I'm just trying to stay away from you | Woody

Depuis novembre, ta vie a complétement changé. Perdre ta mère est encore aujourd'hui la pire épreuve que tu avais vécu et pourtant, tu ne pensais pas un jour vivre pire que ce jour où ton fiancé était parti du jour au lendemain sans donner aucune nouvelle, aucune raison. Ta mère était vraiment ton pilier, le pilier de ta famille tout simplement et depuis, tout a changé. Tu avais une rancune en toi, une haine en toi que tu n'arrivais pas à exprimer, tu accumulais chaque jour un peu plus la fatigue qui se dessinait sur ton visage, ta peine, tu n'arrivais pas à l'exprimer, ni à la faire sortir. Tu ne savais juste plus comment exprimer tes émotions. Tu vivais tel un zombie, te levant, allant travailler, beaucoup trop, plus que de raison, tu rentrais et tu partais dans ton lit sans forcément trouver le sommeil, tu accumulais les tours de gardes au cabinet, te rendant utile puisque tu faisais souvent preuve d'insomnies. Les seuls moments où tu sortais étaient lorsque tu allais rendre visite à ton père où quand tu devais remplir ton frigo à nouveau. Tu ne sortais plus, et surtout tu évitais par dessus tout tes frangins, surtout Woody. Il était la personne que tu avais le moins envie de voir, il était à tes yeux le seul fautif de toute cette histoire. Pourtant, aujourd'hui allait être le jour où tu allais le revoir depuis ce repas de Noël plus que chaotique. Tu déambulais tranquillement dans les rayons du supermarché remplissant ton chariot quand tu viens à percuter celui de quelqu'un d'autres, puisque tu avançais en regardant tout sauf devant toi. C'est le bruit des chariots qui s'entrechoquent qui te sort de tes pensées. "Je suis désolée!" Dis-tu instinctivement alors que tu tournes la tête vers la personne dans qui tu venais de rentrer et reconnaît alors le visage de l'aîné de ta famille. "Woody..." dis-tu dans un souffle, sentant alors ton coeur résonnait dans ta tête de rage. Ton regard changeant directement alors que tu recules ton chariot prête à partir.

Déjà le mois de février, et en même temps ça lui avait paru si long. Woody ne savait plus trop où se situer dans l’espace-temps. Il était là mais il était absent à la fois. Il était vivant mais il avait l’impression d’être mort en-dedans. En tout cas, c’est souvent ce qu’il aurait souhaité être. Mort. À la place de sa mère. Il aurait préféré qu’elle puisse continuer à vivre et que lui, achève enfin de faire du mal à tout le monde autour de lui. Depuis novembre c’était pire que jamais, Woody avait assené le coup de grâce à toute la famille, et les répercussions détruisaient même ses relations tout autour. Ses proches lui en voulaient, que ce soit ceux qui le lui crachaient clairement au visage que ceux qui faisaient semblant que non, que rien n’était sa faute alors que si. Tout était sa faute. La seule lumière dans les dernières semaines avait été le passage de Sara à Bowen, Sara sa première flamme, son premier amour, mais elle était repartie trop tôt vers la Chine. Il avait beau être fiancé à Charlie, il était incapable de soutenir son regard dernièrement. Elle avait pourtant essayé, tellement essayé, mais malgré ses promesses de la laisser rentrer dans sa vulnérabilité, il était incapable d’obtempérer. Woody était incapable d’être faible devant celle qu’il aimait. Il préférait qu’elle ne voit jamais cette partie de lui et alors, parce que cette partie de lui grandissait et dévorait tout de lui, elle ne le voyait plus. Il se cachait. D’elle, et de tous les autres. Woody ne sortait que rarement aux heures des vivants. Seulement lorsque c’était nécessaire. Ça l’était pour remplir son frigo, même si l’appétit était loin d’être grand chez lui dernièrement. Il s’alimentait peu, mais il s’alimentait quand même. Dans son panier il n’y avait que des repas pré-préparés, des boissons diverses, rien de bien nutritif. Ce même panier qui s’entrechoqua contre celui de quelqu’un d’autre. Sa soeur, Avery. « Avery … » Lâcha-t-il sur le même ton. Ils allaient continuer leur chemin. Ils allaient mettre fin à ce court échange, déjà. Mais les mains de Woody se serrèrent un peu à la barre horizontale de son panier et il lâcha, les yeux baissés : « Comment tu vas ? » Ils connaissaient tous les deux la réponse mais il ne pouvait se résoudre à la laisser partir sans rien dire. Il se serait senti encore plus vide que maintenant. Il avait besoin de se remplir, même si c’était de haine.

Tu étais très proche de ta famille mais il est vrai que depuis le décès de ta mère, tu la sentais la rupture qui avait été causé. Surtout entre toi et Woody, tu ne pensais pas un jour pouvoir lui en vouloir autant, toi qui lui pardonnais souvent tout, toi qui idéalisé peut-être un peu trop ton frère ainé. Tu le voyais bien que ça avait changé quand dans ce magasin tu tombes nez à nez avec lui, toi qui en général aurait été la première à lui sauter dans les bras pour lui faire un câlin alors qu'il déteste ça, là, tu cherches principalement à t'éloigner de lui le plus possible, ne pensant pas être capable plus longtemps devant lui. Tu le salues le plus simplement possible, avant de commencer à vouloir partir mais il te demande comment tu vas. Tu le regardes avec ce regard inquisiteur, presque surprise qu'il ose te demander cela. "Vraiment Woody?" Tu n'as pourtant pas envie de créer une scène en plein milieux d'autres gens, mais tu la sens cette haine prête à exploser enfin. "Comment je vais Woody? Je sais pas... Peut-être comme quelqu'un qui a perdu sa mère dans un accident? Peut-être comme quelqu'un qui n'a plus confiance en l'une des personnes les plus importantes à ses yeux?" Tu ne cries pas pour autant, tu chuchote presque mais avec énormément de rage dans l'intonation de ta voix mais surtout dans ton regard. Tu avais si mal au fond de toi, la souffrance que tu avais tu le savais c'était transformé en haine envers ton frère car il était plus simple pour toi de trouver un coupable plutôt que de pouvoir pardonner, tu préférais le détester car tu n'arrivais juste pas à trouver en toi de quoi lui pardonner. Ton regard était froid alors que tu avais toujours été des plus chaleureuse avec lui, tu le sais qu'il devait se détester lui-même à propos de ce qu'il s'est passé. "Ca répond à ta question de comment je vais Woody? T'en intéresses-tu vraiment au final?" Tu secoues la tête alors que tu détournes le regard.

La petite Rutkowski, la plus jeune, généralement pétillante, toujours souriante lorsqu’il était question de la famille, se tenait maintenant face à son aîné avec des traits durs, un sérieux implacable. De quoi faire frissonner Woody, qui avait toujours eu une si belle relation avec sa soeur, même si parfois cette dernière aurait pu lui reprocher que ce soit unilatéral. Elle aurait eu tort. Woody l’adorait, Avery, elle était son éclat de lumière dans un monde si terne. Et voilà qu’il l’avait rendue toute grise à son tour, dans cette allée du supermarché, il n’y avait plus aucune couleur. Il déglutit après lui avoir demandé comment elle allait, conscient que dans le contexte actuel, aucun des Rutkowski ne pouvait prétendre bien aller. Il le savait mieux que n’importe qui. Il en était la cause. Avery s’arrêta - parce qu’elle s’était préparée à partir aussitôt les salutations faites - et s’emporta, déjà, contre son frère. Il le méritait. Elle lui asséna le coup fatal en affirmant qu’elle avait perdu toute confiance en lui. Il serra la mâchoire, l’émotion le gagnait. Il n’avait jamais été capable de crier après Avery. Ce n’est pas maintenant que ça commencerait. De toute façon, il n’avait pas ce feu-là en lui, depuis qu’il était sorti de l’hôpital. Il était juste … éteint. « Je suis désolé. » Est-ce que ça répondait à sa question ? Plus ou moins. Il aurait aimé savoir que sa soeur était bien entourée, qu’elle avait Nevaeh, Elias, leur père et des copines pour la soutenir. Il aurait aimé savoir qu’elle ne s’était pas fermée aux autres, qu’elle les laissait l’aider. Il aurait aimé savoir si elle continuait à bosser à la clinique vétérinaire, si ça lui permettait de se changer les idées. Mais les réponses à ces questions-là, Woody ne les méritait pas. « Bien sûr que ça m’intéresse vraiment, Avery. T’es ma petite soeur. » Lâcha-t-il, attristé qu’elle puisse penser qu’il n’en avait rien à faire. « Elle me manque à moi aussi, tu sais. » À tous les jours. À toutes les minutes.

Ca te tuais le coeur de croiser ton frère ici, de le voir alors que tu l'évitais depuis des semaines. Tu n'étais pas prête à lui faire face encore, t'avais tellement de rancune envers lui, tu le savais que ce n'était pas bon pour toi de lui parler alors que tu le sens au fond de tes entrailles que tu ne lui avais pas pardonné. Pour toi il était le seul fautif de cet accident. "Tu es désolé Woody? Ca ramènera pas maman..." Tu le sais que tu es tranchante dans les mots que tu emploies actuellement, que ça n'allait pas vous aider à avancer ou régler cette histoire, mais t'avais pas forcément envie de la régler. Tu as toujours été de celle à le soutenir, à ne voir que le positif chez lui et pourtant il n'a fait que de te mentir vis à vis de sa maladie et tu lui en voulais autant que tu t'en voulais de n'avoir rien vu. C'était bien plus simple de l'accuser lui que de voir la vérité en face du fait que tu n'as jamais voulu le voir malade. "Mais heureusement qu'elle te manque Woody, c'est de ta faute si elle n'est plus là, c'est de ta faute Woody..." Et tu les sens ces larmes monter dans tes yeux, tu ne veux pourtant pas craquer devant lui, tu as trop de fierté pour qu'il ne mérite tes larmes. Tu détournes le regard et prend une grande inspiration tandis que tes mains se resserrent un peu plus sur le manche du chariot que tu tiens. "Je comprends pas pourquoi tu ne nous as pas dit que ça n'allait pas au niveau de ta maladie, pourquoi tu nous l'as caché ?" Tu tournes finalement ton regard vers lui, rempli à la fois de tristesse, rempli de larmes prêtes à couler, rempli de haine et surtout d'incompréhension. "Pourquoi?" Lâches-tu dans un soupire alors que tu sens une larme rouler le long de ta joue que tu viens essuyer d'un revers de main.

Il la trouvait cruelle, sa soeur, mais Woody savait aussi que c’était tout ce qu’il méritait. Il aurait dû fuir de l’autre côté de l’allée en voyant que c’était elle. C’était d’ailleurs ce qu’il faisait de mieux, fuir, n’est-ce pas ? Alors pourquoi ne pas l’avoir fait lorsque c’était le bon moment ? « Tu penses que je ne le sais pas, ça, Avery ? J’aurai beau me taper sur la tête, me détester jusqu’à la fin, y’a rien de ça qui va la ramener. » Il le ferait quand même, s’haïr jusqu’à en crever, même en sachant que sa mère n’en reviendrait jamais, que sa mémoire serait à jamais dissipée sur cette route, témoin de leur accident. Leur mère lui manquait à lui aussi, ce n’était pas parce qu’il était le fautif qu’il avait voulu qu’elle décède. C’était un accident, malgré tout. Il s’en voudrait toute sa vie de ne pas avoir été celui à mourir à sa place. Il y pensait à tous les jours. À toutes les heures. « Je le sais ça aussi, Avery. Je le sais que c’est de ma faute. » Elle éclata alors, d’un ton de voix encore posé mais d’une agressivité et d’une tristesse dans sa voix alors qu’elle l’attaquait de questions. La mâchoire serrée, il répondit sèchement : « Ça ne va jamais, au niveau de ma maladie, Avery. JAMAIS. Mais je pensais que j’étais encore capable de conduire, je pensais pas une seule seconde que ça irait jusque-là. Je n’aurais pas pris le volant si j’avais pu prédire ça. » Il avait fait preuve d’un très mauvais jugement en prenant la route, oui, mais ce n’était pas en se disant que ça allait se produire. Ça ne s’était jamais produit. Ses jambes ne l’avaient jamais lâché comme ça, alors qu’il avait le pied sur la pédale. Il n’avait pas pu savoir. Mais il aurait dû être plus prudent. « Crois-moi j’reprendrai plus jamais le volant. » Qu’il lui dise ça ne changeait rien, pire ça lui ouvrait sans doute la porte à d’autres injures, mais il était fatigué, Woody.

Tu avais tellement eu ton coeur brisé au décès de ta mère que tu as simplement préféré faire ton deuil en trouvant un coupable à son départ si précipité de vos vies. Et il été tellement plus simple pour toi de détester à cet instant Woody et de lui en vouloir aussi fort. Alors tu n'y vas pas de main morte, tu lui rentres dedans, toi qui avait tant voulu éviter le conflit depuis des mois, toi qui l'avait tant évité depuis des mois il faut que ce soit en lieu public que tu craques et relâches toute cette pression et haine accumulée envers ton frère. Tu en oubliais presque que vous vous retrouviez au milieu d'un supermarché, tu ne voyais que lui et ce crime qu'il avait commis parce que pour toi oui, même si c'était accidentel, il avait tué votre mère. Tu le sais qu'il en payait le prix tous les jours, mais t'avais cette sensation qu'à chaque fois vous le préserviez à la moindre de ses erreurs, mais cette fois-ci tu ne voulais pas le préserver. Alors tu l'assène de questions, tu veux qu'ils te répondent et votre ton montait chez l'un comme chez l'autres, mais tu sens surtout toute cette rage sortir de toi avec cette larme qui coule sur ta joue. "Tu ne m'as jamais dit que ça n'allait pas Woody... JAMAIS!" Et tu craques en lui disant ça. Oui tu étais la plus jeune de la fratrie mais tu étais une adulte tu pouvais encaisser qu'il te parle quand ça n'allait pas. Pourtant jamais il ne t'en parlait, jamais il ne t'a dit que ça n'allait pas, mais dans le fond c'est à toi aussi que tu en voulais car tu n'as jamais vu qu'il n'allait pas bien. Et tu t'en voulais aussi dans le fond car c'était pour venir te voir à l'hôpital que tout s'est passé, tu es au final plus fautive que tu ne veux te l'avouer. "Elle me manque tellement..." Ta voix s'est calmée mais les larmes coulent encore.

Les paroles d’Avery suffirent à le faire exploser de l’intérieur. Woody s’était senti inerte, vide, depuis le mois de novembre. Comme si la tristesse le paralysait, au point de ne plus pouvoir ressentir quoi que ce soit d’autre. Pas même de l’amour envers Charlie – ce qui avait probablement causé leur dérive actuelle. Mais les paroles de sa sœur réveillèrent le volcan qui autrefois crachait constamment sa colère. Ce n’était plus seulement de la colère envers lui qu’il ressentait, silencieusement, c’était de la colère envers celle qui déversait sa hargne sur lui. « Mais t’es aveugle, ou quoi, Avery !? » Cracha-t-il. Certes, Woody avait toujours cherché à préserver sa plus jeune sœur, à ne lui montrer que le strict minimum de ce qui le bouffait intérieurement. Elle était trop pétillante, trop pleine de vie, pour qu’il vienne teinter cette joie de vivre. Il s’était toujours promis d’abîmer le moins possible cette naïveté face à ce monde que lui ne voyait que d’une teinte assombrie. Mais dans les dernières années, il s’était avéré difficile de ne pas montrer à quel point la maladie l’atteignait. Elle le bouffait tout rond. « Je dois me déplacer avec une canne le trois-quart du temps, j’ai perdu une bonne partie de ma masse musculaire, je suis TOUT LE TEMPS fatigué, exténué, vidé. Et à tes yeux j’avais l’air de bien aller !? Wake the fuck up, sis’. Ça fait longtemps que je ne vais pas bien. » Affirma-t-il avec une dure conviction. Il était peut-être temps qu’il cesse de la traiter comme la petite sœur, ouais. Elle était adulte. Qu’elle voit enfin la vérité en face, aussi laide soit-elle. La jeune femme craqua, les larmes roulant sur ses joues, avant qu’elle n’affirme d’une voix calme qu’elle lui manquait tellement. Leur mère. Il soupira, baissa les yeux vers le contenu de son panier – qui ne le rendait pas particulièrement fier – et déclara : « Elle ne voudrait pas nous voir nous engueuler comme ça. » Elle avait toujours cherché à garder cette famille soudée. Elle était la super glue qui les tenait tissés serrés. Maintenant qu’elle n’était plus là, ils avaient volé en éclats.

Tu en voulais tellement à ton frère, tu n'arrivais pas à ressentir autre chose que de la colère ou de la haine envers lui à ce moment là, et qu'il t'ait constamment caché les choses à propos de sa maladie. Dès que tu tentais de lui en parler, de l'aider ou autre il changeait de sujet, qu'est-ce que tu pouvais donc faire? Alors tu lui craches ce venin mais son explosion te revient aussitôt en pleine face. Tu penses ne jamais avoir vu Woody s'énerver une seule fois après toi. Tu sens les larmes monter au fur et à mesure qu'il te hurle dessus, qu'il te reproche de n'avoir rien vu sauf que tu le voyais bien, tu le voyais, tu ne voulais juste certainement pas l'accepter surtout quand il te disait qu'il allait bien. Vous aviez tous les deux des tords dans cette histoire mais clairement tu le savais, vous n'étiez juste pas prêt l'un comme l'autre à accepter l'opinion de l'autre. De l'amour à la haine il n'y a qu'un pas et ton frère que t'aimais tant en ce moment était certainement une des personnes que tu détestais le plus au monde. "Tu sais quoi Woody? T'as raison, j'aurai du le voir, j'aurai du t'aider, j'aurai du faire quelque chose... Mais t'es tellement borné que tu n'aurais jamais accepté de mon aide!" Tu le savais que tu haussais le ton et que tu allais dire des mots qui allaient certainement lui faire encore plus de mal mais à cet instant ta colère était trop noire pour y voir clair. "Et puis je dois faire quoi là? Te pardonner? Te pardonner d'avoir toi-même été trop aveugle sur ta santé et pris le choix de conduire et de tuer maman?" Plus tu t'énervais et plus tu sentais les larmes roulées le long de tes joues. "Elias, Nev t'ont peut-être pardonné, t'ont peut-être dit que tu n'y étais pour rien mais tu sais quoi Woody? J'en ai marre qu'on doive toujours passé outre toute la merde que tu as pu faire, cette fois compte pas sur moi.. Compte pas sur moi ok?" Tu le sais que tes mots dépassés actuellement tes pensées et qu'il allait peut-être mal le prendre, mais tu t'en foutais bien. T'étais simplement pas prête à lui pardonner comme tu n'es pas prête à te pardonner toi-même d'avoir été la raison de cet accident. Tu le sais et si on a pu te dire le contraire, tu restes persuadé que t'étais en partie responsable de cet accident. "Elle aimerait pas non nous voir comme ça, mais... Elle le verra pas!" Malgré le calme dans ta voix qui était revenue, tu restais encore tranchante et froide envers ton frère.

Elle avait raison, Avery. En plein dans le mille. Jamais il n’aurait accepté son aide, surtout pas d’elle, elle était sa plus jeune soeur, sa petite soeur, c’était lui qui devait la protéger et l’aider, pas le contraire. Woody il avait sa fierté, trop souvent mal placée, et pendant bien trop d’années il avait effectivement refusé d’accueillir les mains tendues vers lui. Il s’était bien arrangé, d’ailleurs, pour que ses symptômes paraissent le moins possible. D’abord parce qu’il avait gardé sa maladie secrète pendant plusieurs années, et ensuite parce qu’il en avait eu honte, par la suite, des regards de compassion qu’on lui lançait. Il ne voulait rien de ça, Woody, pas d’aide pas de pitié, puisqu’il avait longtemps pensé que ça venait ensemble. « J’imagine qu’on ne le saura jamais, ça ! » Puisqu’aux yeux de sa soeur il allait bien. Certes, c’était injuste, il avait bien souvent senti qu’Avery lui posait des questions pour qu’il s’ouvre à elle, mais il n’avait jamais répondu à cet appel. Il lui en avait volontairement dit le moins possible, pour la maintenir dans le noir. C’était con de lui reprocher, aujourd’hui, de ne rien avoir vu venir. Le ton ne redescendit pas pour autant entre eux, au contraire, Avery continua à lui déverser la haine de ses quatre vérités. Le coeur de l’aîné de la fratrie sembla être fracassé par ces mots si durs sortant des lèvres de sa petite soeur. Ils s’étaient disputé, par le passé, mais jamais comme ça. Jamais avec une telle violence. « Non, j’compterai pas sur toi, c’est bon, j’ai compris Avery. J’ai tué maman. J’me le pardonnerai pas non plus. J’peux pas m’attendre à ce que toi tu le fasses. » Lâcha-t-il sèchement. Leur mère aurait été tellement triste de les voir ainsi. S’il pleuvait dehors c’était très certainement ses larmes. « T’as raison. Elle le verra pas. Alors j’imagine que ça sert à rien qu’on essaie d’arranger les choses pour les apparences. Elle n’est plus là pour garder la famille tissée serrée. » Ses doigts se resserrèrent contre le barreau de son panier. Il s’apprêtait à partir.

Tu lui en voulais tellement à Woody que tu ne mâchais juste pas tes mots et tu le savais que tu étais terriblement blessante avec ton frère. Vous vous êtes déjà disputé à cause de vos tempéraments de feu, mais jamais autant que vous puissiez le faire aujourd'hui. Tu lui crachais ta haine et tu lâchais tout ce que t'avais sur le coeur, tu n'étais pas prête de lui pardonner. Tu savais que votre relation était rompue à présent et qu'il n'y avait pour l'instant aucune façon de revenir en arrière aujourd'hui. "Je le ferai pas Woody, je te pardonnerai pas!" Et ça te brisait le coeur en disant ça à ton frère. Tu n'allais pas lui pardonner, pas de suite du moins, mais tu le savais qu'un jour tu auras besoin de lui, il restait ton frère même si aujourd'hui vous subissait une rupture. Ta mère détesterait de vous voir ainsi, elle serait certainement même entrain de t'engueuler de parler ainsi à Woody, autant qu'elle l'engueulerait. Vos propos sont durs l'un envers l'autre. "Ca sert donc à rien qu'on continue à se parler!" Tu ressers tes mains autour de ton caddie et t'écartes de lui, lui lançant un dernier regard, sans même lui dire au revoir et tu lui tournes le dos et te diriges aussitôt vers les caisses du magasin, oubliant clairement la moitié de tes courses, tant pis, tu reviendras finir plus tard. Tu ne voulais pas prendre la peine de le croiser à nouveau.