it's been a battle just to wake and greet the day (daywayn)

Il y avait longtemps que Leónel n’avait pas mis les pieds ici. Horseshoe Bay. Même lorsqu’il avait accepté une journée de planche à pagaie avec sa fille, l’homme s’était assuré qu’il était possible d’en louer à Gray’s Bay. Même sur la route, le chilien préférait choisir des détours plutôt que de prendre la voie qui longeait la mer, qui passait juste devant la plage où la fusillade avait eue lieu quatre ans plus tôt. Une plage était une plage, certes, et n’importe quelle étendue de sable pouvait facilement déclencher en lui un flot de souvenirs traumatisants. Mais cette plage-là, cette plage-là portait encore la couleur du sang de tant de personnes innocentes. Les gens dont les corps y bronzaient actuellement ne le voyaient pas, eux, mais Leónel ne pouvait oublier la couleur de chaque grain de sable imbibé de rouge, imbibé d’une violence insensée. Il pensait qu’il aurait pu être prêt. Avec sa psychologue, ils avaient débuté un traitement de désensibilisation et de retraitement par les mouvements oculaires. Il en avait mis du temps, le quadragénaire, avant d’en être finalement à cette étape de son processus de guérison. Et il se sentait maintenant pressé, pressé d’enfin voir les résultats, pressé de retrouver une vie à peu près normale. Sa psychologue l’avait évidemment prévenu que cette étape pouvait également prendre du temps, mais Leónel n’en pouvait plus de toutes ces étapes. Les paroles de Selma faisaient sans cesse écho dans sa mémoire : qu’il devrait changer de psy, qu’elle ne servait à rien, qu’il n’avait pas fait de progrès. Lui avait réinterprété sans cesse ces mots pour finir par se dire que c’était lui qui ne servait à rien. Plus que jamais ça le pesait. Il avait voulu brûler des étapes, en se pointant aujourd’hui à Horseshoe Bay. Et si au départ, l’anxiété et la peur semblaient plutôt tranquilles, lorsque des adolescents firent éclater de pétards à quelques mètres de lui, il sursauta et tomba sur les fesses, pris par surprise, replongé dans le son des coups de fusil. Sa respiration s’accéléra, ses yeux fixaient les adolescents qui riaient, se moquaient, pensant sans doute avoir simplement effrayé l’adulte, ce qui pour eux aurait probablement mérité qu’ils sortent leur portable pour filmer la scène et en faire une vidéo virale.

Le regard de Leónel s’était embrouillé, la réalité se dissipant à travers les mauvais souvenirs qui refaisaient surface, déclenchés par le bruit des pétards et les cris autour. Un cri en particulier. Un cri qui provenait du plus profond d’une âme, un cri de souffrance, un cri d’une peine incommensurable. Leónel n’avait pas pu associer ce hurlement à qui que ce soit sur la plage, tout s’était passé bien trop vite devant ses yeux et les petites explosions qui n’étaient pour les gamins, qu’un jeu, avaient été pour le quadragénaire le coup fatal sur sa mémoire bouleversée. Sur les fesses, les mains plongées dans un sable dont il ne sentait même pas les grains le recouvrir, il regardait encore la bande d’adolescents en discernant à peine la silhouette qui s’était rendue jusqu’à eux et qui leur parla. Les gamins détalèrent bien vite ensuite, tandis que la silhouette se rapprochait de Leónel. Il s’agenouilla face à l’ancien neurologue, le regard perçant mais bienveillant, lui assurant qu’il les avait avertis et que tout allait bien maintenant. L’homme, le cœur battant encore la chamade, l’esprit encore déconnecté de la réalité, avait les lèvres tremblantes. Tremblantes comme le corps de son interlocuteur. Ce n’est qu’en voyant cette personne se reculer et mettre sa tête entre les jambes que l’ancien médecin sembla sortir de sa propre tête. « Merci. » Avait-il alors soufflé, prenant conscience qu’autour d’eux, la plage avait rapidement retrouvé son calme. Le monde continuait de tourner. C’était pour eux deux que ça ne tournait pas rond. L’homme s’était relevé et s’en était retourné vers l’eau, fixant l’horizon, fixant les vagues. Leónel le dévisagea de loin, se relevant péniblement. N’importe qui aurait trouvé le comportement de cet homme erratique. Pas Leónel. Leónel se reconnaissait, en quelque sorte, dans les gestes perdus de l’homme. Il s’approcha, doucement. « La plupart des gens n’auraient même pas remarqué que j’étais là. N’auraient même pas remarqué ma détresse. Ils s’y seraient encore moins attardés. Vous oui. »  Avait lâché le chilien, une affirmation, une constatation.

Intrigué par cet homme qui l’avait conforté pour s’éloigner aussitôt vers la mer, Leónel s’était approché, ayant le sentiment qu’il n’était pas le seul, des deux, à traîner des démons à l’intérieur de lui. Le chilien avait simplement constaté, à haute voix, que l’inconnu avait été le seul à daigner le voir, réellement le voir, dans sa détresse dans toute sa vulnérabilité, et mieux encore il avait osé venir vers lui. Ce n’était pas donné à tous les humains, dans ce monde individualiste, d’avoir l’empathie qu’avait démontrée cet homme. Leónel avait tenu à le souligner d’entrée de jeu. « Ça explique beaucoup. » Avait-il répondu en apprenant que l’homme était sauveteur, entre autres. « J’ai aussi l’habitude d’aider les autres. J’étais médecin, … dans une autre vie. » Dans une autre vie lui semblait-il, oui, puisqu’il y avait un peu plus de quatre ans maintenant que le quadragénaire n’avait pas pratiqué la médecine. Il se tenait encore à jour sur les avancées en neurologie, son intérêt étant encore fort présent pour ce domaine. Mais pour ce qui était de pratiquer, d’avoir la responsabilité d’une vie entre ses mains, il n’y arrivait plus. Véritable livre ouvert, l’homme se présenta alors comme étant Daywayn et sans cérémonie, il annonça à Leónel qu’il avait perdu sa sœur et son frère dans ces mêmes eaux, n’ayant pas réussi à les aider. On se serait cru à une rencontre de son groupe de soutien, mais le contexte actuel n’avait rien à voir, et ils n’étaient pas dans le même état d’esprit. Ils étaient tout simplement deux êtres meurtris, s’étant trouvés et s’étant compris en un seul regard. « Je m’appelle Leónel. Il y a quatre ans sur cette même plage, vous vous souvenez peut-être si vous êtes d’ici … Il y a eu une fusillade. J’étais là, et j’ai complètement figé. Je n’ai pu aider personne. » Partagea-t-il à son tour. Les deux situations n’étaient pas les mêmes, les deuils à vivre non plus. Daywayn avait dû faire le deuil de deux personnes si proches de lui, tandis que le médecin connaissait à peine les victimes. C’est le deuil de lui-même qu’il avait dû faire, ce jour-là.

L’homme le remercia, sans doute d’avoir simplement souligné cette aide qu’il lui avait apportée, contrairement à bien d’autres qui auraient passé leur chemin sans s’attarder. Sans s’attarder à la douleur chez Leónel, sans s’attarder à la peur qui l’habitait, le grugeait, dévorant chaque parcelle de lumière qu’il lui restait lorsqu’il laissait les démons du passé ressurgir dans son esprit tourmenté. « C’est vrai, ça se complète. Nous sommes rarement menés à nous rencontrer et pourtant, l’un métier ne va pas sans l’autre … » Répliqua le quadragénaire. Leónel aurait voulu croire qu’il aurait lui-même pris de son temps pour s’assurer qu’une personne en détresse se portait bien. Mais l’aurait-il fait, au même titre que Daywayn l’avait fait pour lui ? En quatre années, le chilien avait tant changé. Il ne se reconnaissait même plus. Aurait-il encore cette empathie, cette bienveillance envers les autres ? Souvent enfermé chez lui, les occasions se faisaient rares. Perd-t-on notre humanité lorsqu’on s’en éloigne autant ? Leónel osait croire que non. Que le naturel reviendrait au galop s’il était confronté à la douleur chez quelqu’un d’autre. Un peu comme maintenant, alors que Daywayn lui confiait la mort de son frère et de sa sœur dans les eaux devant lesquelles ils se tenaient. À son tour, le chilien lui confia les raisons de son trouble. Cette fusillade avait été un point tournant dans sa vie, le jetant par-dessus la falaise de son propre esprit. « Merci. Ça a été une journée difficile pour tout le monde. Je crois que tous les habitants s’en souviendront pour longtemps … pour toujours. » Conclut-il en haussant les épaules. Contrairement à lui cependant, les autres semblaient avoir continué d’avancer. Leónel faisait du surplace, après avoir tant reculé, même. Daywayn lâcha un profond soupir avant de s’allonger dans le sable. Mal à l’aise, le chilien le regarda faire, plongeant ses mains dans ses poches, ne sachant plus où se mettre. Il baissa les yeux vers le sauveteur lorsque ce dernier prit la parole. « T’y arrives ? À surmonter tout ça ? » Demanda-t-il, se permettant de le tutoyer puisque l’homme l’avait fait en premier. Mais aucune réponse. Il semblait endormi. Une minute passa, et le chilien commença à s’en aller, le laissant se reposer puisqu’il en avait visiblement besoin. Une fois à quelques mètres il tourna la tête, par curiosité, et vit Daywayn dans l’eau à nouveau. Leónel resta planté là, plus loin, à le regarder avec légère confusion. L’homme revint vers lui, un regard vide qui le fixait. Ça lui donnait froid dans le dos. Et le cri de colère et de douleur qu’il hurla ensuite acheva l’ancien neurologue. « Il y a quelqu’un que je peux appeler pour vous ? Ou vous reconduire à quelque part ? » Proposa le chilien qui, pour une fois depuis quatre ans, mettait quelqu’un d’autre que lui en priorité.

Les événements de 2018 à Bowen, cette fusillade insensée sur la plage, resterait à jamais gravée dans les esprits des habitants de Bowen. Autant ceux qui s'y trouvaient que ceux qui ne s'y trouvaient pas, d'ailleurs. Tant de vies perdues, pour absolument rien. À cause d'une personne qui avait trop de rage à l'intérieur d'elle. Un trop-plein de colère que personne n'avait pu aider à libérer avant qu'il ne soit trop tard. Leónel se contenta d'hocher la tête lorsque Daywayn acquiesça à ses paroles, confirmant l'horreur de cette journée. Puis, alors que l'ancien neurologue avait voulu poursuivre la conversation, son interlocuteur semblait s'être endormi, allongé dans le sable, les vagues terminant leur course à ses pieds. Mal à l'aise, Leónel s'était éloigné, se retournant une dernière fois lorsqu'il fut bien plus loin, pour constater avec étonnement que Daywayn était maintenant debout les pieds dans l'eau, avant qu'il ne fasse demi-tour pour le rejoindre. Face à Leónel, il hurla de douleur, une douleur que le quadragénaire ne reconnaissait que trop bien en lui-même. Il demanda à Daywayn s'il pouvait appeler quelqu'un pour lui, s'il pouvait le reconduire à quelque part. Il ne voulait pas le laisser dans un tel état de détresse. L'homme lui affirma qu'il n'avait personne, qu'il voulait rester ici, malgré le cauchemar qu'il venait de faire. « Je sais ce que c'est ... Les cauchemars. » Lâcha Leónel avec un léger soupir. Lui-même se réveillait souvent au beau milieu de la nuit, dans un sursaut, baignant dans sa sueur. Son traumatisme se faufilait même jusque dans son sommeil. Il n'avait aucun répit. À nouveau, Daywayn s'assit sur le sable, mais cette fois il releva vers Leónel un regard séducteur, joueur. Confus, le chilien détourna le regard, embarrassé. À son tour Daywayn avait tourné la tête vers l'horizon, les joues rouges. « Ce n'est rien. Mais ... Je n'ai pas les mêmes intentions ... » Admit-il. Il ne pensait pas avoir laissé entrevoir un quelconque intérêt. Juste un souci pour son bien-être. « Je ne suis pas intéressé. Désolé. » Ajouta-t-il pour ne laisser aucune place à l'interprétation.

L'ancien neurologue hocha la tête, d'abord silencieux, détaillant Daywayn qui semblait avoir retrouvé un peu de calme en-dedans de lui. « J'ai l'impression que nous sommes davantage qu'on ne le pense, à vivre avec des démons ... Certains le cachent mieux que d'autres. » Tous les deux, Leónel et Daywayn, n'étaient certainement pas de ceux à arriver à cacher la douleur, la détresse. Que ce soit pour le Chilien qui avait paniqué pour de simples pétards, ou pour le brun aux yeux bleus qui avait un comportement atypique et sans doute dérangeant pour bien d'autres autour d'eux. Ils ne cachaient pas bien le jeu du traumatisme. Pas comme ceux qu'on croise dans les rues et qui sourient, comme si tout allait bien, alors que leur monde intérieur s'écroulait. Leónel n'arrivait pas à sourire comme ça, lui. Il n'arrivait pas à faire semblant. Il n'arriva d'ailleurs pas à cacher sa gêne, le quadragénaire, lorsque son interlocuteur changea d'attitude du tout au tout et sembla adopter un comportement séducteur à son égard. Il avait déjà du mal à se montrer affectif avec les personnes chères autour de lui, il avait du mal à renouer avec le côté sexuel de sa personne, alors ce ne serait pas avec un homme que cela arriverait. Pas pour lui. Il le fit bien comprendre à Daywayn, afin de mettre un terme à cet inconfort mais aussi pour qu'il ne continue pas à se faire des idées. Si Leónel avait été inquiet et attentif à la douleur de l'homme, c'était parce qu'il la retrouvait en lui-même et qu'il avait voulu aider quelqu'un comme lui. C'est tout. « Je comprends ça aussi. Il vaut mieux ne pas forcer les choses si vous n'êtes pas prêt. Et surtout ... attendre la bonne personne. » Petit rappel que cette personne ne serait pas lui. Si Daywayn se jetait sur les premiers venus, il ne se respecterait pas et risquerait d'être blessé, encore plus. Du bout de ses orteils l'homme jouait dans le sable, et le regard de Leónel se perdit dans ce geste, dans les grains de sable qui se tassaient pour tracer des lignes. Il ne savait plus où se mettre. Le silence s'était réinstallé. Il avait eu envie de partir, puis Daywayn avait repris la parole. « On se comprend mieux que d'autres, sûrement, oui. » Admit l'ancien neurologue. « Écoutez, je dois partir d'ici. Ce n'était pas une bonne idée pour moi de revenir aussi tôt. Ce n'est peut-être pas une bonne idée pour vous non plus. Ce n'est peut-être pas le bon moment. » Renchérit-il, avant d'hausser les épaules. « Je vous inviterais bien à prendre un café le temps de laisser tout ça derrière nous, mais je ne suis pas bien riche. Je peux quand même vous inviter à aller ailleurs qu'ici. » N'importe où tant qu'il n'avait plus l'impression de s'être jeté dans la gueule du loup.

Leónel hocha silencieusement la tête à propos de cette histoire de démons. Il avait rencontré tant de personnes aux âmes brisées, aux esprits tourmentés. Il se disait qu'il n'était pas tout seul dans ce bateau-là et pourtant, c'était quand même l'impression qu'il avait bien souvent. Peut-être parce que lui, contrairement à d'autres, n'arrivait pas à le cacher. Il n'arrivait pas à mentir ou à faire semblant, à sourire même quand en-dedans de lui tout s'effondrait. Il ne pouvait que s'effacer, et faire mal à ceux qui l'aimaient. Il avait l'impression que Daywayn était un peu comme lui, que lui non plus n'arrivait pas à le cacher. Après tout, s'il avait ainsi explosé devant un parfait étranger, comment se comportait-il auprès de ses proches ? Il devait être un fardeau autant que Leónel avait l'impression d'en être un pour sa famille. Mais tout ça, ce n'était que des jugements. Il se trompait peut-être sur toute la ligne. Daywayn semblait bien perdu dans ses relations amoureuses, en tout cas, et pour le peu que ça valait, le Chilien lui conseilla d'attendre la bonne personne. Ça ne servait à rien de forcer les choses. « Je ne peux vous conseiller quoi que ce soit d'autre, j'ignore où les gens se rencontrent, de nos jours ... » Il était vieux jeu, Leónel, il n'était pas de la génération des sites ou des applications de rencontre. Et sa fille était bien trop jeune pour lui avoir parlé de Bowen Bow Tie ou des endroits branchés en ville pour les personnes célibataires. Lui-même était loin d'être prêt à se remettre sur le marché. Dans sa tête il n'y avait encore que Selma, même s'il savait qu'il n'était pas assez bien pour elle, qu'il n'avait pas suffisamment cheminé pour retourner cogner à la porte de leur ancienne maison familiale. Il n'avait visiblement pas assez cheminé, non plus, pour se retrouver sur cette plage aujourd'hui. C'est d'ailleurs pour cela que le quadragénaire chercha une porte de sortie, non pas pour fuir Daywayn, mais pour fuir cette place. « Voilà ... » Admit-il lorsque l'homme affirma que les événements, même s'ils n'étaient pas les mêmes pour l'un comme pour l'autre, étaient encore trop frais dans leur mémoire. À la proposition de café que Leónel ne pouvait leur offrir, Daywayn renchérit en affirmant que lui, pouvait le lui payer. Ça le mettait mal à l'aise, l'ancien neurologue qui n'aimait pas trop la charité, mais il se voyait mal décliner l'offre alors que c'est lui qui avait lancé l'idée. « Bon ... d'accord. Merci. C'est gentil. » Les deux hommes prirent la direction du café le plus près de la plage, à quelques rues de là, après avoir passé par la voiture de Daywayn pour qu'il y dépose ses effets personnels. Leónel n'avait pas grand chose sur lui, pour sa part, alors il ne repassa pas par la sienne.

Ils marchèrent quelque cinq minutes, Leónel et Daywayn, en silence surtout, mais cela ne dérangeait pas le quadragénaire qui appréciait davantage le silence que les conversations vides de sens. Il avait un jour aimé cela, pourtant, le small talk, parce qu’il savait comment s’y prendre. Aujourd’hui il ne savait plus quoi dire. Les deux hommes pénétrèrent dans le café qui, au plus grand soulagement de l’ancien neurologue, n’était pas bondé comme certains Starbucks du coin. L’avantage des petits cafés locaux - même si ceux-là aussi, pouvaient déborder d’âmes en quête de caféine. C’était un mercredi, au beau milieu des heures de travail. Un temps mort. Leónel écouta Daywayn commander sa pâtisserie et son café. Comme il se faisait inviter, le Chilien n’osa pas exagérer - il n’avait plus l’habitude d’exagérer de toute façon, il n’en avait plus les moyens. Il demanda un simple café corsé, format moyen. Ce serait suffisant et ce serait nettement meilleur que les cafés qu’il se faisait chez lui. Les sachets les moins chers du supermarché. Leónel suivit Daywayn jusqu’à la table libre qu’il avait choisie. En s’asseyant, il prit la tasse entre ses mains. « Merci encore pour le café. » Il esquissa un sourire, avant de porter le café à ses lèvres. Il essuya sa moustache à l’aide de son pouce et de son index, regardant distraitement par la fenêtre. Il ne reporta son attention sur son interlocuteur que celui-ci lui posa une question. Il hocha la tête. « Oui, le café est très bon. Juste assez fort. » Il regarda autour de lui, scrutant des yeux le décor du café. « Je ne me souviens pas être déjà rentré ici. Je suis pourtant à Bowen depuis un sacré bout de temps. » Mais il avait arrêté de vivre, à un certain point, quatre ans plus tôt. Et peut-être que ses souvenirs s’effaçaient tout comme lui, d’ailleurs. Il était peut-être déjà venu ici mais n’en gardait aucune trace dans sa mémoire qui semblait se concentrer sur le pire. « Oui, pourquoi pas … Une petite tradition à instaurer. » Il lança un mince sourire à Daywayn, buvant à nouveau une gorgée de café. S’ils revenaient fréquemment ici, il lui faudrait mettre un peu d’argent de côté. Il ne pourrait laisser l’autre payer à chaque fois.