avec un petit sourire sadique. Allons, tu m'aimes, je le sais.

hj: